Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Gaz réseau distribution de France (GRDF) a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les articles 60, 65, 68 et certaines dispositions de la partie 5 du règlement de voirie départemental des Pyrénées-Atlantiques adopté le 20 novembre 2014, ensemble la décision du 21 avril 2015 du président du conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques rejetant son recours gracieux, et d'enjoindre au département des Pyrénées-Atlantiques d'abroger ou de modifier ces dispositions sans délai à compter du prononcé du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1501348 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif de Pau a seulement partiellement fait droit à cette demande en annulant certaines prescriptions techniques comprises dans la partie 5 du règlement de voirie départemental, et a rejeté le surplus des demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 février 2017 et des mémoires enregistrés le 14 juin 2018, le 8 août 2018 et le 25 janvier 2019, la société GRDF, représentée par l'AARPI Frèche et associés, demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Pau du 15 décembre 2016 en tant qu'il a refusé d'annuler les articles 60, 65 et 68 du règlement de voirie départemental et certaines prescriptions et dispositions comprises dans sa partie 5, relatives aux couches de roulement récentes et spécifiques aux voies neuves et à la découpe de la chaussée, ainsi que les coupes schématiques figurant pages 119 à 122 et 124, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux du 21 avril 2015 ;
2°) de mettre à la charge du département des Pyrénées-Atlantiques une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont omis de statuer sur les moyens tirés d'une part de l'incompétence de l'autorité signataire de la décision de rejet de son recours gracieux et de ce que l'article 60 du règlement attaqué méconnaît les dispositions du code du travail en ce qu'il a pour effet de mettre à la charge de l'intervenant sur voirie une obligation de recherche d'amiante et en ce qu'il va au-delà de ce qu'imposent les dispositions du code du travail relatives aux relations entre les employeurs et leurs salariés ;
- la décision de rejet du recours gracieux du 21 avril 2015 est signée par une autorité incompétente ;
- le tribunal administratif a entaché son jugement de contradiction de motifs en jugeant que dans le cas prévu par l'article 60 du règlement attaqué, les travaux ne seront engagés que dans l'intérêt des réseaux appartenant aux sociétés concessionnaires, mais aussi que ces mêmes travaux seront également à la charge du concessionnaire lorsqu'ils sont la conséquence de travaux réalisés dans l'intérêt du domaine occupé ;
- en n'annulant pas les schémas des pages 119 à 122 et 124 ni la deuxième phrase de l'alinéa 2 de l'article 60, alors que ces annulations constituent la conséquence nécessaire de l'annulation des autres dispositions relatives à la " Découpe de la chaussée ", le tribunal a entaché sa décision d'omission à statuer et n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations ;
- en n'annulant pas les autres dispositions de la partie 5 du règlement dont elle demandait l'annulation, alors que celle-ci était la conséquence nécessaire de l'annulation des autres dispositions relative aux prescriptions des couches de roulement récentes et spécifiques aux voies neuves, le tribunal a entaché sa décision d'omission à statuer sur ces conclusions et n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations ;
- la délibération du 20 novembre 2014 approuvant le règlement de voirie est entachée d'illégalité dès lors qu'elle ne vise pas expressément l'avis de la commission prévue par l'article R. 141-14 du code de la voirie routière et que cet avis n'a pas été rendu ;
- les dispositions de l'article 60 du règlement de voirie lui imposent des règles plus contraignantes que celles issues des textes règlementaires auxquels GRDF est par ailleurs soumise, sans que ces dispositions soient indispensables à la protection du domaine public, dès lors qu'elles ont pour effet de lui faire supporter la charge financière et technique de faire procéder à un repérage " amiante " (ou de tout autre type de produit dangereux) et, le cas échéant, à un désamiantage ou à une dépollution de la zone, ce qui correspond à une amélioration du domaine ;
