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09/07/2014 | FRANCE | N°13BX03349

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 09 juillet 2014, 13BX03349


Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2013, par télécopie et régularisée le 16 décembre 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Ducos-Mortreuil, avocat ;

Mme A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301104 du 14 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 4 février 2013 par lequel le Préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renv

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2°) d'annuler cet arrêté du 4 février 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de...

Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2013, par télécopie et régularisée le 16 décembre 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Ducos-Mortreuil, avocat ;

Mme A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301104 du 14 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 4 février 2013 par lequel le Préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté du 4 février 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par heure de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions sur proposition du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2014 :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire, conseiller ;

1. Considérant que MmeA..., de nationalité albanaise, née en 1990, déclare être entrée en France le 30 août 2011 ; que sa demande d'asile a été rejetée le 7 novembre 2011 par le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile le 25 octobre 2012 ; qu'elle relève appel du jugement n° 1301104 du 14 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 4 février 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

Sur la légalité de l'arrêté :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant que l'arrêté attaqué vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment l'article L. 314-11 8°, sur lesquelles il se fonde, ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cet arrêté indique la date et les conditions de l'entrée en France de MmeA..., les démarches qu'elle a entreprises afin de régulariser sa situation administrative, le rejet de sa demande d'asile et précise enfin sa situation personnelle et familiale ; que cette motivation, révélatrice de ce que le préfet a procédé à un examen de la situation personnelle de MmeA..., n'est pas entachée d'insuffisance bien qu'il ne soit pas fait mention, dans cet arrêté, de la présence de sa soeur en France ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 doit être écarté ;

4. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit sois réserve de la régularité du séjour : (...) 8° à l'étranger qui a obtenu la statut de réfugié en application du titre VII du présent code ; " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " (...) la carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ( ...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application des dispositions et des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeA..., entrée en France dix-huit mois avant la date de l'arrêté attaqué, est célibataire et sans charge de famille ; que si sa soeur réside régulièrement en France, elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Albanie ou résident toujours ses parents et son frère ; que si elle soutient qu'elle ne pourrait retourner en Albanie en raison des risques auxquels elle serait exposée compte tenu de l'alcoolisme de son père et de sa dépendance aux jeux d'argent, elle ne l'établit pas ; qu'eu égard à la courte durée et aux conditions de séjour en France de MmeA..., l'arrêté contesté n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale eu égard aux buts en vue desquels il a été pris et ne méconnaît donc pas les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A...;

En ce qui concerne la mesure d'éloignement :

6. Considérant en premier lieu, qu'en vertu des dispositions du I du L. 511-1 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour lorsque, notamment, un refus de délivrance d'un titre de séjour a été opposé à l'étranger ; que l'arrêté litigieux indiquant précisément les motifs de droit et de fait pour lesquels le préfet a refusé de délivrer à Mme A...le titre de séjour qu'elle avait sollicité, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la mesure d'éloignement prise à son encontre ne peut dès lors qu'être écarté ;

7. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français " ; que MmeA..., qui avait la possibilité, pendant l'instruction de sa demande, de faire connaître, de manière utile et effective, les éléments justifiant son admission au séjour, ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, elle pourrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A...aurait eu de nouveaux éléments à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre une décision différente ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en prenant à son encontre une mesure d'éloignement sans la mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement et également méconnu les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

8. Considérant en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ... " ; que ce dernier texte stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de renvoi d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de renvoi ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

11. Considérant en premier lieu, que l'arrêté vise les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce qui démontre que le préfet a examiné les risques encourus alors même qu'il n'a pas visé l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il indique que la requérante n'établit pas être exposée à des peines ou traitement personnels réels et actuels contraires à cette convention en cas de retour dans son pays d'origine et rappelle notamment que la demande d'asile présentée par Mme A...a été rejetée ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de renvoi ne peut dès lors qu'être écarté ;

12. Considérant en deuxième lieu, qu'il ressort des termes de l'arrêté attaqué que, pour écarter les risques invoqués par Mme A...dans son pays d'origine, le préfet ne s'est pas uniquement fondé sur les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ayant rejeté sa demande d'asile ; que par suite, le préfet de la Haute-Garonne ne peut donc être regardé comme s'étant estimé lié par ces décisions ; que le moyen tiré de ce qu'il aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit par suite être écarté ;

13. Considérant en troisième lieu, que la requérante fait valoir que sa vie serait en danger en cas de retour en Albanie où elle aurait déjà été séquestrée et agressée par les créanciers de son père ; que cependant, l'intéressée, dont la demande d'asile a été rejetée, n'établit pas qu'elle serait, ainsi qu'elle le soutient, exposée à des risques pour sa vie ou sa sûreté dans son pays d'origine compte tenu de l'addiction à l'alcool et aux jeux d'argent dont souffrirait son père ; que, par suite, la décision susvisée ne méconnaît pas les stipulations et dispositions précitées ;

14. Considérant en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'encontre de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions prises à son encontre par le préfet de la Haute-Garonne le 4 février 2013 ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

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No 13BX03349


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13BX03349
Date de la décision : 09/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : DUCOS MORTREUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-07-09;13bx03349 ?
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