Vu la procédure suivante :
I. - Par une requête enregistrée le 14 septembre 2017 sous le n° 17BX03095 et un mémoire complémentaire enregistré le 10 octobre 2017, la société Chamvyle, représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le permis de construire tacite délivré le 12 juillet 2017 par le maire de Bénéjacq à la société Suvadis ;
2°) de mettre à la charge de la société Suvadis et de la commune de Bénéjacq une somme de 4 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a intérêt à agir dès lors qu'elle exploite un magasin alimentaire à l'enseigne Intermarché sur le territoire de la commune de Coarraze, à proximité de la zone de chalandise du projet litigieux situé sur le territoire de la commune de Coarraze et qu'elle n'était pas tenue de saisir préalablement la Commission nationale d'aménagement commercial ;
- le permis de construire tacite du 1er octobre 2015 aurait dû être précédé d'un avis de la commission départementale d'aménagement commercial dès lors qu'aucune autorisation n'avait été délivrée par cette commission sous l'empire de la législation antérieure à la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ;
- en application de l'article L. 600-10 du code de l'urbanisme la cour administrative d'appel est compétente pour connaître en premier et dernier ressort de ce litige qui est relatif à un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale ;
- le dossier de demande comprenant les éléments mentionnés à l'article R. 752-6 du code de commerce n'a pas été transmis à la commission départementale d'aménagement commercial comme le prévoient les articles R. 431-33-1 et R. 423-13-2 du code de l'urbanisme ;
- s'agissant d'une demande de permis de construire portant sur une extension de surface de vente d'un ensemble commercial excédant d'ores et déjà 1 000 mètres carrés, le permis de construire ne pouvait être délivré qu'après avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial en application des articles L. 752-1 5° du code de commerce et L. 425-4 du code de l'urbanisme ; les dispositions du IV de l'article 4 du décret n° 2015-165 du 12 février 2015 n'étaient pas applicables faute d'autorisation préalable délivrée par la commission départementale d'aménagement commercial ;
- dès lors que la société Sunay n'avait pas complété son dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale ainsi que le préfet lui en avait fait la demande par courrier du 11 octobre 2012 en application de l'article R. 752-14 du code de commerce, aucune autorisation d'exploitation tacite n'a pu naître concernant la demande d'extension de la surface de vente du magasin Super U de 1 558 mètres carrés et celle de la galerie marchande de 129 mètres carrés ;
- la société Sunay n'ayant pas produit la copie de la lettre du préfet attestant que le dossier de saisine de la commission départementale d'aménagement commercial était complet, conformément aux dispositions de 1'article R. 431-27 du code de l'urbanisme alors applicable, et n'ayant pas non plus répondu à la deuxième demande de pièce complémentaire du 18 mars 2015 qui rappelait qu'en application de l'article R. 423-39 du même code, la demande de permis serait rejetée, aucun permis de construire tacite n'a pu naître à son profit.
Par un courrier enregistré le 15 novembre 2017, la commune de Bénéjacq a transmis à la cour les observations qu'elle a formulées en réponse à la demande de retrait du certificat de permis de construire tacite du 12 juillet 2017 formulée par le préfet des Pyrénées-Atlantiques.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 janvier 2018, la société Suvadis, représentée par la SCP CGCB et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le dossier de demande d'autorisation d'aménagement commercial qu'elle a déposé le 4 octobre 2012 n'était pas en cours d'instruction au jour de l'entrée en vigueur du décret du 12 février 2015 ;
- dès lors, si l'on considère qu'elle ne disposait pas d'une autorisation d'exploitation commerciale au 12 février 2015, alors le permis de construire tacite du 1er octobre 2015 ne vaut pas autorisation d'exploitation commerciale et la requête n'entre pas dans le champ de l'article L. 600-10 du code de l'urbanisme ; elle est donc portée devant une juridiction incompétente ;
- dans ce cas, la requête est également irrecevable faute d'intérêt pour agir de la société requérante, qui ne se prévaut que de sa qualité de concurrente du projet, en application des dispositions de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme ;
- en tout état de cause, elle est titulaire d'une autorisation d'exploitation commerciale tacite pour l'extension de son ensemble commercial dès lors qu'elle a adressé au préfet une réquisition d'instruction en application de l'article R. 752-15 du code de commerce alors applicable et que le préfet n'a pas transmis son dossier au service instructeur et n'a pas répondu ; par suite, la requête est irrecevable faute pour la société requérante d'avoir saisi la Commission nationale d'aménagement commercial d'un recours administratif préalable ;
