Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. H... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler le certificat d'urbanisme négatif du 8 décembre 2016 par lequel le maire de Dolus-d'Oléron a déclaré, sur le fondement du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, que l'opération consistant en la construction d'une maison individuelle sur un terrain situé 14 passe de Royan n'était pas réalisable.
Par un jugement n° 1700176 du 12 avril 2018, le tribunal administratif de Poitiers a fait droit à sa demande et a enjoint au maire de Dolus-d'Oléron de procéder au réexamen de la demande de certificat d'urbanisme de M. A... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 juin 2018 et le 18 décembre 2018, la commune de Dolus-d'Oléron, représentée par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 12 avril 2018 ;
2°) de rejeter la requête de M. A... tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif en date du 8 décembre 2016 ;
3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'opération projetée par M. A... n'était pas irréalisable et que la commune, en indiquant le contraire, avait méconnu l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que le terrain d'assiette du projet ne se trouve pas en continuité avec une agglomération ou un village existant ; la parcelle ne peut être rattachée au secteur " La Rémigeasse ", zone la plus proche susceptible d'être qualifiée de zone urbanisée, compte tenu de son éloignement de Dolus-d'Oléron ; les secteurs de " la Rémigeasse " et de " l'Ecuissière " ne comportent aucun équipement public et ne peuvent ainsi être qualifiés de villages ; la parcelle n'est pas en continuité avec " la Rémigeasse " ou avec " l'Ecuissière " ; le secteur du terrain d'assiette du projet situé au " Renclos de Sable ", qui était au départ une zone naturelle, a connu une urbanisation mais ne constitue pas un village compte tenu de l'absence d'équipement public ; le projet est en réalité dans une zone d'habitat diffus ;
- en outre, le certificat d'urbanisme attaqué n'est pas entaché d'un vice d'incompétence ;
- le certificat d'urbanisme n'a pas été pris en méconnaissance de l'article L. 442-14 du code de l'urbanisme dès lors qu'il est fondé sur les dispositions de la loi littoral, antérieures à l'autorisation de lotir dont M. A... se prévaut ;
- le maire n'a pas commis d'erreur de droit au regard de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme en considérant que le projet de construction ne constituait pas un hameau nouveau et que ne se situant pas dans un village ou en continuité d'une agglomération, il constitue une extension de l'urbanisation contraire à ces dispositions ;
- le plan de prévention des risques naturels (PPRN) approuvé le 17 août 2018 classe la zone du projet en zone verte protégée (VF1) et prescrit une distance de 10 mètres minimum en tout point de la construction avec les espaces boisés ce qui interdit toute construction dans cette zone et le règlement du plan local d'urbanisme en cours de révision prévoit de stopper les constructions à proximité du littoral et de privilégier celles du centre bourg.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2018, M. H... A..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête d'appel de la commune de Dolus-d'Oléron, à la confirmation du jugement attaqué et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Dolus-d'Oléron la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal a considéré que le projet de construction en litige n'était pas contraire à l'article L.121-8 du code de l'urbanisme et qu'il ne se trouvait pas dans une zone d'urbanisation diffuse mais qu'il est dans une zone densément urbanisée composée de plusieurs centaines d'habitations ;
- le certificat est entaché d'un vice d'incompétence en l'absence de preuve d'une délégation donnée à son auteur par le maire ;
- le maire a méconnu les dispositions de l'article L. 442-14 du code de l'urbanisme dès lors que par décision du 18 avril 2014 il ne s'est pas opposé à son projet de lotissement ; il ne pouvait ainsi lui délivrer un certificat d'urbanisme négatif le 8 décembre 2016 ; la circonstance que le certificat d'urbanisme en litige soit fondé sur la loi littoral et le PPRN est ici sans incidence ;
- le certificat est entaché d'une erreur de droit au regard de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que cette disposition ne prescrit pas que le projet doit s'insérer dans un hameau nouveau ; le projet ne constitue pas une extension de l'urbanisation mais se situe en continuité de l'agglomération ou de villages existants.
