Vu la décision n° 348249 du 21 octobre 2013, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 13BX02941, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté pour M.D..., annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux n°10BX00351-10BX01966 en date du 8 février 2011 opposant la prescription quadriennale à sa demande d'indemnisation du préjudice né de sa vaccination contre la poliomyélite et a renvoyé l'affaire devant la même cour ;
Vu, I/, sous le n° 10BX00351, la requête enregistrée le 11 février 2010, présentée pour M.D..., demeurant..., par Me Schmitt, avocat ;
M. D...demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0503284 du 21 avril 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a ordonné une expertise complémentaire et de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif afin qu'il statue sur sa demande indemnitaire ;
2°) à titre subsidiaire, de décider que toute allocation provisionnelle accordée sur leur demande à l'expert et à ses sapiteurs éventuels à valoir sur le montant de leurs honoraires et débours sera versée par l'Etat ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens de l'instance d'appel ;
.........................................................................................................
Vu, II/, sous le n° 10BX01966, la requête présentée pour M.D..., enregistrée le 30 juillet 2010, par Me Schmitt, avocat ;
M. D...demande à la cour :
1°) de joindre les requêtes n° 10BX00351 et 10BX01966 ;
2°) d'annuler le jugement n° 0503284 du 1er juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice subi du fait de la vaccination antipoliomyélitique obligatoire dont il a fait l'objet le 1er juin 1979 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser un capital de 686 000 euros complété par une rente annuelle de 45 000 euros révisée chaque année, ces sommes portant intérêts à compter de la date de la demande indemnitaire préalable ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.........................................................................................................
Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2010, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne ;
La caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0503284 du 1er juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. D...tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice subi du fait de la vaccination antipoliomyélitique obligatoire dont il a fait l'objet le 1er juin 1979 ainsi que les conclusions de la caisse tendant à la condamnation de l'Etat à lui rembourser les dépenses de santé qu'elle a payées et les dépenses de santé futures ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 196 817,99 euros au titre des dépenses de santé et 129 908,83 euros au titre des dépenses de santé futures ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 966 euros au titre de l'indemnité de gestion ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la responsabilité sans faute de l'Etat est engagée à l'égard de M. D... du fait de la vaccination dont il a fait l'objet ;
- les sommes demandées au titre des dépenses de santé sont justifiées par l'attestation jointe ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 octobre 2010, présenté par le ministre de la santé et des sports qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre soutient que :
- la procédure de première instance n'est pas entachée d'irrégularité ; le délai de jugement résulte du refus du requérant de se soumettre à une nouvelle mesure d'expertise ; le tribunal n'a pas écarté l'expertise fournie par le requérant, sur laquelle il se fonde d'ailleurs ;
- le fait générateur du préjudice dont se prévaut le requérant se situe en 1979 et la prescription quadriennale de la loi du 31 décembre 1968 est dès lors en principe acquise depuis le 1er janvier 1984 ;
- il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des lésions développées par le requérant sont stabilisées depuis au moins l'année 1993, date de sa dernière hospitalisation ; la prescription est ainsi acquise depuis le 31 décembre 1997 ; l'administration a opposé la prescription quadriennale dans le rejet de la réclamation préalable du 17 juin 2005 ainsi qu'en première instance ;
- le lien de causalité directe entre la vaccination subie par le requérant et sa pathologie n'est pas établi ;
- les sommes demandées par le requérant, sous forme de versement d'un capital, au titre de l'atteinte à son intégrité physique, de son préjudice esthétique et des souffrances physiques endurées sont excessives ;
- la rente qu'il demande n'est pas justifiée ;
Vu le mémoire, enregistré le 8 novembre 2010, présenté par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) tendant à sa mise hors de cause ;
L'Office soutient que :
- en vertu des dispositions de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique telles qu'elles résultent de la loi n° 2004-303 du 9 août 2004 et des dispositions de l'article 7 du décret n° 2005-1768 du 30 décembre 2005, il n'intervient que pour les affaires dans lesquelles aucune décision de l'administration n'a été prise avant le 1er janvier 2006 ; la demande d'indemnisation du requérant ayant été rejetée le 17 janvier 2005, il doit être mis hors de cause ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 janvier 2011, présenté pour M. D...qui conclut aux mêmes fins que la requête, y ajoutant une demande de capitalisation des intérêts, par les mêmes moyens ;
