Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler, à titre principal, la délibération du conseil municipal de Saint-Crépin du 28 juin 2019 approuvant le plan local d'urbanisme, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux reçu le 11 septembre 2019 ou, à titre subsidiaire, d'annuler cette délibération en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées section E n° 660, 661, 669 et 670 situées lieu-dit E... en zone agricole et grève la parcelle cadastrée section E n° 759 de l'emplacement réservé n° 17.
Par un jugement n° 1910745 du 6 février 2023, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette délibération du 28 juin 2019 en tant qu'elle classe en zone Ac les parcelles E 661 et 670 et en zone AUba l'intégralité du secteur de la Cournette.
Procédure devant la Cour :
Par une requête le 30 mars 2023, la commune de Saint-Crépin, représentée par Me Barbeau, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 février 2023 en tant qu'il a annulé la délibération du 28 juin 2019 en tant qu'elle classe en zone Ac les parcelles E 661 et 670 et en zone AUba l'intégralité du secteur de la Cournette ;
2°) de rejeter les conclusions de Mme A... tendant à cette annulation dans cette mesure ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le classement en zone Ac des parcelles E 661 et 670 n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'elles s'insèrent dans un vaste espace agricole et qu'il correspond au parti d'urbanisme ;
- le classement en zone AUba du secteur de la Cournette est compatible avec les dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme ;
- en tout état de cause, le tribunal a lui-même considéré que la partie nord et ouest de ce secteur respectait ces dispositions.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 octobre 2023, Mme A..., représentée par Me Py, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Saint-Crépin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la commune de Saint-Crépin ne sont pas fondés.
Un mémoire, enregistré le 20 novembre 2023, a été présenté par la commune de Saint-Crépin et n'a pas été communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,
-les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,
- et les observations de Me Py, représentant Mme A..., et de Me Djabali, représentant la commune de Saint-Crépin.
Une note en délibéré présentée pour Mme A... a été enregistrée le 14 décembre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 28 juin 2019, le conseil municipal de Saint-Crépin a approuvé le plan local d'urbanisme (PLU). La commune de Saint-Crépin relève appel du jugement du 6 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, sur la demande de Mme A..., annulé cette délibération en tant qu'elle classe en zone Ac les parcelles E 661 et 670 et en zone AUba l'intégralité du secteur de la Cournette.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-22 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. / En zone A peuvent seules être autorisées : / - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ; / - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.
4. Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du PLU de Saint-Crépin ont délimité une zone agricole Ac qui jouxte à son angle nord-est, le long d'une voie, le hameau du Haut-Villaron, classé en zone Ua, et un secteur AUba. Cette zone agricole en nature de prairie de fauche est traversée par une autre route menant au village en évitant ce hameau et qui occupe, avec un fossé latéral, l'intégralité de la surface de la parcelle cadastrée section E n° 661 et, en grande partie, celle de la parcelle cadastrée section E n° 670, lesquelles appartiennent à Mme A.... Si ces deux parcelles ne présentent donc pas elles-mêmes un caractère de terres agricoles, elles s'inscrivent dans un secteur qui présente ce caractère, le PADD ayant retenu un objectif n° 3 portant sur la préservation et la valorisation des richesses et des ressources naturelles et culturelles, qui inclut la préservation de l'espace agricole et naturel. Eu égard à la destination et à la faible largeur de la voie routière qu'elles supportent, le classement de ces parcelles en zone agricole Ac n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. En outre, il n'appartient pas au juge administratif de vérifier si un autre classement aurait été possible, mais seulement de s'assurer que le classement retenu n'est pas illégal. Par suite, il ne peut être utilement soutenu que cette parcelle aurait dû être classée en zone urbaine du PLU. Dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de ce classement.
5. En second lieu, aux termes de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes, ainsi que de la construction d'annexes, de taille limitée, à ces constructions, et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées ". Aux termes de l'article L. 122-5-1 du même code : " Le principe de continuité s'apprécie au regard des caractéristiques locales de l'habitat traditionnel, des constructions implantées et de l'existence de voies et réseaux. ". Aux termes de l'article L. 122-6 de ce code : " Les critères mentionnés à l'article L. 122-5-1 sont pris en compte : / a) Pour la délimitation des hameaux et groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants en continuité desquels le plan local d'urbanisme ou la carte communale prévoit une extension de l'urbanisation (...) ".
