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27/09/2018 | FRANCE | N°16BX00577

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 27 septembre 2018, 16BX00577


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...C...ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler d'une part l'arrêté du 26 mars 2012 par lequel la préfète de la Charente-Maritime a fait opposition à leur déclaration préalable de division en deux lots de la parcelle ZS 67, lieudit " Champ des vignes " à Saint Palais de Phiolin, et d'autre part le certificat d'urbanisme du 4 mai 2012 par lequel la même autorité a déclaré non réalisable la construction de deux maisons et un atelier de mécanique sur le lot Nord.

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r un jugement n° 1201687 du 9 décembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...C...ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler d'une part l'arrêté du 26 mars 2012 par lequel la préfète de la Charente-Maritime a fait opposition à leur déclaration préalable de division en deux lots de la parcelle ZS 67, lieudit " Champ des vignes " à Saint Palais de Phiolin, et d'autre part le certificat d'urbanisme du 4 mai 2012 par lequel la même autorité a déclaré non réalisable la construction de deux maisons et un atelier de mécanique sur le lot Nord.

Par un jugement n° 1201687 du 9 décembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 février 2016, le 2 juin 2017 (régularisé par télérecours le 7 juin 2017) et le 28 août 2017 (régularisé avec signets le 29 août 2017), M. et MmeC..., représentés par MeD..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 9 décembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 mars 2012 par lequel la préfète de la Charente-Maritime a fait opposition à leur déclaration préalable de création de deux lots pour construire deux maisons et un atelier de mécanique sur la parcelle ZS 67 à Saint Palais de Phiolin, l'avis de la direction départementale des territoires et de la mer du 12 mars 2012 et le certificat d'urbanisme du 4 mai 2012 par lequel la même préfète a déclaré l'opération non réalisable, ensemble le rejet du recours gracieux contre l'arrêté du 26 mars 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- s'agissant de l'opposition à déclaration, c'est à tort que la préfète s'est fondée sur une méconnaissance de l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme alors que le conseil municipal avait bien délibéré le 23 mars 2012 en faveur du projet ; la décision d'opposition à déclaration est ainsi entachée d'une erreur de fait, qui aurait dû être rectifiée dans le cadre du recours gracieux, et d'un défaut d'examen complet, ainsi que d'une erreur d'appréciation ;

- en outre, le tribunal a commis une erreur de fait en retenant que la parcelle n'est pas raccordée aux réseaux, alors que le lot sud en est immédiatement voisin, seul le réseau d'assainissement faisant défaut dans cette partie de la commune ;

- l'opposition est disproportionnée alors que la préfète pouvait assortir sa décision de prescriptions spéciales relatives à la sécurité ; en s'abstenant de rechercher les conditions d'un accord, elle a commis une erreur de droit ;

- la distance de 100 mètres séparant le virage de la route départementale n° 144 de l'accès aux parcelles ne permet pas de retenir une atteinte à la sécurité, comme l'ont admis les premiers juges ; le département s'était prononcé favorablement sous réserve, et la DDTM a outrepassé ses prérogatives en donnant un avis défavorable ; en outre, le maire n'a pas été informé du projet ; par suite, le recours à l'article R. 422-2 n'est pas justifié et la compétence de la préfète est en cause ;

- le point 9 du jugement est directement contraire au point 6 et comporte une référence au point 7 visiblement erronée, si bien qu'il doit être écarté ;

- s'agissant du certificat d'urbanisme, c'est à tort que le tribunal a estimé que le préfet n'était pas tenu de suivre la délibération du conseil municipal qui s'est prononcé à l'unanimité en faveur du projet, méconnaissant le 4° de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ; la population de la commune a diminué de 30% en 50 ans et poursuit sa décroissance ; en 2014, la commune comptait 209 habitants, en diminution de 11,81 % par rapport à 2009 ; l'apport de population nouvelle et d'emplois était donc de nature à justifier le vote du conseil municipal, qui a largement motivé sa position, et sa délibération n'a pas été contestée dans le cadre du contrôle de légalité, alors que le service l'a reçue le 4 avril 2012 ; aller à l'encontre contrevient au principe de libre administration des collectivités locales garanti par l'article 72 de la Constitution ; le préfet, qui n'avait pas le pouvoir de se prononcer sur l'opportunité d'une dérogation, n'a en outre pas motivé sa décision d'écarter cette délibération ; il n'a pas davantage produit les pièces qui l'ont conduit à une décision négative, malgré un avis favorable de la CADA, seul ayant été produit un bordereau de transmission proposant une non-opposition tacite malgré l'avis défavorable de la direction départementale des territoires et de la mer, mais ni cet avis défavorable ni ses motifs, ce qui ne permet pas de vérifier que la préfète n'ait pas outrepassé ses pouvoirs en s'écartant desdits motifs ; l'avis non motivé, constitué d'un simple bordereau, est irrégulier et doit être annulé ; la portée de l'article " R. 423-74 " du code de l'urbanisme a été méconnue ;