- les dispositions de l'article 60 du règlement de voirie sont dépourvues de base légale car elles poursuivent un objectif étranger à celui pour lequel ce règlement est établi ;
- les dispositions de l'article 60 du règlement de voirie méconnaissent les dispositions de l'article L. 556-3 du code de l'environnement et la circulaire du 15 mai 2013 portant sur la gestion des risques sanitaires liés à l'amiante en ce qu'elles ont pour effet de reporter sur l'intervenant l'obligation que ces dispositions mettent à la charge du département, en sa qualité de maître d'ouvrage des travaux antérieurs, d'exécuter et de prendre en charge les investigations et les travaux nécessaires à la dépollution de sa voirie ;
- les prescriptions de l'article 60 méconnaissent le principe du " pollueur payeur " tel qu'énoncé par les dispositions des articles L. 110-1 et L. 541-2 du code de l'environnement pris pour la transposition de la directive 2008/98/CE dès lors que le département, qui doit être regardé comme le détenteur antérieur ou initial des déchets pollués par l'amiante et a nécessairement consenti ou contribué à la mise en oeuvre de matériaux pollués par l'amiante en sa qualité de propriétaire de la voirie, est donc tenu de prendre en charge le coût de la gestion des couches de chaussée polluées ainsi que celui correspondant aux investigations nécessaires ;
- en faisant peser sur l'intervenant la prise en charge financière des dépenses liées à la dépollution de sa voirie, l'article 60 méconnaît l'obligation d'entretien de sa voirie qui pèse sur le département en application des dispositions des articles L. 131-2 du code de la voirie routière et L. 3321-1 du code général des collectivités territoriales ;
- en mettant à la charge des concessionnaires les conséquences financières de la présence potentielle d'amiante, les dispositions de l'article 60 du règlement de voirie méconnaissent les dispositions du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante, pris en application du code du travail et du code de la consommation ;
- les dispositions de l'article 60 du règlement de voirie méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques ;
- les dispositions de l'article 60 du règlement de voirie mettent à la charge des intervenants sur un chantier une obligation de recherche d'amiante et de traitement de la pollution contenue dans les couches de chaussée qui excède ce qui est prévu par les dispositions des articles L. 4121-3, L. 4531-1, L. 4121-2 et R. 4412-97 du code du travail ;
- la circonstance que ses coûts soient couverts par un tarif national ne la dispense pas d'une gestion efficace contrôlée par la commission de régulation de l'énergie ;
- les dispositions de l'article 65 du règlement de voirie instituent une présomption de responsabilité de l'intervenant en cas d'accident pouvant survenir par défaut ou insuffisance de signalisation et imposent donc des règles contraignantes qui ne sont pas indispensables à la protection du domaine public ;
- l'article 68 du règlement de voirie ne se borne pas à rappeler les garanties légales dont elle bénéficie de plein droit dans le cadre des marchés privés de travaux qu'elle peut être amenée à conclure pour ses réseaux, mais a bien pour objet, sans base légale, d'étendre la garantie d'un an prévue par l'article 1792-6 du code civil (pour les marchés privés) ou des principes dont s'inspire ce texte (pour ce qui est des marchés publics) au profit du département.
Par des mémoires en défense enregistrés le 26 juin 2018, le 11 octobre 2018 et le 12 février 2019, le département des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société GRDF une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la circonstance que le tribunal n'ait pas répondu au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur du rejet du recours gracieux est sans influence sur la régularité du jugement, qui est par ailleurs suffisamment motivé au regard des arguments développés ;
- le moyen tiré de ce que l'article 60 du règlement de voirie méconnaîtrait les dispositions du code de l'environnement relatives au principe " pollueur-payeur " est inopérant ;
- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 28 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 13 février 2019.
