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04/02/2020 | FRANCE | N°18BX00783

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 04 février 2020, 18BX00783


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, à titre principal, d'annuler les décisions du 11 septembre 2014 et du 31 août 2015 par lesquelles le président de la chambre d'agriculture de la Charente a refusé de la réintégrer, d'enjoindre au président de la chambre d'agriculture de la Charente de la réintégrer et de reconstituer sa carrière à compter du 1er octobre 2014 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, subsidiairement de réexaminer s

a situation, de condamner la chambre d'agriculture de la Charente à lui verser ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, à titre principal, d'annuler les décisions du 11 septembre 2014 et du 31 août 2015 par lesquelles le président de la chambre d'agriculture de la Charente a refusé de la réintégrer, d'enjoindre au président de la chambre d'agriculture de la Charente de la réintégrer et de reconstituer sa carrière à compter du 1er octobre 2014 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, subsidiairement de réexaminer sa situation, de condamner la chambre d'agriculture de la Charente à lui verser la somme de 50 515,36 euros, ainsi que les intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'illégalité des décisions du 11 septembre 2014 et du 31 août 2015. A titre subsidiaire, elle a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 27 octobre 2015 par laquelle le président de la chambre d'agriculture de la Charente a refusé de lui verser l'allocation de retour à l'emploi, d'enjoindre au président de la chambre d'agriculture de la Charente de lui verser l'allocation de retour à l'emploi à compter du 1er octobre 2014 et à titre subsidiaire, de condamner la chambre d'agriculture de la Charente à lui verser la somme de 10 000 euros, ainsi que les intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis en raison de l'illégalité de la décision du 27 octobre 2015.

Par un jugement n° 1502904 du 20 décembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision du président de la chambre d'agriculture de la Charente du 27 octobre 2015, a enjoint au président de la chambre d'agriculture de la Charente de verser à Mme D... l'allocation de retour à l'emploi à compter du 1er octobre 2014 dans un délai d'un mois à compter de la notification de son jugement, a condamné la chambre d'agriculture de la Charente à verser à Mme D... une indemnité de 1 000 euros, ainsi que la somme de 1 200 euros au titre de ses frais d'instance et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 22 février 2018 sous le n° 18BX00777, la chambre d'agriculture de la Charente, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a annulé la décision du président de la chambre d'agriculture de la Charente du 27 octobre 2015, a enjoint au président de la chambre d'agriculture de la Charente de verser à Mme D... l'allocation de retour à l'emploi à compter du 1er octobre 2014 dans un délai d'un mois, a condamné la chambre d'agriculture de la Charente à verser à Mme D... une indemnité de 1 000 euros et la somme de 1 200 euros au titre de ses frais d'instance ;

2°) de rejeter la demande de première instance de Mme D....

Elle soutient que :

- sa requête est recevable ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que Mme D... remplissait les conditions pour obtenir l'allocation de retour à l'emploi au 1er octobre 2014, car elle ne pouvait être regardée comme ayant été involontairement privée d'emploi au sens de l'article L. 5421-1 du code du travail ;

- Mme D... ne pouvait non plus être considérée comme un salarié non statutaire des chambres d'agricultures, de sorte que l'article L. 5421-1 du code du travail ne lui est pas opposable.

Par un mémoire enregistré le 20 avril 2019, Mme D..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de la chambre d'agriculture de la Charente ;

2°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

II. Par une requête enregistrée le 23 février 2018 sous le n°18BX00783, et un mémoire en réplique enregistré le 31 juillet 2018, la chambre d'agriculture de la Charente, représentée par Me B..., demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 20 décembre 2017.

Elle soutient que :

- elle est fondée à demander le sursis à l'exécution de ce jugement sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, dès lors que ses moyens présentés dans sa requête d'appel présentent un caractère sérieux ;

- elle est fondée à demander le sursis à l'exécution de ce jugement sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative, dès lors que l'exécution de ce jugement l'exposerait à la perte de la somme versée à Mme D... au titre de l'allocation de retour à l'emploi.

