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09/07/2020 | FRANCE | N°20BX00033

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 09 juillet 2020, 20BX00033


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet de la Vienne sur sa demande de titre de séjour déposée le 13 mars 2018 et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1900738, 1902

090 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet de la Vienne sur sa demande de titre de séjour déposée le 13 mars 2018 et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1900738, 1902090 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 janvier 2020 et un mémoire enregistré le 9 juin 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 décembre 2019 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 2 500 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- la décision portant refus de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l''entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a entaché sa décision portant délai de départ volontaire d'une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant que trente jours pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 mai 2020, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 avril 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... B..., ressortissant guinéen, est entré en France le 24 janvier 2011 selon ses déclarations, de manière irrégulière. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 20 septembre 2012. A la suite de cette décision, il s'est vu délivrer des titres de séjour en raison de son état de santé entre 2013 et 2016. Par un arrêté du 16 janvier 2016, le préfet de police de Paris a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Le recours contre cet arrêté a été rejeté par un jugement du tribunal administratif de Paris du 7 juillet 2017. Par un courrier du 13 mai 2018, M. B... a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B... a contesté le rejet implicite de sa demande devant le tribunal administratif de Poitiers. Toutefois, en cours d'instance, le préfet de la Vienne a, par un arrêté du 29 juillet 2019 qui s'est substitué à cette décision implicite, refusé de faire droit à cette demande, a fait obligation à M. B... de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 11 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision implicite de rejet.

Sur l'arrêté pris dans son ensemble :

2. L'arrêté attaqué vise les textes dont il est fait application, mentionne, contrairement à ce que soutient M. B..., les faits relatifs à sa situation personnelle et administrative et indique avec précision les raisons pour lesquelles le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Ces indications, qui ont permis à M. B... de comprendre et de contester les mesures prises à son encontre, étaient suffisantes. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué, qui, ainsi qu'il a été dit précédemment s'est substitué à la décision implicite de rejet, doit être écarté.

Sur le refus de séjour :

3. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".

4. M. B... soutient, d'une part, que son état de santé nécessité un suivi régulier qu'il ne peut pas obtenir dans son pays d'origine et, d'autre part, qu'il est bien intégré en France notamment professionnellement. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que si son état de santé a pu justifier la délivrance de titres de séjour entre 2013 et 2016, le dernier de ces titres n'a pas été renouvelé au motif qu'il pouvait disposer d'une prise en charge dans son pays d'origine. Si l'intéressé fait valoir qu'il est toujours régulièrement suivi en raison de son état de santé, les certificats médicaux qu'il produit, établis en 2013, 2015, 2016 et 2018, sont anciens et ne précisent pas si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité et s'il peut bénéficier d'un traitement dans son pays d'origine. Par ailleurs, les circonstances que M. B... a occupé un emploi d'agent de sécurité en 2013 puis de février 2016 à mars 2017, qu'il a suivi un stage de formation continue au mois de novembre 2019 et qu'il travaille actuellement en tant que compagnon d'Emmaüs ne constituent pas des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour et ne peuvent être regardées, dans les circonstances de l'espèce, comme caractérisant l'existence de liens particuliers en France. Enfin, célibataire et sans enfant, il ne fait valoir aucun lien familial sur le territoire français et n'établit pas, en se bornant à produire des attestations rédigées par le président de l'association Emmaüs d'Angoulême, avoir tissé en France des relations amicales et sociales d'une particulière intensité malgré une présence sur le territoire de plus de neuf ans. Dans ses conditions, il ne peut être regardé comme justifiant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels d'admission au séjour au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de la Vienne n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....

5. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, la décision portant refus de séjour ne peut être regardée comme portant au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B... une atteinte disproportionnée eu égard aux motifs de refus alors même que M. B... maîtrise la langue française. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit également être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour.

7. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 4 et 5, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur le délai de départ volontaire :

8. En vertu du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays où il est légalement admissible. Si les dispositions de cet article prévoient que l'autorité administrative " peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas ", le seul statut de compagnon d'Emmaüs invoqué par M. B... ne justifie pas, dans les circonstances de l'espèce, comme l'ont relevé les premiers juges, que le préfet aurait dû, à titre exceptionnel, lui accorder un délai de départ supérieur à trente jours. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

Sur le pays de renvoi :

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

10. Si M. B... soutient qu'il risque de subir des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Guinée, il se borne à produire, à l'appui de ses allégations, un mandat d'amener établi au mois d'octobre 2009, un article de presse daté également de l'année 2009 et un document intitulé " 3e convocation pour nécessité d'enquête judiciaire " émanant d'un officier de police judiciaire qu'il aurait reçu en personne le 6 mai 2019 alors même qu'il se trouvait en France à cette date. Ces seuls documents ne sont pas de nature à permettre de considérer que M. B... encourrait actuellement des risques pour sa vie ou sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la décision fixant le pays de renvoi n'a pas été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni des stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme E... A..., président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. David Terme, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2020.

Le président,

Marianne A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX00033 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX00033
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Marianne HARDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : RODIER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-09;20bx00033 ?
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