Les parties ont été informées, le 15 février 2019, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des moyens du défaut d'avis de la commission prévue par les dispositions de l'article R. 141-14 du code de la voirie routière et du défaut de visa de cet avis par la délibération attaquée, lesquels ne sont pas d'ordre public, ont été soulevés pour la première fois dans un mémoire enregistré au greffe de la cour le 14 juin 2018, soit postérieurement à l'expiration du délai d'appel le 20 février 2017, et ne se rattachent pas à la cause juridique dont relèvent ceux invoqués dans le délai d'appel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 ;
- le code de l'énergie ;
- le code de l'environnement ;
- le code du travail ;
- le code de la voirie routière ;
- le décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. David Terme,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la société GRDF et les observations de Me B...représentant le département des Pyrénées-Atlantiques.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 20 novembre 2014, le conseil général des Pyrénées-Atlantiques a approuvé un nouveau règlement de voirie départemental applicable à compter du 1er décembre 2014. Par courrier du 15 janvier 2015, la société GRDF a saisi le président du conseil général d'un recours gracieux tendant au retrait ou à la modification des articles 60, 65, 68 de ce règlement et de certaines prescriptions techniques figurant dans sa partie 5. Par une décision du 21 avril 2015, le président du conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques a rejeté ce recours gracieux. La société GRDF a alors demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler ou de modifier ces dispositions et prescriptions du règlement et d'enjoindre au département de les abroger ou modifier. Elle relève appel du jugement du 15 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Pau a seulement annulé certaines prescriptions techniques de la partie 5 du règlement concernant l'interdiction de réaliser des travaux sur les chaussées dont le revêtement de surface est récent, la réalisation des tranchées transversales ainsi que les modalités de découpe des couches de roulement, et a rejeté le surplus de ses conclusions.
Sur la régularité du jugement :
2. Lorsqu'un requérant présente simultanément des conclusions à fin d'annulation d'une décision administrative et du refus de faire droit au recours gracieux dirigé contre elle, les moyens critiquant les vices propres dont la décision de rejet du recours gracieux serait entachée ne peuvent être utilement invoqués à l'appui de sa requête. Dès lors, les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre au moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 21 avril 2015 portant rejet du recours gracieux de la requérante dirigé contre la délibération du 20 novembre 2014, qui était inopérant.
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que devant les premiers juges, la société requérante a soutenu que l'article 60 du règlement attaqué ne pouvait trouver son fondement légal dans les dispositions du code du travail, notamment celles de ses articles L. 4121-2 et L. 4531-1, et qu'il ne pouvait pas plus en rappeler les dispositions ou " s'immiscer dans l'ordonnancement juridique des relations internes entre employeur et salariés ". En retenant, au point 7 du jugement attaqué, que cet article 60 " ne précise pas les conditions dans lesquelles doivent être réalisés les travaux [et] qu'ainsi, il ne méconnaît pas, par lui-même, les dispositions du code du travail et notamment les articles L. 4121-2 et L. 4531-1 ", les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement sur ce point, et la critique du bien-fondé de cette réponse ne relève pas de la régularité du jugement.
4. La société GRDF soutient que le tribunal administratif aurait omis de statuer sur ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au département de modifier les " coupes schématiques " figurant aux pages 119 à 122 et 124 du règlement de voirie en conséquence de l'annulation des prescriptions de la partie 5 du règlement dont elle demandait l'annulation. Toutefois, il ressort de la lecture du jugement attaqué que le tribunal a rejeté l'ensemble des conclusions en injonction de la requérante après avoir relevé que les motifs de sa décision n'impliquaient pas de mesure d'exécution, alors même qu'il avait annulé certaines des prescriptions de la partie 5. Dès lors, les premiers juges ont implicitement mais nécessairement rejeté les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au département de modifier les " coupes schématiques " figurant aux pages 119 à 122 et 124 du règlement de voirie, à l'appui desquelles aucun autre moyen que leur lien avec les prescriptions réglementaires annulées n'était invoqué. Le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'omission à statuer sur ce point doit donc être écarté.
