Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 février 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1800843 du 15 février 2019 le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 mars 2019, M. B... A..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 février 2019 ;
2°) d'annuler le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français sans délai et la décision désignant l'Algérie comme pays de destination contenus dans l'arrêté du 6 février 2018 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement des stipulations de l'article 6-4° de l'accord franco-algérien ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 2 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 6-4° de l'accord franco-algérien ;
- la décision est entachée d'erreur de droit quant au cadre juridique de la demande de titre de séjour dès lors qu'il a reconnu son fils concomitamment à la déclaration de naissance ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit ; l'autorité de la chose jugée attachée au jugement définitif du tribunal administratif de Toulouse en date du 4 décembre 2012 impliquait l'annulation de l'arrêté du 6 février 2018 dès lors que cette décision de justice reconnaît qu'il satisfait aux conditions prévues par les dispositions de l'article 6-4 de l'accord franco-algérien ;
- la décision est entachée d'une erreur de fait en retenant qu'il avait reconnu son fils cinq jours après sa naissance alors qu'il l'a reconnu le jour même ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit en exigeant la preuve de la participation à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dès lors qu'il ne l'a pas reconnu postérieurement à sa naissance ;
- la décision a estimé à tort qu'il ne participait que ponctuellement à l'éducation de son fils dès lors qu'il vit avec lui et la mère de l'enfant ;
- le jugement ne statue pas, comme il y était invité, sur les conséquences de la décision sur le développement de l'enfant au regard des stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relatives aux droits de l'enfant ;
- la décision en litige porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale énoncé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision estime à tort que sa présence constituerait une atteinte à l'ordre public ; sa demande de titre de séjour a été déposée le 4 octobre 2016 et il a entamé un processus d'intégration depuis sa dernière condamnation qui remonte au 1er mars 2016 ;
- la décision d'obligation de quitter le territoire sans délai en raison de la menace pour l'ordre public qu'il constituerait est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête comme non fondée.
Par ordonnance du 14 mai 2019 la clôture d'instruction a été fixée au 17 juillet 2019 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. F... E...,
- et les observations de Me D..., représentant M. B... A....
1. M. B... A..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 15 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 février 2018 du préfet de la Haute-Garonne portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant l'Algérie comme pays de destination.
Sur la régularité du jugement :
2. Contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte du point 6 du jugement qu'en retenant que M. B... A... avait reconnu son fils cinq jours après la naissance de l'enfant et que le requérant n'établissait pas subvenir aux besoins de ce dernier le jugement critiqué a implicitement mais nécessairement répondu aux moyens tirés de l'erreur de fait et de la méconnaissance par le préfet des dispositions de l'article 6-4 de l'accord franco-algérien selon lesquels l'intéressé avait reconnu son fils le jour de sa naissance et, dès lors, n'avait pas à justifier qu'il subvenait aux besoins de ce dernier pour pouvoir bénéficier de plein droit d'un certificat de résidence.
3. Le tribunal a répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant au point 10 du jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'acte :
4 Par un arrêté du 11 septembre 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, le préfet de la Haute-Garonne a donné délégation de signature à M. Jean-François Colombet, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Garonne, à l'effet de signer tous les actes, arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Haute-Garonne, au nombre desquels figure la police des étrangers. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait et doit être écarté.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
5. Contrairement à ce que soutient M. B... A..., l'autorité de la chose jugée dont est revêtu le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 4 décembre 2012, devenu définitif, qui annule la décision implicite par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un certificat de résidence ne s'impose pas dans le présent litige qui porte sur la légalité de la décision en date du 6 février 2018 par laquelle ledit préfet a refusé au requérant de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français à la suite d'une nouvelle instruction.
6. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résident en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que le requérant a procédé, le 17 janvier 2018, à la déclaration de naissance de son fils Younes, de nationalité française, né le 16 janvier 2018, et a concomitamment reconnu sa paternité. Dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la reconnaissance de l'enfant était postérieure à la naissance et que par suite, le requérant devait justifier subvenir aux besoins de l'enfant alors que M. B... A... pouvait prétendre de plein droit à un certificat de résidence.
8. Toutefois, les stipulations précitées de l'accord franco-algérien ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient de refuser à un ressortissant algérien la délivrance d'un certificat de résidence lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public.
9. Il ressort des pièces du dossier que M. B... A..., qui déclare être arrivé en France en décembre 2000, a fait l'objet de multiples condamnations judiciaires ayant conduit à six années d'emprisonnement fermes et huit années d'interdiction du territoire français, pour des faits de pénétration non-autorisée sur le territoire national après interdiction de séjour, de communication de renseignements inexacts sur son identité, de fraudes en vue de l'obtention d'allocations et de prestations sociales et pour des faits de vol aggravé, vol en réunion, et acquisitions, détention, emploi, transport, offre ou cession non autorisés de stupéfiants. S'il est fondé à soutenir qu'il n'a fait l'objet d'aucune condamnation entre la date de dépôt de sa demande de titre de séjour en octobre 2016 et la date de la décision contestée, il demeure qu'il sortait alors d'une peine d'emprisonnement de deux années pour participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement et transport, détention, acquisition, offre ou cession de stupéfiants. Ainsi compte tenu de la nature, du caractère répété et de la gravité des faits pour lesquels le requérant a fait l'objet de multiples condamnations, le préfet de la Haute-Garonne a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, refuser de délivrer au requérant le certificat de résidence demandé motif pris de la menace pour l'ordre public que sa présence en France constitue.
10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...)5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".
11. En l'espèce, s'il est vrai que M. B... A..., qui déclare être entré en France en 2000, à l'âge de quarante ans, justifie participer à des événements de la vie de son fils, il ne vit pas effectivement avec l'enfant et sa mère. Ses cinq frères et soeurs ainsi que ses parents résident dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale énoncé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas méconnu les dispositions du point 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
12. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ".
13. En l'absence de liens d'une particulière intensité entre M. B... A... et son fils, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
14. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écarté. Pour les mêmes motifs que ceux indiqués précédemment, M. B... A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ou porte une atteinte disproportionnée à sa situation personnelle. De même, le moyen tiré de ce que M. B... A... pouvait prétendre de plein droit à un certificat de résidence doit être écarté dès lors que le préfet a pu à bon droit ne pas le lui délivrer pour des motifs liés à l'ordre public.
Sur la décision refusant le délai de départ volontaire :
15. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) ".
16. Compte tenu des multiples condamnations prononcées à l'encontre de M. B... A..., ce dernier se trouvait dans le cas visé par les dispositions citées ci-dessus dans lequel le préfet de la Haute-Garonne pouvait légalement édicter à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire.
Sur la décision fixant le pays de destination :
17. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant l'Algérie comme pays de destination doit être écarté.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. F... E..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 31 octobre 2019.
Le rapporteur,
Stéphane E... Le président,
Philippe Pouzoulet Le greffier,
Caroline Brunier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 19BX01074