- l'avis conforme du préfet n'est pas nécessaire pour les certificats d'urbanisme, en vertu des dispositions combinées des articles L. 410-1, L. 422-1, L. 422-5 et L. 422-6 du code de l'urbanisme ; en transmettant directement au préfet le dossier, la direction départementale des territoires et de la mer a commis un détournement de procédure ;

- le refus porte atteinte au principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques, car une parcelle plus éloignée du hameau a bénéficié en 2005 d'un permis de construire pour une habitation, avec avis favorable des services de l'Etat ; ce secteur a été considéré par la SAFER comme réservé à des activités ; sa parcelle est entourée par un atelier de menuiserie et un bâtiment technique pour une activité de maçonnerie ;

- cette habitation démontre d'ailleurs l'erreur de fait sur la desserte par les réseaux commise par le tribunal ;

- le motif de refus tiré de la consommation d'espaces agricoles ne saurait en droit, faute de base légale, faire obstacle à l'application du 4° de l'article L. 111-1-2 ; au demeurant, le terrain, peu fertile, n'a pas de vocation agricole et n'a même pas trouvé preneur pour une mise à disposition gratuite en échange de son entretien ;

- les deux demandes auraient dû faire l'objet d'une instruction séparée, et le préfet ne pouvait opposer à une simple division en deux lots les dispositions de l'article L. 111-1-2 ; par ailleurs, le certificat d'urbanisme n'a pas fait l'objet d'un avis défavorable, qui ne concerne que la déclaration préalable, et le maire était donc seul compétent pour le délivrer ;

- le certificat du préfet est postérieur au délai d'intervention d'une décision implicite d'acceptation, et donc " frappé de forclusion ".

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 août 2017, le ministre de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à la date des décisions contestées, le terrain du projet litigieux est situé à deux kilomètres du bourg de la commune de Saint-Palais-de-Phiolin, dans une vaste zone rurale où sont uniquement situés à proximité deux habitations et un atelier, ce qui ne permet pas de regarder la parcelle dont s'agit comme appartenant aux parties actuellement urbanisées de la commune au sens de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ;

- la délibération du 23 mars 2012 portant sur la demande de certificat d'urbanisme et n'ayant été reçue en préfecture que le 4 avril 2012, le préfet ne pouvait en tenir compte pour prendre le 26 mars 2012 la décision d'opposition à la déclaration préalable ;

- le certificat d'urbanisme négatif du 4 mai 2012 a écarté cette délibération du 23 mars 2012 au motif de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme. En effet, la délibération mentionne que " la population municipale est faible (252 habitants) et qu'il est important d'y maintenir les habitants " alors que le simple ralentissement de la croissance de la population et l'absence de constructions neuves depuis plusieurs années ne suffisent pas à établir la perspective de diminution de la population communale ;

- sur les autres moyens, il se réfère aux observations du préfet devant le tribunal.

Par ordonnance du 30 août 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 3 novembre 2017 à 12h00.

Les parties ont été informées par lettre du 9 juillet 2018 que la décision était susceptible de reposer partiellement sur un moyen soulevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions demandant l'annulation de l'avis de la direction départementale des territoires et de la mer du 24 janvier 2012.

Des pièces ont été produites par le ministre à la demande de la cour les 20 et 24 août 2018, et des observations en réponse à leur communication ont été présentées pour M. et Mme C... le 25 août 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Catherine Girault,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de M. C....

Une note en délibéré présentée pour M. et Mme C...a été enregistrée le 6 septembre 2018.