Vu la note en délibéré enregistrée, le 12 janvier 2011, présentée pour M. D...qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 février 2011, présenté par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, qui s'en remet à ses précédentes écritures sur l'instance 10BX00351 en acceptant la jonction ;
Vu le mémoire après cassation, enregistré le 17 décembre 2013, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Elle demande en outre à la cour :
1°) à titre subsidiaire, si une expertise complémentaire devait être ordonnée, de réserver ses droits pour le surplus de sa créance dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 015 euros au titre de l'indemnité de gestion ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient en outre que la prescription quadriennale ne saurait être opposée par l'Etat ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 décembre 2013, présenté pour M. D... qui conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 décembre 2013, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 février 2014, présenté par le ministre des affaires sociales et de la santé qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Le ministre soutient en outre que :
- si le certificat médical ne pouvait être suffisant pour permettre aux parents d'affirmer le lien entre la vaccination et la maladie, les autres pièces du dossier leur permettaient d'avoir une connaissance suffisante des conséquences dommageables de la vaccination, notamment par le truchement du médecin traitant de l'enfant et par l'existence d'un principe législatif d'indemnisation des dommages consécutifs à une vaccination ; à la date de la consolidation de l'état de l'enfant, compte tenu du rôle du médecin traitant et des informations disponibles dans les ouvrages médicaux, les parents pouvaient avoir connaissance des éléments leur permettant d'affirmer que la maladie dont souffrait leur fils pouvait avoir été causée par la vaccination ; le délai de la prescription a donc pu commencer à courir le 1er janvier 1984 ;
- la publication de l'information sur les accidents de vaccination par le dictionnaire Vidal à partir de 1988 permet également de faire courir le délai à compter du 1er janvier 1989 ;
Vu l'ordonnance en date du 14 novembre 2013 fixant en dernier lieu la clôture d'instruction au 27 février 2014 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2014 :
- le rapport de M. Olivier Gosselin, président-assesseur ;
- et les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;
1. Considérant que, par ordonnance, en date du 6 février 2001, le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Toulouse, statuant en référé, a fait procéder à une expertise concernant l'état de santé de M.D..., atteint d'une poliomyélite qui s'est développée à l'âge de trois mois, peu de temps après la vaccination obligatoire dont il avait fait l'objet en 1979, et qui lui a laissé des séquelles majeures de quadriplégie et de paralysie respiratoire ; qu'à la suite de l'expertise rendue le 24 juin 2004, M. D...a présenté une réclamation préalable tendant à ce que l'Etat l'indemnise de son préjudice, que le ministre de la santé et des solidarités a rejetée par décision en date du 17 juin 2005 ; qu'à la suite de ce refus, M. D...a demandé au tribunal administratif de condamner l'Etat à lui verser la somme de 686 000 euros ainsi qu'une rente annuelle de 45 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de sa vaccination antipoliomyélitique ; qu'estimant que l'expertise déjà réalisée ne lui permettait pas, en toute connaissance de cause, de se prononcer sur le bien-fondé de la demande de M. D..., le tribunal administratif de Toulouse a, par jugement avant dire droit en date du 21 avril 2009 dont l'intéressé a relevé appel, ordonné une nouvelle expertise ; que par jugement en date du 1er juin 2010 dont M. D...a également relevé appel, le tribunal administratif de Toulouse a ensuite rejeté la demande indemnitaire de l'intéressé au motif que celui-ci s'étant opposé à la réalisation de cette expertise, le lien de causalité ne pouvait être établi ; que la cour a joint ces requêtes pour statuer par un seul arrêt en date du 8 février 2011, qui a estimé acquise la prescription quadriennale ; que par décision du 21 octobre 2013, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour ;
Sur la régularité des jugements :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3113-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date de la demande d'expertise présentée par M.D... : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d'un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est supportée par l'Etat. " ;
3. Considérant que M. D...fait valoir que les premiers juges ne pouvaient prescrire une seconde expertise, qui s'avérait inutile ; qu'il résulte de l'instruction que cette seconde expertise portait sur des questions déjà traitées dans l'expertise réalisée le 24 juin 2004 par le docteurA... ; que si le tribunal entendait se faire préciser l'étiologie de la maladie, cette question ne présentait pas d'utilité pour la solution du litige dès lors que la première expertise se prononçait de manière suffisante sur les conditions de l'apparition de la maladie, l'état de santé antérieur et la vaccination de l'enfant pour permettre au juge de statuer sur la réparation du dommage subi par le requérant ;
