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19/12/2019 | FRANCE | N°18BX00290

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 19 décembre 2019, 18BX00290


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, pour excès de pouvoir, le compte-rendu de son entretien professionnel du 16 octobre 2015 et d'enjoindre à son supérieur hiérarchique de lui reconnaître la possibilité de piloter un lycée ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1600568 du 30 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a

rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, pour excès de pouvoir, le compte-rendu de son entretien professionnel du 16 octobre 2015 et d'enjoindre à son supérieur hiérarchique de lui reconnaître la possibilité de piloter un lycée ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1600568 du 30 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 janvier 2018 et des mémoires enregistrés le 9 février 2018 et le 3 mai 2019, M. D..., représenté par Me F..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux du 30 novembre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 10 décembre 2015 par laquelle le recteur de l'académie de Bordeaux a refusé de faire droit à sa demande de modification de son compte rendu d'entretien professionnel du 16 octobre 2015 ;

3°) d'enjoindre à son supérieur hiérarchique et à la rectrice de la région académique de Nouvelle-Aquitaine, rectrice de l'académie de Bordeaux, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de reconstituer sa carrière et de procéder à un nouveau calcul de sa pension de retraire en prenant en considération un passage au 10e échelon (indice 825) ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- son évaluation ne pouvait intervenir qu'à l'échéance de sa mission, qui courait du 1er septembre 2013 au 31 août 2016 ;

- l'appréciation générale portée sur sa manière de servir et sa valeur professionnelle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la qualité de son évaluation par rapport aux critères définis dans la lettre de mission du 16 décembre 2013 ;

- les mentions portées sur son compte-rendu d'entretien professionnel ont préjudicié à l'évolution de sa carrière.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- en raison de la mutation du requérant à compter de la rentrée scolaire 2013-2014, soit au cours des deux premières années scolaires de la période de référence de sa lettre de mission du 16 mai 2013, la nouvelle lettre de mission établie le 16 décembre 2013 devait seulement porter sur la durée restant à courir de cette période de référence, soit jusqu'à l'année scolaire 2014-2015, et comporte donc une erreur matérielle ; le compte-rendu d'évaluation n'a donc pas été réalisé de manière prématurée ;

- il s'en rapporte pour le surplus aux écritures produites en première instance par le recteur de la région académique Nouvelle-Aquitaine.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2001-1174 du 11 décembre 2001 ;

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;

- l'arrêté du 7 août 2012 relatif à l'entretien professionnel des personnels de direction d'établissement d'enseignement ou de formation relevant du ministre de l'éducation nationale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... B...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., qui appartient au corps des personnels de direction d'établissement d'enseignement, a demandé au recteur de l'académie de Bordeaux, par un courrier du 4 décembre 2015, de procéder à la révision du compte-rendu de son entretien professionnel du 16 octobre 2015. Par un courrier du 10 décembre 2015, après examen de la demande de révision de M. D... par la commission administrative paritaire lors de sa séance du 9 décembre 2015, le recteur de l'académie de Bordeaux a informé ce dernier qu'il n'entendait pas apporter de modification à ce compte-rendu. M. D... relève appel du jugement du 30 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux, après avoir analysé sa requête comme tendant à l'annulation de la décision de rejet opposée par le recteur de l'académie de Bordeaux le 10 décembre 2015 à sa demande de révision de son compte rendu d'entretien professionnel, a rejeté sa demande.

2. Les conclusions à fin d'annulation de M. D... doivent être regardées comme dirigées contre l'appréciation portée à son égard dans le compte-rendu de son évaluation professionnelle effectuée le 16 octobre 2015 et contre la décision du 10 décembre 2015 par laquelle le recteur de l'académie de Bordeaux a rejeté sa demande de révision de ce compte-rendu.

