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16/07/2013 | FRANCE | N°13BX00155

France | France, Cour administrative d'appel de, 2ème chambre (formation à 3), 16 juillet 2013, 13BX00155


Vu la requête enregistrée le 17 janvier 2013, présentée pour Mme A...D..., demeurant au ...par Me E...;

Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202378 du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 22 août 2012 par lequel le préfet de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle devrait être recondui

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2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral ;

3°) d'enjoindre a...

Vu la requête enregistrée le 17 janvier 2013, présentée pour Mme A...D..., demeurant au ...par Me E...;

Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202378 du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 22 août 2012 par lequel le préfet de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle devrait être reconduite ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", et à titre subsidiaire de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l 'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son avocat, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 et notamment son article 7 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2013, le rapport de M. Jean-Pierre Valeins, président assesseur ;

1. Considérant que le préfet de la Vienne a pris à l'encontre de MmeD..., le 22 août 2012, un arrêté lui refusant le titre de séjour qu'elle sollicitait, assorti d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle serait reconduite ; que, par un jugement du 20 décembre 2012, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande d'annulation de l'arrêté préfectoral présentée par MmeD... ; que Mme D...interjette appel de ce jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral :

2. Considérant que M.F..., sous-préfet, directeur de cabinet du préfet de la Vienne, signataire de l'arrêté attaqué, a reçu de ce dernier, par arrêté en date du 18 mai 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 9 décembre 2010, délégation à l'effet de signer " tous actes, décisions, correspondances et documents administratifs pour lesquels délégation de signature est consentie à M. B...C... " ; qu'il a été consenti à ce dernier délégation pour signer toutes les décisions devant être prises en application de l'ensemble des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'est pas établi que M. C...n'était pas absent ou n'était pas empêché à la date de l'arrêté en litige ; que par suite, le moyen invoqué tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit: / (...)7° à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ";

4. Considérant que, Mme D...fait valoir qu'elle s'est investie socialement dans la communauté Emmaüs depuis sa première année de résidence en France en 2003 ; qu'elle fournit plusieurs attestations des membres de la communauté qui témoignent de son intégration au sein de l'association ; que toutefois, MmeD..., de nationalité togolaise, entrée à l'âge de 33 ans sur le territoire français, où elle réside depuis plusieurs années en situation irrégulière, dont il n'est pas établi que le mari serait décédé au Togo et dont les enfants résident en dehors du territoire français, ne fait pas état de l'intensité de ses liens personnels et familiaux en France et n'établit, ni même n'allègue être isolée dans son pays d'origine ; qu'eu égard aux conditions de son séjour, la décision de refus de titre de séjour contestée n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de ce refus sur la vie personnelle de l'intéressée ;

5. Considérant que les articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile disposent que : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). " et que " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) "; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 312-2 que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues notamment à l'article L. 313-11 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus, que Mme D...ne figure pas au nombre des étrangers mentionnés à l'article L. 313-11, 7°, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle se prévaut ; qu'elle n'est donc pas fondée à invoquer la circonstance que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé serait illégal faute d'avoir été précédé de la consultation de la commission du titre de séjour prévue par l'article L. 312-2 du même code ;

7. Considérant que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ;

8. Considérant que, si les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent à l'administration de délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, il ressort des termes mêmes de cet article, et notamment de ce qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour, que le législateur n'a pas entendu imposer à l'administration, saisie d'une demande de carte de séjour, quel qu'en soit le fondement, d'examiner d'office si l'étranger remplit les conditions prévues par cet article ; qu'il en résulte que Mme D...ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre du refus opposé à une demande de titre de séjour qu'elle n'a pas présentée sur le fondement de cet article ;

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire :

9. Considérant, en premier lieu, que la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas illégale, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire, doit être écartée ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) " ; que, pour les motifs mentionnés au point 4 du présent arrêt, la décision obligeant l'intéressée à quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de ces stipulations .

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours " ;

12. Considérant que Mme D...n'invoque aucune circonstance qui justifierait que le préfet de la Vienne lui accorde un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours ; qu'aucune demande dans ce sens n'a d'ailleurs été faite au préfet de la Vienne par MmeD... ; que par conséquent, en fixant à un mois le délai imparti à Mme D...pour son départ volontaire, le préfet de la Vienne n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant que la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas entachée d'illégalité, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, doit être écartée ;

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible ; / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 "; qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

15. Considérant que si MmeD..., dont la demande d'asile a d'ailleurs fait l'objet de deux décisions de rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmées par la Commission de recours des réfugiés puis par la Cour nationale du droit d'asile, soutient que du fait de sa participation à des manifestations politiques pour le parti d'opposition lors des élections présidentielles de 2003 au Togo, elle se trouve dans l'impossibilité de retourner dans son pays où elle craint pour sa vie, les pièces qu'elle produit à l'appui de ses allégations, notamment la photocopie d'un avis de recherche à son nom et d'une convocation de la gendarmerie tous deux datés de 2003, ainsi que la transcription de son propre témoignage, ne sont pas de nature à établir la réalité des risques qu'elle encourrait à la date de la décision attaquée ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Vienne en date du 22 août 2012 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

17. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de MmeD..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Vienne de délivrer à Mme D...un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa demande doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

18. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande Mme D...à ce titre au bénéfice de son avocat ;

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

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No 13BX00155


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00155
Date de la décision : 16/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Autorisation de séjour - Demande de titre de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARRACO
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre VALEINS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : RENNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.de;arret;2013-07-16;13bx00155 ?
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