5. Il ressort des écritures de première instance que la société GRDF n'avait pas demandé l'annulation de l'intégralité des dispositions de la partie 5 mais seulement de celles qu'elle citait. Dans ces conditions, la société GRDF n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'omission à statuer ou d'une insuffisance de motivation, faute pour le tribunal d'avoir également annulé la phrase " [la] réfection sera réalisée par un finisseur ou tout autre moyen permettant une qualité identique " et la phrase : " une voie de circulation étant définie : / Pour une route comportant une signalisation horizontale complète (axe + rives), comme la partie de la chaussée située entre deux bandes de marquage ; / - Pour les autres routes, comme la partie de la chaussée située entre l'axe géométrique de celle-ci (marqué ou non par une ligne axiale), et selon le cas, l'accotement, le trottoir ou la bande de stationnement) ", dès lors qu'elle n'avait formulé aucune critique à leur encontre et qu'elle ne démontre pas que leur annulation devait découler nécessairement des annulations précédemment prononcées par le tribunal.
6. Les moyens invoqués par la société GRDF tirés de ce que les motifs sur lesquels les premiers juges se sont fondés pour écarter le moyen tiré de l'illégalité de l'article 60 du règlement seraient entachés de contradiction et de ce que le tribunal administratif n'aurait pas tiré les conséquences de ses propres constatations en s'abstenant d'annuler les schémas des pages 119 à 122 et 124 ne sont susceptibles d'affecter que le bien-fondé du jugement.
7. Il résulte de ce qui précède que le jugement n'est pas entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la légalité externe de la délibération du 20 novembre 2014 :
8. La société requérante soutient que la délibération attaquée serait irrégulière faute de viser l'avis de la commission prévu par les dispositions de l'article R. 141-14 du code de la voirie routière et faute que cet avis ait été recueilli. Toutefois, ces moyens, qui ne sont pas d'ordre public, ont été soulevés pour la première fois dans un mémoire enregistré au greffe de la cour le 14 juin 2018, soit postérieurement à l'expiration du délai d'appel le 20 février 2017, et ne se rattachent pas à la cause juridique dont relèvent ceux, tirés de l'illégalité interne de la délibération, invoqués dans le délai d'appel. Ils sont donc, en tout état de cause, irrecevables.
En ce qui concerne la légalité interne de la délibération du 20 novembre 2014 :
9. Aux termes de l'article L. 433-3 du code de l'énergie relatif au transport et à la distribution de gaz : " La concession de distribution confère au concessionnaire le droit d'exécuter sur les voies publiques et leurs dépendances tous travaux nécessaires à l'établissement et à l'entretien des ouvrages en se conformant aux conditions du cahier des charges de la concession et des règlements de voirie, sous réserve du respect des dispositions du code de la voirie routière, en particulier de ses articles L. 113-3 et L. 122-3 ". Aux termes de l'article L. 113-3 du code de la voirie routière : " Sous réserve des prescriptions prévues à l'article L. 122-3, les exploitants de réseaux de télécommunications ouverts au public et les services publics de transport ou de distribution d'électricité ou de gaz peuvent occuper le domaine public routier en y installant des ouvrages, dans la mesure où cette occupation n'est pas incompatible avec son affectation à la circulation terrestre (...) ". Aux termes de l'article R. 141-14 du code de la voirie routière : " Un règlement de voirie fixe les modalités d'exécution des travaux de remblaiement, de réfection provisoire et de réfection définitive conformément aux normes techniques et aux règles de l'art. Il détermine les conditions dans lesquelles le maire peut décider que certains des travaux de réfection seront exécutés par la commune (...) ". Enfin aux termes de l'article R. 131-11 du même code : " Les dispositions des articles R. * 141-13 à R. * 141-21 relatives aux modalités d'exécution des travaux de réfection des voies communales et aux évaluations des frais en résultant sont applicables aux travaux de remblaiement des tranchées ouvertes dans les routes départementales et aux travaux de réfection de celles-ci, sous réserve des adaptations ci-après : / 1° Le département est substitué à la commune ; le conseil départemental et le président du conseil départemental sont substitués respectivement au conseil municipal et au maire (...) ".
