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01/04/2019 | FRANCE | N°17BX03851

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 01 avril 2019, 17BX03851


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, d'annuler la décision par laquelle le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion a rejeté sa demande, formulée dans une lettre du 3 novembre 2011, tendant à la mise en oeuvre de la garantie de revenus contenue dans le contrat de prévoyance collective signé entre l'établissement et le groupe AG2R La Mondiale et, d'autre part, de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat à lui verser la somme to

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Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, d'annuler la décision par laquelle le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion a rejeté sa demande, formulée dans une lettre du 3 novembre 2011, tendant à la mise en oeuvre de la garantie de revenus contenue dans le contrat de prévoyance collective signé entre l'établissement et le groupe AG2R La Mondiale et, d'autre part, de condamner la chambre de métiers et de l'artisanat à lui verser la somme totale de 47 903,03 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'absence de mise en oeuvre de cette garantie au cours de la période litigieuse du 1er juin 2009 au 19 mai 2011.

Par un jugement n° 1200249 du 26 juin 2014, le tribunal administratif de La Réunion a condamné la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion à verser à Mme C...une indemnité de 37 000 euros et rejeté le surplus de sa demande.

Par un arrêt n° 14BX02730 du 28 juin 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux, saisie par la chambre des métiers et de l'artisanat de La Réunion, a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de La Réunion et ses conclusions d'appel.

Par une décision n° 402923 du 6 décembre 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par MmeC..., a annulé cet arrêt n° 14BX02730 du 28 juin 2016 de la cour administrative d'appel de Bordeaux et renvoyé l'affaire devant la cour.

Procédure devant la cour :

Par un mémoire enregistré le 28 février 2018, Mme B...C..., représentée par la SCP Moreau - Nassar - Han Kwan, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête d'appel de la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion ;

2°) de réformer le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 26 juin 2014 en ce qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes indemnitaires ;

3°) de mettre à la charge de la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- ses réclamations indemnitaires de première instance étaient recevables dès lors qu'elles ont été précédées de trois décisions successives de l'organisme public lui ayant opposé un refus à sa demande de maintien de sa rémunération ;

- sur le fond, la clause du contrat d'adhésion prévoyance signé entre AG2R et la Chambre de métiers et de l'artisanat, qui stipule qu'est garantie l'invalidité du participant lorsque la date initiale de l'arrêt de travail pour maladie ou accident est postérieure à la date d'effet du contrat et qui exclut donc de sa garantie les situations d'invalidité dont la date de l'arrêt initial est antérieure à son entrée en vigueur, est contraire aux dispositions d'ordre public des articles 2 et 7 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 2009 ;

- en effet, par les dispositions de l'article 2, le législateur a entendu imposer aux assureurs la prise en charge des risques non encore réalisés à la date de la souscription du contrat mais qui trouvent leur origine dans l'état de santé de l'assuré antérieur à la date d'effet du contrat, de sorte que sous réserve de l'application des dispositions de l'article 7 qui organisent la poursuite de la prise en charge des garanties après la cessation du contrat, l'assureur ne peut refuser sa garantie aux assurés reconnus invalides postérieurement à la date de prise d'effet du contrat au motif que l'arrêt de travail est antérieur à cette prise d'effet ;

- ainsi, dès lors que les agents de la chambre des métiers et de l'artisanat de La Réunion ne bénéficiaient pas d'une garantie collective en matière d'invalidité avant l'entrée en vigueur du contrat d'assurance conclu le 13 janvier 2009, elle avait droit à obtenir les sommes dues au titre de la garantie invalidité, donc au maintien de sa rémunération à 80 % de son salaire brut au cours de la période de juin 2009 à mai 2011, de sorte que son préjudice correspond à la différence entre le maintien de ladite rémunération à 80 % de son salaire brut et les indemnités journalières perçues sur cette période ;

- au demeurant, la CMA avait reconnu qu'un tel maintien était de droit dès lors que, d'une part, elle avait précisé, dans son courrier du 6 mars 2012, que les arrêts antérieurs au 1er janvier 2009 ne sont pas couverts, ce qui signifie, a contrario, que la période d'invalidité comprise entre juin 2009 et mai 2011 aurait dû être couverte et que, d'autre part, il avait commencé à s'exécuter en procédant au maintien de son salaire pour les mois de juin, juillet et août 2009, avant de se rétracter en émettant des bulletins de paie négatifs ou nuls pour les mois de septembre, octobre et décembre 2009 ;

