Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association " Société des amis de Navarrosse " a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler le permis de construire délivré le 24 mars 2014 par le maire de Biscarrosse à la société Les Campéoles et d'annuler par voie de conséquence la décision du 21 juillet 2014 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux.
Par un jugement n° 1401876 du 26 janvier 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 mars 2016 et des mémoires enregistrés le 30 août 2017, le 2 novembre 2017, le 10 novembre 2017, le 3 décembre 2017 et le 11 juin 2018, l'Association " Société des amis de Navarrosse ", représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 26 janvier 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 mars 2014 portant permis de construire au profit de la société " Les Campéoles ", ensemble le rejet de son recours gracieux intervenu le 21 juillet 2014 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Biscarosse et de la société Les Campéoles une somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que le remboursement du droit de plaidoirie de 13 euros.
Elle soutient que :
- le permis de construire a été délivré au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a pas été précédé d'une évaluation environnementale conformément aux dispositions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement ; le jugement n'a pas pris position sur l'impact sonore du projet (parc aqua-ludique et scène musicale) au regard des exigences de protection de la zone Natura 2000 " zone humides d'arrière dune du pays de Born ", alors que le camping de 15 hectares en bordure de cette zone est aussi dans une ZNIEFF de type I et II ; le projet comporte la création en réalité de 195 m² de plancher et 1 207 m² d'espace aquatique et plage en béton ;
- le permis de construire ne pouvait être délivré sans porter également sur la régularisation de l'ensemble des installations existantes qui ont été édifiées sans autorisation, ce que la commune n'a pas démenti ;
- s'agissant d'un espace proche du rivage au sens du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, l'autorisation d'aménagement de ce terrain ne pouvait être délivrée sans l'accord du représentant de l'Etat et l'avis de la commission départementale de la nature des sites et paysages ; le tribunal n'a pas recherché si l'extension de l'urbanisation était justifiée au POS ;
- le permis méconnaît les dispositions des articles III ND 1 et III ND 2 du règlement du plan d'occupation des sols dès lors que certains des aménagements qu'il autorise, notamment dancing et salle de jeux et scène d'animations musicales, et espace aquatique de 407 m², ne peuvent être regardés comme nécessaires à l'organisation et à la surveillance des terrains de camping et de stationnement des caravanes ou aux activités sportives ;
- le terrain se situe dans la bande des 100 mètres du littoral, il ne peut être regardé comme un espace urbanisé contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ce que la cour pourrait constater en ordonnant un transport sur les lieux ; il a été intégré dans le périmètre de la zone Natura 2000 par arrêté du préfet du 28 janvier 2016 ; par suite, le projet méconnaît les dispositions des articles L. 146-4 (III) et L. 146-5 du code de l'urbanisme.
Par des mémoires en défense enregistrés le 12 juillet 2017, le 3 novembre 2017 et le 26 novembre 2017, la commune de Biscarosse, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés et précise que la commune s'est dotée d'un plan local d'urbanisme classant le secteur en UK.
Par des mémoires en défense enregistrés le 22 septembre 2017 et le 24 novembre 2017, la société Les Campéoles, société à responsabilité limitée, représentée par la SCP Pèchenard et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- à défaut de classement de la zone considérée en tant que zone Natura 2000 à la date du permis en litige, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 414-4 du code de l'environnement est inopérant ;
- le moyen tiré de l'absence de permis de régularisation des constructions existantes est inopérant dès lors que le projet ne concerne pas des travaux sur constructions existantes ;
- les autres moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés, et la cartographie de la zone Natura 2000 ne comprend pas l'assiette du camping.
Par ordonnance du 27 novembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 4 décembre 2017 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n°95-161 du 15 février 1995 relatif aux droits de plaidoirie et à la contribution équivalente ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. David Terme,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant l'association " Société des amis de Navarrosse " et de Me B...représentant la commune de Biscarrosse.
