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02/07/2020 | FRANCE | N°18BX04317

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 02 juillet 2020, 18BX04317


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... D... H... épouse E... et Mme B... D... H... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 14 septembre 2016 par lequel le préfet de la Creuse a délivré à la SARL Caillaud Metha un permis de construire une installation agricole avec local technique, unité de méthanisation, local de cogénération et quatre silos couloirs sur un terrain situé au lieu-dit 12 Le Pont à la Chatte sur le territoire de la commune de Bonnat.

Par un jugement n° 1601489 du

18 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté la requête.

Procédu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... D... H... épouse E... et Mme B... D... H... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 14 septembre 2016 par lequel le préfet de la Creuse a délivré à la SARL Caillaud Metha un permis de construire une installation agricole avec local technique, unité de méthanisation, local de cogénération et quatre silos couloirs sur un terrain situé au lieu-dit 12 Le Pont à la Chatte sur le territoire de la commune de Bonnat.

Par un jugement n° 1601489 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2018, Mmes G... et B... D... H..., représentées par Me Sermier, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 18 octobre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 septembre 2016 par lequel le préfet de la Creuse a accordé à la société Caillaud Metha un permis de construire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le dossier de demande de permis de construire est incomplet en méconnaissance de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme en ce qu'il ne contient pas un document précisant le mode et les conditions d'utilisation, d'épuration et d'évacuation des eaux résiduaires et des émanations de toute nature ainsi que de gestion des déchets de l'exploitation imposé par le IV de l'article R. 512-47 du code de l'environnement ;

- l'installation de méthanisation projetée est disproportionnée pour traiter les seules déjections du cheptel exploité par le GAEC du Pont de la Chatte ; la SARL Caillaud Metha aurait dû signaler dans sa demande de permis de construire l'importation de sous-produits provenant d'autres exploitations, afin d'augmenter le rendement de leur installation et en amoindrir le coût élevé ;

- les premiers juges ne pouvaient procéder à la substitution de base légale demandée par le préfet dès lors l'administration n'aurait pas pris la même décision au vu de l'insuffisance des éléments fournis par le pétitionnaire concernant la gestion des déchets issus de l'activité de méthanisation.

Par un mémoire enregistré le 26 février 2019, la SARL Caillaud Métha, représentée par Me Lefaure, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'incomplétude de dossier, développé pour la première fois en appel, est irrecevable ;

- l'unité de méthanisation n'est pas disproportionnée, elle est alimentée par 60 % d'effluents d'élevage et 40 % de dérobé de culture ;

- les premiers juges ont à bon droit procédé à la substitution de base légale demandée par le préfet.

Par un mémoire enregistré le 9 décembre 2019, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens développés par les appelantes ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 10 décembre 2019, la date de la clôture de l'instruction a été fixée au 22 janvier 2020 à 12h00.

Un mémoire présenté pour Mmes G... et B... D... H... a été enregistré le 10 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Gay-Sabourdy,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée Caillaud Metha a sollicité, le 19 avril 2016, la délivrance d'un permis de construire pour la réalisation d'une installation agricole avec local technique, unité de méthanisation et local de cogénération de quatre silos couloirs sur un terrain situé au lieu-dit Le Pont à la Chatte sur le territoire de la commune de Bonnat. Mmes G... et B... D... H... relèvent appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Creuse du 14 septembre 2016 accordant le permis de construire à la société Caillaud Métha.

Sur la légalité de l'arrêté du 14 septembre 2016 :

2. Aux termes de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Lorsque les travaux projetés portent sur une installation classée soumise à autorisation, enregistrement ou déclaration en application des articles L. 512-1, L. 512-7 et L. 512-8 du code de l'environnement, la demande de permis de construire doit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande d'autorisation de la demande d'enregistrement ou de la déclaration ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le dossier de demande de permis de construire contenait, ainsi que l'indiquent les visas de l'arrêté attaqué, la preuve de dépôt d'un dossier de déclaration initiale d'une installation classée, délivrée par la préfecture de la Creuse le 3 mars 2016 conformément aux dispositions précitées. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme n'est pas fondé. En outre, en raison de l'indépendance de la législation sur le permis de construire et de la législation sur les installations classées, il n'appartenait pas au maire de rechercher si le dossier de déclaration de l'installation classée était complet et respectait les exigences de l'article R. 512-47 du code de l'environnement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 512-47 du code de l'environnement est inopérant.

4. Aux termes de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme : " Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : (...) 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole, à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national ; / 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes (...) ".

5. Pour rejeter la demande de Mmes D... H..., le tribunal administratif de Limoges a substitué au 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, comme base légale du permis de construire attaqué, le 3° du même article. D'une part, cette substitution n'a pas eu pour effet de priver les intéressées d'une garantie. D'autre part, pour délivrer le permis de construire sur le fondement du 2° ou du 3° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, l'autorité compétente se limite à apprécier si une construction peut être autorisée en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune. Ainsi, pour la mise en oeuvre du 3° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, l'autorité compétente, qui doit déterminer si le projet est, ou non, compatible avec le voisinage d'habitations, dispose du même pouvoir d'appréciation que lorsqu'elle applique le 2° du même article. La circonstance, à la supposer établie, que le dossier de déclaration d'installation classée ne contiendrait pas suffisamment d'éléments relatifs à la gestion des déchets issus de l'activité de méthanisation ne faisait pas par elle-même obstacle à la substitution de base légale opérée. Ainsi, et contrairement à ce que soutiennent les appelantes, les premiers juges pouvaient procéder d'office à cette substitution de base légale.

6. Aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement ". Aux termes de l'article R. 111-27 du même code : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".

7. Il ne ressort pas des pièces du dossier de demande de permis de construire que l'installation projetée serait de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. En se bornant à faire valoir que l'installation de méthanisation projetée serait disproportionnée pour traiter les seules déjections du cheptel exploité par le GAEC du Pont de la Chatte, les requérantes ne mettent pas à même la cour d'apprécier dans quelle mesure l'absence de précision sur les éventuelles importations de produits provenant d'autres exploitations aurait faussé l'appréciation de l'autorité administrative quant aux impacts du projet sur l'environnement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-26 et R. 111-27 d code de l'urbanisme doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mmes D... H... ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 septembre 2016.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les appelantes demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mmes D... H... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... D... H... épouse E..., à Mme B... D... H... épouse A..., à la SARL Caillaud Metha et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 juillet 2020.

Le président,

Marianne Hardy

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX04317


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04317
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation nationale.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SERMIER

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-02;18bx04317 ?
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