Vu la requête sommaire, enregistrée au greffe de la cour le 8 mars 2013, présentée pour M. A...C...B..., demeurant..., par Maître Gonelle, avocat ;
M. B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1003295 du 31 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 août 2010 par laquelle le maire du Passage d'Agen a décidé d'exercer le droit de préemption sur un immeuble sis 1891 avenue des Pyrénées, sur une parcelle cadastrée AE n° 64 ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) de mettre à la charge de la commune du Passage d'Agen la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2015 :
- le rapport de Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;
- les observations de Me Gonelle, avocat de M. B...et celles de Me Cyriaque, avocat de la commune du Passage d'Agen ;
1. Considérant que M. B...a signé, le 10 juin 2010, un compromis de vente d'un immeuble situé 1891 avenue des Pyrénées au Passage d'Agen ; que le vendeur a alors adressé, ce même jour, une déclaration d'intention d'aliéner à la commune du Passage d'Agen ; que par une décision du 11 août 2010, la commune du Passage d'Agen a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur ce bien ; que M. B...relève appel du jugement n° 1003295 du 31 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur la légalité de la décision du 11 août 2010 :
2. Considérant en premier lieu, que M. B...soutient que la décision attaquée ne pouvait être prise sur le fondement du 4° de l'article L.2122-22 du code général des collectivités territoriales et aurait dû l'être sur le fondement du 15° du même article ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L.2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 4° De prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés et des accords-cadres ainsi que toute décision concernant leurs avenants, lorsque les crédits sont inscrits au budget ; (...) 15° d'exercer, au nom de la commune, les droits de préemption définis par le code de l'urbanisme, que la commune en soit titulaire ou délégataire, de déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien selon les dispositions prévues au premier alinéa de l'article L. 213-3 de ce même code dans les conditions que fixe le conseil municipal (...) " ; que si l'arrêté en litige a visé le 4° et non le 15° de l'article L.2122-22 précité du code général des collectivités territoriales, une erreur de visas est cependant sans incidence sur la légalité d'un acte administratif ; que, par suite, le moyen ainsi invoqué ne peut qu'être écarté ;
4. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement.(...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ;
5. Considérant d'une part, que la décision attaquée rappelle que la commune du Passage d'Agen s'est engagée, dans le cadre du programme local de l'habitat de l'agglomération agenaise, dans une politique destinée à favoriser la réalisation de logements locatifs sociaux, eu égard à ses obligations découlant de l'article 55 de la loi du 13 décembre 2000, et précise que l'acquisition du bien immobilier en litige, " tant par son positionnement par rapport au groupe scolaire Ferdinand Buisson qu'aux commerces et activités de proximité, que par son accès direct sur la voie publique, en l'occurrence la rue Laurent Lavinal et l'avenue des Pyrénées, s'inscrit pleinement dans la politique municipale de mixité sociale menée par la commune, au vu du tissu urbain environnant, la réalisation d'une opération de logements locatifs sociaux, la partie arborée dudit bien immobilier contribuant à permettre la réalisation concomitante d'un aménagement paysager de nature à accompagner l'insertion d'une telle opération immobilière dans le quartier " ; que cette décision, qui fait ainsi apparaître la nature du projet en vue duquel le droit de préemption a été exercé, est donc suffisamment motivée ;
6. Considérant d'autre part, qu'il résulte des termes de cette décision que la commune a souhaité préempter l'immeuble en litige afin de respecter l'objectif de création de logements sociaux qui lui avait été assigné dans le cadre du programme local de l'habitat de l'agglomération agenaise ; qu'il ressort en effet des pièces du dossier, que le conseil municipal du Passage d'Agen a approuvé, par une délibération du 7 mars 2007, le programme local de l'habitat élaboré par la communauté d'agglomération d'Agen et qu'elle s'est engagée, dans le cadre du volet complémentaire de ce programme approuvé le 25 mars 2009, à réaliser entre vingt-cinq et soixante-quatorze logements sociaux sur le territoire communal ; qu'ainsi, au lendemain de la réception de la déclaration d'intention d'aliéner le bien en litige, la commune du Passage d'Agen a, par une lettre du 15 juin 2010, demandé à la société anonyme d'habitation à loyer modéré Ciliopée de réaliser une pré-étude portant sur la création de logements sociaux sur ce terrain, en soulignant qu'elle souhaitait réaliser, compte tenu de son positionnement en centre urbain et à proximité des commerces et des établissements d'enseignement, une opération immobilière de production de logements sociaux ou une opération mixte ; que, par une lettre du 12 juillet 2010, la commune a sollicité la délégation ponctuelle du droit de préemption urbain auprès de la communauté d'agglomération d'Agen, en précisant qu'elle souhaitait acquérir ce bien afin de réaliser une opération de logements locatifs sociaux et de respecter ainsi les engagements qu'elle avait pris dans le cadre du programme local de l'habitat de l'agglomération agenaise ; que c'est en vue de lui permettre de réaliser ce projet que le bureau de la communauté d'agglomération d'Agen lui a délégué, le 22 juillet 2010, l'exercice du droit de préemption pour cette acquisition ; qu'enfin, la lettre du 9 septembre 2010 par laquelle la société Ciliopée Habitat décrit les logements qu'elle envisageait de construire sur cette parcelle, qui était accompagnée d'un plan de masse sommaire faisant apparaître l'implantation des onze logements envisagés, les places de stationnement et l'aménagement paysager, atteste également de la réalité et de l'antériorité du projet communal ; que la circonstance que, par une simple erreur matérielle, cette lettre détaille les onze logements envisagés en indiquant seulement " huit logements neufs et deux créés dans le cadre du réaménagement de la maison existante ", alors pourtant que le plan joint identifie neuf logements neufs, n'est pas de nature à démontrer que le projet n'aurait été étudié qu'a posteriori ; que contrairement à ce que soutient M.B..., la circonstance que le conseil municipal n'ait pas délibéré sur un projet précis à l'emplacement du terrain concerné est sans incidence sur la réalité du projet communal et son antériorité à la décision attaquée ; qu'en outre, la décision litigieuse n'avait pas à décrire de manière précise le projet envisagé ni à désigner la société en charge de sa réalisation ; que la circonstance que les travaux n'aient pas été effectués ultérieurement à bref délai est sans incidence sur la légalité de cette décision, de même que le fait, pour la commune, d'avoir finalement porté à seize le nombre de logements à créer sur le terrain préempté, pour lesquels elle a délivré le 10 juin 2014 un permis de construire ; qu'enfin, M. B...ne saurait se prévaloir utilement du fait que la commune n'ait pas réalisé un projet sur un bien distinct de celui en litige, qu'elle avait antérieurement préempté ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la commune justifiait d'un projet suffisamment réel et précis à la date de la décision attaquée et ont, pour ce motif, écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Passage d'Agen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...la somme de 1 500 euros que demande la commune du Passage d'Agen sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : M. B...versera la somme de 1 500 euros à la commune du Passage d'Agen au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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No 13BX00736