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04/02/2020 | FRANCE | N°18BX04342

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 04 février 2020, 18BX04342


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... et Mme G... I... ont demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2017 par lequel le préfet de la Guadeloupe a autorisé Mme K... à défricher la parcelle cadastrée section BP n° 1248.

Par un jugement n° 1701206 du 18 octobre 2018, le tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 décembre 2018 et le 26 mars 2019, M. D... E... et Mme G... I..., représentés par Me F...

, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1701206 du tribunal administratif de la Guad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... et Mme G... I... ont demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2017 par lequel le préfet de la Guadeloupe a autorisé Mme K... à défricher la parcelle cadastrée section BP n° 1248.

Par un jugement n° 1701206 du 18 octobre 2018, le tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 décembre 2018 et le 26 mars 2019, M. D... E... et Mme G... I..., représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1701206 du tribunal administratif de la Guadeloupe ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 5 octobre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande d'autorisation de défrichement aurait dû être accompagnée d'une étude d'impact conformément aux dispositions du 8° de l'article R. 341-1 du code forestier ; le tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, soumet ainsi à une étude d'impact au cas par cas les défrichements portant sur une superficie de plus de 0,5 hectares ; pour l'appréciation de ce seuil, il convient de tenir compte non seulement de la superficie de la parcelle n° 1248 mais aussi de celle de l'ensemble forestier dans lequel elle s'inscrit ;

- l'autorisation en litige méconnaît l'article L. 341-5 du code forestier dès lors que l'équilibre biologique du secteur commandait le rejet de la demande présentée par Mme K... ; la parcelle n° 1248 abrite un boisement dense faisant partie d'un ensemble forestier formant une continuité écologique sensible et une coupure d'urbanisation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 février 2019, Mme K..., représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des requérants la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance, que :

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir à l'encontre de l'autorisation en litige.

Elle soutient, au fond, que :

- les moyens soulevés doivent être écartés comme infondés.

Par un mémoire, enregistré le 4 novembre 2019, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Par ordonnance du 19 août 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 5 novembre 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code forestier ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. J... B...,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant M. E... et Mme I....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 5 octobre 2017, le préfet de la Guadeloupe a autorisé Mme K..., sur le fondement de l'article L. 341-3 du code forestier, à défricher la parcelle cadastrée section BP n° 1248 située au lieu-dit " Bellevue-Nord " sur le territoire de la commune du Gosier. M. E... et Mme I... ont demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2017. Ils relèvent appel du jugement rendu le 18 octobre 2018 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 341-1 du code forestier : " La demande d'autorisation de défrichement est adressée (...) au préfet du département où sont situés les terrains à défricher. (...) La demande est accompagnée d'un dossier comprenant les informations et documents suivants : (...) 8° S'il y a lieu, l'étude d'impact définie à l'article R. 122-5 du code de l'environnement lorsqu'elle est requise en application à l'article R. 122-2 du même code (...) ". Aux termes de l'article R. 122-2 du code de l'environnement : " I. - Les projets relevant d'une ou plusieurs rubriques énumérées dans le tableau annexé au présent article font l'objet d'une évaluation environnementale, de façon systématique ou après un examen au cas par cas, en application du II de l'article L. 122-1, en fonction des critères et des seuils précisés dans ce tableau. (...) ". Dans le tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, la catégorie de projets 47 " Premiers boisements et déboisements en vue de la reconversion de sols. " inclut dans la rubrique " projets soumis à examen au cas par cas " les " a) Défrichements soumis à autorisation au titre de l'article L. 341-3 du code forestier en vue de la reconversion des sols, portant sur une superficie totale, même fragmentée, de plus de 0,5 hectare. ".

