Vu la procédure suivante :
Procédure antérieure :
La commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) du Gers a émis le 16 janvier 2016 un avis favorable au projet présenté par la société en nom collectif Lidl en vue de la création, après démolition du magasin existant, d'un supermarché d'une surface de vente de 1 420,80 mètres carrés sur la commune de Condom.
Plusieurs exploitants de magasins concurrents, dont la société par action simplifiée Samage, exploitante d'un magasin à l'enseigne " Intermarché " implanté dans la zone de chalandise, ont demandé à la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) d'annuler cet avis et d'émettre un avis défavorable au projet.
Par une décision en date du 12 mai 2016, la commission nationale d'aménagement commercial a rejeté ces recours et émis un avis favorable au projet.
Par un arrêté du 13 juillet 2016, le maire de Condom a délivré le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale correspondant au projet d'une surface de plancher de 2 409,90 mètres carrés sur des terrains cadastrés section AT n° 36, 112, 118, 126, 231, 232, 236, 238 et 253 situés au niveau du 39 avenue des Pyrénées.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 29 août 2016 et un mémoire enregistré le 9 février 2017, la SAS Samage, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le permis de construire du 13 juillet 2016 en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale ;
2°) de mettre à la charge de la société Lidl la somme de 6 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Samage soutient que :
- les obligations de communication aux membres de la commission des documents énoncés à l'article R. 752-35 du code de commerce n'ont pas été respectées, ce qui entache de nullité l'arrêté de permis de construire en litige en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale ;
- le projet se situe dans une zone rurale du Gers, hormis Condom, et la population de la zone de chalandise est en diminution de 1,2 % entre 1999 et 2012 et même de 4,5 % sur la seule ville de Condom, alors que le secteur est déjà bien pourvu en grandes surfaces alimentaires avec deux supermarchés de surface de vente de plus de 2 500 mètres carrés et un " discounter " de 540 mètres carrés de surface de vente, auxquels s'ajoutent des petits commerces de centre-ville pour lequel la commune a obtenu en 2013 une subvention au titre du FISAC d'un montant total de 127 000 euros. Le doublement envisagé de la surface de vente du magasin Lidl, enseigne hard discount, va nuire à l'animation de la vie urbaine et rurale de la zone de chalandise. Le projet apparaît prématuré dans la mesure où il n'existe aujourd'hui aucun document de planification permettant une vision générale sur les partis d'une politique d'implantation et de développement des commerces ;
- le dossier de demande ne comporte que peu d'éléments s'agissant des fournisseurs locaux du magasin, seules trois sociétés gersoises étant citées ;
- le projet n'est accessible ni par les transports en commun, car le magasin est à plus d'un kilomètre à pied de 1'arrêt de bus " gare routière ", ni par les vélos en l'absence de piste cyclable desservant le site ;
- aucune étude des flux concernant cette zone commerciale comprenant plusieurs grandes surfaces spécialisées dans l'équipement de la personne et de la maison n'a été réalisée et la société Lidl a volontairement sous estimé les flux de circulation supplémentaires induit par le projet et s'est abstenue de communiquer les éléments nécessaires à la CNAC ;
- le pétitionnaire n'a pas la maîtrise foncière des terrains sur lequel un giratoire est prévu pour la desserte du site, dont il s'est engagé à assurer le financement. Au demeurant, la demande de permis de construire ne concerne pas les parcelles d'assiette de cet équipement. Dans ces conditions, la réalisation effective de cet ouvrage, dont les dimensions ne sont pas connues, n'apparaît pas certaine ;
- le service instructeur devant la CDAC a souligné dans son rapport la dangerosité de l'accès " livraisons " dès lors que l'accès au quai de déchargement nécessitera la marche arrière des poids lourds sur des voies empruntées par les clients et à côté des stationnements. Si selon le pétitionnaire, les livraisons s'effectueront " dans la mesure du possible " en dehors des heures d'ouverture au public, cette seule réponse n'apparaît pas satisfaire à l'exigence de sécurité des accès et de l'organisation des flux de circulation sur l'aire de stationnement ;
