Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Transports Gaston Arnould a demandé au tribunal administratif de Nancy, à titre principal, de surseoir à statuer jusqu'à ce que le présent tribunal et, le cas échéant, le Conseil d'Etat ou le Conseil constitutionnel, se soient prononcés sur la question prioritaire de constitutionalité relative au 1 bis de l'article 1586 quater du code général des impôts, et à titre subsidiaire, de prononcer la réduction de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2020, pour un montant total de 4 923 euros ainsi que de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement no 2201178 du 22 décembre 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes et l'a condamnée à payer une amende de 1 500 euros pour recours abusif au titre de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 février 2023, la SAS Transports Gaston Arnould, représentée par Me Zapf, demande à la cour d'annuler le jugement du 22 décembre 2022 en tant qu'il la condamne au paiement d'une amende pour recours abusif.
Elle soutient que :
- une requête ne peut être jugée abusive que dans les circonstances exceptionnelles, c'est-à-dire si le plaideur manifeste de la désinvolture à l'égard du juge ou si sa mauvaise foi est évidente ;
- la qualification de recours abusif ne pouvait nullement être retenue en l'espèce puisque la requête présentée devant le tribunal administratif de Nancy n'était pas dépourvue de tout moyen, et il ne saurait lui être reproché d'avoir invoqué un moyen identique à celui présenté dans le cadre d'autres litiges.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique soutient que le bien-fondé de l'application de l'amende susvisée ne relève pas de la compétence de l'administration fiscale et s'en remet à l'appréciation de la cour.
Vu :
- les autres pièces du dossier
Vu :
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martinez ;
- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ".
2. S'il est vrai qu'à la date d'introduction de la requête de la société SAS Transport Gaston Arnould devant le tribunal administratif de Nancy, cette juridiction avait déjà rejeté d'autres requêtes déposées par cette même société comportant des demandes de réduction de la la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) assorties d'une question prioritaire de constitutionnalité, ces affaires concernaient cependant les impositions établies notamment au titre des années 2014, 2018 et 2019. Or, dans la présente instance, la requérante a formé une demande tendant à la décharge de l'imposition due au titre de l'année 2020. Ainsi, dès lors que l'autorité de la chose jugée d'une décision juridictionnelle, qui s'attache au dispositif de cette décision et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire, est subordonnée à la triple identité de parties, d'objet et de cause, la demande de première instance relative au présent litige n'a pas le même objet que celles rejetées par les précédents jugements. Par ailleurs, la circonstance que le tribunal administratif de Nancy avait rejeté une précédente question prioritaire de constitutionnalité formulée par d'autres contribuables dans les mêmes termes ne faisait pas obstacle à ce que la société requérante soulevât pour son propre compte une question similaire dans un mémoire distinct enregistré le 18 octobre 2022, soit antérieurement à la décision du 23 février 2023 par laquelle le Conseil d'Etat avait confirmé le refus de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité concernant la dispositions législative en cause. Dans ces circonstances, eu égard son objet et à l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle était fondée, la demande de première instance présentée par la société ne revêtait pas un caractère abusif contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, sans d'ailleurs en indiquer les motifs, au point 25 du jugement attaqué.
4. Par suite, la SAS Transports Gaston Arnould est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a prononcé à son encontre une amende pour recours abusif en application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative et à demander la réformation de ce jugement en tant qu'il lui a infligé cette amende.
D E C I D E :
Article 1er : L'article 2 du jugement n° 2201178 du 22 décembre 2022 du tribunal administratif de Nancy infligeant à la SAS Transports Gaston Arnould une amende pour recours abusif d'un montant de 1 500 euros est annulé.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Transports Gaston Arnould et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 21 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.
Le président-rapporteur,
Signé : J. Martinez
La première conseillère,
la plus ancienne,
Signé : Mme Bourguet-Chassagnon
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
C. Schramm
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N°23NC00585 2