Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...F...a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner la commune d'Ondres à lui verser la somme de 18 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi en raison de son éviction du marché de la commune sur lequel il exerçait chaque dimanche matin sa profession de crémier-fromager.
Par un jugement n° 1600222 du 24 mai 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2017, M.F..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 24 mai 2017 ;
2°) de condamner la commune d'Ondres à lui verser la somme de 18 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la demande indemnitaire préalable ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Ondres une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- son exclusion du marché de la commune d'Ondres a été décidée suivant un motif illégal ; aucun trouble à l'ordre public n'a été causé, de sorte que l'éviction du marché n'était nullement justifiée pour assurer le bon ordre sur le marché ; en outre, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il n'était pas dépourvu de titre pour l'année 2015 et avait respecté les règles de fonctionnement du marché ; il ne s'est aucunement vu signifier une quelconque décision prise par l'autorité compétente et prononçant son éviction ou annulant l'autorisation d'occupation du marché dont il bénéficiait, de sorte que la police municipale n'était pas en mesure de le contraindre à quitter le marché où il exerçait régulièrement depuis janvier 2015 ;
- le refus de renouveler son abonnement au marché municipal d'Ondres est entaché de détournement de pouvoir ; les règles de fonctionnement du marché d'Ondres de 2007 ne mentionnent pas l'obligation de produire les bulletins de salaires des salariés ; en tout état de cause, Mme G...B...a pu présenter son bulletin de salaire aux policiers municipaux chaque fois que ceux-ci le lui ont demandé ; cette décision résulte de la seule volonté du maire de voir installer un ami fromager sur l'emplacement qu'il occupait ; le comportement fautif résultant de la mesure d'exclusion prise illégalement porte directement atteinte à ses droits en sa qualité de commerçant du marché d'Ondres, et à la liberté du commerce et de l'industrie ;
- son exclusion du marché d'Ondres est totalement illégale et constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ; son éviction irrégulière lui a causé un préjudice matériel certain et direct, dans la mesure où il se trouve privé de vendre ses produits le dimanche sur le marché d'Ondres depuis le mois de mai 2015 ; ce préjudice matériel correspondant à une perte du chiffre d'affaires (de mai 2015 à décembre 2015) d'un montant de 16 000 euros, auquel s'ajoute une perte sur investissement personnel à hauteur de 2 000 euros, soit un préjudice total de 18 000 euros, arrêté au 31 décembre 2015.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2018, la commune d'Ondres, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête à ce que M. F...soit condamné à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- M. F...n'a pas fait l'objet d'une exclusion du marché, mais d'un non-renouvellement de son autorisation temporaire d'occupation du domaine public sur le marché d'Ondres ; son dossier de demande pour l'année 2015 était incomplet et ce, malgré plusieurs relances des services de la police municipale pour obtenir les pièces manquantes; invité à s'expliquer sur cette demande incomplète, M. F...a réagi de façon violente, ce qui a conduit la commission des marchés, à l'unanimité des votants, à ne pas lui accorder un abonnement au titre de l'année 2015 ; si M. F...conteste la véracité des propos qui lui sont attribués, la commune d'Ondres observe que le procès-verbal de la commission a été rédigé de la main du chef de la police municipale, agent assermenté, et qu'il appartient au requérant d'apporter la preuve contraire ; en outre, le fait que M. F...ait pu s'installer sur le marché du 1er janvier 2015 jusqu'au 17 mai 2015, de la même manière que les années précédentes, ne signifiait pas qu'il disposait formellement d'un titre d'occupation pour l'année 2015 dès lors qu'il n'existe pas d'autorisation d'occupation tacite sur le domaine public ; compte-tenu du régime des autorisations d'occupation domaniale, il ne peut prétendre à indemnisation dans la mesure où le refus d'accès au marché n'est pas illégal ;
- M. F...ne produit aucun document permettant d'établir l'exactitude et la réalité du préjudice dont il est demandé l'indemnisation.
Par ordonnance du 1er août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 26 septembre 2018 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- l'arrêté municipal du 27 juin 2003 portant réglementation du marché d'Ondres ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Gay-Sabourdy,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public ;
- et les observations de Me E...se substituant à MeD..., représentant la commune d'Ondres.
Considérant ce qui suit :
1. M.F..., exerçant la profession de crémier-fromager, était titulaire d'une autorisation temporaire d'occupation domaniale sur le marché de la commune d'Ondres depuis l'année 2009. Le 7 octobre 2015, M. F...a demandé au maire la réparation du préjudice matériel qu'il estime avoir subi du fait de son éviction illégale du marché depuis le 17 mai 2015, par l'octroi d'une indemnisation d'un montant de 14 000 euros. Par un jugement du 24 mai 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser une somme de 18 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la demande indemnitaire préalable. M. F...relève appel de ce jugement.
