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07/11/2019 | FRANCE | N°19BX01393,19BX01395

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 07 novembre 2019, 19BX01393,19BX01395


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - Mme H... F... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai.

II - M. E... F... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refu

sé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - Mme H... F... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai.

II - M. E... F... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1804856,1804857 du 28 décembre 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande respective.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête, enregistrée sous le n° 19BX01393, le 8 avril 2019, Mme F..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 décembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

s'agissant du refus de délivrance d'un titre de séjour :

- la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'il n'est pas établi, d'une part, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été rendu de façon collégiale, d'autre part, que le collège de médecins a été destinataire du rapport médical du 22 février 2018 avant de rendre son avis, en méconnaissance des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- le préfet n'a pas examiné sa situation de façon suffisante, en se bornant à reproduire l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- elle ne peut bénéficier d'un traitement médical approprié en Albanie en raison de son indisponibilité, alors que les troubles dont elle est atteinte sont consécutifs au traumatisme qu'elle y a subi, de sorte que le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2019, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme F... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 19 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 17 juin 2019 à 12h00.

Un mémoire présenté pour Mme F... a été enregistré le 8 août 2019.

Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mars 2019.

II - Par une requête, enregistrée sous le n° 13BX01395, le 8 avril 2019, M. F..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 décembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour, subsidiairement de réexaminer sa demande de titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté pris à son encontre est illégal par voie de conséquence de l'illégalité de l'arrêté pris à l'encontre de sa conjointe, le refus de titre opposé à cette dernière étant entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il n'est pas établi, d'une part, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été rendu de façon collégiale, d'autre part, que le collège de médecins a été destinataire du rapport médical du 22 février 2018 avant de rendre son avis, en méconnaissance des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ; le refus de titre opposé à sa conjointe méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de sa conjointe méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2019, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 19 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 17 juin 2019 à 12h00.

Un mémoire présenté pour M. F... a été enregistré le 8 août 2019.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mars 2019.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... C...,

- et les observations de Me B..., représentant M. et Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme F..., ressortissants albanais nés respectivement les 24 avril 1988 et 18 septembre 1994, sont entrés en France selon leurs déclarations en avril 2016. Ils ont chacun déposé le 14 décembre suivant une demande de reconnaissance du statut de réfugié qui a été rejetée par décisions du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 22 juin 2017, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 18 octobre 2017. Puis, Mme F... a introduit, le 20 novembre 2017, une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par deux arrêtés du 11 septembre 2018, le préfet de la Gironde a refusé de délivrer à chacun d'eux un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seraient reconduits à l'issue de ce délai. Par deux requêtes, enregistrées sous les n° 19BX01393 et 19BX01395, Mme F... et M. F... relèvent appel du jugement du 28 décembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande respective tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde qui le concerne.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n° 19BX01393 et n° 19BX01395 sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'arrêté du 11 septembre 2018 pris à l'encontre de Mme F... :

S'agissant du refus de titre de séjour :

3. En vertu du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est, sous réserve d'une menace pour l'ordre public, délivrée de plein droit à " l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

4. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ".

5. L'article R. 313-23 du même code dispose que : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313 22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. A défaut de réponse dans le délai de quinze jours, ou si le demandeur ne se présente pas à la convocation qui lui a été fixée, ou s'il n'a pas présenté les documents justifiant de son identité le médecin de l'office établit son rapport au vu des éléments dont il dispose et y indique que le demandeur n'a pas répondu à sa convocation ou n'a pas justifié de son identité. Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. En cas de défaut de présentation de l'étranger lorsqu'il a été convoqué par le médecin de l'office ou de production des examens complémentaires demandés dans les conditions prévues au premier alinéa, il en informe également le préfet ; dans ce cas le récépissé de demande de première délivrance de carte de séjour prévu à l'article R. 311-4 n'est pas délivré. Lorsque l'étranger dépose une demande de renouvellement de titre de séjour, le récépissé est délivré dès la réception, par le service médical de l'office, du certificat médical mentionné au premier alinéa. / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) / Le collège peut demander au médecin qui suit habituellement le demandeur, au médecin praticien hospitalier ou au médecin qui a rédigé le rapport de lui communiquer, dans un délai de quinze jours, tout complément d'information. Le demandeur en est simultanément informé. Le collège de médecins peut entendre et, le cas échéant, examiner le demandeur et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. Il peut être assisté d'un interprète et d'un médecin. Lorsque l'étranger est mineur, il est accompagné de son représentant légal. / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate. / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