6. S'il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières aux zones de montagne, il résulte des dispositions des articles L. 131-4 et L. 131-7 de ce code que, s'agissant d'un plan local d'urbanisme, il appartient à ses auteurs de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de sa compatibilité avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières aux zones de montagne, notamment celles de l'article L. 122-5.
7. Il ressort des pièces du dossier que le PLU de Saint-Crépin délimite, comme l'avait fait le PLU approuvé en 2005, une zone AUba dans le secteur de la Cournette dont la superficie est de 2,3 ha et qui est destinée à permettre la construction d'au moins 30 logements. Ainsi que le mentionne le rapport de présentation, ce secteur se situe en entrée sud de la commune et à environ 600 m du centre-bourg. Au nord, à l'ouest et au sud, il s'inscrit en continuité d'une urbanisation composée d'une quarantaine de constructions rapprochées, à usage d'habitation pour la plupart, édifiées le long de deux voies de communication et classées en zone Ub. Eu égard à la surface de ce secteur et au fait que le règlement y impose une opération d'ensemble de 4 000 m² au moins, la circonstance que, à l'est et au sud-est, il jouxte un secteur naturel et qu'à cet endroit le terrain serait plus pentu et boisé, est sans incidence sur l'existence d'une situation de continuité. Par suite, la commune de Saint-Crépin est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme pour annuler la délibération du 28 juin 2019 en tant qu'elle classe le secteur en cause en zone AUba.
8. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif et devant la cour.
9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 132-7 du code de l'urbanisme : " (...) les régions (...) sont associés à l'élaboration (...) des plans locaux d'urbanisme dans les conditions définies aux titres IV et V. / Il en est de même des chambres de commerce et d'industrie territoriales, des chambres de métiers. (...) ". Aux termes de l'article L. 153-16 du même code : " Le projet de plan arrêté est soumis pour avis : 1° Aux personnes publiques associées à son élaboration mentionnées aux articles L. 132-7 et L. 132-9 ; (...) ". Aux termes de l'article R. 153-4 du même code : " Les personnes consultées en application des articles L. 153-16 et L. 153-17 donnent un avis dans les limites de leurs compétences propres, au plus tard trois mois après transmission du projet de plan. / A défaut de réponse dans ce délai, ces avis sont réputés favorables ".
10. Il ressort des pièces du dossier que, par lettres du 15 juin 2018 envoyées en recommandé avec accusé de réception, la délibération du 25 mai 2018 par laquelle le conseil municipal de Saint-Crépin a arrêté le projet de PLU a été notifiée au président du conseil régional, au président de la chambre de commerce et d'industrie des Hautes-Alpes et au président de la chambre de métiers et de l'artisanat des Hautes-Alpes, qui avaient été associés à l'élaboration du projet de PLU. Dès lors, le moyen tiré de l'absence de consultation de ces personnes publiques manque en fait et doit être écarté.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 151-2 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation comporte les justifications de : / 1° La cohérence des orientations d'aménagement et de programmation avec les orientations et objectifs du projet d'aménagement et de développement durables ; / 2° La nécessité des dispositions édictées par le règlement pour la mise en œuvre du projet d'aménagement et de développement durables et des différences qu'elles comportent, notamment selon qu'elles s'appliquent à des constructions existantes ou nouvelles ou selon la dimension des constructions ou selon les destinations et les sous-destinations de constructions dans une même zone ; / 3° La complémentarité de ces dispositions avec les orientations d'aménagement et de programmation mentionnées à l'article L. 151-6 ; / 4° La délimitation des zones prévues par l'article L. 151-9 ; / 5° L'institution des zones urbaines prévues par l'article R. 151-19, des zones urbaines ou zones à urbaniser prévues par le deuxième alinéa de l'article R. 151-20 lorsque leurs conditions d'aménagement ne font pas l'objet de dispositions réglementaires ainsi que celle des servitudes prévues par le 5° de l'article L. 151-41 ; / 6° Toute autre disposition du plan local d'urbanisme pour laquelle une obligation de justification particulière est prévue par le présent titre. / Ces justifications sont regroupées dans le rapport. ".
