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18/02/2020 | FRANCE | N°18BX01447

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 18 février 2020, 18BX01447


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SNC Ferme éolienne de Montlevicq a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 19 avril 2016 par lequel le préfet de la région Centre - Val de Loire a refusé de lui délivrer l'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent sur le territoire de la commune de Montlevicq.

Par un jugement n°1601106 du 8 février 2018, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de procéder

à un nouvel examen de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SNC Ferme éolienne de Montlevicq a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 19 avril 2016 par lequel le préfet de la région Centre - Val de Loire a refusé de lui délivrer l'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent sur le territoire de la commune de Montlevicq.

Par un jugement n°1601106 du 8 février 2018, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de procéder à un nouvel examen de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 avril 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 8 février 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la SNC Ferme éolienne de Montlevicq devant le tribunal administratif de Limoges.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé concernant l'absence d'atteinte portée par le projet à la sécurité publique ;

- compte tenu de ses caractéristiques et de son implantation au sein du secteur d'entraînement à très basse altitude des Combrailles, le projet en litige porte atteinte à la sécurité des exercices d'entraînements militaires dans le secteur.

Par deux mémoires en intervention, enregistrés le 8 octobre 2018 et le 5 juillet 2019, M. et Mme A... G..., M. B... F..., M. et Mme A... C..., M. et Mme E... et l'association Eaux et terres du Berry, représentés par Me H..., demandent qu'il soit fait droit aux conclusions de la requête du ministre de la transition écologique et solidaire.

Ils se réfèrent aux moyens exposés dans la requête du ministre et soutiennent en outre que :

- compte tenu de l'impact visuel et sonore du projet, ils justifient d'un intérêt à intervenir à l'instance ;

- le projet porterait atteinte au patrimoine architectural et historique situé à proximité.

Par ordonnance du 22 mai 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 15 juillet 2019 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me H..., représentant M. et Mme G..., M. F..., M. et Mme C..., M. et Mme E... et l'association Eaux et terres du Berry.

Considérant ce qui suit :

1. La SNC Ferme éolienne de Montlevicq a déposé, le 7 juin 2013, une demande d'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent composée de cinq aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Montlevicq (Indre). Par arrêté du 19 avril 2016, le préfet de la région Centre - Val de Loire a refusé de lui délivrer cette autorisation. Le ministre de la transition écologique et solidaire relève appel du jugement du 8 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté à la demande de la pétitionnaire et a enjoint au préfet de procéder à un nouvel examen de la demande.

Sur l'intervention :

2. Il résulte de l'instruction que M. et Mme G... sont propriétaires d'un immeuble à usage de résidence principale au lieudit Priches à Montlevicq. Il n'est pas contesté que ce bien se situe à 900 mètres du lieu d'implantation de l'une des éoliennes du projet en litige, lesquelles mesureront 149 mètres de haut chacune. Ainsi, et comme le soutiennent les intéressés, le projet est susceptible de créer pour eux des nuisances visuelles et sonores. Dans ces conditions, M. et Mme G... justifient d'un intérêt suffisant à l'annulation du jugement attaqué. Dès lors que l'un au moins des intervenants est recevable, l'intervention doit être admise.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Les premiers juges ont annulé l'arrêté en litige aux motifs que, au regard de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, d'une part, le projet ne présente pas de risques pour la sécurité des aéronefs militaires et de leurs occupants et, d'autre part, il ne porte pas atteinte aux sites, monuments et paysages.

4. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (...) ".

5. Il est constant que la zone d'implantation du projet en litige, composé de cinq éoliennes d'une hauteur totale de 149 mètres chacune, est située au sein du secteur d'entraînement à très basse altitude (SETBA) de Combrailles dans lequel des aéronefs militaires évoluent à une altitude inférieure à 150 mètres et à très grande vitesse. Il résulte de l'instruction, en particulier de la cartographie de ce secteur, produite pour la première fois en appel, que l'implantation des cinq éoliennes en litige réduirait fortement une zone d'entraînement militaire dénuée d'obstacles et de zones urbanisées et aurait un fort impact sur les axes de déplacement utilisés par les forces armées. Si d'autres projets similaires ont pu être autorisés dans le même SETBA, il n'est pas sérieusement contesté que ces derniers affectaient de façon moindre le déroulement des exercices militaires, en particulier parce qu'ils se situent le plus souvent en limite de ce secteur. Dès lors, en estimant que le projet en litige était de nature à porter atteinte à la sécurité des aéronefs militaires et de leurs occupants, le préfet de la région Centre - Val de Loire n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

6. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence d'atteinte à la sécurité des aéronefs militaires et de leurs occupants pour annuler l'arrêté du préfet de la région Centre - Val de Loire du 19 avril 2016.

7. Il résulte en outre de l'instruction, à supposer que le motif tiré de l'atteinte aux sites et monuments soit illégal, que le préfet aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré de l'atteinte à la sécurité des aéronefs militaires et de leurs occupants.

8. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SNC Ferme éolienne de Montlevicq devant le tribunal administratif de Limoges.

9. En premier lieu, l'arrêté en litige énonce les motifs sur lesquels il se fonde, à savoir la circonstance que le projet est de nature à porter atteinte, d'une part, à la sécurité des aéronefs militaires et de leurs occupants et, d'autre part, aux monuments et sites situés à proximité. Ces motifs sont exposés avec suffisamment de précision pour permettre à la pétitionnaire de les contester utilement, ce qu'elle a d'ailleurs fait devant le tribunal administratif de Limoges. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige est insuffisamment motivé doit être écarté.

10. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la pétitionnaire, l'arrêté en litige n'est pas fondé sur le statut juridique du SETBA de Combrailles mais sur l'atteinte portée par le projet à la sécurité des aéronefs militaires et de leurs occupants. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit, par suite, être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du préfet de la région Centre - Val de Loire du 19 avril 2016.

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de M. et Mme A... G..., M. B... F..., M. et Mme A... C..., M. et Mme E... et l'association Eaux et terres du Berry est admise.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 8 février 2018 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par la SNC Ferme éolienne de Montlevicq devant le tribunal administratif de Limoges est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et solidaire, à la SNC Ferme éolienne de Montlevicq, à M. et Mme A... G..., à M. B... F..., à M. et Mme A... C..., à M. et Mme I... E... et à l'association Eaux et terres du Berry.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

Mme J... D..., présidente,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

M. Romain Roussel, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 18 février 2020.

Le rapporteur,

Romain Roussel

La présidente,

Elisabeth D...La greffière,

Virginie Marty

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX01447


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01447
Date de la décision : 18/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Energie.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Romain ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : MONAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-18;18bx01447 ?
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