- le projet ne prévoit pas de mesures spécifiques pour limiter l'imperméabilisation des sols alors que le bâtiment existant est démoli, ce qui permettait d'envisager diverses mesures pour limiter l'imperméabilisation. L'emprise au sol des surfaces affectées aux aires de stationnement est de 4 646,28 mètres carrés et atteint près du double de la surface de plancher totale du projet prévue de 2 409 mètres carrés. Or s'agissant d'un projet qui a donné lieu à une demande de permis de construire avant le 1er janvier 2016, le projet ne respecte pas le rapport maximal de 1,5 prévu par l'article L. 111-6-1 du code de l'urbanisme, devenu L. 111-9, limitant en l'espèce l'emprise totale des aires de stationnement à 3 613 mètres carrés. La totalité des 131 places de stationnement prévues sont imperméabilisées ;
- en outre, seule une emprise de 10,9 % du terrain d'assiette est réservée aux espaces verts, 29 arbres sont plantés et les eaux pluviales ne sont pas récupérées pour l'arrosage de ces espaces verts. L'avis du ministre chargé de l'urbanisme est défavorable faute d'insertion satisfaisante ;
- le rapport de la direction départementale des territoires met en doute les affirmations du dossier quant à la performance supérieure aux exigences de la réglementation thermique 2012. Enfin, le projet n'emploie pas de matériaux ou procédé éco-responsables ni n'intègre de démarches éco-responsables particulières. Aucun effort n'est produit pour insérer le nouveau bâtiment dans l'environnement paysager et architectural du Gers, très marqué par l'agriculture, 1'élevage et la présence de nombreux monuments et lieux touristiques dans la ville de Condom. En outre, la démolition de deux maisons d'habitation situées sur l'emprise foncière augmente la visibilité de la façade du bâtiment depuis la RD 930.
Par deux mémoires enregistrés les 5 janvier et 1er mars 2017, la commune de Condom, prise en la personne de son maire en exercice et représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Samage d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune fait valoir que :
- la société Samage devra justifier de la notification de son recours à l'auteur et au bénéficiaire de l'acte ;
- le moyen visant à contester la régularité de la procédure ayant précédé la délivrance de l'avis de la CNAC ne repose sur aucun élément probant, alors qu'une jurisprudence constante rappelle qu'aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe ne fait obligation à la décision de la CNAC d'attester que la convocation de ses membres a été régulièrement effectuée et qu'elle a été accompagnée de l'envoi dans les délais des documents nécessaires à ses délibérations ;
- le projet consiste en l'extension d'une surface de vente existante implantée sur le territoire local depuis plus de dix ans. La circonstance qu'il existe une offre commerciale sur la zone ne saurait suffire à disqualifier le projet, sauf à réintroduire le critère de densité commerciale abandonné par le législateur depuis 2008 ;
- le développement du magasin en cause permettra sur un segment intermédiaire une amélioration de l'offre et réduira un peu le monopole de deux enseignes qui détiennent plus de
80 % des parts de marché dans la zone et qui étaient d'ailleurs les auteurs des recours devant la CNAC. Le projet n'est pas spécialement de nature à entrer en conflit avec le commerce traditionnel de centre-ville. L'attribution de fonds FISAC, il y a quatre ans, ne constitue pas en soi un élément déterminant de l'impact du projet sur ces commerces. La société Samage ne démontre pas en quoi un projet de réhabilitation à l'intérieur d'une zone commerciale préexistante viendrait compromettre l'aménagement cohérent du territoire, même en l'absence de documents de planification ;
- le code de commerce n'impose pas la production d'une étude de flux dans un dossier de demande d'avis de la CDAC. En l'espèce, l'apport de clientèle supplémentaire est extrêmement limité, de l'ordre de 100 clients par jour, soit sur les heures de pointe, une quinzaine de clients par heure. Ainsi, la commune a pu à juste titre considérer, à partir des éléments à sa disposition et du constat de l'absence de saturation de la RD 930, que le projet ne générerait aucune saturation ni aucun risque pour la sécurité publique ;