- les dispositions de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme n'étaient pas applicables à sa demande et le dossier déposé par ses soins était complet dès lors, d'une part, que la carte communale de Bénéjacq, approuvée le 12 août 1998 et applicable jusqu'à l'adoption du plan local d'urbanisme le 19 mai 2008, classait la zone d'assiette du projet en zone UY et en zone NC et que la commune de Mirepeix était régie par le règlement national d'urbanisme ;
- le moyen tiré du défaut de production des pièces complémentaires est irrecevable ;
- il est également mal fondé dès lors que l'article R. 431-27 du code de l'urbanisme a été abrogé par le 10° de l'article 2 du décret du 12 février 2015 relatif à l'aménagement commercial, que le IV de l'article 4 du même décret dispose que " pour les demandes de permis de construire en cours d'instruction à la date d'entrée en vigueur du présent décret et relatives à des projets soumis à une autorisation d'exploitation commerciale, les autorisations d'exploitation commerciale valent avis favorables de la commission départementale d'aménagement commercial ", et enfin qu'elle avait complété son dossier de demande de permis de construire par la production de la lettre du préfet du 11 octobre 2012 attestant qu'elle avait bien déposé un dossier complet.
II. - Procédure antérieure :
Le préfet des Pyrénées-Atlantiques a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler le certificat du 12 juillet 2017, par lequel le maire de Bénéjacq a attesté avoir accordé un permis de construire tacite en vue de l'extension d'un supermarché à la société par actions simplifiée Suvadis, ainsi que ce permis tacite.
Par un jugement n° 1800094 du 23 mai 2018, le tribunal administratif de Pau a annulé ces deux décisions.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 23 juillet 2018 sous le n° 18BX02905 et un mémoire complémentaire enregistré le 7 mai 2019, la société Suvadis, représentée par la SCP CGCB et Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1800094 du 23 mai 2018 du tribunal administratif de Pau ;
2°) de rejeter la demande présentée par le préfet des Pyrénées-Atlantiques devant le tribunal administratif de Pau ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les écritures en défense produites par le préfet émanent d'une autorité incompétente en application de l'article R. 811-10 du code de justice administrative et doivent être écartées ;
- la demande du préfet portait uniquement sur le certificat délivré le 12 juillet 2017 ; en annulant le permis de construire tacite, les premiers juges ont donc statué ultra petita et entaché leur jugement d'irrégularité ;
- la réponse des premiers juges à son moyen de défense, tiré de ce qu'elle doit être regardée comme bénéficiaire d'une autorisation d'aménagement commercial tacite, est assimilable à un défaut de réponse à moyen ;
- la demande est irrecevable dans la mesure où le certificat de permis de construire tacite ne constitue pas un acte faisant grief ;
- la demande était tardive dès lors que le préfet avait eu connaissance des éléments du dossier de demande de permis de construire dès le 18 décembre 2014, si bien que le délai de recours à l'encontre du permis de construire tacite a commencé de courir à compter du 1er octobre 2015 et a expiré au plus tard le 1er octobre 2016 ;
- le jugement attaqué méconnaît l'autorité de la chose jugée résultant du jugement du 21 novembre 2017 du même tribunal ;
- elle est titulaire d'une autorisation d'aménagement commercial délivrée préalablement au permis de construire tacite ;
- dès lors qu'elle était titulaire d'une autorisation d'exploitation commerciale au sens du IV de l'article 4 du décret n° 2015-165 du 12 février 2015, les dispositions du h de l'article R. 242-2 du code de l'urbanisme étaient inapplicables.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2019, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- sa demande de première instance devait être regardée comme dirigée contre le permis de construire tacite dès lors qu'elle contenait des moyens dirigés contre ledit permis tacite ; le tribunal n'a donc pas statué ultra petita ;
- son déféré n'est pas tardif dans la mesure où la société Suvadis ne pouvait être titulaire d'un permis de construire tacite ;
- le jugement attaqué ne méconnaît pas l'autorité de la chose jugée dès lors qu'il résulte seulement du jugement du 21 novembre 2017 qu'à la date de la décision attaquée, l'exploitation commerciale de l'ensemble commercial n'était pas subordonnée à l'octroi préalable d'une autorisation de la commission départementale d'aménagement commercial mais relevait d'un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ;
