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09/07/2020 | FRANCE | N°20BX00688

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 09 juillet 2020, 20BX00688


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, d'une part, la décision implicite par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et, d'autre part, la décision du 9 août 2018 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence.

Par un jugement n° 1800171-1804957 du 20 novembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une r

equête, enregistrée le 14 février 2020, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, d'une part, la décision implicite par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et, d'autre part, la décision du 9 août 2018 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence.

Par un jugement n° 1800171-1804957 du 20 novembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 février 2020, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 novembre 2019 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Gironde du 9 août 2018 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de la Gironde du 9 août 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un certificat de résidence algérien ou un titre de séjour en qualité de membre de la famille d'un citoyen de l'Union européenne ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- en refusant d'examiner sa demande de titre de séjour en qualité de membre de la famille d'un citoyen de l'Union européenne au motif qu'elle est de nationalité algérienne, le préfet a commis une erreur de droit ;

- la décision de refus de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire, enregistré le 29 mai 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... E..., ressortissante algérienne née le 15 octobre 1986, est entrée en France à une date indéterminée munie d'un titre de séjour délivré par les autorités espagnoles. Le 10 juillet 2017, elle a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement de l'accord franco-algérien ou d'un titre de séjour en qualité de membre de la famille d'un citoyen de l'Union européenne. Après la naissance d'une décision implicite de rejet, le préfet de la Gironde a, par décision du 9 août 2018, refusé de lui délivrer un certificat de résidence ou un autre titre de séjour. Mme E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de ces deux décisions. Elle relève appel du jugement du 20 novembre 2019 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 août 2018.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie (...) / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° (...) ". L'article L. 121-3 du même code dispose que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé aux 4° ou 5° de l'article L. 121-1 selon la situation de la personne qu'il accompagne ou rejoint, ressortissant d'un Etat tiers, a le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois. S'il est âgé de plus de dix-huit ans ou d'au moins seize ans lorsqu'il veut exercer une activité professionnelle, il doit être muni d'une carte de séjour. Cette carte, dont la durée de validité correspond à la durée de séjour envisagée du citoyen de l'Union dans la limite de cinq années, porte la mention : " carte de séjour de membre de la famille d'un citoyen de l'Union ". Sauf application des mesures transitoires prévues par le traité d'adhésion à l'Union européenne de l'Etat dont il est ressortissant, cette carte donne à son titulaire le droit d'exercer une activité professionnelle ".

3. Il ressort des termes mêmes de la décision en litige que le préfet a examiné la demande de titre de séjour de Mme E... en sa qualité de conjoint d'un citoyen de l'Union européenne et a refusé de lui délivrer un tel titre au motif que son époux, de nationalité espagnole, était sans emploi et ne disposait pas de ressources autres que la perception du revenu de solidarité active et des allocations familiales. Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, le préfet n'a pas refusé d'examiner sa demande sur le fondement des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif de sa nationalité algérienne. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet ne peut qu'être écarté.

4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Il ressort des pièces du dossier que si l'époux de Mme E... est de nationalité espagnole, il ne disposait, à la date de la décision en litige, ni d'une activité professionnelle stable ni de ressources suffisantes pour lui et pour sa famille. Ainsi, il ne remplissait pas les conditions fixées par l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour bénéficier d'un droit à se maintenir sur le territoire français. S'il a été victime d'une maladie professionnelle, il ressort encore des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, son état était consolidé. La circonstance qu'il a conclu un contrat de travail saisonnier puis un contrat de mission temporaire postérieurement à la décision en litige est sans incidence sur la légalité de celle-ci. Si le couple est présent en France avec leurs deux enfants nés en 2015 à Bordeaux, rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Espagne ou dans tout autre pays où ils seraient légalement admissibles. Dans ces conditions, compte tenu de ses conditions d'entrée et de séjour en France, en refusant de délivrer à Mme E... un titre de séjour, le préfet n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Gironde du 9 août 2018. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E..., au ministre de l'intérieur et à Me B.... Copie sera transmise au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... A..., présidente,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

M. Romain Roussel, premier conseiller

Lu en audience publique, le 9 juillet 2020.

La présidente,

Elisabeth A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX00688


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX00688
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Romain ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : LANDETE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-09;20bx00688 ?
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