Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2017 par lequel le préfet de Mayotte lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1800305 du 29 octobre 2019, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 octobre 2019, M. A..., représenté par Me B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Mayotte le 29 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Mayotte du 12 septembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Mayotte de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le vice-président du tribunal a présidé la formation de jugement alors qu'il avait statué sur le référé suspension qu'il avait introduit ;
- le jugement est insuffisamment motivé : les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que le médecin rapporteur n'a pas siégé au sein du collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;
En ce qui concerne la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- cette décision est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière : il n'est pas établi que le médecin rapporteur n'a pas siégé au sein du collège de médecins de l'OFII ; l'avis du collège de médecins est irrégulier dès lors qu'il ne se prononce pas sur la disponibilité du traitement nécessité par son état de santé dans son pays d'origine ; il n'a pas été mis en mesure de présenter des observations préalablement à l'édiction de cette décision ;
- le préfet s'est estimé tenu par l'avis du collège de médecins ;
- cette décision méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et il ne pourra pas effectivement bénéficier du traitement approprié dans son pays d'origine ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré 28 janvier 2020, le préfet de Mayotte a produit des pièces.
Par ordonnance du 9 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 10 février 2020 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... C..., a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant comorien né le 31 décembre 1973, est entré en France en 2012, selon ses déclarations. Le 31 juillet 2014, il s'est vu délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, régulièrement renouvelé une fois jusqu'au 6 avril 2017 et dont il a sollicité le renouvellement. Par un arrêté du 12 septembre 2017, le préfet de Mayotte a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 29 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, saisi sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative d'une demande tendant à ce qu'il prononce, à titre provisoire et conservatoire, la suspension d'une décision administrative, le juge des référés procède dans les plus brefs délais à une instruction succincte - distincte de celle au vu de laquelle le juge saisi du principal statuera - pour apprécier si les préjudices que l'exécution de cette décision pourrait entraîner sont suffisamment graves et immédiats pour caractériser une situation d'urgence, et si les moyens invoqués apparaissent, en cet état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision. Il se prononce par une ordonnance qui n'est pas revêtue de l'autorité de la chose jugée et dont il peut lui-même modifier la portée au vu d'un élément nouveau invoqué devant lui par toute personne intéressée.
3. Eu égard à la nature de l'office ainsi attribué au juge des référés, la seule circonstance qu'un magistrat a statué sur une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative n'est pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à ce qu'il se prononce ultérieurement sur la requête en qualité de juge du principal. Toutefois, dans le cas où il apparaîtrait, compte tenu notamment des termes mêmes de l'ordonnance, qu'un magistrat statuant comme juge des référés aurait préjugé l'issue du litige, ce magistrat ne pourrait, sans méconnaître le principe d'impartialité, se prononcer ultérieurement comme juge du principal.
4. En l'occurrence, il ne ressort ni des motifs, ni du dispositif de l'ordonnance du 15 mars 2018 (n° 1800506) par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a refusé de prononcer la suspension de l'arrêté litigieux que celui-ci aurait préjugé de l'issue du litige en considérant que l'intéressé ne justifiait d'aucune circonstance particulière de nature à caractériser une situation d'urgence et qu'en l'état de l'instruction, aucun des moyens invoqués devant lui n'était de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté litigieux. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué aurait été rendu en méconnaissance des exigences du principe d'impartialité.
5. En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait soulevé le moyen tiré de ce que le médecin rapporteur n'a pas siégé au sein du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) à l'appui de son recours devant le tribunal administratif de Mayotte. En outre, il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Mayotte, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par M. A.... Par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
6. En premier lieu, la décision attaquée vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, ainsi que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à la situation de M. A.... Le préfet de Mayotte, après avoir rappelé les conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé sur le territoire français, mentionne l'avis du collège de médecins de l'OFII le concernant et précise que son état de santé, évalué lors de l'instruction du dossier, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour conclure que M. A... ne remplit plus les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La décision en litige comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée.
7. En deuxième lieu, en vertu du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est, sous réserve d'une menace pour l'ordre public, délivrée de plein droit à " l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...). ".
8. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ".
9. L'article R. 313-23 du même code dispose, dans sa rédaction applicable au litige, que : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...). / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. (...). Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...). / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. ".
10. L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".
11. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le rapport médical concernant l'état de santé de M. A..., prévu à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été établi par un premier médecin puis transmis au collège de médecins de l'OFII. Ce collège, au sein duquel ont siégé trois autres médecins, désignés pour participer aux collèges de médecins de l'Office par décision du directeur général de l'Office en date du 21 août 2017 régulièrement publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur et disponible sur le site internet de l'OFII, s'est réuni les 1er et 4 septembre 2017 pour émettre l'avis qui a été transmis au préfet de Mayotte. Il suit de là que l'avis a été émis dans le respect des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment dans le respect de la règle selon laquelle le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège.
12. D'autre part, il ressort de l'avis rendu par le collège de médecins de l'OFII que si l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ces conditions, le collège n'était pas tenu de se prononcer sur la possibilité pour l'intéressé de bénéficier d'un accès effectif à un traitement approprié dans son pays d'origine.
13. Enfin, aucune des dispositions précitées n'impose au préfet d'inviter un candidat au séjour à présenter des observations préalablement à l'édiction de la décision se prononçant sur son droit au séjour.
14. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière doit être écarté en toutes ses branches.
15. En troisième lieu, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le préfet se serait estimé tenu par l'avis du collège de médecins de l'OFII.
16. En dernier lieu, il ressort de l'avis du collège de médecins de l'OFII que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Il ne ressort d'aucune des pièces médicales versées au dossier que le défaut de prise en charge pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé, ni, à supposer que cela soit le cas, que ce dernier ne pourrait effectivement bénéficier des soins requis dans son pays d'origine. Par suite, c'est sans méconnaître les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet a pu refuser de renouveler le titre de séjour de M. A....
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision lui refusant le renouvellement de son titre de séjour.
18. En deuxième lieu, dès lors que la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour de M. A... est elle-même motivée et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de cette dernière décision se confond avec celle de la décision relative au séjour. En l'espèce et ainsi qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt, la décision de refus de renouvellement de titre de séjour est suffisamment motivée en droit comme en fait. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
19. En dernier lieu et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 16 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
20. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 septembre 2017 par lequel le préfet de Mayotte lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Mayotte.
Délibéré après l'audience du 20 février 2020 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
M. E... C..., président-assesseur,
M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 20 mai 2020.
Le président,
Philippe Pouzoulet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX04119