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09/07/2020 | FRANCE | N°18BX04310

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 09 juillet 2020, 18BX04310


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler les titres exécutoires émis à son encontre les 20 juillet et 19 août 2016 par le préfet de La Réunion, pour les montants de 12 000 euros et 263 750,85 euros.

Par un jugement n° 1700050, 1700068 du 5 octobre 2018, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2018, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :r>
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 5 octobre 2018 ;

2°) de cond...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler les titres exécutoires émis à son encontre les 20 juillet et 19 août 2016 par le préfet de La Réunion, pour les montants de 12 000 euros et 263 750,85 euros.

Par un jugement n° 1700050, 1700068 du 5 octobre 2018, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2018, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 5 octobre 2018 ;

2°) de condamner l'administration à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du 5 mars 2009 ne présente pas un caractère exécutoire dès lors que ce jugement ne lui a pas été régulièrement notifié, en méconnaissance de l'article L. 774-6 du code de justice administrative, dans la mesure où la lettre datée du 23 mars 2009, reçue le 25 mars 2009, lui a été adressée par la direction départementale de l'équipement et non par le préfet et que son signataire l'a signée en son nom personnel et non au nom du délégant ; en outre il n'a pas reçu ni signé le reçu de notification visé par la direction départementale de l'équipement ;

- le titre de perception du 19 août ne fait pas référence à la lettre du préfet de La Réunion du 7 juin 2016 qui seule constitue les bases de la liquidation ; en outre l'état exécutoire n'a pas été signifié par huissier le 21 juin 2016 en même temps que la lettre du préfet relative aux bases de la liquidation ;

- les actions engagées par l'émission des titres de perception en litige sont prescrites.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2019, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre le titre de perception du 20 juillet 2016 qui présente un caractère superfétatoire dès lors que, en application de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, les décisions des juridictions de l'ordre administratif, lorsqu'elles ont force exécutoire, constituent des titres exécutoires, ce qui est le cas du jugement devenu définitif du tribunal administratif de La Réunion du 5 mars 2009 qui condamne solidairement M. B... et la société Tho BTG à payer une amende de 12 000 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des procédures civiles d'exécution ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... A... ;

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1 Le préfet de La Réunion a déféré au tribunal administratif de La Réunion, comme prévenus d'une contravention de grande voirie, M. E... B... et la société Tho BTP, dont il était le gérant, et a conclu à ce que ce tribunal constate que les faits établis par le procès-verbal dressé le 30 juin 2008, consistant en la réalisation de remblaiements d'un volume de 22 500 mètres cubes et d'un accès privatif en rive gauche de la rivière des Pluies sur le domaine public fluvial et dans la servitude dite de " marche-pied ", constituaient les contraventions prévues et réprimées par les articles L.2132-5, L.2132-7, L.2131-1 et L.2131-2 du code général de la propriété des personnes publiques. Par un jugement n° 0801351, 0801383 du 5 mars 2009, le tribunal administratif a condamné solidairement M. B... et la société Tho BTP à payer une amende de 12 000 euros, à réparer, sous le contrôle de l'administration, les dommages causés au domaine public fluvial et à remettre les lieux en état dans un délai de trois mois. Par ce jugement, le tribunal a également autorisé l'administration à procéder d'office, aux frais des contrevenants, à cette remise en état des lieux. En l'absence d'exécution du jugement, il a été procédé d'office à la remise en état des lieux en octobre 2012 dans le cadre d'un marché public de travaux. Un premier titre de perception a alors été émis le 22 août 2013 à l'encontre de M. B..., mais ce titre a été annulé le 28 janvier 2016 par le tribunal administratif de La Réunion. Les 20 juillet 2016 et 19 août 2016, deux nouveaux titres de perception ont été émis à l'encontre de M. B... pour des montants respectifs de 12 000 euros et de 263 750,85 euros. M. B... relève appel du jugement du 5 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux titres de perception.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le caractère exécutoire du jugement du 5 mars 2009 :

2. Aux termes de l'article L. 774-6 du code de justice administrative : " Le jugement est notifié aux parties, à leur domicile réel, dans la forme administrative par les soins des autorités mentionnées à l'article L. 774-2, sans préjudice du droit de la partie de le faire signifier par acte d'huissier de justice ".