4. Considérant par ailleurs que si le tribunal entendait également se faire préciser la date éventuelle de la consolidation de l'état de M.D..., cette question ne présentait pas non plus d'utilité pour le tribunal dès lors que ni le certificat médical établi le 28 décembre 1983, ni la mention des effets indésirables de la vaccination dans le dictionnaire Vidal, ni aucune autre circonstance alléguée par le ministre ne pouvait permettre aux parents de l'enfant de rattacher les préjudices subis par M. D... à la vaccination pratiquée le 1er juin 1979 ; que le délai de prescription quadriennale n'ayant pas pu courir de ce fait, le tribunal n'avait pas à rechercher la date d'une éventuelle consolidation de la maladie pour écarter l'exception de prescription, et pouvait statuer sur la demande indemnitaire ;
5. Considérant dès lors que l'expertise prescrite par le jugement avant dire droit du 21 avril 2009 présentait un caractère frustratoire ; que M. D...est, par suite, fondé à demander l'annulation de ce jugement ainsi que celle du jugement du 1er juin 2010 rejetant sa demande indemnitaire par voie de conséquence de son opposition à la réalisation de cette nouvelle expertise ;
6. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Toulouse et tendant à être indemnisé de son préjudice ;
Sur l'exception de prescription:
7. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat (...), sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la connaissance par la victime de l'existence d'un dommage ne suffit pas à faire courir le délai de la prescription quadriennale ; que le point de départ de cette dernière est la date à laquelle la victime est en mesure de connaître l'origine de ce dommage ou au moins de disposer d'indications suffisantes selon lesquelles ce dommage pourrait être imputable au fait de l'administration ;
8. Considérant que ni l'attestation établie par un médecin du centre hospitalier à la sortie de l'enfant après quatre ans d'hospitalisation, en date du 28 décembre 1983, qui ne fait état d'aucun lien entre la poliomyélite dont il est atteint et la vaccination reçue à trois mois de vie, ni la circonstance que cette attestation aurait pu être commentée aux parents de M. D...par le médecin traitant de l'enfant ni, enfin la circonstance que le dictionnaire Vidal ait mentionné les effets indésirables de la vaccination dans son édition de 1988 n'étaient suffisants pour faire courir le délai de prescription quadriennale à l'encontre du requérant et de ses parents ; que par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la compétence de M.C..., sous-directeur de la coordination des services et des affaires juridiques à la direction générale de la santé, pour signer la décision du 17 juin 2005 opposant la prescription quadriennale à la demande d'indemnisation, l'exception de prescription invoquée par l'Etat ne peut qu'être écartée ;
Sur la mise en cause de l'ONIAM :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 3113-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date de la demande présentée par M.D..., mettaient la réparation d'un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire à la charge de l'Etat ; que la demande de réparation de son préjudice présentée par M. D...étant antérieure à l'intervention du décret du 30 décembre 2005 ayant transféré à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales la charge d'indemnisation des victimes de tels préjudices, l'Office doit être mis hors de cause ;
Sur l'imputabilité de la maladie à la vaccination :
10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.D..., alors âgé de près de trois mois, a fait l'objet le 1er juin 1979 d'une vaccination antipoliomyélitique, pratiquée par voie orale au moyen du vaccin Sabin TO 206 3 utilisant des souches vivantes du virus ; que l'enfant a été atteint de fortes fièvres dès le 17 juin, puis de paralysies périphériques et de troubles respiratoires à partir du 21 juin ; que la poliomyélite a été diagnostiquée dès le 24 août 1979 ; que M.D..., qui souffre toujours de quadriplégie et de paralysie respiratoire complète, demande la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices subis du fait de sa vaccination antipoliomyélitique, obligatoire depuis 1964 en application des dispositions de l'article L. 7-1 du code de la santé publique alors applicable ; que si l'expert désigné en référé ne se prononce pas sur le lien de causalité entre la vaccination et la maladie, il ne l'exclut pas et a noté que " les effets indésirables du vaccin oral, signalés dans le dictionnaire Vidal, sont des paralysies que l'on peut observer sur le sujet vacciné dans les 30 jours suivant la vaccination, dues à une réversion de l'atténuation du virus " ; que, compte tenu du bon état de santé antérieur à la vaccination de l'enfant, de l'absence de contre indication à la vaccination, de la rapidité d'apparition des signes d'infection et de l'absence d'autre vaccination, le lien de causalité direct doit être regardé comme établi même en l'absence de certitude scientifique sur l'étiologie de la maladie en ce qui concerne M.D... ; que, par suite, l'Etat doit indemniser les préjudices causés par cette vaccination en application de l'article L. 3113-9 du code de la santé publique précité;
Sur le préjudice :
En ce qui concerne les dépenses de santé supportées par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne :
11. Considérant qu'en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, les caisses de sécurité sociale sont autorisées à demander à l'auteur du dommage causé à l'un de leurs assurés le remboursement des prestations servies quel que soit le fondement de la responsabilité encourue ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne justifie des dépenses de santé actuelles qu'elle a exposées à hauteur de 181 609,51 euros, et de frais divers à hauteur de 15 208,48 euros ; qu'il y a lieu de condamner l'Etat au versement de ces sommes ; qu'en revanche, si la caisse demande au titre des dépenses futures une somme de 129 908,83 euros qu'elle n'a jamais réévaluée depuis 2009, il y a lieu de décider que les dépenses de santé futures ainsi réclamées seront remboursées, sur présentation des justificatifs, à la fin de chaque année échue ;