10. Il découle de ces dispositions que le droit d'occupation du domaine public routier reconnu à la société GRDF, en sa qualité de concessionnaire d'un réseau de distribution de gaz, ne peut s'exercer que dans les conditions prévues par les règlements de voirie. Si les autorités compétentes peuvent, par la voie de ces règlements, subordonner l'exercice du droit dont il s'agit aux conditions qui se révèlent indispensables pour assurer la protection du domaine public routier dont elles ont la charge et en garantir un usage répondant à sa destination, c'est à la condition de ne pas porter une atteinte excessive au droit permanent d'occupation des concessionnaires de distribution d'énergie.
S'agissant de l'article 60 du règlement de voirie :
11. L'article 60 du règlement de voirie attaqué, relatif à l'information sur la présence de produits dangereux dans les couches de chaussée, dispose que : " Dans le cas où les travaux prévus génèreront de la poussière, le Département ne sera pas en mesure de fournir au pétitionnaire les éléments lui permettant de garantir l'absence de produits dangereux dans les couches de chaussée tel que défini dans le décret n° 2012-639 du 4 mai 2012 ". Ce décret relatif aux risques d'exposition à l'amiante modifie les dispositions du code du travail. Aux termes de l'annexe 2 du règlement de voirie attaqué : " (...) Les intervenants regroupent l'ensemble des personnes physiques ou morales, publiques ou privées, autres que le Département des Pyrénées-Atlantiques, pour le compte desquelles des travaux sont entrepris. On distingue : / Le pétitionnaire est la personne physique ou morale qui présente au gestionnaire une demande d'autorisation préalable. II peut être propriétaire de l'ouvrage à réaliser ou son concessionnaire ou un " prestataire autorisé ". / Le " prestataire autorisé " peut être une entreprise, un maître d'oeuvre ou un mandataire du maître d'ouvrage. Il est autorisé par le propriétaire de l'ouvrage à réaliser, ou son concessionnaire, dans le cadre du contrat qui les lie, à présenter au nom et pour le compte de ce dernier une ou des demande(s) d'autorisation préalable (...) ".
12. Aux termes de l'article L.4121-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;2° Des actions d'information et de formation ;3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". L'article L.4121-2 du même code précise : " L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : / 1° Eviter les risques ; / 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; / 3° Combattre les risques à la source (...) ". Aux termes de l'article L. 4531-1 du même code : " Afin d'assurer la sécurité et de protéger la santé des personnes qui interviennent sur un chantier de bâtiment ou de génie civil, le maître d'ouvrage, le maître d'oeuvre et le coordonnateur en matière de sécurité et de protection de la santé mentionné à l'article L. 4532-4 mettent en oeuvre, pendant la phase de conception, d'étude et d'élaboration du projet et pendant la réalisation de l'ouvrage, les principes généraux de prévention énoncés aux 1° à 3° et 5° à 8° de l'article L. 4121-2 ". Aux termes de l'article R. 4412-97 du même code : " Dans le cadre de l'évaluation des risques, prévue aux articles L. 4121-3 et L. 4531-1, le donneur d'ordre joint les dossiers techniques prévus aux articles R. 1334-29-4 à R. 1334-29-6 du code de la santé publique et R. 111-45 du code de la construction et de l'habitation aux documents de consultation des entreprises./ Pour les opérations ne relevant pas des articles R. 1334-29-4 à R. 1334-29-6 du code de la santé publique et R. 111-45 du code de la construction et de l'habitation, le donneur d'ordre joint aux documents de consultation des entreprises tout document équivalent permettant le repérage des matériaux contenant de l'amiante, y compris ceux relevant de ses obligations au titre de l'article L. 541-1 du code de l'environnement. / Au vu des informations qui lui ont été données, l'employeur réalise son évaluation des risques, conformément à l'article L. 4121-2 ". Selon l'article R. 4412-96 de ce même code : " Pour l'application de la présente section, on entend par: (...) 4° Donneur d'ordre : le chef d'entreprise utilisatrice (...) ou le maître d'ouvrage mentionné à l'article L. 4531-1 ou l'armateur (...). ".
