Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy l'annulation de la délibération n° 2012-163 CE du 8 mars 2012 par laquelle le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande de permis de construire un bâtiment d'habitation sur une parcelle cadastrée AE 1705 située au lieudit Colombier.
Par jugement n° 1200053 en date du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 février 2016, et des mémoires enregistrés les 14 mai 2016, 16 mars et 16 juin 2017, Mme B...A..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1200053 du 17 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération n° 2012-163 CE du 8 mars 2012 par laquelle la collectivité de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande de permis de construire ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette délibération ;
3°) d'enjoindre à la collectivité de délivrer le permis de construire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal n'a pas suffisamment motivé son jugement ;
- la délibération est également insuffisamment motivée ;
- lors de la notification le 22 mars 2012 du refus de permis, la carte d'urbanisme du 9 mars 2012 était en vigueur pour avoir été publiée au JO de Saint-Barthélemy ; par suite le tribunal a commis une erreur dans le champ d'application de la loi en mettant en oeuvre les dispositions des articles 2-1 et 2-2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy et en reconnaissant l'existence d'un " projet de carte d'urbanisme de la collectivité " ;
- subsidiairement, la parcelle est située dans une zone urbanisée, la plupart des parcelles mitoyennes étant construites, 28 constructions étant recensées dans un rayon de 100 mètres et 82 dans un rayon de 200 mètres, et desservies par des voies d'accès et des réseaux ;
- le motif tiré de ce que le projet favoriserait une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels, en méconnaissance de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme, est entaché d'erreur " manifeste " d'appréciation ; la zone ne présente aucun caractère remarquable nécessitant une protection particulière et le projet, modeste, est intégré à l'environnement ;
- la collectivité ne peut utilement se prévaloir des dispositions postérieures de la carte d'urbanisme adoptée le 24 février 2017, et en vigueur depuis le 18 mars 2017, classant la parcelle en zone inconstructible, dont Mme A...entend au demeurant soulever l'illégalité par voie d'exception.
Par des mémoires, enregistrés les 18 avril 2016, 16 mai et 22 août 2017, la collectivité de Saint-Barthélemy conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A...d'une somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les décisions attaquées sont suffisamment motivées ;
- au jour de la décision du 8 mars, la carte d'urbanisme du 9 mars n'était pas approuvée ni entrée en vigueur ; au demeurant, elle classait la parcelle en secteur non constructible et a depuis été annulée ; la nouvelle carte adoptée le 24 février 2017 confirme un classement en zone naturelle du sommet du morne ;
- le sommet du morne et ses flancs sont demeurés à l'état naturel, comme avait pu le constater le tribunal administratif lors d'une précédente visite des lieux ; la définition d'espace urbanisé ne peut être entendue largement sur une île d'une superficie de 24 km² ;
- alors même que le terrain serait considéré à l'intérieur des parties urbanisées, cela n'interdirait pas d'opposer l'article R. 111-14-1 du code de l'urbanisme au regard de l'implantation de la construction envisagée à proximité du sommet du morne ;
- elle n'entend pas faire une application rétroactive de la carte d'urbanisme adoptée en 2017, laquelle ne fait que confirmer le caractère naturel de la zone qui comprend d'autres parcelles, et qui n'a au demeurant pas été attaquée par MmeA....
Par ordonnance du 16 juin 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 septembre 2017 à 12h.
Un mémoire récapitulatif a été présenté pour Mme A...le 27 septembre 2017, après la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Catherine Girault,
- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Désireuse d'édifier une construction à usage d'habitation sur la partie haute d'une parcelle AE n° 1705 située au Colombier à Saint-Barthélemy, Mme A...a sollicité le 22 janvier 2008 la délivrance d'un certificat d'urbanisme afin de s'assurer de la faisabilité de ce projet. Le 6 mars suivant, un certificat négatif lui a été délivré au motif, notamment, que ce projet s'exécuterait, en contradiction avec le 1° de l'article 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, dans un espace non urbanisé de la collectivité. Le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a refusé d'annuler cette décision par jugement du 7 octobre 2010, confirmé par la cour de céans le 13 octobre 2011. Le 17 janvier 2012, Mme A...a sollicité un permis de construire sur la même parcelle, à proximité du sommet du morne, aux fins d'édifier une maison de 154 m² de SHON avec piscine, qui lui a été refusé par délibération unanime du conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy du 8 mars 2012. Elle relève appel du jugement du 17 décembre 2015 rejetant sa demande d'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement :
2. Contrairement à ce que soutient MmeA..., le tribunal a suffisamment motivé son jugement en retenant, s'agissant de la motivation de la délibération attaquée, " qu'il ressort de l'examen des motifs de la décision attaquée que ceux-ci comportent les mentions de l'article 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy et du caractère non urbanisé des espaces dans lequel le projet se situe ; qu'ainsi la requérante a été informée des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la mesure qu'elle conteste ". Par suite, le jugement n'est pas irrégulier.
Sur la légalité du refus de permis de construire :
3. Le conseil exécutif de Saint-Barthélemy a refusé de délivrer le permis de construire sollicité au motif que la partie haute de la parcelle concernée correspond au sommet du morne et que ledit sommet et ses versants sont demeurés naturels et dépourvus de toute construction et d'équipements publics, concluant que " le projet contredit les articles 2-1 et 2-2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, le second renvoyant à l'article R. 111-14 du code national de l'urbanisme ". Ainsi que l'a relevé à bon droit le tribunal, une telle motivation permettait à la requérante d'être informée des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la mesure qu'elle conteste. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la décision ne peut qu'être écarté.