3. L'autorisation de défrichement contestée porte sur 955 m2 de superficie correspondant à la parcelle n° 1248, ce qui est inférieur au seuil de 0,5 ha au-delà duquel l'opération doit faire l'objet d'un examen au cas par cas pour déterminer si elle doit être accompagnée d'une étude d'impact. Les appelants font néanmoins valoir que la parcelle n° 1248 fait partie d'un ensemble forestier plus vaste devant être défriché sur plus 0,5 ha pour la réalisation d'un lotissement. Toutefois, Mme K... a pour projet de construire sur la parcelle n° 1248 dont elle est propriétaire et l'autorisation en litige a été demandée et délivrée à ce seul titre. Par ailleurs, à supposer qu'il faille ajouter à la superficie dont le défrichement a été autorisé pour la seule parcelle n° 1248 la surface concernée par une autre autorisation délivrée le 24 octobre 2017 à Mme H... concernant la parcelle attenante n° 1247, il ressort des pièces du dossier que la surface cumulée des deux parcelles à défricher resterait inférieure au seuil de 0,5 ha prévu par les dispositions précitées du code de l'environnement. Enfin, il n'existait à la date de la décision attaquée aucune autre autorisation de défrichement dont il aurait convenu, comme le soutiennent les requérants, de tenir compte pour apprécier le dépassement éventuel du seuil de 0,5 ha. Par suite, M. E... et Mme I... ne sont pas fondés à soutenir que la demande d'autorisation aurait dû faire l'objet d'un examen " au cas par cas " en vertu du tableau annexé à l'article R. 122-2 précité du code de l'environnement.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 341-5 du code forestier : " L'autorisation de défrichement peut être refusée lorsque la conservation des bois et forêts ou des massifs qu'ils complètent, ou le maintien de la destination forestière des sols, est reconnu nécessaire à une ou plusieurs des fonctions suivantes : (...) 3° A l'existence des sources, cours d'eau et zones humides, et plus généralement à la qualité des eaux (...) 8° A l'équilibre biologique d'une région ou d'un territoire présentant un intérêt remarquable et motivé du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l'écosystème ou au bien-être de la population (...) ".

5. Pour soutenir que l'autorisation en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées, les appelants se prévalent tout d'abord d'une étude réalisée par le cabinet Biotope dont il ressort que des parcelles proches, cadastrées section BP n° 802,943-945, abritent des espèces animales protégées ainsi que l'Acomat Franc, arbre à très forte valeur patrimoniale. Toutefois, la superficie à défricher sur la parcelle n° 1248 ne concerne qu'une petite partie de l'ensemble boisé considéré et il ne ressort pas des pièces du dossier que le défrichement autorisé porterait atteinte à une " continuité écologique " comme l'allèguent les appelants. La seule circonstance que le boisement considéré est en déclivité et surplombe une clairière humide abritant une mare ne suffit pas à entacher d'erreur manifeste l'autorisation délivrée dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le défrichement porterait une atteinte particulière à ces espaces. Par ailleurs, si la direction de l'équipement, d'aménagement et du logement a estimé dans un rapport que la zone nord de la Saline, située non loin de la parcelle n° 1248 et classée zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique mérite des " protections supplémentaires ", sans que ces dernières y soient d'ailleurs précisées, il ne ressort pas des pièces du dossier que le défrichement autorisé, qui porte sur 955 m2 de surface, serait manifestement susceptible de porter atteinte aux intérêts protégés par l'article L. 341-5 précité du code forestier. Par suite, le moyen soulevé doit être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... et Mme I... ne sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté leur demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu de faire application de ces dispositions en mettant à la charge de M. E... et Mme I... la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme K... et non compris dans les dépens. En revanche, les conclusions présentées par les requérants sur ce même fondement doivent être rejetées dès lors qu'ils sont la partie perdante à l'instance d'appel.

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 18BX04342 de M. E... et Mme I... est rejetée.

Article 2 : M. E... et Mme I... verseront à Mme K... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., à Mme G... I..., à Mme K... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Copie pour information en sera délivrée au ministre des outre-mer et au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. J... B..., président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 février 2020.

Le rapporteur,

Frédéric B...Le président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Virginie Marty

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX04342


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04342
Date de la décision : 04/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-042-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Autorisations relatives aux espaces boisés. Autorisation de défrichement.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : RIVIERE AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-04;18bx04342 ?
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