13. D'une part, il résulte de la combinaison des dispositions citées au point 9 qu'elles se bornent à rappeler qu'il n'incombe pas au département de faire réaliser un diagnostic et un repérage d'amiante lorsque les travaux effectués sur la voirie ne sont pas réalisés à sa demande. D'autre part, ces dispositions ne pourraient en tout état de cause, eu égard à l'objet d'un règlement de voirie tel qu'il est défini par les dispositions du code de la voirie routière rappelées au point 9, faire obstacle à l'exécution par le département des obligations qui lui incombent en vertu des dispositions législatives et réglementaires du code du travail relatives à la prévention des risques d'exposition des travailleurs à l'amiante lorsqu'il est donneur d'ordre de travaux sur son domaine. Par suite, les moyens tirés de ce que l'article 60 méconnaîtrait les dispositions des articles L. 4121-3, L. 4531-1, L. 4121-2 et R. 4412-97 du code du travail en faisant peser sur l'intervenant une obligation de recherche d'amiante préalable aux travaux, alors que cette obligation pèserait dans tous les cas, selon la requérante, sur le département, en sa qualité de propriétaire de la voirie, de ce qu'elles excéderaient ce faisant les contraintes qui peuvent être imposées aux intervenants dans l'intérêt du domaine public et de ses usagers, et déchargeraient le département de son obligation d'entretien des voiries doivent être écartés.
14. La circonstance que le premier intervenant sur une emprise supporterait des frais que les intervenants suivants au même endroit n'auraient pas à exposer ne méconnaît pas le principe d'égalité, dès lors que ces intervenants successifs ne seraient pas dans la même situation au regard des informations disponibles sur la structure de la chaussée.
15. Les dispositions de l'article 60 étant étrangères au régime du traitement et de gestion des déchets susceptibles d'être générés par les travaux qu'elles concernent et à la détermination du débiteur final du coût de ce traitement, les moyens tirés de ce qu'elles méconnaîtraient le " principe pollueur-payeur " posé par le 3° de l'article L. 110-1 du code de l'environnement et l'article L. 541-2 du code de l'environnement indiquant que " tout producteur ou détenteur de déchets est tenu d'en assurer ou d'en faire assurer la gestion, conformément aux dispositions du présent chapitre ", ou la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets doivent, en tout état de cause, être écartés comme inopérants.
16. Ne peuvent davantage être utilement invoquées en l'espèce les dispositions de l'article L. 556-3 du code de l'environnement, qui déterminent l'obligation de l'exploitant d'une installation classée, de son ayant droit ou de celui qui s'est substitué à lui, de mettre en oeuvre les mesures permettant de remettre en état le site qui a été le siège de l'exploitation dans l'intérêt, notamment, de la santé ou de la sécurité publique et de la protection de l'environnement, dès lors que n'est pas en cause une installation classée et pas davantage la charge de la gestion des revêtements qui s'avéreraient pollués.
17. Les dispositions de l'article 60 n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre la fabrication, la transformation, la vente, l'importation, la mise sur le marché national ou la cession de variétés de fibres d'amiante. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996, au demeurant non assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, doit donc également être écarté comme inopérant.
S'agissant de l'article 65 du règlement de voirie relatif à la signalisation des chantiers :
18. Si la société GRDF demande, en appel comme en première instance, l'annulation totale de cet article, elle n'articule de moyen qu'à l'encontre de ses premier, deuxième et sixième alinéa, aux termes desquels : " L'intervenant doit prendre de jour comme de nuit, sous sa responsabilité et à ses frais, toutes les mesures relatives à l'exploitation du domaine public routier départemental lié au chantier et à la sécurité de la circulation (...) conformément aux textes en vigueur et aux dispositions ayant reçu l'accord des services du conseil général ", " Ceux-ci peuvent, en cours de chantier, prescrire toute modification de ces mesures commandées par les conditions de circulation " et " La responsabilité de l'intervenant peut être engagée en cas d'accident pouvant survenir pour défaut ou insuffisance de signalisation ".