- la société pétitionnaire justifie des autorisations des propriétaires pour réaliser le giratoire sur voie privée qu'elle s'est engagée à financer ;
- le nombre de livraisons demeure relativement modeste (1 à 2 par jour) et celles-ci interviendront, sauf cas exceptionnel, en dehors de l'ouverture du magasin. Le camion avancera de quelques mètres sur le parking, puis effectuera une marche arrière vers le quai de livraison, c'est-à-dire à un endroit où la clientèle n'est pas présente et qui se situe à 1'opposé de 1'entrée du magasin ;
- l'absence de piste cyclable, dans une zone rurale, ne fait pas obstacle à la présence effective de deux-roues et la jurisprudence rappelle régulièrement qu'une telle absence ne saurait justifier à elle seule un refus d'autorisation. Le magasin est implanté en limite de zones d'habitat et la route départementale est équipée de trottoirs et de passages protégés au droit du magasin ;
- s'agissant du critère du développement durable, la société Lidl a indiqué une surface de stationnement de 1 806 m² qui respecte les normes en vigueur. Au demeurant, les dispositions de l'article L. 111-6-1 du code de l'urbanisme portant sur l'emprise au sol des surfaces des places de stationnement sont inopposables à un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, d'autant plus qu'elles n'étaient pas en vigueur à la date de la demande ;
- la surface consacrée aux espaces verts représente 10%, ce qui, pour un projet urbain, n'est pas négligeable. Si la société Samage met en doute les performances thermiques du bâtiment, en se fondant sur le rapport de la direction départementale des territoires, elle en dévoie en réalité le sens. Alors que le pétitionnaire a indiqué " que les performances du bâtiment vont au-delà des exigences de la RT 2012 ", le service instructeur a seulement relevé dans son rapport qu'il n'existe pas de quantification réglementaire au-delà de la RT 2012. Le matériau moderne et esthétique prévu participe à une insertion visuelle de qualité du bâtiment. Les monuments inscrits ou classés visés par la société Samage ne se trouvent pas dans le secteur d'implantation du projet, lequel n'a pas été soumis à l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, dès lors qu'il n'est pas situé dans le champ de visibilité d'un de ces bâtiments.
La commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a transmis l'ensemble des pièces du recours formé devant elle par la société Samage, par un bordereau de production de pièces enregistré le 4 août 2017.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 septembre 2017, la société en nom collectif Lidl, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Samage d'une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SNC Lidl soutient que :
- la société Samage n'établit pas que les membres de la commission nationale n'auraient pas eu communication de l'ensemble des pièces prévues à l'article R. 752-35 du code du commerce. Le Conseil d'Etat a en outre jugé que la méconnaissance de ces dispositions n'a pas d'incidence sur le sens de la décision prise ni n'a privé les intéressés d'une garantie ; en l'espèce, avec 5 voix pour et 3 contre, aucune incidence n'est établie ;
- le projet vise à améliorer la présentation des produits. L'offre restera la même qu'aujourd'hui, l'objectif étant d'offrir un accueil chaleureux aux clients avec une meilleure visibilité des produits et de fournir un outil de travail optimal et confortable aux équipes en magasin. De plus, le projet se situe au sein du pôle commercial des Pyrénées dans lequel plusieurs moyennes surfaces spécialisées sont déjà implantées et la baisse de la population dans la zone de chalandise est relativement faible (de l'ordre de 1,2 %) et non de près de 5 % comme le soutient la société Samage. La circonstance que la commune de Condom aurait obtenu des subventions FISAC ne permet pas d'établir que l'implantation projetée nuirait au commerce de centre-ville ;