Considérant ce qui suit :

1. Le 24 janvier 2012, M. C...a déposé en mairie de Saint-Palais-de-Phiolin une déclaration préalable ayant pour objet la création de deux lots sur le terrain cadastré ZS 67, au lieu-dit " Champ des vignes ". Au vu de la contradiction entre l'avis favorable du maire et l'avis défavorable de la direction départementale des territoires et de la mer, la préfète de la Charente-Maritime a pris le 26 mars 2012 un arrêté d'opposition à cette déclaration. Le 24 janvier 2012, M. C...a également déposé pour la même parcelle une demande de certificat d'urbanisme opérationnel portant sur la construction, après division, de deux maisons d'habitation et deux garages-ateliers sur la parcelle Nord. La préfète a délivré le 4 mai 2012 un certificat déclarant le projet non réalisable. Le recours gracieux contre la première décision présenté par M. C...le 18 avril 2012 ayant été rejeté le 11 mai 2012, celui-ci a saisi le tribunal administratif de Poitiers le 4 juillet 2012 d'une demande d'annulation des deux décisions, et relève régulièrement appel du jugement du 9 décembre 2015 qui a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. La contradiction de motifs affecte le bien-fondé et non la régularité du jugement. Par suite, la circonstance, pour regrettable qu'elle soit, que les premiers juges aient indiqué, au demeurant par une simple erreur matérielle au point 9 du jugement, que le projet était situé " dans une partie urbanisée de la commune " alors qu'ils renvoyaient au point précédent, qui était à tort identifié comme le 7 alors qu'il s'agissait du 6, où ils avaient au contraire jugé qu'il était hors des parties urbanisées, n'entache pas le jugement d'irrégularité.

Sur la légalité de l'opposition à déclaration de division du 26 mars 2012 :

En ce qui concerne la compétence du préfet :

3. Selon l'article R. 422-2 du code de l'urbanisme alors applicable : " Le préfet est compétent pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable dans les communes visées au b de l'article L. 422-1 et dans les cas prévus par l'article L. 422-2 dans les hypothèses suivantes : (...) e) En cas de désaccord entre le maire et le responsable du service de l'Etat dans le département chargé de l'instruction mentionné à l'article R. 423-16. /Le préfet peut déléguer sa signature au responsable du service de l'Etat dans le département chargé de l'instruction ou à ses subordonnés, sauf dans le cas prévu au e ci-dessus. ".

4. Il ressort de la décision d'opposition que la préfète a bien signé elle-même cet acte, en visant l'avis favorable du maire du 24 janvier 2012 et l'avis défavorable de la direction départementale des territoires et de la mer du 12 mars 2012. Si M. C...critique l'absence de motivation de l'avis défavorable de la direction départementale des territoires et de la mer, en faisant valoir les difficultés qu'il a eues pour en obtenir communication malgré l'avis favorable de la CADA, la circonstance que le bordereau produit ne soit pas accompagné du projet de décision annoncé joint et qu'il porte en objet " transmission d'une proposition de non-opposition tacite " ne modifie pas le sens de l'avis qu'il contient, qui est expressément et sans ambigüité indiqué comme défavorable et justifiant le recours à l'arbitrage du préfet en application de l'article R. 422-2 du code de l'urbanisme. Ledit avis est signé par M. B...E..., adjoint au chef du service d'aménagement territorial de Saintonge, qui avait reçu délégation par arrêté du 16 février 2012, publié au recueil des actes administratifs du 29 février 2012, lequel avait notamment pour objet les affaires concernant l'instruction des décisions d'urbanisme pour lesquelles les services de l'Etat étaient mis à la disposition de communes dotées d'un document d'urbanisme. Dans ces conditions, M.C..., qui n'est pas recevable à demander l'annulation de l'avis de la direction départementale des territoires et de la mer, document préparatoire qui ne lie pas le préfet, alors qu'il ne conteste pas que la décision prise est dûment motivée, n'est pas fondé à critiquer la compétence de l'auteur de la décision.

En ce qui concerne l'opposabilité des règles de sécurité à une division parcellaire :

5. Les opérations d'aménagement, ayant pour but l'implantation de constructions, doivent respecter les règles tendant à la maîtrise de l'occupation des sols édictées par le code de l'urbanisme ou les documents locaux d'urbanisme, même si elles n'ont pour objet ou pour effet, à un stade où il n'existe pas encore de projet concret de construction, que de permettre le détachement d'un lot d'une unité foncière. Il appartient, en conséquence, à l'autorité compétente de refuser le permis d'aménager sollicité ou de s'opposer à la déclaration préalable présentée sur le fondement de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, une déclaration préalable de division est présentée en vue de l'implantation de constructions dont la compatibilité avec les règles d'urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme requises.

