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14/03/2019 | FRANCE | N°17BX03079,17BX03081

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 14 mars 2019, 17BX03079,17BX03081


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Grand port maritime de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'ordonner l'expulsion de la société de maintenance industrielle et portuaire (SOMIP) des dépendances du domaine public du quai Ouest du port de la Pointe des Galets qu'elle occupe sans titre depuis le 30 juin 2015.

Par un jugement n° 1600879 du 29 juin 2017, le tribunal administratif de La Réunion a ordonné à la société de maintenance industrielle et portuaire (SOMIP) d'évacuer les dépendances du domaine pu

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Grand port maritime de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'ordonner l'expulsion de la société de maintenance industrielle et portuaire (SOMIP) des dépendances du domaine public du quai Ouest du port de la Pointe des Galets qu'elle occupe sans titre depuis le 30 juin 2015.

Par un jugement n° 1600879 du 29 juin 2017, le tribunal administratif de La Réunion a ordonné à la société de maintenance industrielle et portuaire (SOMIP) d'évacuer les dépendances du domaine public du Port de la Pointe-des-Galets visées par les autorisations n° 2015/183 PO et n° 2015/116 PO à 2015/121 PO dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

I/ Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 septembre 2017 et le 17 avril 2018, la société SOMIP SAS, représentée par la SCP Caviglioli Baron Fourquie, son administrateur judiciaire, et par Me Richard, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 29 juin 2017 ;

2°) d'annuler la décision de refus de renouveler l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public et la décision d'expulsion subséquente ;

3°) à titre subsidiaire d'ordonner au Grand port maritime de La Réunion de produire les procès-verbaux de délibération du directoire décidant de ne pas renouveler l'autorisation d'occupation temporaire ainsi que la production du décompte détaillé et daté des sommes qui seraient dues par la société et des sommes versées hors frais de justice ;

4°) de mettre à la charge du Grand port maritime de La Réunion une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle est bénéficiaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public pour effectuer des travaux de réparations navales depuis 23 ans ;

- la décision de refus de renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public du 8 juin 2016, confirmée le 25 janvier 2017, est illégale dès lors qu'elle n'a pas été prise par le directoire, seul organe compétent en matière de gestion domaniale ; aucun procès-verbal de la décision du directoire ne lui a été notifié ; il n'est pas établi que le directoire a valablement délibéré sur le refus de renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public, alors que plusieurs membres ont indiqué n'avoir jamais été consultés sur ce point ;

- le non renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public n'est pas justifié ; au regard des missions de service public auxquelles elle participe, le retard dans le paiement des redevances ne constitue pas un motif d'intérêt général ; le motif tiré du non-paiement des redevances est erroné car il ne tient pas compte des sommes versées auprès de l'huissier mandaté par le Grand port maritime de La Réunion ; depuis juillet 2016, elle a versé directement les montants correspondant aux redevances de base, non multipliées par 16, alors que cette partie des titres de recettes a été émise sur des bases illégales ainsi que l'a jugé le tribunal administratif dans un jugement du 22 juin 2017 ; le Grand port maritime de La Réunion lui doit une somme de 141 050 euros correspondant au remboursement du matériel informatique et du logiciel permettant de faire fonctionner les portiques du Port Est, qui doit être compensée avec les sommes qu'elle doit ; les sommes réclamées correspondent à des autorisations d'occupation temporaire du domaine public sans lien avec la société ;

- elle assure une mission de service public car elle est la seule entreprise compétente en matière de réparation navale située sur une terre française dans l'Océan Indien ; le retrait de l'AOT, qui conduira à une liquidation judiciaire, prive la Marine nationale de ce soutien et constitue un moyen abusif de se faire payer des redevances alors que d'autres procédures étaient possibles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2017, le Grand port maritime de La Réunion conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de la société SOMIP une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation de la société SOMIP sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;