3. Il résulte de l'instruction que le jugement de tribunal administratif de La Réunion du 5 mars 2009, mentionné au point 1 du présent arrêt, a été notifié par un envoi en recommandé avec avis de réception signé le 25 mars 2009. Le tribunal a considéré qu'une telle notification présentait les mêmes garanties que la notification en la forme administrative et qu'ainsi le jugement devait être regardé comme exécutoire. Si M. B..., qui ne critique pas en appel la position ainsi retenue par les premiers juges, fait valoir que la lettre accompagnant le jugement contenu dans ce pli lui a été adressée par la direction départementale de l'équipement et non par le préfet et que son signataire l'a signée en son nom personnel et non au nom du délégant, il résulte toutefois de l'instruction que ce courrier a été signé par le responsable de l'agence nord de la direction départementale de l'équipement de La Réunion qui disposait d'une délégation de signature accordée par le préfet de La Réunion par un arrêté n° 1120 du 13 mai 2008. La circonstance que ce courrier ne porte pas la mention " pour le préfet " n'est pas, contrairement à ce que soutient M. B..., de nature à permettre de considérer que la notification du jugement aurait été effectuée en son nom propre par le responsable de l'agence nord de la direction départementale de l'équipement dès lors que ledit courrier était établi sur un papier à en-tête du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, ce qui ne pouvait laisser aucun doute sur l'autorité pour les soins de laquelle ce jugement était notifié à M. B.... Par ailleurs, la circonstance, à la supposer établie, que le reçu de notification mentionné dans ce courrier n'aurait pas été reçu par M. B... n'est pas davantage de nature à entacher d'irrégularité ladite notification dès lors que l'avis de réception du pli a bien été signé, ce qui établit la notification du jugement à l'intéressé. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient M. B..., le jugement du 5 mars 2009, par lequel le tribunal administratif l'a condamné à payer une amende de 12 000 euros, à réparer les dommages causés au domaine public fluvial et à remettre les lieux en état, doit être regardé comme lui ayant été régulièrement notifié par les services de l'Etat. Par suite, le moyen tiré de l'absence de caractère exécutoire de ce jugement doit être écarté.

En ce qui concerne les titres de perception :

S'agissant du titre de perception du 20 juillet 2016 :

4. En application de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, les décisions des juridictions de l'ordre administratif, lorsqu'elles ont force exécutoire, constituent des titres exécutoires. En l'espèce, le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 5 mars 2009, par lequel le tribunal administratif a condamné M. B... à payer une amende de 12 000 euros, ayant, ainsi qu'il a été dit précédemment, force exécutoire, le titre de perception émis le 20 juillet 2016 pour avoir paiement de cette somme présente un caractère superfétatoire. Par suite, les conclusions de M. B... dirigées contre ce titre de perception sont irrecevables.

S'agissant du titre de perception du 19 août 2016 :

Quant à la motivation :

5. En l'espèce, le titre de perception du 19 août 2016 indique " objet de la créance : exécution d'office d'une décision de justice tribunal administratif en date du 05/03/2009 ". Par ailleurs, par un courrier du 7 juin 2016, remis à M. B... par un huissier de justice, le préfet de La Réunion l'a informé qu'en l'absence de commencement d'exécution du jugement du 5 mars 2009 l'Etat avait fait procédé, d'office, aux travaux de remise en état du domaine public fluvial. Par ce courrier, le préfet a indiqué avec précision la nature de ces travaux ainsi que les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fondait pour mettre la somme de 263 750,85 euros à la charge de M. B... au titre de l'exécution d'office de ces travaux et l'a informé qu'un titre de perception serait émis prochainement à son encontre " sur cette base de calcul de la créance ". Par suite, M. B... a bien été mis à même, par ce document qui lui avait été envoyé deux mois auparavant, de comprendre la nature de la somme de 263 750,85 euros mise à sa charge par le titre de perception du 19 août 2016 et d'en discuter les bases de liquidation alors même que le titre de perception ne mentionne pas le courrier du 7 juin 2016 et qu'il ne lui a pas été notifié par huissier en même temps que ce courrier.

Quant à la prescription :

6. La somme réclamée à M. B... par le titre de perception du 19 août 2016 correspond au coût des travaux de remise en état du domaine public fluvial. Ces travaux ont été exécutés entre les mois de juillet et de novembre 2012, comme il a été indiqué à M. B... par le courrier du 7 juin 2016 mentionné précédemment. Ainsi, le délai de prescription de l'action tendant à obtenir le remboursement des frais relatifs à ces travaux a donc commencé à courir au mois de novembre 2012, date de réalisation desdits travaux, et non, comme le soutient M. B..., au 5 mars 2009, date du jugement par lequel le tribunal administratif de La Réunion l'a condamné à remettre en état de domaine public maritime. Par suite, la créance de l'Etat à l'égard de M. B... n'était pas prescrite lors de l'émission du titre de perception en litige, le 19 août 2016, soit avant l'expiration, à compter de la date de réalisation de ces travaux, du délai de cinq ans prévu par les dispositions de l'article 2224 du code civil dont M. B... se prévaut.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des titres de perception des 20 juillet et 19 août 2016.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à la ministre de transition écologique et solidaire et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... A..., président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. David Terme, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2020.

Le président,

Marianne A...

La République mande et ordonne à la ministre de l'écologie et des comptes publics en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 18BX04310


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04310
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

24-01-03-01-04-02 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie. Poursuites. Condamnations.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Marianne HARDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : DUGOUJON ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-09;18bx04310 ?
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