6. Pour s'opposer à la division de la parcelle en vue de construire, la préfète a relevé d'une part qu'elle était située en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune et ne relevait d'aucune des dérogations à l'interdiction de construire prévues à l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, et d'autre part que les conditions d'accès envisagées après un virage de la route départementale n° 144 présenteraient des risques, en méconnaissance des articles R. 111-5 et R. 111-2 du code de l'urbanisme. Il résulte des principes rappelés au point 5 que M. C...n'est pas fondé à soutenir que de tels motifs, susceptibles le cas échéant de conduire au refus de permis de construire, ne pourraient être opposés au stade de la division de la parcelle.

En ce qui concerne les erreurs de fait et de droit :

7. M. C...n'est pas davantage fondé à soutenir que l'absence de transmission de l'annexe au bordereau d'avis négatif de la direction départementale des territoires et de la mer l'aurait empêché de contrôler si la préfète s'était écartée des motifs dudit avis, dès lors que celui-ci ne lie pas le préfet.

8. Aux termes de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains : " En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : (...) / 4° Les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publique, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n'est pas contraire aux objectifs visés à l'article L. 110 et aux dispositions des chapitres V et VI du titre IV du livre Ier ou aux directives territoriales d'aménagement précisant leurs modalités d'application ".

9. Si M. C...évoque la proximité de deux ateliers de maçonnerie et de menuiserie et plusieurs constructions dans un rayon de 100 mètres, et relève que la limite de sa parcelle serait à environ 300 mètres, et non 500 mètres comme retenu par le préfet, du hameau de Montgarni, il ne critique pas la distance de 2,5 km du centre bourg retenue. Il ressort des plans produits au dossier que la parcelle s'inscrit bien dans un espace naturel et agricole malgré la présence isolée de quelques constructions, et que l'appréciation du préfet la situant en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune de Saint Palais de Phiolin, qui n'est pas dotée d'un document d'urbanisme, n'est pas erronée. Celle du tribunal faisant ressortir que la parcelle n'est pas desservie par les réseaux n'est pas davantage démentie par la seule assertion de M. C...selon laquelle le lot sud en serait immédiatement voisin. Enfin, M. C...critique surtout l'absence de prise en compte de la délibération du conseil municipal de Saint-Palais-de Phiolin du 23 mars 2012, prise sur le fondement du 4° précité de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette délibération, qui reconnaît donc la situation de la parcelle hors des parties actuellement urbanisées de la commune et évoque une consultation des concessionnaires en électricité et en eau pour une " extension " de leurs réseaux, prononçait un avis favorable sur la demande de certificat d'urbanisme et non sur la déclaration préalable en vue de division, et qu'elle n'est parvenue en préfecture que le 4 avril 2012. Ainsi, elle n'était pas opposable à la date de l'opposition à division attaquée, et le moyen tiré d'une erreur de fait ou de droit doit être écarté.

En ce qui concerne l'appréciation de la sécurité des accès :

10. Pour estimer en outre que le projet porterait atteinte à la sécurité publique en méconnaissance des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme, la préfète a relevé qu'un accès direct à la route départementale n°144 serait situé dans une zone où le tracé de cette route forme une courbe, réduisant ainsi la visibilité des véhicules sortant de la parcelle à 102 mètres du coté droit au lieu des 117 mètres requis pour une vitesse de référence de 70 km/h.

11. L'article R. 111-5 alors applicable indiquait que " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie./Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic. ". L'article R.111-2 disposait : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

12. Si le requérant fait valoir que le département s'était prononcé favorablement au projet sous réserve, il omet de préciser que ladite réserve avait précisément pour objet d'imposer une desserte des deux terrains par la voie communale située au sud, à l'exclusion d'un accès sur la RD 144. La même réserve avait d'ailleurs assorti un certificat positif délivré au requérant en 2006, et devenu caduc. Or le projet a divisé la parcelle en deux parties égales, celle située au Nord étant prévue uniquement avec accès sur la route départementale. Par ailleurs, si le requérant se prévaut de documents trouvés sur Internet et destinés à sensibiliser les usagers de la route aux effets de la vitesse et aux temps de freinage, il ne critique ainsi pas utilement les calculs effectués par la direction des infrastructures du conseil général de Charente-Maritime sur la base d'un document technique destiné à apprécier les distances de visibilité des véhicules.

