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12/03/2020 | FRANCE | N°19BX03916

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 12 mars 2020, 19BX03916


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1903690 du 13 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enreg

istrée le 16 octobre 2019, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) de l'adme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1903690 du 13 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 octobre 2019, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) de l'admettre, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 13 septembre 2019 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 314-11 8° du CESEDA, ou, à titre infiniment subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) à titre subsidiaire de suspendre l'exécution de la décision contesté e dans l'attente de la décision de la cour nationale du droit d'asile ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- sa motivation témoigne d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle méconnaît son droit au recours effectif, dès lors qu'il a introduit un recours devant la Cour nationale du droit d'asile, en méconnaissance des articles 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle méconnaît le 8° de l'article L. 314-11 et l'article L. 313-25 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le rejet de sa demande d'asile n'est pas définitif ;

- cette décision méconnaît le premier paragraphe de l'article 3, le deuxième paragraphe de l'article 6 et l'article 16 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle et celle de ses enfants ;

- il n'a pas été procédé à un examen personnel de sa situation quant à la possibilité de lui délivrer un titre de séjour sur un autre fondement ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les articles L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 33 de la convention de Genève ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle et celle de ses enfants ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit quant à la possibilité de lui délivrer un titre de séjour sur un autre fondement ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît le premier paragraphe de l'article 3 et le deuxième paragraphe de l'article 6 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la demande de suspension :

- il sollicite la suspension de l'exécution de la décision dans l'attente de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 janvier 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 janvier 2020, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 27 janvier 2020 à 12h00.

Mme A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 décembre 2019.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-770 DC du 6 septembre 2018 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... D...,

- et les observations de Me B..., représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante albanaise, née le 31 mai 1985, déclare être entrée sur le territoire national le 29 décembre 2018. Le bénéfice de l'asile lui a été refusé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) en date du 16 mai 2019, qui a statué en procédure accélérée en application du 1° du I de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 4 juillet 2019, le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement. Mme A... relève appel de l'ordonnance en date du 13 septembre 2019 par laquelle le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté les demandes tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :

2. Par décision du 19 décembre 2019, Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont ainsi devenues sans objet.

Sur la décision portant refus d'admission au séjour :

3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Lorsque, dans l'hypothèse mentionnée à l'article L. 311-6, un refus de séjour a été opposé à l'étranger, la mesure peut être prise sur le seul fondement du présent 6° (...) ". Selon les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin (...) lorsque : / 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 (...) ". Aux termes du I de l'article L. 723-2 du même code : " L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 (...) ".

4. En premier lieu, Mme A... reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance, et sans critiquer utilement la réponse apportée par les premiers juges, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant refus d'admission au séjour principalement fondé sur l'absence de mention de la convention internationale des droits de l'enfant par la décision critiquée. Dès lors, il y a lieu, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

5. En deuxième lieu, il ressort des termes de cette motivation que le préfet ne s'est pas estimé lié par la décision de l'OFPRA et a procédé à un examen réel et sérieux de la situation personnelle du requérant.

6. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, il résulte des dispositions combinées du 7° de l'article L. 743-2 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du 6° de l'article L. 511-1, du I bis de l'article L. 512-1 et de l'article L. 512-3 du même code, qu'un ressortissant étranger issu d'un pays d'origine sûr dont la demande d'asile a été rejetée selon la procédure accélérée peut faire l'objet d'une décision de refus d'admission au séjour.

7. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile de Mme A..., ressortissante albanaise, pays figurant sur la liste des pays considérés comme d'origine sûrs par le conseil d'administration de l'OFPRA, a été rejetée par une décision de l'office, statuant en procédure accélérée du 16 mai 2019. Ainsi, à la date de l'acte attaqué, l'intéressée ne disposait plus du droit de se maintenir sur le territoire français et se trouvait dans le cas prévu au 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut obliger un étranger à quitter le territoire français et assortir cette décision d'un refus d'admission au séjour.

8. En quatrième lieu, Mme A... soutient que la décision refusant de l'admettre au séjour méconnaît son droit à un recours effectif, devant la Cour nationale du droit d'asile, contre la décision du 16 mai 2019 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile.

9. Toutefois, d'une part, les dispositions citées au point 3, qui font dérogation au principe fixé à l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, selon lequel le demandeur d'asile bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile en cas de rejet en procédure accélérée par l'office d'une demande émanant d'une personne provenant d'un pays sûr ne privent pas l'intéressé de la possibilité d'exercer un recours contre la décision de rejet de l'office. De plus, il résulte des dispositions combinées du 7° de l'article L. 743-2 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du 6° de l'article L. 511-1, du I bis de l'article L. 512-1 et de l'article L. 512-3 du même code, qu'un ressortissant étranger issu d'un pays d'origine sûr dont la demande d'asile a été rejetée selon la procédure accélérée, s'il ne bénéficie pas du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours, peut contester l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre. Ce recours présente un caractère suspensif et le juge saisi a la possibilité, le cas échéant, en application de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement et de permettre, ainsi, au ressortissant étranger de demeurer sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile statue sur son recours. Ainsi, eu égard à ces garanties procédurales et juridictionnelles qui permettent notamment à l'étranger de faire valoir les risques qu'il estime encourir dans son pays d'origine, la requérante qui a contesté la légalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire et a demandé la suspension de cette mesure jusqu'à ce que la cour nationale du droit d'asile statue sur son recours, n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaît le droit à un recours effectif garanti notamment par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. Mme A... était présente sur le territoire français depuis moins d'un an à la date de la décision en litige, période d'instruction de sa demande d'asile. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'elle aurait noué des liens d'une intensité particulière sur le territoire français. Elle n'est pas dépourvue d'attaches familiale dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans français et il n'existe aucun obstacle à ce qu'elle retourne dans son pays d'origine en compagnie de son époux, ressortissant albanais qui fait également l'objet d'un arrêté portant refus de séjour sur le territoire français au titre de l'asile assorti d'une obligation de quitter le territoire, et de leurs deux enfants. La décision ne méconnait donc pas les dispositions précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A... ou de celle de ses enfants.