- alors qu'il semble qu'en pratique, l'absence de mise en oeuvre de la prévoyance à son profit résulte non d'une difficulté juridique mais d'une erreur technique, ce que le responsable de développement d'AG2R La Mondiale a expliqué dans son mail du 23 février 2011, la CMA n'a pas sollicité l'organisme de prévoyance afin d'en assurer la résolution ;

- elle a ainsi droit au paiement des sommes de 35 920,94 euros au titre du maintien de salaire sur la période de juin 2009 à mai 2011, 5 692,09 euros au titre du 13ème mois pour les années 2009, 2010 et 2011, 1 290,00 euros au titre des frais de déménagement dans un logement plus petit induits par sa perte de revenus et 5 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Par un mémoire enregistré le 5 avril 2018, la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion, représentée par MeA..., conclut à l'annulation du jugement du 26 juin 2014 du tribunal administratif de La Réunion, au rejet des demandes de Mme C...et à ce que soit mise à la charge de l'intéressée la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas rejeté la demande de première instance de Mme C...comme irrecevable dès lors qu'en méconnaissance de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, elle n'avait pas été précédée d'une réclamation préalable indemnitaire, laquelle ne saurait être constituée par la lettre du 3 novembre 2011 qu'elle avait adressée à la chambre et dans laquelle elle s'était contentée de solliciter que soient déterminées les modalités de mise en oeuvre de la garantie d'invalidité dont elle estimait devoir bénéficier sur la période du 1er juin 2009 au 19 mai 2011 sans invoquer à aucun moment un quelconque comportement fautif de la chambre ni solliciter, davantage, le paiement d'une somme à titre d'indemnisation ;

- d'ailleurs, la chambre a satisfait à l'unique demande de Mme C...contenue dans cette lettre du 3 novembre 2011, en l'occurrence de solliciter du groupe AG2R La Mondiale un nouvel examen de sa situation contractuelle, ce qui l'a conduite, par lettre du 6 mars 2012, à l'aviser des raisons pour lesquelles la garantie ne pouvait être mobilisée ;

- en tout état de cause, l'action introduite par Mme C...était infondée, dès lors que les articles 2 et 7 de la loi Evin ne prescrivent aucune obligation aux employeurs souscripteurs d'un contrat de prévoyance obligatoire mais se contentent de préciser l'application dans le temps des garanties souscrites auprès des organismes de prévoyance, lesquels sont seuls débiteurs de l'exécution des contrats d'assurance collective dans le respect des prescriptions de la loi, à l'inverse des employeurs dont l'obligation se limite à la souscription de ces garanties lorsqu'elle est prescrite par la loi ou les dispositions conventionnelles en vigueur ;

- or en l'espèce, il résulte de l'article 46 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat que les chambres consulaires n'ont l'obligation de contracter une prévoyance collective obligatoire couvrant les risques d'incapacité, d'invalidité et de décès que depuis janvier 2009, ce qui a conduit par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion à souscrire, dès le 13 janvier 2009, un contrat de prévoyance obligatoire garantissant les risques envisagés par le statut ;

- ainsi, le préjudice financier allégué par Mme C...ne résulte pas directement de la faute reprochée à la CMA mais de l'absence de mise en oeuvre de la garantie, laquelle est imputable, d'une part, au refus abusivement opposé par le groupe AG2R La Mondiale, seule débitrice de la garantie, sur la base d'une clause qu'elle sait manifestement illicite, et, d'autre part, de l'abstention fautive de Mme C...qui a omis d'actionner directement la garantie de l'AG2R La Mondiale en saisissant les juridictions judiciaires d'une action en paiement des sommes dues en exécution du contrat ;

- à cet égard, le préjudice invoqué, consistant en une perte de revenus, consécutive à la privation de la garantie pour invalidité, n'est à ce jour pas même réalisé ou certain, dès lors que cette garantie subsiste précisément par l'effet de l'article 2 de la loi Evin, rien n'empêchant l'intéressée d'agir contre l'AG2R La Mondiale pour obtenir le paiement des sommes auxquelles elle estime avoir droit.

Par ordonnance du 5 avril 2018, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 26 avril 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 modifiée ;

