Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2009, 2010 et 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 juillet 2012.
Par un jugement n° 1404106 du 18 septembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 novembre 2017, M. A...D..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 septembre 2017 ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les rectifications ayant été assorties de majorations pour manquements délibérés, les propositions de rectification devaient être signées par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire ;
- les chiffres d'affaires reconstitués par l'administration ont été artificiellement exagérés ; un certain nombre de recettes ont été incluses à la fois dans ses chiffres d'affaires et dans ceux réalisés par l'entreprise de son frère, notamment la somme de 15 881,25 euros figurant sur la facture n° 21 du 4 novembre 2010 et payée par un chèque n° 2940299 du 26 novembre 2010 ; un certain nombre de chèques encaissés sur ses comptes bancaires ont été établis par son frère et ne correspondent ainsi pas à un chiffre d'affaires taxable ;
- il s'est inscrit en qualité d'auto-entrepreneur à la demande de son unique cliente, la société AS Sécurité, et n'avait pas connaissance de ses obligations fiscales en matière de taxe sur la valeur ajoutée ;
- il a déclaré l'ensemble des sommes qui lui ont été versées au cours de la période d'imposition.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 mai 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par M. D... n'est fondé.
Par ordonnance du 10 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 4 mars 2019 à 12 heures.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,
- et les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...D...a exercé à compter du mois de juin 2007 et jusqu'au 4 juillet 2012, en qualité d'auto-entrepreneur, une activité de gardiennage et de sécurité sous l'enseigne " EGS Sécurité ", qu'il a placée sous le régime des micro-entreprises pour l'imposition des bénéfices industriels et commerciaux et sous le régime de la franchise en base pour la taxe sur la valeur ajoutée. A l'occasion d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2009 au 4 juillet 2012, le vérificateur, à défaut de présentation d'éléments comptables par le contribuable, a reconstitué les chiffres d'affaires réalisés et en a déduit un dépassement des seuils ouvrant droit à l'option en faveur du régime des micro-entreprises sous franchise de taxe. M. A...D...a en conséquence été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, au titre des années 2009 à 2011, et s'est vu assigner des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période vérifiée. Il fait appel du jugement du 18 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités dont elles ont été assorties.
Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
S'agissant du régime d'imposition :
2. Aux termes de 293 B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - 1. Pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France, à l'exclusion des redevables qui exercent une activité occulte au sens du deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, lorsqu'ils n'ont pas réalisé : (...) 2° Et un chiffre d'affaires afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, supérieur à : a) 32 000 euros l'année civile précédente ; b) Ou 34 000 euros l'année civile précédente, lorsque la pénultième année il n'a pas excédé le montant mentionné au a. II. - 1. Le I cesse de s'appliquer : a. aux assujettis dont le chiffre d'affaires de l'année en cours dépasse le montant mentionné au b du 1° du I. b) Ou à ceux dont le chiffre d'affaires de l'année en cours afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, dépasse le montant mentionné au b du 2° du I. 2. Les assujettis visés au 1 deviennent redevables de la taxe sur la valeur ajoutée pour les prestations de services et les livraisons de biens effectuées à compter du premier jour du mois au cours duquel ces chiffres d'affaires sont dépassés (...) ". Les seuils fixés au 2° du 1 du I de cet article ont été portés à 32 100 euros et 34 000 euros à compter du 1er mai 2010.
3. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la vérification de comptabilité, M. A...D...n'a pas été en mesure de présenter les documents comptables qu'il devait tenir, en particulier un livre-journal présentant le détail de ses recettes professionnelles ainsi que l'ensemble des factures et pièces justificatives, de sorte qu'un procès-verbal de non-présentation de comptabilité a été dressé le 16 novembre 2012. Le service a ainsi pu, à bon droit, procéder à la reconstitution des chiffres d'affaires générés par l'activité de l'intéressé, ce qu'il ne conteste d'ailleurs pas. Lors des opérations de contrôle, M. A...D...a indiqué avoir comme cliente unique la société AS Sécurité, intervenir conjointement avec son frère, M. B...D..., qui exerçait également une activité individuelle de sécurité et gardiennage, et encaisser des recettes professionnelles sur deux comptes bancaires dont il n'avait pas conservé les relevés. Le vérificateur a reconstitué les chiffres d'affaires de l'activité, pour chacun des exercices contrôlés, à partir des factures qui ont pu être présentées, des informations obtenues dans le cadre de l'exercice du droit de communication auprès de la société AS Sécurité, et à partir de l'examen des relevés des comptes bancaires détenus par M. A...D...au sein de la Banque Populaire Occitanie et du Crédit Mutuel, également obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès de ces établissements bancaires. Le vérificateur a fixé les chiffres d'affaires TTC réalisés par M. A...D...aux montants de 52 131 euros au titre de l'exercice 2009, 152 527 euros au titre de l'exercice 2010, 103 083 euros au titre de l'exercice 2011 et 20 868 euros au titre de l'exercice 2012, les montants hors taxe correspondants excédant les seuils d'application du régime de la franchise en base rappelés au point 2 du présent arrêt. En se bornant à faire valoir, sans aucune précision, qu'un " certain nombre " de recettes ont été incluses à la fois dans ses chiffres d'affaires et dans ceux réalisés par l'entreprise de son frère et que certains de ses crédits bancaires ont été regardés à tort comme correspondant à des recettes professionnelles, le requérant n'apporte pas d'éléments permettant de regarder la reconstitution opérée par le vérificateur comme erronée. Par ailleurs, M. A...D...soutient que la somme de 15 881, 25 euros, encaissée sur son compte bancaire le 8 décembre 2010, a été intégrée à tort dans son chiffre d'affaires de l'année 2010 alors qu'elle correspondait à une facture émise le 4 novembre 2010 par l'entreprise individuelle exploitée par son frère. Cependant, quand bien même l'administration n'aurait pas inclus cette somme, les chiffres d'affaires réalisés par le requérant auraient tout de même été nettement supérieurs aux seuils lui permettant de bénéficier du régime de franchise en base prévu par l'article 293 B du code général des impôts. Il s'ensuit que M. A...D..., qui ne peut utilement soutenir qu'il ignorait ses obligations fiscales et aurait opté pour le régime d'imposition du régime des micro-entreprises sous franchise de taxe à la demande de sa cliente, ne relevait pas, pour la période en litige, du régime de la franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée.