En ce qui concerne l'indemnité prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :
12. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne a droit à la somme de 1 015 euros qu'elle demande au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu de mettre cette somme à la charge de l'Etat ;
En ce qui concerne M.D... :
13. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise que M.D..., qui a vécu à l'hôpital jusqu'à l'âge de quatre ans, puis a été hospitalisé seulement la nuit pendant neuf ans, et n'a jamais pu être scolarisé, reste atteint d'une incapacité permanente de 90 % ; que le préjudice esthétique lié notamment à l'intubation permanente et à la dépendance d'un respirateur artificiel, ainsi qu'à l'impossibilité de se tenir debout, a été qualifié par l'expert de considérable, et noté 7 sur une échelle de 7 ; que les douleurs diverses, notamment à la mobilisation, ont été qualifiées d'importantes et évaluées à 5 sur une échelle de 7 ; que si l'intéressé a pu apprendre à lire, ses difficultés de préhension ne lui ont pas permis d'apprendre à écrire ; que le préjudice d'agrément lié à l'absence totale d'autonomie, l'isolement social et la dépendance à l'égard des tiers qui le visitent et la limitation des distractions a été estimé très important à 6 sur une échelle de 7 ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, M. D...est fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 686 000 euros au titre des troubles personnels de toute nature qu'il subit dans ses conditions d'existence ;
14. Considérant qu'il est constant que l'état de M. D...requiert l'assistance permanente d'une tierce personne ; que la circonstance que cette assistance lui soit apportée par roulement nuit et jour par les membres de sa famille n'est pas de nature à modifier son droit à indemnisation ; qu'en sollicitant une rente annuelle de 45 000 euros, il n'a pas fait une appréciation excessive de ce préjudice ; que par suite il y a lieu de lui accorder la rente demandée, laquelle sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
15. Considérant que M. D...a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 686 000 euros à compter du 9 mars 2005, date de réception de sa demande par le ministre des affaires sociales et de la solidarité ; que les arrérages de la rente qui lui est due porteront intérêts au taux légal à compter de leur date d'échéance respective et jusqu'à leur paiement ; qu'il a sollicité la capitalisation des intérêts par mémoire enregistré le 6 janvier 2011 ; qu'à cette date, il était dû plus d'une année d'intérêts ; que par suite, il y a lieu de faire droit à sa demande et d'ordonner la capitalisation des intérêts au 6 janvier 2011 et à chacune des échéances annuelles à compter de cette date ;
Sur les dépens de l'instance :
16. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 500 euros par ordonnance du président du tribunal administratif de Toulouse en date du 1er juillet 2004 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. D...et non compris dans les dépens et la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne ;
DECIDE :
Article 1er : Les jugements n° 0503284 des 21 avril 2009 et 1er juin 2010 du tribunal administratif de Toulouse sont annulés.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser la somme de 686 000 euros à M. D.... Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 9 mars 2005. Les intérêts seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts au 6 janvier 2011 et à chacune des échéances annuelles à compter de cette date.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. D... une rente annuelle de 45 000 euros, versée par trimestre échu et revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. Les arrérages échus porteront intérêt au taux légal à compter du 9 mars 2005. Les intérêts seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts au 6 janvier 2011 et à chacune des échéances annuelles à compter de cette date.
Article 4 : L'Etat est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne la somme de 196 817,99 euros ainsi qu'à lui rembourser, sur présentation des justificatifs à la fin de chaque année échue, les frais exposés par elle au titre des frais futurs de santé.
Article 5 : L'Etat est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne la somme de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Article 6 : Les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 500 euros par ordonnance du président du tribunal administratif de Toulouse du 1er juillet 2004 sont mis à la charge définitive de l'Etat.
Article 7 : L'Etat versera à M. D...la somme de 1 500 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., au ministre des affaires sociales et de la santé, à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM). Copie en sera adressée à MmeA..., expert.
Délibéré après l'audience du 12 juin 2014 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Olivier Gosselin, président-assesseur,
Mme Marie-Pierre Dupuy, premier conseiller.
Lu en audience publique le 9 juillet 2014.
Le rapporteur,
Olivier GOSSELINLe président,
Catherine GIRAULTLe greffier,
Florence FAURE
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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