- le décret n° 2015-165 du 12 février 2015 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... C...,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant la société Suvadis.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 28 juillet 2011, la Commission nationale d'aménagement commercial a autorisé la société Sunay à exploiter un hypermarché de 2 600 mètres carrés de surface de vente à l'enseigne " Super U ", assorti d'un espace culturel de 299 mètres carrés sur le territoire des communes de Bénéjacq et de Mirepeix (Pyrénées-Atlantiques). Souhaitant agrandir cet ensemble commercial, la société Sunay a déposé, le 4 octobre 2012, une demande d'autorisation portant sur une extension de 1 558 mètres carrés de surface de vente pour l'hypermarché et de 129 mètres carrés pour la galerie marchande. Par un courrier du 11 octobre 2012, le préfet a informé la société que le dossier était incomplet. Estimant que la pièce réclamée par le préfet n'était pas nécessaire, la société Sunay lui a alors demandé de constater que son dossier de demande était bien complet et que le délai d'instruction de deux mois prévu à l'article L. 752-14 du code de commerce courait depuis le 11 octobre 2012. En l'absence de réponse du préfet, la société a fait publier dans deux journaux des annonces indiquant qu'elle était titulaire d'une autorisation tacite de la commission départementale d'aménagement commercial depuis le 12 décembre 2012.
2. Le 10 décembre 2014, la société Suvadis, venant au droit de la société Sunay, a déposé une demande de permis de construire portant sur la partie de la construction située sur le territoire de la commune de Bénéjacq, dont le territoire est couvert par un plan local d'urbanisme. Ce dossier de demande a été complété ultérieurement par des pièces complémentaires produites le 24 mars 2015. Le maire de Bénéjacq n'a pas statué expressément sur cette demande et a délivré à la société Suvadis, le 12 juillet 2017, un certificat de permis de construire tacite, en application de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme, indiquant qu'un permis de construire avait été tacitement délivré à la société Suvadis le 1er octobre 2015.
3. Par sa requête enregistrée sous le n° 17BX03095, la société Chamvyle, qui fait uniquement valoir des moyens tirés de l'illégalité du permis de construire tacite révélé par le certificat du 12 juillet 2017, doit être regardée comme demandant l'annulation de ce permis de construire tacite. Par la requête enregistrée sous le n° 18BX02905, la société Suvadis relève appel du jugement n° 1800094 du 23 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé, sur déféré du préfet des Pyrénées-Atlantiques, le certificat de permis de construire tacite et le permis de construire.
Sur la jonction :
4. Les requêtes de la société Chamvyle et de la société Suvadis sont dirigées contre les mêmes actes. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la requête n° 18BX02905 :
En ce qui concerne la recevabilité des écritures en défense du préfet des Pyrénées-Atlantiques :
5. Aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission (...). L'appel des jugements du tribunal administratif ainsi que des décisions relatives aux demandes de suspension prévues aux alinéas précédents, rendus sur recours du représentant de l'Etat, est présenté par celui-ci ".
6. Il résulte de ces dispositions que le préfet a seul qualité pour représenter l'Etat en appel dans un litige relatif à un acte qu'il a déféré au tribunal administratif en application de ces dispositions. La société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que le mémoire en défense présenté par le préfet, dans une instance ouverte par l'appel qu'elle a formé à l'encontre d'un jugement rendu sur un déféré préfectoral, serait irrecevable faute d'être signé du ministre.
En ce qui concerne la régularité du jugement :
7. Au point 5 du jugement attaqué, les premiers juges ont répondu au moyen de défense de la société Suvadis, tiré de ce qu'elle était bénéficiaire d'une autorisation d'exploitation commerciale à la date du permis de construire litigieux, en indiquant qu'il n'était " pas démontré que la demande de permis [avait] fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou de la Commission nationale d'aménagement commercial ". Par suite, et malgré le caractère succinct de cette réponse, la société Suvadis n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'un défaut de réponse à moyen.
8. Il résulte de la lecture même des conclusions du mémoire introductif d'instance du préfet des Pyrénées-Atlantiques enregistré au greffe du tribunal administratif le 15 janvier 2018 qu'il y demandait expressément tant l'annulation du certificat de permis de construire tacite délivré le 12 juillet 2017 que l'annulation du permis de construire révélé par celui-ci. Par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait statué au-delà des conclusions dont il était saisi en statuant sur la légalité du permis de construire doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la recevabilité du déféré :
9. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 que la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité du déféré du préfet des Pyrénées-Atlantiques comme tendant à l'annulation d'une décision ne faisant pas grief doit être écartée.
10. Aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission (...) ". Parmi les actes mentionnés par l'article L. 2131-2 de ce code figure, au 6° : " Le permis de construire et les autres autorisations d'utilisation du sol et le certificat d'urbanisme délivrés par le maire (...) ". L'article R. 423-23 du code de l'urbanisme fixe le délai d'instruction de droit commun pour les demandes de permis de construire. L'article R. 424-1 du même code prévoit que, à défaut d'une décision expresse dans le délai d'instruction, le silence gardé par l'autorité compétente vaut permis de construire. Aux termes de l'article L. 424-8 du code de l'urbanisme : " Le permis tacite et la décision de non-opposition à une déclaration préalable sont exécutoires à compter de la date à laquelle ils sont acquis ". Enfin, l'article R. 423-7 du même code dispose : " Lorsque l'autorité compétente pour délivrer le permis ou pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est le maire au nom de la commune, celui-ci transmet un exemplaire de la demande ou de la déclaration préalable au préfet dans la semaine qui suit le dépôt ".
11. S'il résulte des dispositions de l'article L. 424-8 du code de l'urbanisme qu'un permis de construire tacite est exécutoire dès qu'il est acquis, sans qu'il y ait lieu de rechercher s'il a été transmis au représentant de l'Etat, ces dispositions ne dérogent pas à celles de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, en vertu desquelles le préfet défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. Figurent au nombre de ces actes les permis de construire tacites. Une commune doit être réputée avoir satisfait à l'obligation de transmission dans le cas d'un permis de construire tacite si elle a transmis au préfet l'entier dossier de demande, en application de l'article R. 423-7 du code de l'urbanisme. Le délai du déféré court alors à compter de la date à laquelle le permis est acquis ou, dans l'hypothèse où la commune ne satisfait à l'obligation de transmission que postérieurement à cette date, à compter de la date de cette transmission. Toutefois, lorsqu'une commune a fait appel aux services de l'Etat pour l'instruction d'un dossier de permis de construire sur le fondement des dispositions de l'article L. 422-8 du code de l'urbanisme, cette demande d'instruction ne constitue, en l'absence de toute demande expressément formulée en ce sens par la commune auprès des services instructeurs, ni une transmission faite aux services de l'Etat en application des articles L. 2131-1 et L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales, ni une transmission au préfet au titre de l'obligation posée par l'article R. 423-7 du code de l'urbanisme. Une telle demande n'est donc pas de nature à faire courir le délai du déféré préfectoral.
12. En l'espèce, la commune de Bénéjacq soutient que le dossier de demande de permis de construire a été transmis en préfecture le 18 décembre 2014 accompagné de l'avis du maire sur cette demande. Toutefois, il est constant que cette demande a fait l'objet d'une demande de pièces complémentaires à laquelle la société requérante n'a satisfait que le 24 mars 2015, et il n'est pas démontré que ces pièces, ni le dossier de demande initial, auraient été transmis au préfet au titre de l'obligation posée par l'article R. 423-7 du code de l'urbanisme. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'est sans incidence, à cet égard, la circonstance que l'entier dossier de demande de permis de construire aurait été transmis aux services instructeurs de la direction départementale des territoires et de la mer de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques.
13. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le certificat de permis de construire tacite du 12 juillet 2017 a été transmis aux services de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques au titre du contrôle de légalité le 18 juillet 2017. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques a formé un recours gracieux contre la décision révélée par ce certificat par un courrier du 15 septembre 2017, soit dans le délai de deux mois suivant la transmission du certificat. Ce recours gracieux a donc eu pour effet de proroger le délai de recours contentieux à l'encontre de la décision attaquée. Par un courrier du 10 novembre 2017, reçu le 14 novembre 2017, le maire de Bénéjacq a rejeté ce recours gracieux. Le déféré du préfet a été enregistré le 15 janvier 2018 au greffe du tribunal, soit dans le délai de recours contentieux de deux mois suivant la décision de rejet du recours gracieux. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du déféré du préfet des Pyrénées-Atlantiques doit être écartée.
