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06/02/2020 | FRANCE | N°17BX02880

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 06 février 2020, 17BX02880


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme de Château Giscours a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 2 avril 2015 par lequel le préfet de la Gironde a autorisé l'exploitation de 257,88 ha dont 68,26 ha de vignes, par le groupement foncier agricole (GFA) du Château Giscours.

Par un jugement n° 1502557 en date du 23 juin 2017 le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 août 2017, le GFA du Châte

au Giscours et M. B... F..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme de Château Giscours a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 2 avril 2015 par lequel le préfet de la Gironde a autorisé l'exploitation de 257,88 ha dont 68,26 ha de vignes, par le groupement foncier agricole (GFA) du Château Giscours.

Par un jugement n° 1502557 en date du 23 juin 2017 le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 août 2017, le GFA du Château Giscours et M. B... F..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 23 juin 2017 ;

2°) de rejeter la demande introductive d'instance de la SA de Château Giscours ;

3°) de mettre la somme de 6 000 euros à la charge de la SA de Château Giscours au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Ils soutiennent que :

- le moyen d'annulation retenu par les premiers juges est infondé ; la consultation de la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDOA) n'était pas obligatoire dès lors que les biens supports de sa demande d'exploitation étaient libres de toute occupation ; ce vice de procédure est sans incidence sur le sens de la décision et n'a privé la SA de Château Giscours d'aucune garantie ;

- les autre moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 octobre 2017, la société anonyme (SA) de Château Giscours, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête, en tant que de besoin à l'annulation de l'arrêté du 2 avril 2015 et demande que la somme de 8 000 euros soit mise à la charge solidaire du GFA du Château de Giscours et de M. F... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- le moyen d'annulation a été retenu à bon droit par les premiers juges ;

- l'arrêté a été signé par une autorité incompétente ;

- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure dès lors que l'obligation de lui notifier la date d'examen de la demande d'autorisation par la CDOA ne lui a pas été communiquée ainsi que le prévoient les dispositions de l'article R. 331-5 du code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit en ce que le préfet s'est contenté de relever l'absence de demande concurrente pour justifier la délivrance de l'autorisation sans prendre en compte la situation du preneur sur place ;

- le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'il n'y avait pas de demande concurrente alors que le preneur sur place s'opposait à la reprise des terres ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation compte tenu des conséquences de sa décision sur le devenir de son activité et sur son caractère prioritaire par rapport à une demande d'autorisation émanant d'un organisme qui ne peut, du fait de ses statuts, exploiter directement les terres.

Par un mémoire enregistré le 4 octobre 2019, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 23 juin 2017 et, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de rejeter la demande introductive d'instance de la SA de Château Giscours en toutes ses conclusions.

Il soutient que :

- le moyen d'annulation retenu par les premiers juges est infondé ; la consultation de la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDOA) n'était pas obligatoire dès lors que les biens supports de la demande d'exploitation étaient libres de toute occupation ; ce vice de procédure est sans incidence sur le sens de la décision et n'a privé la SA de Château Giscours d'aucune garantie ;

- les autre moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... D...,

- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la SA de Château Giscours.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 2 avril 2015, le préfet de la Gironde a autorisé le GFA du Château Giscours à exploiter 257,88 ha dont 68,26 ha de vignes AOC à Arsac et Labarde. Le GFA du Château de Giscours et M. F... interjettent appel du jugement en date du 23 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Le moyen selon lequel les premiers juges se seraient mépris sur la portée du jugement du tribunal partiaire des baux ruraux de Bordeaux du 12 mai 2014 a trait au bien-fondé du jugement attaqué et n'est pas de nature à mettre en cause sa régularité.

Sur la légalité de l'arrêté du 2 avril 2015 :

