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31/10/2013 | FRANCE | N°13BX00616

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 31 octobre 2013, 13BX00616


Vu la requête, enregistrée le 26 février 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 27 février 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Tercero, avocat ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 0804321-1201737 en date du 20 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation de la décision implicite de rejet du préfet de la Haute-Garonne sur sa demande de délivrance d'un titre de séjour et, d'autre part, à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2

012 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de...

Vu la requête, enregistrée le 26 février 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 27 février 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Tercero, avocat ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 0804321-1201737 en date du 20 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation de la décision implicite de rejet du préfet de la Haute-Garonne sur sa demande de délivrance d'un titre de séjour et, d'autre part, à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2012 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de procéder à l'effacement de son signalement dans le système d'information Schengen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions sur proposition du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Catherine Girault, président ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité ghanéenne, né le 11 septembre 1967, est entré irrégulièrement en France, selon ses dires, en décembre 2004 ; qu'à la suite d'une interpellation le 1er septembre 2005, il a fait l'objet d'un arrêté portant reconduite à la frontière assorti d'une mesure de placement en rétention administrative ; que suite à une demande d'admission au séjour en qualité d'étranger malade le 14 décembre 2006, un arrêté de refus de titre de séjour a été pris à son encontre le 7 mai 2007, accompagné d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'il a de nouveau été interpellé le 25 octobre 2007 et a été placé en rétention administrative ; qu'un arrêté de reconduite à la frontière a été pris le 6 novembre 2008 à son encontre, ainsi qu'une mesure de placement en rétention administrative, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Toulouse du 12 novembre 2008 ; que M. A... a déposé un nouveau recours devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à l'annulation d'une décision implicite de rejet d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour qu'il aurait déposée le 28 mai 2008 ; que le 8 février 2010, il a sollicité de nouveau son admission exceptionnelle au séjour ; que par un arrêté du 24 janvier 2012, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans ; que par un jugement n°s 0804321-1201737 en date du 20 novembre 2012 le tribunal administratif de Toulouse a rejeté, après les avoir jointes, ses demandes tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet et à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2012 ; que M. A...relève appel de ce jugement, mais faute d'énoncer aucun moyen contre le rejet de sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite, dont le tribunal a estimé que l'existence n'était pas établie, doit être regardé comme en sollicitant l'annulation seulement en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2012 ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " II. - L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant " ; et qu'aux termes de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 : " Lorsqu'une action en justice doit être intentée avant l'expiration d'un délai devant la juridiction du premier degré (...), l'action est réputée avoir été intentée dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter : (...) c) De la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet de la demande est devenue définitive / d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. " ; qu'enfin, en vertu de l'article 23 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de l'article 56 du décret du 19 décembre 1991, la décision du bureau admettant le demandeur au bénéfice de l'aide juridictionnelle ne devient définitive qu'à l'expiration d'un délai de recours de deux mois ouvert au bâtonnier à compter de la date à laquelle cette décision a été prise ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 24 janvier 2012 a été régulièrement notifié à M. A...le 7 février 2012 ; qu'il a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 9 février 2012, soit dans le délai de recours contentieux de 48 heures prévu par le II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce qui a eu pour effet d'interrompre ce délai ; qu'en application des dispositions précitées de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991, un nouveau délai de recours de 48 heures devait commencer à courir à compter du 29 avril 2012, date à laquelle la décision du 29 février 2012 lui allouant l'aide juridictionnelle totale devenait définitive ; qu'ainsi, la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Toulouse le 12 avril 2012 ne saurait être regardée comme tardive ; que la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Haute-Garonne doit, par suite, être écartée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, applicable en l'espèce : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) : ( ...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. /(...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'obligation de quitter le territoire, prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte du refus de séjour ; qu'en l'espèce, la décision de refus de titre de séjour comporte l'énoncé détaillé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement de ce refus de séjour doit être écarté ;

5. Considérant qu'au soutien du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, M. A...ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges ;

6. Considérant que M. A...soutient que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ne prévoyant aucune procédure contradictoire préalablement à l'édiction d'une mesure d'éloignement, est incompatible avec les exigences du considérant 6 et de l'article 1er de la directive 2008/115/CE ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 : " La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu'au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l'homme " ; que le sixième considérant de cette directive indique que : " Les États membres devraient veiller à ce que, en mettant fin au séjour irrégulier de ressortissants de pays tiers, ils respectent une procédure équitable et transparente " ; qu'aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre " ; qu'aux termes de l'article 51 de la même charte : " Champ d'application. 1. Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions et organes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ;

8. Considérant que lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet se situe dans le champ d'application de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ; que la décision de retour imposée à un étranger dont la demande de titre de séjour a été rejetée est régie par les principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit à une bonne administration ; que le droit d'être entendu avant l'édiction d'une mesure individuelle défavorable, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, permet à toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, ses observations écrites ou orales au cours d'une procédure administrative, avant l'adoption de toute décision susceptible de lui faire grief ; que toutefois ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations ; que dès lors, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas incompatible avec la directive précitée, laquelle ne demande pas expressément l'organisation d'une procédure contradictoire préalable à l'édiction d'une mesure d'éloignement, ni avec la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français " ; que M.A..., qui avait la possibilité, pendant l'instruction de sa demande, de faire connaître, de manière utile et effective, les éléments justifiant son admission au séjour, ne pouvait ignorer, alors au demeurant qu'il avait fait l'objet de plusieurs mesures de même nature, qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il pourrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A...aurait eu de nouveaux éléments à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre une décision différente ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en prenant à son encontre une mesure d'éloignement sans le mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement et également méconnu les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