Par ordonnance du 6 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée, au 9 octobre 2019 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... E...,
- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune de Dolus-d'Oleron, et de Me F..., représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a demandé au maire de la commune de Dolus-d'Oléron la délivrance d'un certificat d'urbanisme opérationnel pour la réalisation d'une maison individuelle d'habitation de 150 m² sur la parcelle cadastrée BS 1096 située 14 passe de Royan. Par décision du 8 décembre 2016, le maire de Dolus-d'Oléron lui a délivré un certificat d'urbanisme indiquant que l'opération projetée n'était pas réalisable. M. A... a saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant à l'annulation de ce certificat d'urbanisme négatif. Par un jugement du 12 avril 2018, le tribunal a fait droit à sa demande. La commune de Dolus-d'Oléron relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé des motifs du jugement attaqué :
2. Par le certificat d'urbanisme contesté, le maire de la commune de Dolus-d'Oléron a déclaré que l'opération projetée de construction d'une maison individuelle de 150 m², au 14 passe de Royan sur la parcelle BS 1096, n'était pas réalisable au motif que le projet ne respecte pas les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors qu'il ne se situe pas dans un hameau nouveau ni en continuité d'une agglomération ou d'un village, mais au sein de l'espace appelé " Renclos des Sables ", qui ne comporte aucun équipement collectif, administratif, culturel ou commercial et dont la densité urbaine n'est pas significative.
3. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme reprenant les dispositions de l'ancien article L. 146-4 du même code : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. "
4. Il résulte de ces dispositions que dans les communes littorales, ne peuvent être autorisées dans les zones situées en dehors des espaces déjà urbanisés, que les constructions réalisées soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement.
5. Pour annuler le certificat d'urbanisme en litige, le tribunal a relevé que " le terrain d'assiette du projet se situe passe de Royan, au Sud du chemin de Saint-James. Ce chemin constitue le prolongement, à l'Est, de l'avenue de l'Océan. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans et photographies aériennes produits par les parties, que, depuis le lieu-dit la Rémigeasse jusqu'à la passe de Royan, l'avenue de l'Océan et le chemin de Saint-James sont, sur leur côté Sud, bordés sans discontinuer de constructions implantées sur plusieurs rangs. Cet ensemble continu de constructions se poursuit au Nord du lieu-dit la Rémigeasse par les lieux-dits la Gratonnière et Beaurepaire et au Nord-Ouest du terrain d'assiette du projet par le lieu-dit l'Ecuissière. Au total, cette partie du territoire de la commune de Dolus-d'Oléron est composée de plusieurs centaines de constructions dont la densité est significative. Il s'agit donc d'une zone déjà urbanisée. Or, le terrain d'assiette du projet, qui est entouré de constructions sur trois de ses côtés, se situe au sein de cette zone urbanisée. Par conséquent, le maire a méconnu l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme en estimant que le projet de M. A... n'était pas réalisable. "
6. Pour contester ce jugement, la commune fait valoir que le terrain d'assiette du projet est situé dans le secteur du " Renclos des Sables " qui constitue une zone d'urbanisation diffuse dès lors qu'elle ne comprend aucun équipement public et qu'elle est entourée d'une zone boisée. Il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment des photographies aériennes produites que le terrain d'assiette du projet, entouré de construction sur trois côtés, se trouve, comme l'ont relevé les premiers juges, à l'intérieur d'une zone qui est densément urbanisée dès lors qu'elle comporte de très nombreuses habitations sans discontinuité qui sont seulement entrecoupées de quelques éléments boisés, délimitée à l'est par la passe de Royan, à l'ouest par le chemin de l'Ecuissière et au nord par le chemin de Saint-James et que la passe de Royan, chemin qui dessert directement le projet de M. A..., comporte de chaque côté de la voie de nombreuses maisons et constructions sur plusieurs rangs aussi bien en amont qu'en aval du projet. Enfin, il ressort également des photographies