- en raison des inexécutions contractuelles récurrentes de la société SOMIP, il a notifié le 3 juillet 2015 le terme de l'autorisation, avec une injonction de quitter les lieux ; la décision de refus de renouvellement est devenue définitive et la société SOMIP ne dispose plus de voie de recours pour contester cette décision, qu'elle ne peut critiquer pour la première fois en appel et au demeurant plus d'un an après sa notification ;

- la décision de refus de renouvellement est parfaitement justifiée ; l'occupant du domaine public n'a aucun droit au renouvellement de son autorisation ; le motif du refus de renouvellement est tiré du défaut de paiement des redevances, lequel créait un risque financier en cours d'aggravation ; le refus de renouvellement des autorisations d'occupation temporaires du domaine public n'est pas à l'origine de la procédure collective ;

- les demandes tendant à la production des procès-verbaux de délibération du directoire, des dates et moyens de publication, de la liste des membres présents ainsi que la demande de production du décompte détaillé et daté des sommes dues par la SOMIP au Grand port maritime de La Réunion seront également rejetées ; ces demandes, accessoires à la contestation de la légalité de la décision de refus de renouvellement et notamment de son motif, sont également nouvelles et irrecevables ;

- l'expulsion a été prononcée à bon droit par le tribunal administratif à l'encontre de la SOMIP, occupant sans droit ni titre du domaine public, dont la dette à l'égard du Grand port maritime de La Réunion reste considérable et continue de croître ; l'annulation partielle d'un titre de recettes ayant fait l'objet d'une instance distincte ne peut être invoquée dans le présent litige ; le litige relatif à la cession d'un logiciel n'a fait l'objet d'aucune procédure à son encontre.

Une ordonnance du 26 juillet 2018 prise en application des dispositions des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative a fixé la date de clôture de l'instruction au 26 juillet 2018.

II/ Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 septembre 2017, le 17 février 2018 et le 17 avril 2018, la société SOMIP SAS, représentée par la SCP Caviglioli Baron Fourquie, son administrateur judiciaire, et par Me Richard, avocat, demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de La Réunion du 29 juin 2017 lui enjoignant d'évacuer les dépendances du domaine public du Port de la Pointe-des-Galets dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de mettre à la charge du Grand port maritime de La Réunion une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement aura des conséquences difficilement réparables au regard de son activité et de sa situation ;

- elle développe dans la requête au fond des moyens sérieux ;

- le moyen tiré de l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire du domaine pouvait être soulevé en appel par le défendeur en première instance ; aucune des décisions de 2015 ou de 2016 n'ont été publiées et le Grand port maritime de La Réunion ne lui a pas notifié de décision du directoire et n'a pas répondu aux demandes de la SOMIP visant à avoir connaissance de ces décisions.

Par des mémoires en défense enregistrés le 6 décembre 2017 et le 12 mars 2018, la Grand port maritime de La Réunion conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de la société SOMIP une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la société SOMIP ne sont pas sérieux ; la décision de refus de renouvellement de l'autorisation d'occupation du domaine public était fondée ;

- l'exécution du jugement n'aura pas de conséquences difficilement réparables.

Une ordonnance du 26 juillet 2018 prise en application des dispositions des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative a fixé la date de clôture de l'instruction au 26 juillet 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'établissement public national " Grand port maritime de La Réunion " a consenti à la Société de maintenance industrielle et portuaire (SOMIP) plusieurs autorisations d'occupation temporaire du domaine public, en dernier lieu pour la période du 1er janvier 2015 au 30 juin 2015. Par courrier du 30 juin 2015, reçu le 3 juillet 2015, le Grand port maritime de La Réunion a informé la société SOMIP qu'il n'entendait pas renouveler ces sept autorisations au vu des impayés de redevances non régularisés, et par le même courrier, il a enjoint à la SOMIP de libérer les lieux au plus tard au 31 août 2015. Le 8 juin 2016, il a réitéré cette mise en demeure, puis a saisi le 13 juillet le tribunal administratif. Par jugement n° 1600879 du 29 juin 2017, le tribunal administratif de La Réunion a ordonné à la Société de maintenance industrielle et portuaire d'évacuer les dépendances du domaine public du Port de la Pointe-des-Galets visées par les autorisations n° 2015/183 PO et n° 2015/116 PO à 2015/121 PO dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. La société SOMIP relève appel et sollicite le sursis à exécution de ce jugement.