12. En sixième lieu, Mme A... se prévaut de la méconnaissance des dispositions des articles 3-1, 6-2 et 16 de la convention internationale des droits de l'enfant. Toutefois, la décision portant refus d'admission au séjour n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme A... de ses enfants, qui peuvent l'accompagner dans son pays d'origine où il n'est pas allégué qu'ils sont dépourvus d'attaches familiales et sociales et où ils peuvent poursuivre leur scolarité, et ne se traduit par aucune immixtion ou atteinte à leur vie privée, à leur honneur ou à leur réputation. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations du premier paragraphe de l'article 3 et de l'article 16 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent donc être rejetés. De plus, Mme A... ne peut se prévaloir des stipulations de l'article 6 de la convention internationale des droits de l'enfant qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux particuliers.

13. En dernier lieu, alors que Mme A... n'a présenté aucune demande de titre de séjour sur un fondement autre que son admission à l'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet a commis une erreur de droit en refusant de lui attribuer un titre de séjour sur un autre fondement est inopérant et ne peut qu'être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire :

14. En premier lieu, il résulte de qui a été dit précédemment que la décision portant refus d'admission au séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale doit être écarté.

15. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 11, les moyens tirés de la méconnaissance dispositions précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur la situation personnelle de Mme A... ou de celle de ses enfants doivent être écartés.

16. Enfin, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'emporte pas, par elle-même, l'obligation pour la requérante de retourner dans son pays d'origine. Par conséquent, Mme A... ne peut se prévaloir utilement de ses craintes en cas de retour dans ce pays pour faire valoir que cette décision méconnaîtrait les articles L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 33 de la convention relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951.

Sur le pays de destination :

17. En premier lieu, il résulte de qui a été dit précédemment que le moyen tiré de ce que la décision portant pays de destination serait dépourvue de base légale doit être écarté.

18. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". L'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

19. Pour établir la réalité des risques de traitement inhumains ou dégradants qu'elle et sa famille encourraient en cas de retour en Albanie, Mme A... soutient être sous le coup de menaces de représailles mais ne produit au soutien de son récit aucun élément permettant d'établir l'existence d'un risque actuel de traitements prohibé par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Albanie. Dans ces circonstances, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent être accueillis. De même le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

20. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige aurait pour conséquence de séparer les enfants de Mme A... de leurs parents, l'époux de l'intéressée, de même nationalité, ainsi qu'il a été dit au point 11, faisant également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, ni qu'en cas de retour en Albanie les conditions d'existence de ses enfants s'en trouveraient affectées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté. Ensuite Mme A... ne peut se prévaloir des stipulations de l'article 6 de la convention internationale des droits de l'enfant qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux particuliers.

Sur les conclusions tendant à la suspension de la mesure d'éloignement :

21. Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour ".

22. Il est fait droit à la demande de suspension de la mesure d'éloignement si le juge a un doute sérieux sur le bien-fondé de la décision de rejet ou d'irrecevabilité opposée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides à la demande de protection, au regard des risques de persécutions allégués ou des autres motifs retenus par l'Office. Les moyens tirés des vices propres entachant la décision de l'Office ne peuvent utilement être invoqués à l'appui des conclusions à fin de suspension de la mesure d'éloignement, à l'exception de ceux ayant trait à l'absence, par l'Office, d'examen individuel de la demande ou d'entretien personnel en dehors des cas prévus par la loi ou de défaut d'interprétariat imputable à l'Office.

23. En l'espèce, la requérante n'apporte aucun élément de nature à faire naître un doute sérieux sur le bien-fondé de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides au regard des risques de persécution allégués. Il y a donc lieu de rejeter les conclusions tendant à la suspension de la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet, à supposer que la Cour nationale du droit d'asile ne se soit pas encore prononcée sur un recours de la requérante à la date du présent arrêt.

24. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de renvoi et a refusé de suspendre les effets de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

25. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la requérante, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

26. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle présentée par Mme A....

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 6 février 2020 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. E... D..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 mars 2020.

Le rapporteur,

Stéphane D... Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 19BX03916


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03916
Date de la décision : 12/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : LOUIS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-03-12;19bx03916 ?
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