19. Les premières dispositions se bornent à rappeler l'état des obligations incombant à un intervenant sans ajouter de contraintes nouvelles, les secondes n'excèdent pas ce qui est nécessaire à la préservation de la fonction du domaine routier, et les dernières n'évoquent que l'éventualité que la responsabilité de l'intervenant soit engagée en cas d'accident imputable à un défaut de signalisation des travaux qu'il réalise. Ces dernières ne peuvent être regardées, contrairement à ce que soutient la société GRDF, comme " [prescrivant] une responsabilité systématique de l'intervenant en cas de défaut de signalisation sans qu'il soit possible à ce dernier de s'en défendre si ce défaut ne lui est pas imputable, notamment dans l'hypothèse où cette défaillance trouverait son origine dans une cause qui lui est totalement extérieure ". Le moyen tiré de ce que ces dispositions porteraient une atteinte excessive au droit d'occupation du domaine public de la société GRDF ne peut donc qu'être écarté.
S'agissant de l'article 68 du règlement de voirie relatif à la garantie de bonne exécution :
20. L'article 68 du règlement de voirie attaqué, compris dans la partie du règlement intitulée " occupation du domaine public routier par des tiers ", prévoit en ses deux premiers paragraphes que le gestionnaire du domaine peut organiser une réception des travaux pour ceux effectués dans le cadre de chantiers qualifiés de " courants " et que celle-ci sera obligatoire pour les chantiers " considérés comme importants par le Conseil général ". Son troisième paragraphe prévoit que : " La durée de garantie est de deux années. / Elle court à compter de la signature par les services techniques départementaux du procès-verbal d'acceptation des travaux (cf. Guide de remblaiement des tranchées sur le domaine public routier départemental des Pyrénées-Atlantiques). / La garantie de bonne exécution des travaux porte sur l'absence de déformation significative en surface de la voie et de ses dépendances et sur la bonne tenue de la couche de roulement, liée à l'exécution des travaux. / Lorsque le gestionnaire de la voie se trouvera contraint de rappeler ces obligations, l'occupant devra remettre les lieux en état dans un délai qui ne sera pas supérieur à un délai mentionné dans la mise en demeure. / En cas d'urgence, il pourra exécuter d'office, sans mise en demeure préalable, et aux frais de l'occupant, les travaux qu'il jugera nécessaires au maintien de la sécurité routière. / A l'issue de la période de garantie, l'occupant est dégagé de toute obligation d'entretien sauf malfaçons ou vices cachés. / En revanche, il reste responsable des dommages résultant de l'existence de l'ouvrage lui appartenant ou de son exploitation ".
21. La société GRDF critique la durée de la garantie ainsi instaurée par le règlement de voirie au motif qu'aucun texte ne permettrait au département, par un acte unilatéral, d'imposer aux intervenants sur la voirie un délai de garantie de bonne exécution des travaux supérieur à la durée de la garantie légale d'une année prévue par l'article 1792-6 du code civil, et qu'un tel délai excède ce qui est nécessaire à la protection du domaine public. Dès lors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'a habilité l'auteur d'un règlement de voirie à fixer les conditions de garantie des travaux réalisés sur son domaine et qu'au surplus le département ne justifie pas de la nécessité de la durée de cette garantie pour la protection de son domaine public routier, la société GRDF est fondée à soutenir que ces dispositions, en tant qu'elles fixent à deux ans la durée de la garantie qu'elles instaurent, sont entachées d'excès de pouvoir.