- la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Axel Basset,

- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., enseignante recrutée par la chambre de métiers et de l'artisanat (CMA) de La Réunion en 1983 puis titularisée deux ans plus tard, a été admise, après avoir été placée en mi-temps thérapeutique en 2008, au bénéfice d'une pension d'invalidité, tenant compte d'une incapacité de deux tiers, par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à compter du 1er juin 2009. Ayant pu reprendre son activité en tant qu'attachée administrative à mi-temps au centre de formation des apprentis (CFA) de Saint-Clotilde à compter du 19 mai 2011, l'intéressée a sollicité en vain auprès de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion la mise en oeuvre de la garantie d'invalidité prévue, en cas d'incapacité de travail, par le contrat de prévoyance collective souscrit le 13 janvier 2009 pour ses agents auprès de la société AG2R La Mondiale, en application de l'article 46 du statut des personnels des chambres de métiers et de l'artisanat. Mme C...a alors saisi le tribunal administratif de La Réunion aux fins d'obtenir la condamnation de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion à lui verser la somme totale de 47 903,03 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'absence de mise en oeuvre de la garantie de revenus au cours de la période litigieuse du 1er juin 2009 au 19 mai 2011. Par un jugement du 26 juin 2014, ce tribunal a condamné la chambre à verser à Mme C... la somme de 37 000 euros au titre de ses pertes de revenus et rejeté le surplus de sa demande. Saisie par la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, par un arrêt du 28 juin 2016, annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de La Réunion et ses conclusions d'appel. Toutefois, par une décision n° 402923 du 6 décembre 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par Mme C..., a annulé cet arrêt du 28 juin 2016 et renvoyé l'affaire devant la cour.

Sur l'appel principal de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction qu'alors qu'elle se trouvait placée en arrêt de travail pour invalidité, Mme C...a sollicité du président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion, son employeur, la mise en oeuvre de la garantie de revenus prévue par le contrat de prévoyance collective souscrit le 13 janvier 2009 en faveur des agents de ladite chambre consulaire. S'étant vu notifier, par lettre du 7 mars 2011, le refus de la société AG2R La Mondiale d'appliquer cette garantie au motif tiré de ce que la date de son arrêt de travail initial était antérieure au 1er janvier 2009, date de prise d'effet du contrat de prévoyance, Mme C... a, par une lettre du 3 novembre 2011 adressée par l'intermédiaire de son conseil, indiqué à la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion que le refus qui lui avait ainsi été opposé occasionnait pour elle une perte de revenus excédant la somme de 30 000 euros et que " à défaut par l'employeur de solliciter [de la société AG2R La Mondiale] la mise en oeuvre du contrat de prévoyance, il [devait] garantir à son personnel les droits nés dudit contrat ". La chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion soutient que, dans cette lettre, le conseil de Mme C...s'est borné à l'inviter à se " rapprocher [de l'intéressée] afin de déterminer les modalités de mise en oeuvre de la garantie d'invalidité dont elle doit bénéficier pour la période comprise entre le 1er juin 2009 et le 19 mai 2011 " et de l'en tenir informée. Toutefois, en demandant directement à son employeur de lui faire bénéficier de la clause, à caractère financier, du contrat de prévoyance conclu par la CMA avec la société AG2R La Mondiale, le cas échéant en se substituant à celle-ci dans l'exécution de ladite obligation, Mme C...a nécessairement entendu obtenir le paiement de la somme à laquelle elle estimait pouvoir prétendre en application du contrat d'assurance, et qu'elle avait déjà évaluée à un minimum de 30 000 euros. Dès lors, et contrairement à ce que fait valoir la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion, la lettre du 3 novembre 2011 doit être regardée, eu égard à son objet et aux termes dans lesquels elle est rédigée, comme constituant une réclamation préalable de nature à lier le contentieux indemnitaire. Il s'ensuit qu'ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, la demande de première instance de Mme C...était recevable.

En ce qui concerne le bien-fondé de la condamnation prononcée par le tribunal :

4. Aux termes de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1989 susvisée : " Lorsque des salariés sont garantis collectivement, soit sur la base d'une convention ou d'un accord collectif, soit à la suite de la ratification par la majorité des intéressés d'un projet d'accord proposé par le chef d'entreprise, soit par décision unilatérale de l'employeur, contre le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité, l'organisme qui délivre sa garantie prend en charge les suites des états pathologiques survenus antérieurement à la souscription du contrat ou de la convention ou à l'adhésion à ceux-ci, sous réserve des sanctions prévues en cas de fausse déclaration. ". Aux termes de l'article 7 de cette loi : " Lorsque des assurés ou des adhérents sont garantis collectivement contre les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, le risque décès ou les risques d'incapacité ou d'invalidité, la résiliation ou le non-renouvellement du contrat ou de la convention est sans effet sur le versement des prestations immédiates ou différées, acquises ou nées durant son exécution. Le versement des prestations de toute nature se poursuit à un niveau au moins égal à celui de la dernière prestation due ou payée avant la résiliation ou le non-renouvellement, sans préjudice des révisions prévues dans le contrat ou la convention. De telles révisions ne peuvent être prévues à raison de la seule résiliation ou du seul non-renouvellement. / L'engagement doit être couvert à tout moment, pour tous les contrats ou conventions souscrits, par des provisions représentées par des actifs équivalents. ". Aux termes de l'article 10 de ladite loi : " Les articles 2, 4, 7, 9 et 31 sont des dispositions d'ordre public et s'appliquent quelle que soit la loi régissant le contrat. ".

5. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1989 que le législateur a entendu imposer aux assureurs la prise en charge des risques non encore réalisés à la date de la souscription du contrat mais qui trouvent leur origine dans l'état de santé de l'assuré antérieur à la date d'effet du contrat. Par suite et sous réserve, en cas de succession de contrats de prévoyance collective, de l'application des dispositions de l'article 7 qui organisent la poursuite de la prise en charge des garanties après la cessation du contrat, l'assureur ne peut refuser sa garantie aux assurés reconnus invalides postérieurement à la date de prise d'effet du contrat au motif que l'arrêt de travail est antérieur à cette prise d'effet. Il est constant que les agents de la chambre des métiers et de l'artisanat de La Réunion ne bénéficiaient pas d'une garantie collective en matière de risque invalidité avant l'entrée en vigueur du contrat d'assurance conclu le 13 janvier 2009. Dès lors, la clause du contrat de prévoyance collective souscrit, en application de l'article 46 du statut des personnels des chambres de métiers et de l'artisanat, par la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion au profit de ses agents auprès de la société AG2R La Mondiale, qui stipule que : " Est garantie l'invalidité du participant prévue ci-après, lorsque la date initiale de l'arrêt de travail pour maladie ou accident est postérieure à la date d'effet du présent contrat ", méconnait les dispositions d'ordre public de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1989 et est, partant, entachée d'illicéité.

6. En second lieu, il est vrai, ainsi que le soutient la chambre des métiers et de l'artisanat de La Réunion, qu'il ne lui incombait pas de se substituer à la société AG2R La Mondiale dans la mise en oeuvre effective de la garantie de revenus au titre de la période du 1er juin 2009 au 19 mai 2011 où Mme C...se trouvait placée en arrêt de travail pour invalidité. Toutefois, en signant un contrat de prévoyance collective comportant la clause litigieuse, laquelle - ainsi qu'il vient d'être dit au point 5 - permettait à l'assureur de refuser la garantie invalidité aux agents lorsque la date initiale de l'arrêt de travail était antérieure à la date d'effet du contrat en méconnaissance des dispositions d'ordre public de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1989 et, partant, avait pour effet de priver les agents concernés du complément de revenus auxquels ils avaient droit en cas de survenance du risque invalidité, la chambre consulaire a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de MmeC.... Dès lors, la chambre de métiers et de l'artisanat de la Réunion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont alloué à Mme C...la somme de 37 000 euros, non contestée dans son quantum, au titre du préjudice financier subi par elle au cours de la période litigieuse de juin 2009 à mai 2011 du fait de la non mise en jeu de la garantie de maintien de salaire, en tenant compte de la pension d'invalidité qu'elle a perçue par ailleurs.

Sur l'appel incident de MmeC... :

7. Il n'appartient pas au juge d'appel, devant lequel le demandeur de première instance ne conteste pas la fin de non-recevoir opposée à ses conclusions par le tribunal, de rechercher d'office si cette fin de non-recevoir a été soulevée à bon droit.

8. Les premiers juges ont indiqué, dans le jugement attaqué, que si la lettre susmentionnée du 3 novembre 2011 avait lié le contentieux s'agissant du préjudice financier subi par Mme C...au titre de se perte de compléments de revenus, en revanche, il n'en était pas de même s'agissant du préjudice moral invoqué et du préjudice subi en matière de frais de déménagement, qui n'avaient pas été mentionnés dans ladite demande. Mme C...ne conteste pas cette irrecevabilité devant la cour. Dès lors, ses conclusions, présentées dans le cadre de son appel incident, tendant à la réformation du jugement du tribunal administratif de La Réunion en ce qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes indemnitaires doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeC..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion une somme de 1 500 euros à verser à Mme C...sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion est rejetée.

Article 2 : La chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion versera la somme de 1 500 euros à Mme C...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions d'appel de Mme C...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et à la chambre de métiers et de l'artisanat de La Réunion. Copie en sera transmise au ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 18 mars 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, président assesseur,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er avril 2019.

Le rapporteur,

Axel BassetLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

7

N° 17BX03851


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX03851
Date de la décision : 01/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Assurance et prévoyance - Contrats d'assurance.

Procédure - Introduction de l'instance - Liaison de l'instance.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Axel BASSET
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CABINET JEAN-JACQUES MOREL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-04-01;17bx03851 ?
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