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06/02/2020 | FRANCE | N°19BX02623

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 06 février 2020, 19BX02623


Vu la procédure suivante :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers l'annulation des décisions en date du 9 mai 2019 par lesquelles le préfet de la Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de circulation sur le territoire français de deux ans.

Par un jugement n° 1901149 en date du 14 juin 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 juillet 2019, M. A..., r

eprésenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers l'annulation des décisions en date du 9 mai 2019 par lesquelles le préfet de la Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de circulation sur le territoire français de deux ans.

Par un jugement n° 1901149 en date du 14 juin 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 juillet 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 14 juin 2019 ;

2°) d'annuler la décision portant obligation de quitter le territoire sans délai de départ volontaire et, à titre subsidiaire, d'annuler la seule décision fixant le pays de destination ;

3°) en tout état de cause, d'annuler la décision portant interdiction de circulation sur le territoire français pendant une durée de deux ans ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'arrêté est signé par une autorité incompétente ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- la décision est entachée d'erreur de fait et d'erreur de droit ; il n'est pas une charge pour le système d'assistance sociale français ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle et méconnait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne le pays de renvoi :

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux années :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 octobre 2019, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. E... D..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant roumain né le 2 avril 1996, relève appel du jugement en date du 14 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 mai 2019 du préfet de la Vienne portant obligation de quitter le territoire français sans délai en fixant le pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

2. M. A... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions qu'il conteste, contenues dans l'arrêté préfectoral du 9 mai 2019. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ... ". Aux termes de l'article L. 511-3-1 du même code : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : 1° Qu'il ne justifie plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par les articles L. 121-1, L. 121-3 ou L. 121-4-1 ... / 3° Ou que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine. / L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à trente jours à compter de sa notification. A titre exceptionnel, l'autorité administrative peut accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel il est renvoyé en cas d'exécution d'office. / Les articles L. 512-1 à L. 512-4 sont applicables aux mesures prises en application du présent article ".

4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté indique que M. A... soutient être entré en France en 2012, séjourne en France depuis plus de trois mois avec son épouse, ressortissante roumaine ne justifiant pas d'un droit au séjour, et leurs trois enfants et soutient suivre une formation en chaudronnerie. Il retient également que l'intéressé, qui a déjà fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai le 26 janvier 2016, représente une menace pour l'ordre public compte tenu des faits d'exhibition sexuelle et de vols pour lesquels il a été plusieurs fois interpellés et condamnés. La décision portant obligation de quitter le territoire est ainsi suffisamment motivée.

5. M. A... établit avoir suivi une formation et avoir travaillé pendant l'année 2018 et justifie percevoir des allocations chômage d'environ 600 euros par mois mais il ne fournit aucun élément de nature à démontrer qu'il percevrait une rémunération complémentaire au titre de la formation en chaudronnerie qu'il soutient suivre. Ainsi il ne justifie pas de ressources suffisantes pour un couple marié avec trois enfants. Le moyen tiré de l'erreur de fait quant à l'existence de ressources suffisantes et celui tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

6. Il ressort des pièces du dossier que le requérant est marié à une ressortissante roumaine ne justifiant par elle-même d'aucun droit au séjour en France, est père de trois enfants en bas âge et n'apporte aucun élément permettant de justifier que l'un des membres de sa famille résiderait en France. Il n'est pas dépourvu de toute attache en Roumanie, pays où il a vécu la majorité de sa vie et où il a indiqué lors de son interpellation rentrer tous les ans pendant les vacances scolaires. Dans ces conditions, la décision en litige ne méconnait pas les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

Sur le pays de destination :

7. L'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". M. A..., qui n'a procédé à aucune demande d'asile et a indiqué lors de son audition par les services de police rentrer une fois par an en Roumanie pendant les vacances scolaires, n'établit pas les risques de discrimination et de persécution qu'il prétend encourir dans son pays d'origine en se bornant à se référer en termes généraux à la situation des Roms dans son pays d'origine. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux années :

8. Aux termes de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français prononcée en application des 2° et 3° de l'article L. 511-3-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans... ".

9. Il ressort des termes de l'arrêté contesté que le préfet de la Vienne a pris en compte la durée de la présence en France de M. A..., du fait que ni lui ni son épouse ne justifient d'un droit au séjour en France, que leurs enfants peuvent les suivre dans leur pays d'origine, du fait qu'il a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 26 janvier 2016 et qu'il constitue une menace pour l'ordre public. La décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans est donc suffisamment motivée.

10. Il résulte de ce qui précède et notamment du point 6 du présent arrêt que M. A... est marié avec une ressortissante roumaine ne justifiant d'aucun droit au séjour. Compte tenu du fait que M. A... n'a pas respecté une précédente mesure d'éloignement, a été interpellé plusieurs fois, a été condamné pour des faits de vols et a été interpellé, en état de récidive, pour des faits d'exhibition sexuelle en mai 2019, la décision lui faisant interdiction de circulation sur le territoire français pour une durée de deux années ne méconnait pas les dispositions précitées de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

12. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions susvisées ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE ;

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. E... D..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 février 2020.

Le rapporteur,

Stéphane D... Le président,

Philippe PouzouletLe greffier,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX02623


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02623
Date de la décision : 06/02/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : MENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-06;19bx02623 ?
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