produites que cet ensemble urbanisé n'est pas isolé au sein du secteur du " Renclos des Sables " mais qu'au contraire il se poursuit, comme l'a également relevé le tribunal, au nord du chemin de Saint-James par le secteur de l'Ecuissière et à l'ouest par les secteurs de la Rémigeasse et de la Gratonnière, ces derniers également fortement urbanisés formant ainsi, avec le secteur du " Renclos des Sables ", un ensemble cohérent comportant des centaines d'habitations caractéristiques de l'urbanisation pavillonnaire littorale d'une station balnéaire. Ni son éloignement de deux kilomètres du centre du bourg, ni l'absence d'équipement public culturel ou administratif, ni le fait qu'il soit à proximité d'un espace boisé ne font obstacle à sa qualification d'agglomération existante au sens des dispositions précitées, résultant du nombre et de la densité des constructions qui y sont implantées. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que le motif de refus de délivrance d'un certificat d'urbanisme opérationnel opposé par le maire reposant sur la méconnaissance de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme était erroné.
Sur les nouveaux motifs de refus invoqués pour la première fois en appel par la commune :
7. Aux termes de l'article L. 442-14 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme nouvelles intervenues dans un délai de cinq ans suivant : (...) 1° la date de la non-opposition à cette déclaration, lorsque le lotissement a fait l'objet d'une déclaration préalable (...) ". Il résulte des articles L. 442-14 et R. 462-1 et suivants du code de l'urbanisme que le document d'urbanisme applicable aux demandes de permis de construire présentées dans le cadre d'un lotissement est celui en vigueur à la date à laquelle a été délivrée l'autorisation de lotir et ce, pendant un délai de cinq ans à compter de la réception, par l'administration, de la déclaration d'achèvement du lotissement. Durant ce délai, les dispositions des documents d'urbanisme intervenues postérieurement à l'autorisation de lotissement ne sont pas opposables aux demandes de permis de construire.
8. Si la commune de Dolus-d'Oléron se prévaut du plan de prévention des risques naturels approuvé le 17 août 2018 qui classe la zone où se situe la parcelle en zone verte VF1 et du règlement du plan local d'urbanisme en cours de révision, il ressort toutefois des pièces du dossier que par une décision du 18 avril 2014, le maire ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de projet de lotissement tendant à la division du terrain composé notamment de la parcelle BS 1096, terrain d'assiette du projet, en deux lots dont un lot à bâtir. Il en résulte que ne peuvent être opposées, dans le délai de cinq ans suivant la déclaration de non-opposition au projet de lotissement, lesdits documents d'urbanisme qui sont postérieurs à l'autorisation de lotissement précitée. En état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de construction, objet du certificat d'urbanisme, devrait être implanté à moins de la distance de 10 mètres d'un espace boisé imposée par le règlement du plan de prévention des risques naturels en zone verte VF1 où se situe le terrain d'assiette du projet. Dans ces conditions, les motifs tirés de la méconnaissance des dispositions du plan de prévention des risques approuvé le 17 août 2018 et du plan local d'urbanisme, d'ailleurs toujours en cours de révision, ne peuvent légalement fonder le certificat d'urbanisme négatif en litige du 8 décembre 2016.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Dolus-d'Oléron n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal a annulé le certificat d'urbanisme négatif du 8 décembre 2016.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A... qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la commune de Dolus-d'Oléron demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Dolus-d'Oléron la somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Dolus-d'Oléron est rejetée.
Article 2 : La commune de Dolus-d'Oléron versera à M. A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... A... et à la commune de Dolus-d'Oléron.
Délibéré après l'audience du 18 février 2020 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme D... E..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 19 mai 2020.
Le président,
Elisabeth Jayat
La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX02315