Sur la jonction :

2. Les requêtes enregistrées respectivement sous les numéros 17BX03079 et 17BX03081 sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la recevabilité de la requête :

3. Les conclusions de la société SOMIP tendant à l'annulation de la décision de refus de renouveler l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public et de la décision d'expulsion subséquente ainsi que les conclusions présentées à titre subsidiaire tendant à ce que la cour ordonne au Grand port maritime de La Réunion de produire les procès-verbaux de délibération du directoire décidant de ne pas renouveler l'autorisation d'occupation temporaire et le décompte détaillé et daté des sommes qui seraient dues par la société et des sommes versées hors frais de justice, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont par suite irrecevables.

Sur le bien fondé du jugement :

En ce qui concerne l'exception tirée de l'illégalité du refus de renouvellement de l'autorisation temporaire d'occupation du domaine public :

4. La société SOMIP soutient pour la première fois en appel que la décision par laquelle le Grand port maritime de La Réunion a refusé de renouveler les autorisations temporaires d'occupation du domaine public dont elle bénéficiait est illégale dès lors qu'elle a été prise par une autorité incompétente et qu'elle n'est pas justifiée. Il ressort des pièces du dossier que le Grand port maritime de La Réunion a informé la société SOMIP par courrier en date du 30 juin 2015, notifié le 3 juillet 2015, qu'elle ne renouvellerait pas les autorisations temporaires d'occupation du domaine public. Ce refus de renouvellement a été confirmé par une décision en date du 8 juin 2016, mentionnant les voies et délais de recours, qui a été reçue par la société SOMIP, ainsi que le confirme cette dernière dans le courrier qu'elle a adressé au Grand port maritime de La Réunion le 9 juin 2016. Dans ces conditions, la décision de refus de renouvellement des autorisations temporaires d'occupation du domaine public était devenue définitive à la date à laquelle la société a excipé pour la première fois en appel, le 12 septembre 2017, de l'illégalité de cette décision. Dès lors, ce moyen est irrecevable comme tardif.

5. La SOMIP, qui s'est maintenue irrégulièrement dans les lieux, ne peut utilement se prévaloir de ce qu'elle aurait récemment obtenu des commandes ou payé une partie des redevances pour l'année 2017, ni de considérations d'opportunité sur les compétences de réparation navale à maintenir dans l'Océan indien qu'il n'appartient pas à la juridiction d'examiner, pour contester le bien-fondé du jugement lui ordonnant de libérer le domaine public portuaire qu'elle occupe sans titre.

6. Il résulte de ce qui précède que la société SOMIP n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a ordonné l'évacuation des dépendances du domaine public du Port de la Pointe-des-Galets visées par les autorisations n° 2015/183 PO et n° 2015/116 PO à 2015/121 PO dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

7. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de la société SOMIP tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête n° 17BX03081 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 17BX03079 de la société SOMIP est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel du Grand port maritime de La Réunion sont rejetées.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées dans la requête enregistrée sous le n° 17BX03081. Le surplus des conclusions présentées dans cette requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCP Caviglioli Baron Fourquie, représentant ad hoc de la SOMIP, et au Grand port maritime de La Réunion. Copie en sera adressée au préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 7 février 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 mars 2019.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président,

Catherine GIRAULTLe greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

No 17BX03079, 17BX03081


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX03079,17BX03081
Date de la décision : 14/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-02-01-01 Domaine. Domaine public. Régime. Occupation. Utilisations privatives du domaine.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : AVOCATS ET CONSEILS REUNION

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-03-14;17bx03079.17bx03081 ?
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