14. Aux termes de l'article R. 752-12 du code de commerce alors applicable : " La demande d'autorisation est soit adressée au préfet sous pli recommandé avec demande d'avis de réception, soit déposée contre décharge au secrétariat de la commission (...) ". Aux termes de l'article R. 752-13 du même code : " Dès réception de la demande, si le dossier est complet, le préfet fait connaître au demandeur son numéro d'enregistrement et la date avant laquelle la décision doit lui être notifiée. Le délai d'instruction court, sous réserve des dispositions prévues à l'article R. 752-14, à compter du jour de la décharge ou de l'avis de réception ou de l'accusé de réception électronique prévus à l'article R. 752-12. / La lettre du préfet avise en outre le demandeur que, si aucune décision ne lui a été adressée avant la date mentionnée à l'alinéa précédent, l'autorisation est réputée accordée ". Aux termes de l'article R. 752-14 du même code : " Si le dossier est incomplet, le préfet, dans les quinze jours de la réception de la demande, invite l'intéressé, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à fournir les pièces complémentaires. / Lorsque toutes ces pièces ont été produites, il est fait application de l'article R. 752-13 et le délai d'instruction court à compter de la réception de la dernière pièce complétant le dossier ". Enfin aux termes de l'article R. 752-15 : " Dans le cas où le demandeur n'a pas reçu, dans les quinze jours suivant la réception de sa demande par le secrétariat de la commission départementale d'aménagement commercial, la lettre prévue à l'article R. 752-13 ou R. 752-14, le délai d'instruction court à compter du jour de la décharge ou de l'avis de réception prévu à l'article R. 752-12 ".
15. Il ressort des pièces du dossier que la société Suvadis a déposé le 4 octobre 2012 auprès de la préfecture une demande d'autorisation d'aménagement commercial portant sur une extension de 1 558 mètres carrés de surface de vente pour l'hypermarché et de 129 mètres carrés pour la galerie marchande, demande qui entrait dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 752-1 du code de commerce. Toutefois, par un courrier du 11 octobre 2012, soit dans le délai de quinze jours prévu par les dispositions de l'article R. 752-14 du code de commerce, le préfet a informé la société que son dossier devait être complété par la fourniture d'une dérogation délivrée par l'établissement public chargé de l'élaboration du schéma de cohérence territoriale en application des dispositions de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme alors en vigueur. La société Sunay a alors saisi le préfet d'un recours gracieux tendant à ce qu'il constate que son dossier de demande était complet et que le délai d'instruction de deux mois prévu à l'article L. 752-14 du code de commerce courait depuis le 11 octobre 2012.
16. Il est constant que le préfet a opposé un refus implicite à cette demande et que la société n'a pas contesté cette décision. Il ressort également des pièces du dossier que le dossier de demande n'a pas été transmis à la commission départementale d'aménagement commercial, qui ne l'a, par suite, pas instruit. Dans ces circonstances, le délai mentionné à l'article L. 752-4 du code de commerce n'a pas couru et la société Suvadis n'est pas fondée à soutenir qu'elle serait titulaire d'une autorisation d'exploitation commerciale tacite acquise le 12 décembre 2012.
17. Aux termes de l'article R. 424-2 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " Par exception au b de l'article R.424-1, le défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction vaut décision implicite de rejet dans les cas suivants : (...) h) Si le permis ne relève pas de la compétence de l'Etat, lorsque le projet relève de l'article L. 425-4 ou a été soumis pour avis à la commission départementale d'aménagement commercial sur le fondement de l'article L. 752-4 du code de commerce et que la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial a rendu un avis défavorable (...) ".
18. La demande de permis de construire déposée par la société Suvadis n'ayant ainsi pas fait l'objet d'un avis défavorable de la commission départementale d'aménagement commercial, elle n'entrait donc pas dans le champ d'application des dispositions précitées du h de l'article R. 424-2 du code de l'urbanisme. Dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif de Pau a annulé le permis de construire attaqué au motif que, en application des dispositions de cet article, faute de décision expresse notifiée avant l'expiration du délai d'instruction, cette demande avait donné lieu à une décision implicite de rejet.
19. Il appartient à la cour, saisie par l'effet d'évolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens invoqués par le préfet des Pyrénées-Atlantiques devant le tribunal administratif.
20. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de commerce dans sa rédaction applicable : " I. - Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : / 1° La création d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 1 000 mètres carrés, résultant soit d'une construction nouvelle, soit de la transformation d'un immeuble existant ; / 2° L'extension de la surface de vente d'un magasin de commerce de détail ayant déjà atteint le seuil des 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet. Est considérée comme une extension l'utilisation supplémentaire de tout espace couvert ou non, fixe ou mobile, et qui n'entrerait pas dans le cadre de l'article L. 310-2 (...) ". L'article L. 425-4 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire portant sur un projet soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce ne peut être légalement délivré que sur avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial compétente ou, le cas échéant, sur avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial.
21. Ainsi qu'il a été dit au point 2, la demande de permis de construire de la société Suvadis, déposée complète le 24 mars 2015, portait sur une extension de 1 558 mètres carrés de surface de vente d'un hypermarché existant et de 129 mètres carrés de sa galerie marchande et devait dès lors, en vertu des dispositions citées au point précédent, faire l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial compétente, ou le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial, à défaut d'avoir été régulièrement autorisée par une décision rendue par une commission d'aménagement commercial antérieurement au 15 février 2015. Une telle autorisation ne pouvant, ainsi qu'il a été dit précédemment, être considérée comme ayant été délivrée, même tacitement, le préfet des Pyrénées-Atlantiques est fondé à soutenir que le permis de construire tacite révélé par le certificat du 12 juillet 2017 est entaché d'illégalité dès lors qu'il n'a pas été précédé d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial. La société Suvadis ne peut utilement se prévaloir à cet égard de l'autorité de chose jugée attachée aux motifs du jugement du 21 novembre 2017, par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 13 mai 2015 du préfet des Pyrénées-Atlantiques refusant de lui délivrer un permis de construire concernant la partie du même projet située sur le territoire de la commune de Mirepeix, dès lors que, par ce jugement, le tribunal a seulement estimé qu'en raison de l'entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2014 et du décret du 12 février 2015, le permis de construire en cause dans cette instance ne devait pas être précédé d'une décision préalable d'autorisation de la commission départementale d'aménagement commercial conformément au régime antérieurement applicable.
22. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier soumis à la cour, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision attaquée.
23. Il résulte de tout ce qui précède que la société Suvadis n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé le permis de construire tacite révélé par le certificat du 12 juillet 2017.
Sur la requête n° 17BX03095 :
24. Il résulte des dispositions de l'article L. 752-1 du code de commerce et L. 425-4 du code de l'urbanisme précitées que les cours administratives d'appel ne sont, par exception, compétentes pour statuer en premier et dernier ressort sur un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un permis de construire, aussi bien en tant qu'il vaut autorisation de construire qu'en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, que si ce permis tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Il résulte des termes mêmes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme qu'un permis, même délivré pour un projet soumis à autorisation d'exploitation commerciale en vertu de l'article L. 752-1 du code de commerce, ne peut jamais tenir lieu d'une telle autorisation lorsque le projet n'a pas été, au préalable, soumis pour avis à une commission départementale d'aménagement commercial.
25. Dès lors, il résulte de ce qui a été dit aux points 15 et 16 que la requête de la société Chamvyle relève de la compétence du tribunal administratif de Pau.
26. Toutefois, d'une part, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation (...) ". D'autre part, aux termes de l'article R. 351-4 du code de justice administrative : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance ".
27. A l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du permis de construire tacite délivré à la société Suvadis par le maire de Bénéjacq, la société Chamvyle se prévaut uniquement de sa qualité d'exploitante d'un supermarché " Intermarché " situé sur le territoire de la commune de Coarraze à proximité de la zone de chalandise du projet de la société Suvadis et ne soutient pas que ce dernier serait de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Elle n'établit donc pas avoir intérêt pour agir contre le permis en tant qu'il vaut autorisation de construire. Sa requête est donc manifestement irrecevable et doit être rejetée.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
28. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous le n° 17BX03905. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans l'instance n° 18BX03905, partie perdante, la somme que demande la société Suvadis à ce même titre.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes n° 17BX003095 et 18BX02905 sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de la société Suvadis présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans l'instance n° 17BX03095 sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Chamvyle, à la commune de Bénéjacq, à la sociétés Suvadis et au ministre de l'économie et des finances (Commission nationale d'aménagement commercial).
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Atlantiques.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. A... C..., premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 21 novembre 2019.
Le rapporteur,
David C...Le président,
Marianne Hardy
Le greffier,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17BX03095,18BX02905