3. Aux termes de l'article 21 du décret du 11 décembre 2001 portant statut particulier du corps des personnels de direction d'établissement d'enseignement ou de formation relevant du ministre de l'éducation nationale : " Les personnels de direction font l'objet d'un entretien professionnel qui porte notamment sur la réalisation des objectifs qui leur ont été fixés par lettre de mission et sur leur manière de servir. Cet entretien est conduit à l'issue de la période de référence de trois années scolaires couverte par cette même lettre de mission (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'éducation nationale fixe le contenu du compte rendu de l'entretien professionnel ainsi que les modalités d'établissement et de modification de la lettre de mission et d'organisation de l'entretien professionnel (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 4 de l'arrêté du 7 août 2012 : " La lettre de mission (...) est établie pour une période de référence couvrant trois années scolaires, à l'issue d'un entretien avec l'agent, sur la base du diagnostic de l'établissement que ce dernier a préalablement élaboré. Elle fixe les objectifs qui lui sont assignés et les responsabilités qui lui sont confiées. Elle est signée par l'autorité qui l'a établie et par l'intéressé, puis visée, selon le cas, par le recteur ou le directeur académique des services de l'éducation nationale agissant sur délégation du recteur d'académie. / Lorsqu'une demande de mutation déposée au cours des deux premières années scolaires de la période de référence est satisfaite, la lettre de mission en cours est complétée par celle établie pour la durée restant à courir, par l'autorité hiérarchique compétente, au titre de la nouvelle affectation ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'alors qu'il exerçait les fonctions de principal adjoint du collège Michel de Montaigne à Périgueux, M. D... s'est vu assigner des objectifs par une lettre de mission du 16 mai 2013 portant sur la période 2012-2013, 2013-2014 et 2014-2015. Il a ensuite obtenu une nouvelle affectation sur un poste de proviseur adjoint au lycée Max Linder à Libourne à compter du 1er septembre 2013, soit au cours des deux premières années de la période de référence de cette lettre de mission. Une nouvelle lettre de mission du 16 décembre 2013 a alors été établie par le proviseur de ce lycée. Si celle-ci mentionne une période de validité s'étendant du 1er septembre 2013 au 31 août 2016, cette erreur matérielle ne pouvait avoir pour effet d'affecter les conditions de réalisation de l'entretien professionnel de M. D... au titre de la période considérée, qui devait nécessairement se dérouler, en application des dispositions précitées, à l'issue de la période de référence fixée par la lettre de mission du 16 mai 2013, soit à la fin de l'année scolaire 2014-2015. Par ailleurs, si M. D... conteste avoir donné son accord à la réalisation de son entretien professionnel à la date du 16 octobre 2015, il ne produit en tout état de cause aucun élément pour étayer cette contestation et il ressort des pièces du dossier qu'il n'a formulé sur ce point aucune observation ni dans le compte-rendu attaqué ni dans le recours hiérarchique qu'il a introduit auprès du ministre. Le moyen tiré de ce que l'entretien professionnel aurait été prématuré et n'aurait ainsi pas permis à l'autorité hiérarchique de prendre en compte l'ensemble des éléments concernant la situation de M. D... doit donc être écarté.

5. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 7 août 2012 : " L'entretien professionnel s'appuie sur la lettre de mission susmentionnée telle que définie à l'article 4 ainsi que, le cas échéant, sur le rapport d'étape prévu au troisième alinéa de l'article 22 du décret du 11 décembre 2001 susvisé. Il porte principalement sur : / 1° Le degré de réalisation des objectifs fixés à l'agent dans la lettre de mission et les méthodes mises en oeuvre pour y parvenir ; / 2° Les objectifs assignés à l'agent pour les trois années à venir et les perspectives d'évolution de ses résultats professionnels, qui donnent lieu à l'établissement d'une nouvelle lettre de mission fondée sur une actualisation du diagnostic de l'établissement pour les personnels de direction (...) / 3° La maîtrise des fonctions occupées et les compétences mises en oeuvre au cours de la période d'évaluation ; / 4° La manière de servir de l'agent ; / (...) 7° Ses perspectives d'évolution professionnelle en termes de carrière et de mobilité ". En vertu de l'article 6 du même arrêté : " Le compte rendu de l'entretien professionnel est établi au moyen du formulaire mentionné à l'article 2 du présent arrêté et signé par l'autorité qui a conduit l'entretien. Il comporte une appréciation générale exprimant la valeur professionnelle du personnel de direction ".

6. Il résulte de ces dispositions que si l'entretien professionnel doit s'appuyer sur les objectifs fixés à l'intéressé par la lettre de mission relative à la période de référence, l'appréciation générale portée sur la valeur professionnelle de celui-ci n'a pas pour seul objet de transcrire l'évaluation qui est faite du degré de réalisation des objectifs qui lui ont ainsi été assignés et doit notamment permettre d'envisager de manière globale ses perspectives d'évolution de carrière. Par suite, la circonstance que l'appréciation générale portée sur la manière de servir et la valeur professionnelle de M. D... n'indique pas un degré de qualité identique à celui mentionné s'agissant des critères et objectifs fixés par la lettre de mission du 16 décembre 2013 ne révèle pas en elle-même une erreur manifeste d'appréciation. Par ailleurs, si l'appréciation portée sur le niveau de compétence atteint par l'intéressé pour la réalisation de ces objectifs indique " très bon ", alors que l'appréciation générale portée sur sa valeur professionnelle et sa manière de servir indique " bon ", une telle différence ne permet pas non plus de caractériser une erreur manifeste d'appréciation, alors en outre que le compte-rendu litigieux relève par ailleurs que M. D... n'a que partiellement atteint les objectifs fixés dans sa lettre de mission. Enfin, M. D... ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il aurait fait l'objet d'une évaluation plus favorable en 2012. Par suite, le moyen tiré de ce que l'appréciation générale de sa valeur professionnelle serait entachée d'une erreur manifeste au regard des autres éléments de son évaluation doit être écarté.

7. Enfin, M. D... ne peut utilement soutenir, à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation, que le compte-rendu d'entretien professionnel litigieux aurait préjudicié à sa carrière.

8. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, et en tout état de cause, ses conclusions à fin d'injonction.

9. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande le requérant au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Bordeaux.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. A... B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2019.

Le rapporteur,

David B...Le président,

Marianne Hardy

Le greffier,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 18BX00290


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX00290
Date de la décision : 19/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-01 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Notation.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. David TERME
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LAPLAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-12-19;18bx00290 ?
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