S'agissant des prescriptions relatives aux couches de roulement récentes et spécifiques aux voies neuves et concernant le remblaiement des tranchées transversales et longitudinales :
22. Le tribunal a annulé les dispositions des deux premiers alinéas du paragraphe relatif aux tranchées transversales prévoyant que : " Le fonçage ou le forage dirigé seront les techniques recherchées le plus souvent possible sauf impossibilité technique démontrée ou accord exceptionnel des services techniques départementaux. / Dans ces cas-là, la réfection de la couche de roulement sera exécutée sur toute la largeur de la chaussée et sur une distance de 5 mètres de part et d'autre de la tranchée afin de limiter au maximum la déstabilisation du sous-sol (...) ". Les dispositions du troisième alinéa de ce même paragraphe prévoyant que la " réfection sera réalisée par un finisseur ou tout autre moyen permettant une qualité identique " fixent seulement une obligation de résultat à l'intervenant qui n'excède pas ce qui est nécessaire à la protection du domaine public et ne sont pas indivisibles de deux premiers alinéas du même paragraphe. Dès lors, le moyen tiré de ce qu'elles devraient être annulées par voie de conséquence de l'annulation des autres dispositions doit, en tout état de cause, être écarté.
23. En ce qui concerne les dispositions relatives aux tranchées longitudinales dans les couches de roulement récentes, le tribunal a annulé les dispositions prévoyant que : " (...) En cas d'impossibilité dûment justifiée d'implanter la tranchée hors chaussée, le revêtement sera exécuté sur l'intégralité de la (ou des) voie(s) de circulation impactée(s) par la tranchée (...) " mais a laissé subsister celles prévoyant que : " une voie de circulation étant définie : / Pour une route comportant une signalisation horizontale complète (axe + rives), comme la partie de la chaussée située entre deux bandes de marquage ; / - Pour les autres routes, comme la partie de la chaussée située entre l'axe géométrique de celle-ci (marqué ou non par une ligne axiale), et selon le cas, l'accotement, le trottoir ou la bande de stationnement) ". Ces dernières dispositions ont pour seul objet de définir la notion de voie de circulation, et la société GRDF n'est donc pas fondée à soutenir, en tout état de cause, qu'elles devraient être annulées par voie de conséquence.
24. Si la société GRDF fait valoir que l'annulation des " coupes schématiques " figurant aux pages 119 à 122 et 124 du règlement attaqué serait la conséquence nécessaire de celle des dispositions mentionnées aux points 22 et 23, cette affirmation ne ressort pas de l'examen desdites coupes, dont le règlement précise au demeurant qu'elles n'ont qu'une valeur indicative, et la requérante ne fait valoir aucun argument de nature à le démontrer. Le moyen doit par suite être écarté.
25. Il résulte de tout ce qui précède que la société GRDF est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont refusé de faire droit à ses conclusions tendant à l'annulation de l'alinéa 1er du troisième paragraphe de l'article 68 du règlement de voirie attaqué en tant qu'il fixe à deux ans la durée de la garantie qu'il instaure et, dans cette même mesure, à ses conclusions tenant à l'annulation du rejet de son recours gracieux.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
26. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Les dispositions de l'article 68 du règlement de voirie adopté le 20 novembre 2014 sont annulées en tant qu'elles prévoient une durée de garantie de deux ans. La décision du 21 avril 2015 portant rejet du recours gracieux de la société GRDF est annulée en tant qu'elle refuse de faire droit à la demande d'annulation de ces mêmes dispositions.
Article 2 : Le jugement n° 1501348 du 15 décembre 2016 du tribunal administratif de Pau est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la société GRDF est rejeté.
Article 4 : Les conclusions du département des Pyrénées-Atlantiques tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société GRDF et au département des Pyrénées-Atlantiques.
Délibéré après l'audience du 21 février 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
M. David Terme, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 28 mars 2019.
Le rapporteur,
David TERMELe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17BX00536