12. Il ne ressort pas de ces dispositions que les auteurs du plan local d'urbanisme soient tenus de justifier dans le rapport de présentation la création d'un emplacement réservé. Par suite le moyen selon lequel le rapport de présentation ne comporte aucune justification ou explication du choix d'aménagement en ce qui concerne les 22 emplacements réservés maintenus ou créés doit être écarté comme sans influence sur la légalité de la délibération attaquée.
13. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires. ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération. Cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel.
14. La délibération attaquée détermine des prévisions et règles d'urbanisme dont le champ d'application s'étend à l'ensemble de la commune. Il ressort des pièces du dossier que le PLU approuvé par cette délibération, de même que le projet arrêté par celle du 25 mai 2018, a classé en zone à urbaniser AUba notamment les terrains non bâtis, représentant une surface totale de 0,67 ha, situés au nord du hameau du Haut-Villaron, lesquels étaient classés en zone Ub par le PLU approuvé en 2005, et ceux qui jouxtent à l'est le secteur de la Cournette, d'une surface de 2,28 ha, déjà classés en zone à urbaniser au PLU précédent. La chambre d'agriculture a émis un avis défavorable au projet de PLU arrêté compte tenu de sa consommation excessive de foncier agricole de qualité. La commission départementale de préservation des espaces naturels agricoles et forestiers a, le 23 août 2018, émis un avis favorable au projet de PLU arrêté sous réserve de supprimer notamment les deux secteurs précités. Le préfet des Hautes-Alpes a recommandé, d'une part, le déplacement vers l'ouest du secteur AUba du Haut-Villaron recouvrant de bonnes terres agricoles et visible dans le paysage, d'autre part, la suppression du secteur de la Cournette en raison de sa localisation sur des terres d'une bonne valeur agricole justifiant un classement en zone agricole. Le 8 février 2019, la commune a répondu à cet avis en se prévalant d'un diagnostic agricole daté du 28 janvier 2019, élaboré à sa demande. Mme A... fait valoir que M. C..., premier adjoint au maire de Saint-Crépin, est propriétaire des parcelles cadastrées section E n° 195, 196 et 197 comprises dans le secteur AUba du Haut-Villaron et que M. B..., maire de Saint-Crépin, est propriétaire des parcelles cadastrées section D n° 1700, 2030, 2032 et 2037, situées dans le secteur AUba de la Cournette.
15. Il résulte de la lecture du diagnostic agricole mentionné au point 5 que celui-ci a porté non seulement sur les secteurs du Haut-Villaron et de la Cournette mais également sur l'extension de la zone d'activités des Guillermins dont procède la création d'un secteur AUe pour lequel le préfet a demandé que soit justifié le besoin en surfaces. Le maire et le premier adjoint de Saint-Crépin ne sont pas propriétaires de toutes les parcelles couvertes par le zonage concerné. Le parti retenu d'accroissement de la zone constructible répond à l'objectif retenu par le PADD de maintenir, conforter et développer l'activité économique locale et aux orientations consistant à accueillir une population nouvelle et permettre la construction de logements. La seule circonstance que le maire et le premier adjoint ont participé à la délibération attaquée à l'issue de laquelle le PLU a été approuvé à l'unanimité et que ce plan a pour effet de rendre constructibles ou de maintenir la constructibilité des terrains dont ils sont propriétaires, n'est pas de nature à entraîner, par elle-même, l'illégalité de cette délibération. Il ne ressort pas des pièces du dossier que, du fait de l'influence qu'ils auraient exercée, le PLU aurait été élaboré afin d'inclure des terrains qui n'auraient pas répondu aux critères retenus pour le classement en zone à urbaniser et aurait ainsi pris en compte des intérêts personnels ne se confondant pas avec les intérêts de la généralité des habitants de la commune. En se prévalant de l'élaboration du diagnostic agricole précité et en en critiquant la qualité, notamment en ce qu'il a justifié la valeur agricole des terrains appartenant à la requérante, classés en zone agricole et situés à l'ouest du secteur du Haut-Villaron, Mme A... n'établit pas que la délibération aurait pris en compte ces intérêts personnels. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.
16. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".
17. Pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme (PLU) entre le règlement et le PADD, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le PADD, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du PLU à une orientation ou à un objectif du PADD ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.
18. Le PADD fixe un objectif n° 2 consistant à maîtriser l'urbanisation, notamment en densifiant l'urbanisation existante, en maîtrisant la consommation d'espaces et en adaptant le développement urbain aux équipements collectifs existants. Il mentionne au titre des orientations générales celles visant à permettre/faciliter le renouvellement urbain dans le village et les hameaux, renforcer l'urbanisation du village/bourg et maîtriser l'urbanisation sur l'habitat périphérique du bourg et dans les hameaux. Le PADD a également retenu un objectif n° 3 portant sur la préservation et la valorisation des richesses et des ressources naturelles et culturelles, qui inclut la préservation de l'espace agricole et naturel. L'une des autres orientations générales vise ainsi à maintenir et protéger les terres agricoles. Eu égard à l'ensemble de ces objectifs et orientations, alors que Mme A... se prévaut de la proximité des parcelles cadastrées E 661 et 670 qui lui appartiennent avec le hameau du Haut Villaron et de quelques constructions ainsi que de la présence des différents réseaux, cette localisation n'est pas de nature à rendre incohérent avec le PADD le classement de ces parcelles en zone agricole Ac.
19. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme : " Les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières, en particulier les terres qui se situent dans les fonds de vallée, sont préservées. La nécessité de préserver ces terres s'apprécie au regard de leur rôle et de leur place dans les systèmes d'exploitation locaux. Sont également pris en compte leur situation par rapport au siège de l'exploitation, leur relief, leur pente et leur exposition ". Ces dispositions, qui ont pour objet la préservation des terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles en zone de montagne, énumèrent les critères permettant d'apprécier la nécessité de préserver ces terres.
20. Il ressort des pièces du dossier que le secteur AUba de la Cournette présente une pente moyenne de 15 %. Sa surface de 2,3 ha ne représente qu'une très faible partie de l'ensemble des zones agricoles de la commune, qui recouvrent au total une surface de 365 ha, en progression de 10 % par rapport au PLU approuvé en 2005. Selon les mentions non contestées du diagnostic agricole daté du 28 janvier 2019, élaboré à la demande de la commune, seule la moitié de la surface du secteur de la Cournette est exploitée et est en nature, pour l'essentiel, de prairie de fauche et de terres labourées, le surplus étant en friches. Ce document indique que le fourrage produit ne satisfait que marginalement les besoins d'un éleveur ovin, dont le siège d'exploitation se situe à 5 km. Il en ressort également que certaines parcelles sont utilisées par un éleveur bovin mais pour parquer des chevaux. Dans ces conditions, même si le préfet des Hautes-Alpes a recommandé la suppression du secteur de la Cournette en raison de sa localisation sur des terres d'une bonne valeur agricole justifiant selon lui un classement en zone agricole, le classement contesté en zone AUba ne rend pas le PLU de Saint-Crépin incompatible avec les dispositions de l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme.
21. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Crépin est fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du 28 juin 2019 en tant qu'elle classe en zone Ac les parcelles E 661 et 670 et en zone AUba l'intégralité du secteur de la Cournette.
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Crépin, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme A..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par la commune Saint-Crépin au même titre.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 février 2023 est annulé en tant qu'il a annulé la délibération du 28 juin 2019 en tant qu'elle classe en zone Ac les parcelles E 661 et 670 et en zone AUba l'intégralité du secteur de la Cournette.
Article 2 : Les conclusions de Mme A... présentées devant le tribunal administratif de Marseille tendant à l'annulation de la délibération du 28 juin 2019 en tant qu'elle classe en zone Ac les parcelles E 661 et 670 et en zone AUba l'intégralité du secteur de la Cournette sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune Saint-Crépin et de Mme A... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Crépin et à Mme D... A....
Délibéré après l'audience du 14 décembre 2023, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 décembre 2023.
Le rapporteur,
Signé
P. D'IZARN DE VILLEFORTLe président,
Signé
P. PORTAILLa greffière,
Signé
N. JUAREZ
La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Alpes en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision
Pour expédition conforme,
La greffière,
N° 23MA00779 2