En ce qui concerne le refus du délai de départ volontaire :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente (...) " ;

11. Considérant que la décision contestée mentionne que M. A...est entré irrégulièrement sur le territoire français en décembre 2004 à l'âge de trente-sept ans et qu'il s'est soustrait à l'exécution de précédentes mesures d'éloignement, notamment par un refus d'embarquer en 2005 ; que le préfet a ainsi suffisamment motivé son refus d'accorder un délai de départ volontaire à l'intéressé ;

12. Considérant que le moyen tiré de l'absence de demande d'observations de M. A...préalablement à la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne doit être écarté pour les motifs exposés précédemment au point 9 ; qu'il en va de même du moyen tiré de l'incompatibilité du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile avec le considérant 6 et l'article 1er de la directive 2008/115/CE, pour les motifs exposés au point 8 ;

13. Considérant que M. A...a précédemment fait l'objet de mesures d'éloignement prononcées à son encontre le 1er septembre 2005, le 7 mai 2007 et le 6 novembre 2008 ; qu'il est constant qu'il s'est soustrait à l'exécution de ces mesures ; que si le requérant se prévaut de garanties de représentation en faisant valoir qu'il dispose d'une adresse à laquelle il vit depuis plusieurs années et d'une promesse d'embauche, le préfet, qui ne s'est pas cru lié par la présomption de risque de fuite prévue au d) précité du 3° de l'article L.511-1 II, a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, estimer, compte tenu notamment de ce que l'intéressé s'est maintenu sur le territoire malgré les trois mesures d'éloignement dont il a fait l'objet, que M. A...n'était pas dans une situation particulière permettant d'écarter le risque de fuite ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

14. Considérant qu'au soutien du moyen tiré de l'insuffisance de motivation en droit de cette décision, faute de viser l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. A...ne se prévaut devant la cour d'aucun élément nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire national :

15. Considérant qu'aux termes du paragraphe III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 16 juin 2011 : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...). L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. L'autorité administrative peut à tout moment abroger l'interdiction de retour (...) " ;

16. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi ;

17. Considérant que, pour prononcer la mesure d'interdiction de retour pour la durée maximale de trois ans, le préfet de la Haute-Garonne s'est borné à prendre en compte le fait que M. A...a déjà fait l'objet de mesures d'éloignement, qu'il est entré irrégulièrement en France en 2004 et qu'il n'est pas dépourvu de liens personnels ni d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de sa vie et où résident ses deux enfants, ses trois soeurs et son frère, sans faire apparaître qu'il aurait pris en compte le critère relatif à la menace que représenterait pour l'ordre public la présence de l'intéressé sur le territoire français ; qu'il n'a donc pas motivé sa décision en prenant en compte, au vu de la situation de l'étranger, l'ensemble des critères prévus par la loi ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français et alors même que le préfet n'avait pas à motiver de manière distincte la durée de l'interdiction, M. A...est fondé à soutenir que cette décision est insuffisamment motivée et doit être annulée ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

18. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger à l'encontre duquel a été prise une interdiction de retour est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 96 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990. Les modalités de suppression du signalement de l' étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire " ; qu'aux termes de l'article R. 511-3 du même code : " (...) Les modalités de suppression du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour prise en application du III de l'article L. 511-1 sont celles qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010, aux cas d'extinction du motif d'inscription au fichier des personnes recherchées. " ; qu'aux termes de cet article : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le fichier sont effacées sans délai en cas d'aboutissement de la recherche ou d'extinction du motif de l'inscription. Les données enregistrées au titre du 5° du IV de l'article 2 sont effacées, au plus tard, trois ans après la date à laquelle l'obligation de quitter le territoire français a été signée. La mise à jour des données enregistrées est réalisée, à l'initiative de l'autorité ayant demandé l'inscription au fichier, par les services ayant procédé à l'enregistrement des données en application des dispositions de l'article 4. Des vérifications périodiques sont mises en oeuvre afin de garantir la fiabilité des données" ; " ;

19. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le présent arrêt, qui annule l'interdiction de retour sur le territoire français, implique nécessairement que le préfet de la Haute-Garonne, qui a eu l'initiative de l'inscription, fasse supprimer dans le système d'information Schengen le signalement de M. A...aux fins de non-admission ;

20. Considérant, en second lieu, que le présent arrêt n'implique pas nécessairement, eu égard à ses motifs, que le préfet de la Haute-Garonne délivre à M. A...une autorisation provisoire de séjour ; que, dès lors, les conclusions de M. A...tendant à ce qu'il soit enjoint à cette autorité de lui délivrer une telle autorisation ne sauraient être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

21. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A...tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : L'arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 24 janvier 2012 est annulé en tant qu'il interdit à M. A...le retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de faire procéder à la suppression du signalement de M. A...aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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No 13BX00616


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13BX00616
Date de la décision : 31/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-01 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Légalité externe.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : CABINET ATY AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-10-31;13bx00616 ?
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