6. L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

7. En premier lieu, si Mme F... soutient que la décision litigieuse est entachée de vices de procédure dès lors qu'il n'est pas justifié, d'une part, que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a été destinataire du rapport du médecin instructeur avant de rédiger son avis, d'autre part, que les médecins composant ce collège ont effectivement délibéré après concertation, il ressort des pièces du dossier que le rapport médical sur l'état de santé de Mme F... a été établi le 27 avril 2018 par le docteur Coulanges et a été transmis pour être soumis au collège de médecins. Par ailleurs, lorsque l'avis précise, comme en l'espèce, " Après en avoir délibéré, le collège de médecins de l'OFII émet l'avis suivant ", cette mention du caractère collégial de l'avis rendu le 20 août 2018 fait foi jusqu'à preuve du contraire, laquelle n'est pas rapportée par l'appelante. Par suite, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que cet avis n'a pas été émis dans le respect de la procédure prescrite par les dispositions précitées.

8. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier des termes mêmes de la décision litigieuse, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier et attentif de la situation de Mme F... ou qu'il se serait estimé lié par l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII. Par suite, à le supposer soulevé, le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le préfet doit être écarté.

9. En troisième lieu, il ressort de l'avis émis le 20 août 2018 que le collège de médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de Mme F... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Les attestations produites par l'appelante, émanant du praticien hospitalier qui la suit et d'une pharmacie albanaise ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis rendu par le collège de médecins sur la possibilité de sa prise en charge dans son pays d'origine, en particulier par la poursuite d'un traitement médicamenteux approprié à son état de santé. Si Mme F... fait valoir que ses troubles sont consécutifs au traumatisme qu'elle a subi dans son pays d'origine en raison des conditions dans lesquels elle a perdu l'enfant dont elle était enceinte, les pièces qu'elle produit à l'instance ne sont pas de nature à caractériser une impossibilité pour elle de poursuivre son traitement en Albanie. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet aurait, en prenant la décision attaquée, fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

10. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme F... et son conjoint, sont entrés récemment en France. La durée de leur séjour est en majeure partie consécutive à l'instruction de leur demande d'asile, en définitive rejetée. Ils font tous les deux l'objet d'une mesure d'éloignement et rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en dehors du territoire français notamment en Albanie où le couple ne justifie pas être dépourvu de toute attache familiale et où il n'est pas établi que leur fille ne pourrait pas poursuivre une scolarité normale. Dès lors, en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme F..., le préfet n'a pas, eu égard notamment à la durée et aux conditions de séjour en France de l'intéressée, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

11. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

12. Compte tenu de ce qui a été dit au point 9 ci-dessus, les éléments produits par Mme F... ne sont pas de nature à établir qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, dès lors, être écarté.

En ce qui concerne l'arrêté du 11 septembre 2018 pris à l'encontre de M. F... :

13. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 à 12 ci-dessus, et en tout état de cause, les moyens soulevés par M. F..., tirés, d'une part, de l'illégalité de l'arrêté du 11 septembre 2018 pris à l'encontre de sa conjointe et, d'autre part, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande respective. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 19BX01393 et la requête n° 19BX01395 sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... F..., à M. E... F... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme G... A..., président,

M. D... C..., président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 novembre 2019.

Le rapporteur,

Didier C...

Le président,

Mme G... A...Le greffier,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

7

N° 19BX01393,19BX01395


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LANNE PIERRE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 07/11/2019
Date de l'import : 12/11/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19BX01393,19BX01395
Numéro NOR : CETATEXT000039351200 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-07;19bx01393.19bx01395 ?
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