S'agissant des bases d'imposition :
4. M. A...D..., redevable de la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période vérifiée, n'a pas répondu dans le délai légal à la proposition de rectification du 3 décembre 2012 relative aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009 qui lui ont été assignés selon la procédure de rectification contradictoire. Par ailleurs, n'ayant pas déposé les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée qu'il était tenu de souscrire, il a été régulièrement taxé d'office en application du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales au titre de la période allant du 1er janvier 2010 au 4 juillet 2012. Il lui incombe dès lors, en vertu des articles R. 194-1 et L. 193 du même code, d'établir l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration.
5. M. A...D...conteste l'intégration, dans son chiffre d'affaires de l'année 2010, d'une somme de 15 881,25 euros encaissée sur son compte bancaire le 8 décembre 2010. Il fait valoir qu'une somme d'un montant identique, qui figure sur une facture émise le 4 novembre 2010 par l'entreprise exploitée par son frère, M. B...D..., a été incluse par l'administration dans les recettes reconstituées de ce dernier. Toutefois, il n'est nullement démontré que le crédit bancaire de 15 881,25 euros figurant sur son compte correspondrait au paiement de la facture du 4 novembre 2010. Par ailleurs, si le requérant fait valoir qu'un " certain nombre " de recettes auraient été incluses à la fois dans ses chiffres d'affaires et dans ceux réalisés par l'entreprise de son frère, il n'apporte aucune précision à cet égard. Enfin, il n'est nullement établi qu'une partie des crédits bancaires, au demeurant non identifiés, intégrés par le service dans les chiffres d'affaires réalisés par le requérant, ne correspondraient pas aux recettes tirées de son activité de sécurité et de gardiennage. M. A...D...ne démontre ainsi pas le caractère exagéré des bases d'imposition retenues par l'administration.
En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu :
S'agissant du régime d'imposition :
6. Aux termes de l'article 50-0 du code général des impôts, relatif au régime d'imposition des bénéfices dit des micro-entreprises : " 2. Sont exclus de ce régime : (...) b. Les contribuables qui ne bénéficient pas des dispositions des I et II de l'article 293 B. Cette exclusion prend effet à compter du 1er janvier de l'année de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée (...). ".
7. Ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent arrêt, M. A...D...ne relevait pas, pour la période litigieuse, du régime de la franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée prévu par l'article 293 B du code général des impôts. Dès lors, en application des dispositions précitées du 2 b de l'article 50-0 du code général des impôts, il ne pouvait relever, pour l'imposition des bénéfices industriels et commerciaux réalisés au cours des années 2009, 2010 et 2011, du régime dit des micro-entreprises défini à l'article 50-0 du code général des impôts.
S'agissant des bases d'imposition :
8. M. A...D...n'a pas répondu dans le délai légal à la proposition de rectification du 3 décembre 2012 relative aux compléments d'impôt sur le revenu de l'année 2009 qui lui ont été assignés selon la procédure de rectification contradictoire. Il n'a par ailleurs pas déféré aux mises en demeure de l'administration de souscrire des déclarations de bénéfices industriels et commerciaux au titre des années 2010 et 2011, de sorte que ses bénéfices imposables ont été régulièrement évalués d'office en application des articles L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales. Il lui incombe dès lors, en vertu des articles R. 194-1 et L. 193 du même code, d'établir l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration.
9. D'une part, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 5 du présent arrêt, le requérant n'établit pas que l'administration aurait intégré à tort dans ses chiffres d'affaires des recettes réalisées par l'entreprise exploitée à titre individuel par son frère ou encore des sommes ne correspondant pas à des recettes professionnelles.
10. D'autre part, et contrairement à ce qui est soutenu, il résulte de l'instruction que le requérant n'a nullement déclaré l'ensemble des bénéfices réalisés au titre des années 2009 à 2011 par son entreprise de sécurité et de gardiennage.
Sur les pénalités :
11. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai (...) ". Aux termes de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales: " La décision d'appliquer les majorations et amendes prévues aux articles 1729, 1732 et 1735 ter du code général des impôts est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités ".
12. Il résulte de l'instruction que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en litige ont été assortis, soit de la majoration de 10 % prévue au 1 a) de l'article 1728 du code général des impôts, soit de la majoration de 40 % prévue au 1 b) du même article ; en revanche, ces rehaussements n'ont pas été assortis de la majoration pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 dudit code. Or, et ainsi que l'a relevé le tribunal administratif, les dispositions précitées de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales ne sont pas applicables aux majorations de 10 % ou de 40 % infligées sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts. Il s'ensuit que le moyen tiré la méconnaissance des dispositions de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales est inopérant à l'appui de la contestation des majorations en litige.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2019 à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Laurent Pouget, président-assesseur,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 25 juillet 2019.
Le rapporteur,
Marie-Pierre BEUVE DUPUYLe président,
Aymard de MALAFOSSE
Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX03569