Considérant ce qui suit :
1. La société " Les Campéoles ", qui exploite le camping dénommé " Campéoles Navarrosse " situé au 712 chemin de Navarrosse sur le territoire de la commune de Biscarrosse (Landes), alors en zone naturelle ND III du plan d'occupation des sols, a obtenu le 24 mars 2014 un permis l'autorisant à y édifier une construction à usage d'accueil du public et de restauration légère, un logement pour le gérant, une scène d'animations, un espace aquatique assorti d'un local technique et un terrain multisports, à transformer le bâtiment d'accueil existant en salle de jeux et de danse, à modifier la voirie interne, et, enfin, à démolir l'ancien logement du gérant, un terrain de tennis et plusieurs cabanons. L'association " Société des amis de Navarrosse " relève appel du jugement du 26 janvier 2016 du tribunal administratif de Pau par lequel celui-ci a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce permis de construire et de la décision du 21 juillet 2014 rejetant son recours gracieux.
Sur les conclusions en annulation :
2. Aux termes du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme alors applicable : " En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée (...) ". Aux termes de l'article L. 146-5 du même code : " L'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes en dehors des espaces urbanisés sont subordonnés à la délimitation de secteurs prévus à cet effet par le plan local d'urbanisme. / Ils respectent les dispositions du présent chapitre relatives à l'extension de l'urbanisation et ne peuvent, en tout état de cause, être installés dans la bande littorale définie à l'article L. 146-4 ".
3. Il ressort des pièces du dossier que si le vaste terrain d'assiette du projet litigieux supporte déjà plusieurs constructions éparses et se situe à proximité de deux zones d'habitat pavillonnaire dense à l'Ouest et au Sud, celles-ci sont peu étendues, et il en est séparé par un canal d'une quinzaine de mètres de largeur dont il n'est pas contesté qu'il sert de voie de communication et de mouillage pour des bateaux et en interdit l'accès par un autre moyen depuis ce terrain. En outre, ces deux zones sont elles-mêmes isolées, ceinturées par des voies de circulation, et ouvrent sur de vastes espaces naturels. Enfin, à l'Est et au Sud-Est, le bourg le plus important se situe à une distance approximative de 170 mètres et en est séparé par une voie de circulation et une parcelle supportant seulement des installations portuaires mais restée pour le reste à l'état naturel. Par suite, l'association requérante est fondée à soutenir que le terrain ne peut être regardé comme une zone urbanisée au sens des dispositions précitées. Il ressort également des pièces du dossier que les constructions autorisées par le permis litigieux se situent dans la bande des 100 mètres à compter des plus hautes eaux du lac de Cazaux / Biscarrosse. Les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées doivent, par suite, être accueillis, sans qu'importe la circonstance que le terrain d'assiette du projet serait situé dans une zone classée UK par le plan local d'urbanisme ultérieurement adopté par la commune de Biscarrosse en 2017.
4. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens n'est susceptible d'entraîner, en l'état du dossier soumis à la cour, l'annulation de la décision contestée.
5. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ".
6. Eu égard aux motifs d'annulation retenus au point 3, aucune régularisation ne peut être envisagée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que l'association requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a refusé d'annuler le permis de construire du 24 mars 2014.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la requérante les sommes que la commune de Biscarosse et la société Les Campéoles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la commune de Biscarosse et de la société les Campéoles une somme de 1 000 euros chacune à ce titre au bénéfice de l'association " Société des amis de Navarrosse ". La commune de Biscarosse versera également à cette association la somme de 13 euros prévue par l'article R.723-26-3 du code de la sécurité sociale au titre du droit de plaidoirie.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1401876 du 26 janvier 2016 du tribunal administratif de Pau, le permis de construire délivré le 24 mars 2014 à la société Les Campéoles et la décision du 21 juillet 2014 rejetant le recours gracieux de la requérante sont annulés.
Article 2 : La commune de Biscarosse et la société Les Campéoles verseront chacune à l'association " Société des amis de Navarrosse " une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La commune de Biscarosse versera à l'association " Société des amis de Navarrosse " une somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie.
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Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association "Société des amis de Navarrosse", à la commune de Biscarosse et à la société Les Campéoles.
Une copie en sera transmise au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Dax en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.
Délibéré après l'audience du 11 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
M. David Terme, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 15 novembre 2018.
Le rapporteur,
David TERMELe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au préfet des Landes, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16BX01020