Sur la responsabilité de la commune d'Ondres :
2. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous ". Aux termes de l'article L. 2122-2 du même code : " L'occupation ou l'utilisation du domaine public ne peut être que temporaire ". Aux termes de l'article L. 2224-18 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable: " (...) Le régime des droits de place et de stationnement sur les halles et les marchés est défini conformément aux dispositions d'un cahier des charges ou d'un règlement établi par l'autorité municipale après consultation des organisations professionnelles intéressées ". Aux termes de l'article 3 du règlement du marché de la commune d'Ondres du 27 juin 2003 : " Sont autorisés à vendre sur les marchés, dans la limite des places disponibles et suivant les règles d'attribution des places, les personnes ayant satisfait aux déclarations et obligations qui leur incombent dans le cadre de la réglementation nationale et locale ". Aux termes de l'article 5 du même règlement, définissant les conditions générales de délivrance des autorisations : " A. Toutes les demandes d'attribution d'emplacement fixe selon le principe de 1'abonnement, doivent être formulées par écrit à M. H...de la Commune. Toute demande enregistrée est valable pour l'année en cours, elle doit être renouvelée par les intéressés, dans les meilleures conditions, chaque année dans la période du 1er janvier au 28 février. A défaut de renouvellement, la demande est classée sans suite (...) Elles doivent être accompagnées des photocopies des documents permettant d'exercer une activité de distribution sur le domaine public. Le demandeur devra présenter les originaux au moment de l'attribution de l'emplacement, faute de quoi, elle n'aura pas lieu et il perdra l'ancienneté de sa demande (...) Assiduité (...) L'abonné (...) ne peut se faire remplacer que par son conjoint s'il est titulaire de la carte permettant l'exercice d'activités non sédentaires en qualité de conjoint ou salarié au même titre qu'un vendeur salarié de son entreprise (...) C (...) L'attribution d'un emplacement est un acte administratif qui confère un droit personnel d'occupation du domaine public. / Le titulaire de ce droit personnel n'a pas compétence pour attribuer ce droit à une tierce personne (...) ". Enfin, selon l'article 9 de ce même règlement, concernant les documents nécessaires pour les personnes salariées : " 3) les salariés exerçant de façon autonome : [...] le bulletin de salaire (...) ou (...) la photocopie de la déclaration préalable d'embauche faite à l'URSSAF (...) ".
3. Il résulte du compte-rendu de la commission des marchés du 7 mai 2015 que M. F..., commerçant abonné en 2014, avait justifié ses nombreuses absences en 2014 par des difficultés rencontrées avec une de ses salariées et que, le 25 novembre 2014, la commission des marchés, à titre exceptionnel, avait décidé de ne pas faire perdre à M. F...le bénéfice de son abonnement pour l'année 2014. Au titre de l'année 2015, M. F...a présenté deux demandes les 2 janvier et 27 avril 2015 tendant au renouvellement d'une autorisation d'occuper un emplacement sur le marché communal. Si M. F...relève de la première catégorie de la liste de l'article 9 du règlement du marché, dès lors qu'il exerce son activité en tant que commerçant ayant un domicile fixe, et était tenu de produire les documents figurant au 1) de ce même article 9, il est constant qu'il avait l'habitude de se faire remplacer sur le marché d'Ondres. A ce titre, la commission des marchés était fondée à lui demander la production des documents mentionnés au 3) de ce même article afin de prouver que cette personne pouvait être regardée comme salariée. Il résulte de l'instruction que, malgré plusieurs relances, l'intéressé n'a pas communiqué les bulletins de salaires de son employée et que la commission des marchés a, à l'unanimité des votants, décidé de ne pas renouveler son abonnement pour l'année 2015 au regard du comportement violent de l'intéressé lorsqu'il a été invité à s'expliquer devant la commission. Ainsi, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Pau a jugé que M. F... n'était personnellement titulaire d'aucun titre l'habilitant à occuper un emplacement sur le marché d'Ondres, qui constitue une dépendance du domaine public communal. Par ailleurs, la circonstance que M. F...ait été présent sur l'emplacement du marché d'Ondres du 1er janvier au 17 mai 2015 n'a pu avoir pour effet de prolonger un droit qu'il ne détenait pas. Dans ces conditions, la commune d'Ondres, en refusant l'installation sur l'emplacement en litige à M.F..., qui l'occupait jusque-là sans titre, n'a pas fait une application erronée du règlement du 27 juin 2003.
4. L'autorité chargée de la gestion du domaine public peut autoriser une personne privée à occuper une dépendance de ce domaine en vue d'y exercer une activité économique, à la condition que cette occupation soit compatible avec l'affectation et la conservation de ce domaine. La décision de délivrer ou non une telle autorisation, que l'administration n'est jamais tenue d'accorder, n'est pas susceptible, par elle-même, de porter atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie. Par suite, le moyen tiré de ce que " l'exclusion " de l'appelant du marché d'Ondres porterait atteinte à ses droits en sa qualité de commerçant et violerait la liberté de commerce et d'industrie ne peut qu'être écarté.
5. En se bornant à soutenir que son exclusion résulte de la volonté du maire d'Ondres de voir installer un ami fromager sur l'emplacement qu'il occupait, M. F...n'établit pas le détournement de pouvoir allégué. En outre, si M. F...affirme exercer son activité au sein de sept communes du pays basque et être présent sur onze marchés sans avoir rencontré de difficultés, cette circonstance est sans influence sur la légalité de la décision de refus de renouvellement de son emplacement sur le marché d'Ondres.
6. Il résulte de ce qui précède qu'en refusant l'installation de M. F...sur le marché d'Ondres pour l'année 2015, le maire n'a pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de la commune. Par suite, M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Ondres, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. F...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de M. F...la somme de 1 000 euros à verser à la commune au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.
Article 2 : M. F...versera à la commune d'Ondres la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...F...et à la commune d'Ondres.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 juin 2019.
Le rapporteur,
Nathalie GAY-SABOURDYLe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au préfet des Landes, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition certifiée conforme.
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No 17BX02431