- la part supplémentaire de clientèle engendrée par le projet est estimée à 15%, ce qui au regard du flux routier sur la RD 930 ne devrait pas perturber le trafic global, d'autant qu'afin de faciliter les flux internes à la zone commerciale et les sécuriser, elle a envisagé la création d'un rond-point franchissable, qu'elle financera intégralement, et produit devant la CNAC l'autorisation des propriétaires des parcelles concernées par la construction du rond-point, dont la réalisation effective est justifiée par la production de l'ensemble du dossier financier et administratif correspondant. Le projet ne présente aucune difficulté d'accès qui mettrait en danger les clients du magasin. Les véhicules de livraison emprunteront la même entrée/sortie que la clientèle, mais ne transiteront pas par le même cheminement que les véhicules légers. Les livraisons seront effectuées via une aire de déchargement dotée d'un quai situé à l'opposé de l'entrée pour les clients du magasin. De plus, les livraisons, qui auront lieu deux fois par jour, seront effectuées en dehors des heures d'ouverture. Le site est accessible à pied aux habitants des quartiers Sainte-Claire, Mirabeau, Saint-Michel qui peuvent emprunter les trottoirs existants. Il est prévu de créer un cheminement piétonnier entre le magasin et l'avenue des Pyrénées ainsi qu'un abri à deux roues couvert de huit emplacements, de sorte qu'elle a pu estimer le flux de piétons à 6 % et à 3 % celui des cyclistes. Enfin, un lieu d'arrêt des transports interurbains est situé à moins d'un kilomètre du magasin ;
- les dispositions de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme n'étaient pas entrées en vigueur à la date du dépôt du permis le 13 novembre 2015 et ne s'appliquent de surcroît que pour une création d'un commerce et non une extension. En outre, un tel moyen ne saurait être accueilli à l'encontre d'un permis de construire en ce qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. En l'espèce, le nombre de places de stationnement a été réduit à 114 afin d'améliorer le traitement des espaces verts et de les rendre plus harmonieux en conservant notamment les cyprès actuels ; quatre places pour des véhicules électriques ou hybrides, trois places pour personnes à mobilité réduite, trois places " familles " et un abri deux roues de huit emplacements ont été créés ;
- la parcelle d'emprise de l'ancien magasin Lidl était déjà imperméabilisée, de même que les parcelles adjacentes sur lesquelles étaient implantées deux maisons, et diverses mesures ont été prévues pour limiter cette imperméabilisation : terrassement pour assainissement, collecte des eaux usées et pluviales avec un filtre à sable et un débourbeur-déshuileur pour les eaux de ruissellement du parking. La conception du projet et son implantation résultent d'une réelle réflexion faite en fonction de son environnement et du paysage. Pour répondre aux interrogations de la CDAC, le projet modifié fait passer la surface des espaces verts de 904,86 à 1 308 mètres carrés et le nombre d'arbres de 29 à 39. Enfin, le projet s'implante dans la zone commerciale des Pyrénées qui ne présente aucune cohérence architecturale particulière. L'étude qu'elle a fait réaliser montre que son projet est plus performant que la réglementation RT 2012 ne le préconise en matière de réduction de la consommation énergétique du bâtiment, ainsi que par l'utilisation de LED, l'adaptation de l'éclairage en fonction de l'activité, l'installation de meubles doubles flux d'air et de rideaux de nuit s'abaissant automatiquement devant les meubles froids en dehors des heures d'ouverture, d'une pompe à chaleur et d'une ventilation double flux. Il en est de même s'agissant de la collecte, du tri et du traitement des déchets ;
- l'extension projetée améliorera la gamme de produits offerte aux consommateurs qui bénéficieront d'un plus grand confort d'achat. Le point de vente actuel travaille avec de nombreux fournisseurs locaux du Gers ou des départements limitrophes.
Par ordonnance du 26 janvier 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au
28 février 2018 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 15 novembre 2018 :
- le rapport de Mme Catherine Girault,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public ;
- et les observations de MeD..., représentant la commune de Condom.