Par un mémoire enregistré le 20 avril 2018 et un mémoire complémentaire enregistré le 20 août 2018, Mme D... représentée par Me E..., demande dans ses dernières écritures à la cour :

1°) de rejeter la requête de la chambre d'agriculture de la Charente ;

2°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... A...,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... recrutée par la chambre d'agriculture de la Charente en avril 1997 a bénéficié, sur sa demande, d'un congé de mise en disponibilité pour motifs exceptionnels d'une durée d'un an à compter du 1er octobre 2011 et renouvelé jusqu'au 30 septembre 2014. Par la suite, Mme D... a, à nouveau, demandé le renouvellement de sa mise en disponibilité mais le président de la chambre d'agriculture de la Charente a rejeté sa demande par une décision du 17 avril 2014. Mme D... a ensuite demandé, par courrier du 15 juillet 2014, sa réintégration à compter du 1er octobre 2014. Le président de la chambre d'agriculture de la Charente a rejeté sa demande par décision du 11 septembre 2014. Mme D... a enfin demandé, par courrier du 12 octobre 2015, à bénéficier de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Le président de la chambre d'agriculture de la Charente a rejeté sa demande par décision du 27 octobre 2015. Mme D... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, à titre principal, d'annuler les décisions du 11 septembre 2014 et du 31 août 2015 par lesquelles le président de la chambre d'agriculture de la Charente a refusé de la réintégrer, et à titre subsidiaire, d'annuler la décision du 27 octobre 2015 refusant de lui attribuer le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Elle avait également présenté des conclusions à fins d'injonction et des conclusions indemnitaires. Par un jugement du 20 décembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté les conclusions principales de Mme D..., mais a fait droit à ses conclusions subsidiaires en annulant la décision du 27 octobre 2015. Il a également enjoint à la chambre d'agriculture de la Charente de verser à Mme D... l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er octobre 2014 dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'a condamnée à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de son préjudice moral et de ses troubles de toutes natures subis dans ses conditions d'existence du fait de l'illégalité dont la décision du 27 octobre 2015 était entachée, ainsi que la somme de 1 200 euros au titre de ses frais d'instance. La chambre d'agriculture de la Charente relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision du 27 octobre 2015, a accordé à Mme D... l'allocation de retour à l'emploi et a fait partiellement droit à ses conclusions indemnitaires et à celles présentées au titre de ses frais d'instance.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 21 du statut du personnel administratif des chambres d'agriculture : " Mise en disponibilité. Des congés de mise en disponibilité sans traitement peuvent être accordés à l'agent par le président de l'organisme employeur pour motifs exceptionnels. La durée accordée est fonction du motif invoqué, sans pouvoir excéder un an, éventuellement renouvelable. La réintégration est effectuée dans des fonctions équivalentes et à l'indice correspond à celui que l'agent avait avant sa mise à disponibilité, en fonction des postes disponibles au cas où la durée du congé excéderait un an ". Selon l'article L.5422-1 du code du travail dans sa version alors applicable : " Ont droit à l'allocation d'assurance les travailleurs involontairement privés d'emploi ou dont le contrat de travail a été rompu conventionnellement selon les modalités prévues aux articles L. 1237-11 et suivants, aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure ". Aux termes de l'article L. 5421-3 du même code dans sa version alors applicable : " La condition de recherche d'emploi requise pour bénéficier d'un revenu de remplacement est satisfaite dès lors que les intéressés sont inscrits comme demandeurs d'emploi (...) ". Enfin l'article L. 5424-1 de ce code dans sa version alors en vigueur dispose que : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : (...) 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires ; (...) 4° Les salariés non statutaires des chambres de métiers, des services à caractère industriel et commercial gérés par les chambres de commerce et d'industrie territoriales, des chambres d'agriculture, ainsi que les salariés des établissements et services d'utilité agricole de ces chambres (...) ".

3. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées au point 2 qu'un agent soumis au statut du personnel administratif des chambres de l'agriculture qui a sollicité sa réintégration à l'issue d'une période de mise en disponibilité pour convenances personnelles et dont la demande n'a pu être honorée faute de poste vacant à la date souhaitée, doit en principe être regardé comme ayant été non seulement involontairement privé d'emploi mais aussi à la recherche d'un emploi au sens de l'article L. 5422-1 du code du travail, au titre de la période comprise entre la date à laquelle sa mise en disponibilité a expiré et la date de sa réintégration dans un délai raisonnable. En ce cas, il peut prétendre au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... a sollicité, par courrier du 15 juillet 2014, sa réintégration à compter du 1er octobre 2014 à la chambre d'agriculture de la Charente, à l'issue de la période de disponibilité pour convenances personnelles. Toutefois, à compter du 1er octobre 2014, elle a été maintenue d'office en disponibilité dans l'attente de sa réintégration et a ensuite présenté sa candidature, qui n'a pas été retenue, aux postes de chef de service " Environnement Energie " et "Communication, Diversification et Territoire " qui lui ont été adressés par la chambre de l'agriculture le 2 avril 2015 et le 15 avril 2015, ainsi qu'au poste de conseiller à pourvoir dans le service " productions animales au domaine bovin viande " que lui a adressé la chambre d'agriculture de la Charente le 17 novembre 2015 et enfin au poste de conseiller à pourvoir dans la filière " Elevage et Agronomie " de ce même service qui lui a été adressé le 19 octobre 2016. Par suite, alors même que sa réintégration n'était pas de droit à l'issue d'une disponibilité pour convenances personnelles, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que Mme D... soit regardée comme involontairement privée d'emploi et à la recherche d'un emploi par le seul fait qu'elle a été maintenue d'office en disponibilité pour des motifs indépendants de sa volonté. Au surplus, Mme D... justifie de son inscription sur la liste des demandeurs d'emploi à compter du 1er octobre 2014. Par suite, la chambre d'agriculture de la Charente n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a considéré que Mme D... remplissait les conditions fixées par les dispositions de l'article L. 5422-1 du code du travail, qui lui est rendu applicable en vertu de l'article L. 5424-1 du même code, et qu'elle pouvait bénéficier de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er octobre 2014.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la chambre d'agriculture de la Charente n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision du président de la chambre d'agriculture de la Charente du 27 octobre 2015, a enjoint au président de la chambre d'agriculture de la Charente de verser à Mme D... l'allocation de retour à l'emploi à compter du 1er octobre 2014 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, l'a condamnée à verser à Mme D... une indemnité de 1 000 euros et la somme de 1 200 euros au titre de ses frais d'instance.

Sur les frais d'instance :

6. Il y a lieu de mettre à la charge de la chambre d'agriculture de la Charente la somme de 1 500 euros à verser à Mme D... au titre de ses frais d'instance.

Sur la requête n°18BX00783 :

7. Compte tenu de ce qui précède, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la chambre d'agriculture de la Charente tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1502904 du 20 décembre 2017 du tribunal administratif de Poitiers.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la chambre d'agriculture de la Charente est rejetée.

Article 2 : La chambre d'agriculture de la Charente versera la somme de 1 500 euros à Mme D... en l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n°18BX00783.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... D... et à la chambre d'agriculture de la Charente.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

Mme G... H..., présidente,

Mme C... A..., premier-conseiller

Mme Agnès Bourjol, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 février 2020.

Le rapporteur,

Déborah A...La présidente,

Fabienne H...Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX00777, 18BX00783


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX00783
Date de la décision : 04/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Disponibilité.

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Disponibilité - Réintégration.

Travail et emploi - Politiques de l'emploi - Indemnisation des travailleurs privés d'emploi.


Composition du Tribunal
Président : Mme ZUCCARELLO
Rapporteur ?: Mme Déborah DE PAZ
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CABINET VALOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-04;18bx00783 ?
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