3. Aux termes de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorité administrative assure la publicité des demandes d'autorisation dont elle est saisie, selon des modalités définies par décret. / Elle vérifie, compte tenu des motifs de refus prévus à l'article L. 331-3-1, si les conditions de l'opération permettent de délivrer l'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 et se prononce sur la demande d'autorisation par une décision motivée. ". Aux termes de l'article R. 331-5 du même code, dans sa version applicable à l'espèce : " I. - Les demandes d'autorisation d'exploiter sont soumises à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture instituée aux articles R. 313-1 et suivants. Lorsque des candidatures concurrentes ont été enregistrées sur tout ou partie des biens qui font l'objet de la demande, l'ensemble des dossiers portant sur ces biens est soumis à la même séance de la commission. / Les candidats, les propriétaires et les preneurs en place sont informés par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé de la date d'examen des dossiers les concernant par la commission. / II. - Toutefois, il n'est pas procédé à cette consultation si les biens sur lesquels porte la demande n'ont pas fait l'objet de candidatures concurrentes dans les trois mois suivant l'enregistrement du dossier de demande complet et si la reprise envisagée remplit l'une des conditions suivantes : / a) Les biens sont libres de location ; / b) Les biens font l'objet d'une location et l'exploitant en place consent à la reprise. / Cependant, même en l'absence de demandes concurrentes, le préfet peut décider de soumettre le dossier à la commission départementale d'orientation de l'agriculture, notamment s'il estime que le projet méconnaît les orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles et les critères posés aux 2° à 9° de l'article L. 331-3. / III. - La commission départementale d'orientation de l'agriculture est informée périodiquement de toutes les demandes d'autorisation d'exploiter qui ne lui ont pas été soumises et des décisions auxquelles ces demandes ont donné lieu. ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'annulation de plusieurs congés donnés à la SA de Château Giscours, le GFA du Château Giscours a donné à cette société un nouveau congé le 27 juin 2013 en vue d'une reprise d'exploitation à l'échéance du bail le 31 décembre 2014. Saisi par l'exploitant en place, le tribunal paritaire des baux ruraux de Bordeaux a constaté, dans un jugement du 12 mai 2014, que les statuts du GFA du Château Giscours l'empêchaient d'exploiter directement les terres dont il a la propriété, que cette clause ne pouvait être modifiée qu'à l'unanimité de ses membres et que l'un des membres du GFA a déclaré s'opposer à cette modification puis a sursis à statuer dès lors que les conditions de fonds de la reprise pouvaient être régularisées jusqu'à la date d'échéance prévue au 31 décembre 2014. Par un jugement du 21 septembre 2015, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 17 novembre 2016, le tribunal paritaire des baux ruraux de Bordeaux a déclaré nul le congé pour reprise délivré le 27 juin 2013 et a dit que le bail conclu les 13 et 20 mars 1991 entre le GFA du Château Giscours et la SA de Château Giscours était renouvelé.

5. Le GFA du Château Giscours a demandé l'autorisation d'exploiter les terres données à bail par un courrier en date du 30 décembre 2014. La SA de Château Giscours a été informée de cette demande et a renvoyé au préfet de la Gironde la fiche n° 4 intitulée " Exploitant antérieur " en mentionnant qu'elle s'opposait au congé qui lui avait été notifié, que l'objet social du GFA ne lui permettait pas de reprendre l'exploitation des terres et qu'elle souhaitait être entendue par la commission départementale d'orientation de l'agriculture.

6. Dans ces circonstances, le préfet de la Gironde ne pouvait pas regarder les biens sur lesquels portaient la demande d'autorisation d'exploiter comme libres d'occupation ni retenir que l'exploitant en place consentait à la reprise. Il ne pouvait dès lors délivrer l'autorisation d'exploiter du 2 avril 2015 sans consulter au préalable la commission départementale d'orientation de l'agriculture.

7. Dès lors que le préfet de la Gironde devait examiner les conditions dans lesquelles une reprise de l'exploitation par le GFA du Château Giscours étaient possible compte tenu du contentieux opposant le GFA à l'exploitant en place et du fait que les statuts du GFA l'empêchaient d'exploiter directement les terrains en cause, le préfet n'était pas en situation de compétence liée pour délivrer l'autorisation sollicitée.

8. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. Eu égard à la garantie que constitue l'avis de la commission départementale d'orientation agricole devant laquelle la requérante pouvait présenter des observations, et à l'influence que cet avis pouvait avoir sur la décision du préfet, l'absence de cette consultation entraîne l'irrégularité de la procédure à l'issue de laquelle l'autorisation d'exploiter a été délivrée.

9. Il résulte de ce qui précède que le GFA du Château de Giscours et M. F... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 2 avril 2015 par lequel le préfet de la Gironde l'a autorisé à exploiter 257,88 ha dont 68,26 ha de vignes.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

10. La SA de Château Giscours n'étant pas la partie perdante, les conclusions des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetée. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre la somme de 1 500 euros à la charge solidaire du GFA du Château de Giscours et de M. F... au titre des frais exposés par la SA de Château Giscours et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête du GFA du Château Giscours et de M. F... est rejetée.

Article 2 : Le GFA du Château Giscours et de M. F... verseront la somme globale de 1 500 euros à la SA de Château Giscours.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Groupement foncier agricole du Château Giscours, à M. B... F..., à la SA de Château Giscours et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie en sera délivrée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. E... D..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 février 2020.

Le rapporteur,

Stéphane D... Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX02880


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX02880
Date de la décision : 06/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03-01-06 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures. Cumuls d'exploitations. Contentieux.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : LEXYMORE CABINET D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-06;17bx02880 ?
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