13. Il résulte de ce qui précède que le recours gracieux contre l'opposition à déclaration de division pouvait légalement être rejeté au regard de ces considérations de sécurité. Il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que ce motif. Par suite, la circonstance qu'il ait omis de prendre en compte la délibération du conseil municipal du 23 mars 2012 au titre du motif d'opposition tiré de l'application de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ne peut être utilement invoquée.

Sur la légalité du certificat d'urbanisme négatif du 4 mai 2012 :

En ce qui concerne la compétence du préfet :

14. L'article L. 410-1 du code de l'urbanisme prévoit que " le certificat d'urbanisme est délivré dans les formes, conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'État par l'autorité compétente mentionnée au a et b de l'art. L 422-1 du présent code ". L'article R. 410-11 alors applicable indiquait que : " Le certificat d'urbanisme est délivré par l'autorité compétente mentionnée aux articles R. 422-1 à R. 422-4. ". Et l'article L.422-1 du même code, applicable à l'espèce, dispose que : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : /a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, ainsi que, lorsque le conseil municipal l'a décidé, dans les communes qui se sont dotées d'une carte communale ;lorsque le transfert de compétence à la commune est intervenu, ce transfert est définitif ; /b) Le préfet ou le maire au nom de l'État dans les autres communes. / ". L'article R. 422-1 précise : " Lorsque la décision est prise au nom de l'Etat, elle émane du maire, sauf dans les cas mentionnés à l'article R. 422-2 où elle émane du préfet. ".

15. Il résulte de la combinaison de ces dispositions et de celles de l'article R. 422-2 précité au point 3 que l'autorité compétente pour délivrer un certificat d'urbanisme est celle qui serait compétente pour délivrer un permis de construire pour le même projet. Par suite, et alors même que l'article R. 422-2 n'évoque que " le permis de construire, d'aménager ou de démolir ", le renvoi auquel il est procédé par l'article R. 410-11 rend applicable au certificat d'urbanisme le e) de l'article R. 422-2 désignant le préfet comme autorité compétente dès lors que les avis du maire et du service instructeur sont de sens contraire. Par suite, c'est à bon droit que le service instructeur a transmis à la préfète, sans commettre de détournement de procédure, une proposition de décision et que la préfète, visant l'avis favorable du maire du 24 janvier 2012 et l'avis défavorable de la direction départementale des territoires et de la mer du 27 avril 2012, s'est prononcée sur la demande de certificat d'urbanisme déposée par M. et MmeC.... Il ressort par ailleurs des pièces produites que ledit avis, signé également par M. E..., qui avait reçu délégation suffisante ainsi qu'il a été dit précédemment, est bien défavorable et la circonstance qu'il porte un tampon d'arrivée en préfecture en date du 9 mai ne signifie pas qu'il n'aurait pas été transmis par des moyens de communication rapides à la préfète, qui en avait connaissance le jour de la décision pour l'avoir visé. Par suite, la décision n'est entachée d'aucune incompétence ni détournement de procédure.

En ce qui concerne la prétendue intervention d'une décision implicite d'acceptation :

16. L'article R. 410-12 du code de l'urbanisme prévoit que : " A défaut de notification d'un certificat d'urbanisme dans le délai fixé par les articles R. 410-9 et R. 410-10, le silence gardé par l'autorité compétente vaut délivrance d'un certificat d'urbanisme tacite. Celui-ci a exclusivement les effets prévus par le quatrième alinéa de l'article L. 410-1, y compris si la demande portait sur les éléments mentionnés au b de cet article. ". Il résulte de ces dispositions qu'une demande de certificat d'urbanisme opérationnel ne peut faire naître une acceptation tacite du projet, mais seulement garantir le maintien des dispositions d'urbanisme applicables. Dans ces conditions, le moyen tiré d'une prétendue " forclusion " du certificat d'urbanisme négatif ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la prise en compte de la délibération favorable du conseil municipal du 23 mars 2012 :

17. Aux termes de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme alors applicable : " En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : 1° L'adaptation, le changement de destination, la réfection, l'extension des constructions existantes ou la construction de bâtiments nouveaux à usage d'habitation à l'intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d'une ancienne exploitation agricole, dans le respect des traditions architecturales locales ; 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole, à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national. Les projets de constructions, aménagements, installations et travaux ayant pour conséquence une réduction des surfaces situées dans les espaces autres qu'urbanisés et sur lesquelles est exercée une activité agricole ou qui sont à vocation agricole doivent être préalablement soumis pour avis par le représentant de l'Etat dans le département à la commission départementale de la consommation des espaces agricoles prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. Cet avis est réputé favorable s'il n'est pas intervenu dans un délai d'un mois à compter de la saisine de la commission ; 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes. 4° Les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publique, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n'est pas contraire aux objectifs visés à l'article L. 110 et aux dispositions des chapitres V et VI du titre IV du livre Ier ou aux directives territoriales d'aménagement précisant leurs modalités d'application ".

