Vu la requête, enregistrée le 10 octobre 2014, présentée pour M. M'A...B..., demeurant au..., par Dialektik avocats ;
M. B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1402392 du 17 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 10 avril 2014 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et dans l'hypothèse où l'aide juridictionnelle lui serait refusée, le versement à son bénéfice de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2015 :
- le rapport de M. Olivier Gosselin, président-assesseur ;
1. Considérant que M.B..., de nationalité guinéenne, est entré irrégulièrement en France en mai 2010 selon ses déclarations ; que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 mai 2011 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 23 octobre 2012 ; que sa demande d'admission exceptionnelle au séjour a été rejetée le 24 mai 2013 par le préfet de la Moselle ; que l'intéressé a alors sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que, par arrêté du 10 avril 2014, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que M. B...relève appel du jugement n° 1402392 du 17 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cette décision ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il le soutient, que M. B... avait soulevé, dans son mémoire enregistré le 17 juillet 2014, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant au regard de la présence en France de ses deux enfants ; que le jugement attaqué ne répond pas à ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que le jugement est ainsi irrégulier; qu'il doit par suite être annulé ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
4. Considérant, en premier lieu, que la décision vise les textes dont le préfet a fait application, mentionne les éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de M.B..., rappelle l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et le pouvoir d'appréciation du préfet et estime que l'intéressé, qui peut bénéficier de soins appropriés à son état de santé dans son pays, ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, la décision attaquée, qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, et qui n'avait pas à faire état, de manière exhaustive, de tous les éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressé ni à préciser l'offre de soins accessible dans son pays d'origine, est suffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;
5. Considérant, par ailleurs, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ; qu'il résulte de ces dispositions que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle et n'implique pas, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention particulière pour respecter les exigences des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en l'espèce, ainsi qu'il vient d'être dit, l'arrêté énonce de manière suffisamment détaillée les motifs de droit et de fait sur lesquels le préfet s'est fondé pour estimer que M. B... n'avait pas droit au séjour, et par suite lui faire obligation de quitter le territoire français ; que le préfet n'avait pas à mentionner dans ces conditions l'article L. 511-4 10° du code précité ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...souffre d'une gastrite chronique ; que l'intéressé soutient qu'il n'existe pas de traitement approprié de sa pathologie en Guinée ; que, toutefois, le certificat médical établi le 5 mai 2014 par un médecin généraliste n'est pas de nature à remettre en cause l'avis émis le 13 décembre 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé de Midi-Pyrénées, lequel indique notamment qu'une offre de soins appropriée existe dans le pays d'origine du requérant pour sa prise en charge médicale ; qu'en particulier, ni ce certificat médical ni aucun autre élément produit par M. B...ne fournissent de précisions sur les traitements requis et leur indisponibilité en Guinée ; que, dans ces conditions, et alors que le requérant ne saurait utilement se prévaloir de la circulaire du 17 juin 2011 qui est dépourvue de valeur réglementaire, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant qu'en réservant le cas d'une circonstance humanitaire exceptionnelle, le législateur a souhaité que puissent être prises en compte les situations individuelles qui justifient, nonobstant l'existence d'un traitement approprié dans le pays d'origine, le maintien sur le territoire français de l'intéressé ; qu'ainsi, lorsque le demandeur porte à la connaissance de l'autorité administrative des éléments particuliers relatifs à sa situation personnelle, il appartient à cette autorité d'apprécier, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé lui-même éclairé par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, si ces éléments peuvent être qualifiés de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B...ait porté à la connaissance du préfet de la Haute-Garonne, préalablement à la décision litigieuse du 10 avril 2014, des éléments relatifs à sa situation personnelle susceptibles d'être qualifiés de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par ailleurs, s'il fait état de la circonstance que son frère s'est vu reconnaître la qualité de réfugié en France et s'il indique que ses enfants résident en France auprès de leur mère, il n'apporte aucun élément propre à sa situation susceptible d'être qualifié de circonstance humanitaire exceptionnelle ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
11. Considérant que si M.B..., qui réside à Toulouse, soutient qu'il entretient une relation avec son épouse et leurs enfants, lesquels résident à Metz, l'intéressé ne produit aucun élément probant de nature à établir la réalité et la stabilité de cette relation, alors qu'il indique que son épouse souhaite divorcer ; que le requérant n'établit pas davantage, en se prévalant de quelques photographies, de récépissés de versements d'espèces sur un compte à la banque postale dont il n'est pas établi qu'il serait celui de son épouse et de factures acquittées de cantine pour les mois de mars à mai 2014 et de deux attestations peu circonstanciées de son épouse, qu'il contribuerait effectivement à l'éducation et à l'entretien de ses trois enfants, dont le dernier est né en 2012 ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. B...conserve d'importantes attaches familiales dans son pays d'origine, où résident notamment, selon ses déclarations, sa mère, trois de ses frères et sa soeur, et où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour en litige n'a pas porté au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas entaché sa décision d'erreur de fait ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales citées ci-dessus ; que, pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle de l'intéressé ;
12. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;
13. Considérant, ainsi qu'il vient d'être dit, que M. B... n'établit ni qu'il vivrait avec ses enfants, ni qu'il assumerait effectivement ses obligations de parent ; qu'en l'absence de liens réels et avérés, la décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement prise à son encontre ;
15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;
16. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit aux points 7 à 9, le moyen tiré de ce que la décision méconnaîtrait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées ci-dessus ne peut qu'être écarté ;
17. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée l'obligation de quitter le territoire français doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 11 et 13 ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
18. Considérant que la décision fixant la Guinée comme pays de renvoi, qui vise notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, précise la nationalité de M. B...et indique que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à cette convention ; que cette décision est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;
19. Considérant que, compte tenu de tout ce qui a été dit précédemment, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait privée de base légale ne peut qu'être écarté ;
20. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;
21. Considérant que M. B...soutient que son engagement associatif et politique l'a contraint de fuir son pays d'origine ; que, toutefois, comme l'a relevé à juste titre le tribunal, le requérant, dont la demande d'asile a d'ailleurs été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, ainsi qu'il a été dit au point 1, ne produit pas d'éléments suffisamment probants de nature à établir la réalité des risques personnels et actuels allégués en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
22. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 10 avril 2014 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
23. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer sous astreinte un titre de séjour ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
24. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'avocat de M. B..., au titre des frais que l'intéressé aurait exposés s'il n'avait obtenu l'aide juridictionnelle ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1402392 du tribunal administratif de Toulouse du 17 septembre 2014 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
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N° 14BX02873