Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 juillet 2008 sous le n° 08BX01703, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ;
Le PREFET DE LA GIRONDE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0801519 en date du 23 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté en date du 14 février 2008 par lequel il a refusé d'admettre Mme Zakia au séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à défaut de quoi elle s'exposerait à être d'office reconduite à la frontière à destination du Maroc ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme devant le Tribunal administratif de Bordeaux ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
Vu code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2010,
- le rapport de M. Péano, président-assesseur ;
- les observations de Me Missiaen, avocat de Mme ;
- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;
Considérant que le PREFET DE LA GIRONDE relève appel du jugement n°0801519 du 23 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté en date du 14 février 2008 par lequel il a refusé d'admettre au séjour Mme Zakia , de nationalité marocaine, et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à défaut de quoi elle s'exposerait à être d'office reconduite à la frontière à destination du Maroc ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme , de nationalité marocaine, est entrée en France, selon ses dires, en septembre 2006, pour rejoindre son époux également de nationalité marocaine avec lequel elle s'est mariée le 23 août 2006 ; qu'il n'est pas établi que Mme serait dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'il ressort également des pièces du dossier que le mari de Mme , arrivé en France en 2000 et titulaire d'une carte de résident valable dix ans, jusqu'au 14 mars 2010, disposait de la faculté de solliciter un regroupement familial en faveur de son épouse ; que la circonstance qu'à la date de la demande de titre de séjour présentée par Mme , les revenus de son époux ne satisfaisaient pas aux conditions prévues par les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour la faire bénéficier de la procédure de regroupement familial ne faisait pas obstacle à ce qu'il soit fait droit à une demande de regroupement familial en considération d'autres critères légalement prévus ; qu'ainsi Mme était susceptible, en retournant dans son pays d'origine, de bénéficier, à la demande de son conjoint, du regroupement familial ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu notamment du caractère récent de sa vie familiale, de la brièveté de son séjour en France et de la faculté dont dispose son mari de solliciter, à son bénéfice, le regroupement familial, l'arrêté en date du 14 février 2008 pris à l'encontre de Mme n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris alors même qu'elle est mère d'un petit garçon né le 8 juillet 2007 ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler cet arrêté, le Tribunal administratif de Bordeaux s'est fondé sur le motif tiré de ce qu'il méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme ;
Considérant que M. Bernard Cagnault, directeur de la réglementation et des libertés publiques de la préfecture de la Gironde, signataire de l'arrêté pris à l'encontre de Mme refusant de l'admettre au séjour en France, a reçu délégation à l'effet de signer de tels actes par arrêté préfectoral du 19 septembre 2007, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait ;
Considérant que, pour les motifs déjà exposés, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision portant refus de titre de séjour opposée à Mme méconnaîtrait les termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la circonstance que son mari réside légalement en France avec l'ensemble de sa famille proche et qu'il est pour lui hors de question de revenir s'installer au Maroc n'est pas de nature à entacher cette décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de Mme ;
Considérant qu'il y a lieu, pour les motifs précédemment exposés, d'écarter les moyens tirés de l'illégalité de la décision portant refus du titre de séjour et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales invoqués par Mme au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs. l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'à ce titre, Mme fait valoir que la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à son encontre aura pour effet de priver son enfant soit de sa présence pour le cas où cet enfant resterait en France aux côtés de son père, soit de la présence de son père dans le cas inverse où il l'accompagnerait dans le pays de renvoi ; que toutefois, compte tenu notamment de la possibilité de demander le bénéfice du regroupement familial en sa faveur, il n'est fait état d'aucune circonstance mettant Mme dans l'impossibilité de poursuivre sa vie familiale avec son fils et son époux ; qu'ainsi l'arrêté pris à l'encontre de Mme qui n'a ni pour objet ni pour effet de la séparer de son fils et du père de celui-ci, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté en date du 14 février 2008 par lequel il a refusé d'admettre Mme au séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à défaut de quoi elle s'exposerait à être d'office reconduite à la frontière à destination du Maroc ;
Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté en date du 14 février 2008, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme ne sauraient être accueillies ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à l'avocate de Mme de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0801519 du Tribunal administratif de Bordeaux en date du 23 juin 2008 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme devant le tribunal administratif et ses conclusions présentées devant la cour sont rejetées.
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No 08BX01703