Considérant ce qui suit :
1. La commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) du Gers a émis le 16 janvier 2016 un avis favorable au projet présenté par la société en nom collectif Lidl en vue de la reconstruction, après démolition du magasin existant d'une surface de vente de 651 mètres carrés, d'un supermarché de 1 420,80 mètres carrés de surface de vente sur la commune de Condom, dans le pôle commercial " Les Pyrénées " en entrée sud de la ville. La commission nationale d'aménagement commercial, saisie de trois recours contre cet avis, dont celui formé par la société par actions simplifiée Samage, a rejeté l'ensemble de ces recours et émis un avis favorable au projet. La SAS Samage, qui exploite sur la commune de Condom un hypermarché à l'enseigne " Intermarché " de 2 830 m² de surface de vente, demande à la cour d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2016 par lequel le maire de Condom a délivré le permis de construire en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale correspondant au projet d'une surface de plancher de 2 409,90 mètres carrés sur des terrains cadastrés section AT n° 36, 112, 118, 126, 231, 232, 236, 238 et 253 situés au niveau du 39 avenue des Pyrénées.
Sur la régularité formelle de l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 752-35 du code de commerce : " La commission nationale se réunit sur convocation de son président. Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier : / 1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; / 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ; / 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; / 4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision ; / 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale. ".
3. Il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, notamment pas de l'article R. 752-35 du code de commerce, ni d'aucun principe, que les décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial doivent comporter des mentions attestant de la régularité de sa composition ou de ce que la convocation de ses membres a été accompagnée de l'envoi de l'ordre du jour et des documents nécessaires aux délibérations. En tout état de cause, il ressort des pièces produites que dix membres de la commission étaient présents, et qu'ils avaient reçu communication des dossiers en temps utile, ceux-ci étant mis à leur disposition en ligne au moins cinq jours avant la séance.
4. En second lieu, selon l'article R. 752-6 du même code : " (...) Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : (...) / c) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; / d) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules de livraison générés par le projet et description des accès au projet pour ces véhicules (...) ".
5. Si la société Samage soutient que le dossier de demande déposé par la société Lidl ne contenait pas d'indications suffisantes permettant à la commission nationale d'aménagement commercial d'apprécier les impacts du projet sur les flux de circulation, il ressort toutefois des pièces du dossier que des comptages routiers sur la RD 930 émanant des données 2012 du département du Gers sont indiqués, faisant état de 2 582 passages par jour, et que l'évaluation des flux de circulation supplémentaires de véhicules particuliers, limités à une centaine par jour sur une clientèle d'environ 740 clients par jour, ainsi que de véhicules de livraison, n'apparaît pas inappropriée pour apprécier, s'agissant seulement d'une extension d'un magasin existant, la fréquentation du site. Le dossier comporte également des indications sur l'accès au site selon les différents modes de transport, et il n'est pas établi que les informations fournies seraient erronées. Par suite, la commission nationale d'aménagement commercial a ainsi disposé des éléments suffisants permettant d'apprécier les flux de circulation générés par le projet.
Sur l'appréciation de la commission nationale d'aménagement commercial :
6. Aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. / Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés ". Selon l'article L. 752-6 du même code : " I. - L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. (...) / 3° En matière de protection des consommateurs : /a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locale (...) ". Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code. L'autorisation ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation de ces objectifs.
En ce qui concerne l'impact du projet sur l'aménagement du territoire :
7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'assiette du projet se situe au sein d'une zone d'activités, à environ 1 kilomètre au sud du centre-ville de Condom, dans une zone de chalandise connaissant une légère diminution de population. La reconstruction du magasin suite à la destruction du bâtiment existant et de deux maisons d'habitation s'effectuera sans augmentation sensible de la surface imperméabilisée. Par ailleurs, les premières habitations sont situées à moins de trois cent mètres du supermarché. Ce magasin, d'une taille relativement modeste même après l'extension, est accessible à pied et est desservi par un système de transports en commun à la demande. Enfin, l'offre commerciale de la zone de chalandise sera ainsi étoffée et diversifiée, ce qui permettra en outre de limiter l'évasion commerciale. La seule circonstance que la commune de Condom a bénéficié d'une subvention du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) en 2013 en vue de dynamiser le commerce local n'est pas de nature à démontrer que l'extension projetée nuirait à l'animation du centre-ville de Condom.
8. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que les flux de circulation supplémentaires attendus pour le magasin, de l'ordre de 100 clients par jour, sont minimes par rapport à la capacité des axes d'accès au site, dont il n'est pas établi ni même allégué qu'ils seraient saturés. Si l'organisation des livraisons n'est pas optimale, les camions étant amenés à manoeuvrer sur la voirie clients pour accéder en marche arrière au quai de déchargement, le décalage des horaires par rapport à ceux d'ouverture du magasin peut pallier ce défaut. Enfin, contrairement à ce que soutient la société Samage, le pétitionnaire a produit devant la CNAC les autorisations des propriétaires des parcelles sur lesquelles est prévu un second giratoire, interne à la zone commerciale, réalisé et financé par la société Lidl pour sécuriser les accès au site, ainsi que l'avis favorable des services techniques communaux et des pièces concernant les contrats signés avec des entreprises de travaux publics pour la réalisation de l'ouvrage et le coût de cet aménagement. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de la desserte doivent être écartés.
9. En troisième et dernier lieu, le dossier de demande indique que deux parcs de stationnement pour deux-roues seront créés, ainsi qu'un cheminement doux. L'absence de desserte du site par une piste cyclable et par une ligne de bus régulière, dont au demeurant la commune est totalement dépourvue, ne serait pas à elle seule de nature à justifier le refus de l'autorisation sollicitée.
En ce qui concerne le développement durable :
10. En premier lieu, aux termes de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4 du présent code, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables à l'appui de telles conclusions (...) ".
11. La société Samage exploite un hypermarché dans la zone de chalandise du projet, et poursuit l'annulation du permis de construire accordé à la société Lidl en tant que professionnel dont l'activité est susceptible d'être affectée par le projet. Par suite, ses moyens ne peuvent tendre qu'à l'annulation de ce permis en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Elle ne peut donc se prévaloir de la règlementation prévue par le code de l'urbanisme pour limiter la surface consacrée aux stationnements, et le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-6-1 du code de l'urbanisme alors applicable doit être écarté comme irrecevable. Par ailleurs, au regard de la configuration des lieux avant le projet, le b) du 1° de l'article L.152-6 du code de commerce relatif à la consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement, n'apparaît pas méconnu.
12. En second lieu, le projet autorisé prévoit notamment la mise en place de dispositifs permettant l'isolation du bâtiment, la réduction des consommations d'énergie et le respect de la réglementation thermique 2012 sans augmentation de surface imperméabilisée, ainsi que le recyclage des déchets et la récupération des eaux pluviales. L'insertion paysagère est suffisamment assurée par les caractéristiques architecturales du bâtiment envisagé au sein d'une zone d'activités en entrée de ville et la plantation de près de quarante arbres supplémentaires. La CNAC n'a donc pas fait une inexacte appréciation de la qualité environnementale du projet en autorisant l'exploitation.
13. Il résulte de tout ce qui précède que la société Samage n'est pas fondée à demander l'annulation du permis de construire délivré le 13 juillet 2016 par le maire de Condom à la
SNC Lidl en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Condom, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par la société Samage sur leur fondement. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette dernière des sommes de 1 000 euros à verser d'une part à la SNC Lidl et d'autre part à la commune de Condom au titre des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La demande de la société Samage est rejetée.
Article 2 : La société Samage versera à la SNC Lidl et à la commune de Condom une somme de 1 000 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Samage, à la
société en nom collectif Lidl, à la commune de Condom et au ministre de l'économie et des finances (commission nationale d'aménagement commercial). Copie en sera adressée pour information au préfet du Gers.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
M. David Terme, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2018.
Le président-assesseur,
Jean-Claude PAUZIESLe président-rapporteur,
Catherine GIRAULT Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
N° 16BX02962 9