18. Pour demander, sur le fondement du 4° de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, une exception au principe de non-constructibilité hors des parties actuellement urbanisées, le conseil municipal a relevé que " la population municipale est faible (252 habitants) et qu'il est important d'y maintenir les habitants, que la réalisation d'un tel projet permettrait le maintien du réseau économique local, que peu de permis de construire ont été accordés depuis quelques années, que le terrain est à 30 m d'habitations existantes, que les concessionnaires en eau et électricité ont été sollicités pour prendre en charge l'extension de leurs réseaux, que le projet ne porte pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, ni à la salubrité et à la sécurité publique et qu'il n'entraînera pas de surcroît important des dépenses publiques ".

19. Pour écarter l'application de cette délibération, que le préfet n'était pas tenu de suivre sans pour autant méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales posé par la Constitution, la décision, après avoir rappelé les dispositions des articles L. 111-1-2 et R. 111-14-1 b, indique que le terrain fait partie d'un ensemble cultural (prairies naturelles) et de bois, et que sa constructibilité générerait une réduction des surfaces agricoles utiles préjudiciable au maintien de l'activité agricole dans une zone dont c'est la vocation. Il a ajouté que l'accès direct par la RD 144 aurait pour conséquences des conditions d'insécurité routières certaines. Contrairement à ce que soutient M.C..., la décision est ainsi suffisamment motivée. Si le requérant affirme que sa parcelle n'a pas de valeur agricole, il ne ressort pas des pièces du dossier, au regard des seuls plans et photographies fournies, que le préfet aurait inexactement apprécié ses caractéristiques et les conséquences d'une éventuelle urbanisation. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort qu'il a écarté la délibération du conseil municipal.

En ce qui concerne les autres motifs de refus opposés :

20. En premier lieu, le préfet a également visé l'avis du syndicat départemental d'électrification et d'équipement rural du 24 février 2012 et a indiqué que le réseau d'électricité est à 80 m et que son extension n'est pas prévue, concluant que la parcelle n'est pas desservie par ce réseau.

21. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. (...) ". Il appartient à l'autorité compétente pour délivrer le certificat d'urbanisme d'apprécier si les équipements publics existants ou prévus susceptibles de desservir le terrain concerné permettent ou non la construction sur ce terrain. Si elle estime que tel n'est pas le cas, cette autorité peut, sous le contrôle du juge, déclarer que le terrain est inconstructible ou non utilisable pour cette opération, alors même qu'aucune règle d'urbanisme n'imposerait le refus de toute construction ou autorisation.

22. Le requérant ne contredit par aucune pièce produite avant la clôture de l'instruction la nécessité d'une extension soulignée par l'avis du syndicat compétent. Dans ces conditions, le préfet pouvait à bon droit retenir une absence de desserte pour déclarer le projet non réalisable.

23. En second lieu, le préfet s'est également fondé sur les conditions d'accès envisagées après un virage sur la RD 144, qui présenteraient des risques pour la sécurité publique, en méconnaissance des articles R. 111-5 et R. 111-2 du code de l'urbanisme. Pour les motifs exposés au point 12, ce motif n'est pas entaché d'illégalité.

24. Enfin, M. C...ne peut utilement invoquer une méconnaissance du principe d'égalité en se bornant à se prévaloir d'un permis de construire anciennement accordé en 2005 pour une maison d'habitation sur la parcelle voisine, où existait déjà un atelier.

25. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande d'annulation des décisions de la préfète de la Charente Maritime des 26 mars et 4 mai 2012.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme C...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M et Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...C...et au ministre de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée à la préfète de la Charente-Maritime.

Délibéré après l'audience du 30 août 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. David Terme, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 27 septembre 2018.

Le président-assesseur,

Jean-Claude PAUZIESLe président-rapporteur

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

10

No 16BX00577


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00577
Date de la décision : 27/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Certificat d'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable - Déclaration de certaines divisions foncières (régime issu de la loi du 18 juillet 1985).


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CAULIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-09-27;16bx00577 ?
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