4. Aux termes de l'article 1er du code de l'urbanisme de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " Les règles générales applicables en matière d'utilisation du sol sur le territoire de la collectivité de Saint-Barthélemy, notamment en ce qui concerne la localisation, la desserte, l'implantation et l'architecture des constructions, le mode de clôture et la tenue décente des propriétés foncières et des constructions, sont déterminées par la carte d'urbanisme prévue à l'article 13. ". Aux termes de l'article 2 de ce même code : " En l'absence de carte d'urbanisme opposable aux tiers, les règles de constructibilité sont les suivantes : 1º En dehors des espaces urbanisés de la collectivité, seuls peuvent être autorisés l'adaptation, le changement de destination, la réfection ou l'extension extrêmement mesurée des constructions existantes ainsi que les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à l'exploitation agricole, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt général ; 2º Sur l'ensemble du territoire de la collectivité, les règles nationales d'urbanisme prévues aux articles R. 111-2 à R. 111-24 du code national de l'urbanisme sont applicables. (...) ". L'article R. 111-14 du code de l'urbanisme alors applicable disposait : " En dehors des parties urbanisées des communes, le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature, par sa localisation ou sa destination : a) A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés (...) ".
5. Mme A...soutient que c'est à tort que le tribunal a fait application des règles de constructibilité mentionnées aux articles 1 et 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy alors qu'à la date de la notification, le 22 mars 2012, de la décision attaquée, la carte d'urbanisme adoptée le 24 février 2012 avait été rendue opposable par sa publication et son affichage le 9 mars 2012. Toutefois, à la date de signature de la décision du 8 mars 2012, la carte communale n'était pas encore opposable, et le tribunal, qui n'a pas fait état dans la présente instance d'un " projet de carte communale " contrairement à ce que soutient Mme A...en opérant une confusion avec l'instance précédente sur le certificat d'urbanisme, n'a pas commis d'erreur de droit sur les dispositions applicables. Par suite, et alors au demeurant que Mme A...ne pouvait utilement se prévaloir de l'application de la carte d'urbanisme, laquelle classait son terrain en zone naturelle inconstructible et a d'ailleurs ultérieurement été annulée par le tribunal administratif, le moyen ne peut qu'être écarté.
6. La requérante soutient également que le conseil exécutif et le tribunal administratif ont mal apprécié la situation de sa parcelle, qui se trouve dans un secteur urbanisé de Saint-Barthélemy. Il ressort des plans et photographies produits au dossier que si le secteur dit Colombier apparaît largement construit, quoique sur de vastes parcelles, et si notamment 7 des 10 parcelles limitrophes du projet supportent des constructions, celle-ci sont implantées, à l'exception d'une seule, au bas des pentes du morne Colombier, dont le sommet, à une altitude d'environ 120 mètres, est resté vierge. Les circonstances que cet espace naturel ne ferait pas l'objet d'une protection légale spécifique, et qu'il n'est ni établi ni même allégué que la végétation y présente des espèces remarquables, ne font pas obstacle à ce que sa préservation soit recherchée par l'autorité chargée d'instruire les permis de construire. Au regard des photographies produites et de l'ampleur de la zone non construite, qui ne comporte pas seulement la parcelle de la requérante, l'autorité compétente et le tribunal ont pu sans erreur estimer que cet espace naturel pouvait être regardé comme en dehors des parties urbanisées de la collectivité, sans que la requérante puisse utilement se prévaloir de ce que les maisons avoisinantes sont desservies par les réseaux. En outre, au vu de l'implantation envisagée à quelques mètres du sommet du morne, et alors même que la conception architecturale du projet de plain-pied a recherché une intégration des matériaux dans l'environnement, le conseil exécutif a pu légalement opposer la circonstance que le projet favoriserait une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en méconnaissance de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme auquel renvoie l'article 2-2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy.
7. Enfin, la circonstance que la nouvelle carte d'urbanisme adoptée par le conseil exécutif de Saint-Barthélemy le 24 février 2017 ait classé l'ensemble des parcelles au sommet du morne en zone naturelle, si elle n'aurait pu utilement être invoquée par la collectivité, ne peut davantage utilement faire l'objet d'une " exception d'illégalité " de MmeA..., alors que la décision attaquée n'est pas prise sur son fondement ni pour son application.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du refus de permis de construire opposé le 8 mars 2012 par le conseil exécutif de Saint-Barthélemy. Par suite, ses conclusions à fins d'injonction de délivrer le permis sollicité ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la collectivité de Saint-Barthélemy, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme A... quelque somme que ce soit au titre des frais exposés pour l'instance et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la collectivité de Saint-Barthélemy sur le même fondement à l'encontre de MmeA....
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la collectivité de Saint-Barthélemy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et à la collectivité de Saint-Barthélemy.
Délibéré après l'audience du 27 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 octobre 2018.
Le président-assesseur,
Jean-Claude PAUZIESLe président-rapporteur,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au préfet délégué dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX00647