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28/12/2023 | FRANCE | N°22TL20158

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 28 décembre 2023, 22TL20158


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la circulaire du 3 juillet 2019 du garde des sceaux, ministre de la justice fixant les modalités de gestion du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) pour le corps des directeurs des services de greffe judiciaires et le corps des greffiers des services judiciaires, d'annuler la décision individuelle de décembre 2019 du responsa

ble des ressources humaines du service administratif régional de la cour d'appel...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la circulaire du 3 juillet 2019 du garde des sceaux, ministre de la justice fixant les modalités de gestion du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) pour le corps des directeurs des services de greffe judiciaires et le corps des greffiers des services judiciaires, d'annuler la décision individuelle de décembre 2019 du responsable des ressources humaines du service administratif régional de la cour d'appel de Montpellier en tant qu'elle fixe son groupe de fonctions RIFSEEP ainsi que le montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) à 8 400 euros et de lui enjoindre de fixer le montant de son IFSE à 11 400 euros avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 2019, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2002952 du 16 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté les conclusions à fins d'annulation dirigées contre la circulaire JUSB1918222C du 3 juillet 2019, a annulé la décision fixant le groupe de fonctions ainsi que l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de M. B... à un montant inférieur à 11 400 euros, et a enjoint au responsable des ressources humaines du service administratif régional de la cour d'appel de Montpellier de prendre, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, une décision fixant le montant annuel de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de M. B... pour la période courant à compter du 1er janvier 2019 à au moins 11 400 euros pour un travail à temps plein et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 14 janvier 2022, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 novembre 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse.

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'intéressé était fondée à exciper de l'illégalité de la circulaire du 3 juillet 2019, au motif que la combinaison des dispositions du décret du 20 mai 2014 et de cette circulaire instaurait une différence de traitement qui n'est justifiée par aucune différence objective de situation pertinente au regard de l'objet de la réglementation instituant le régime indemnitaire litigieux ni par aucun motif d'intérêt général, dès lors que les greffiers ayant obtenu leur grade de greffier principal antérieurement au 1er janvier 2019 sous le régime de l'indemnité forfaitaire de fonctions (IFF) et les greffiers ayant obtenu leur grade de greffier principal postérieurement au 1er janvier 2019 dans le cadre du régime indemnitaire tenant compte des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) ne se trouvaient pas dans une situation comparable eu égard à la distinction entre le régime de l'IFF et le régime du RIFSEEP, régis par des textes différents.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2022, M. B..., représenté par Me Boussoum, conclut au rejet du recours et à ce que soit mise à la charge de l'Etat, la somme de 2 500 euros à la fédération Interco CFDT au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que le recours n'est pas fondé.

Par ordonnance du 12 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 12 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- l'arrêté interministériel du 18 décembre 2018 pris pour l'application au corps des directeurs des services de greffe judiciaires des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Armelle Geslan-Demaret, présidente-rapporteure,

- et les conclusions de Mme Michelle Torelli, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., directeur des services de greffe judiciaires depuis le 1er novembre 2018 a été promu directeur principal des services judiciaires à compter du 1er mars 2013. Il exerce ses fonctions au tribunal judiciaire de Rodez. Le 8 juin 2020, il a demandé l'annulation, d'une part de la circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice, du 3 juillet 2019 relative au régime indemnitaire des corps de directeur de services de greffe et greffiers des services judicaires et, d'autre part, de la décision individuelle de notification du groupe de fonctions dans le cadre du régime indemnitaire tenant compte des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) du 17 décembre 2019 par laquelle la responsable des ressources humaines du service administratif régional de la cour d'appel de Montpellier a classé son poste en groupe 3 et a fixé le montant annuel de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) à 8 400 euros, en tant que ce montant est inférieur au montant de 11 400 euros alloué aux directeurs de service de greffe judiciaires nommés au grade de principal à compter du 1er janvier 2019, date d'effet de la circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice, du 3 juillet 2019 relative aux modalités de gestion du régime indemnitaire tenant compte des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel pour le corps des directeurs des services de greffes judiciaires et le corps des greffiers des services judiciaires. Le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel du jugement du 16 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a fait partiellement droit à cette demande.

2. Aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'État (RIFSEEP) : " Les fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée peuvent bénéficier, d'une part, d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et, d'autre part, d'un complément indemnitaire annuel lié à l'engagement professionnel et à la manière de servir, dans les conditions fixées par le présent décret (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. / Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps (...) sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. / Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps (...) par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. / Ce même arrêté fixe les montants minimaux par grade (...), les montants maximaux afférents à chaque groupe de fonctions (...) ". Aux termes de son article 3 : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen : 1° En cas de changement de fonctions ; 2° Au moins tous les quatre ans, en l'absence de changement de fonctions et au vu de l'expérience acquise par l'agent ; 3° En cas de changement de grade à la suite d'une promotion ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Lors de la première application des dispositions du présent décret, le montant indemnitaire mensuel perçu par l'agent au titre du ou des régimes indemnitaires liés aux fonctions exercées ou au grade détenu et, le cas échéant, aux résultats, à l'exception de tout versement à caractère exceptionnel, est conservé au titre de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise jusqu'à la date du prochain changement de fonctions de l'agent, sans préjudice du réexamen au vu de l'expérience acquise prévu au 2° de l'article 3 ".

3. L'arrêté interministériel susvisé du 18 décembre 2018 pris pour l'application au corps des directeurs des services de greffe judiciaires du décret du 20 mai 2014 portant création du RIFSEEP a fixé à quatre le nombre de groupes de fonctions dans lesquels doivent être classés les directeurs des services de greffe judiciaires, les plafonds annuels de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise afférents à chacun de ces trois groupes, ainsi que les montants minimaux annuels de l'indemnité pour chacun des deux grades de ce corps. La circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice du 3 juillet 2019, portant sur les modalités de gestion du régime indemnitaire du corps des directeurs des services de greffe judiciaires et greffiers des services judiciaires prévoit, d'une part, à son paragraphe 1.2, que ce qu'elle qualifie de " socle indemnitaire " " correspond à un montant minimum et non pas à un montant indemnitaire unique par groupe. Au sein d'un même groupe de fonctions, les agents peuvent ainsi bénéficier de montants individuels différents en raison, notamment, de la diversité de leurs parcours professionnels ". L'annexe 1 de cette circulaire fixe le " socle indemnitaire " de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise pour chacun des quatre groupes de fonctions pour les directeurs des services de greffe, en distinguant ceux qui exercent leurs fonctions à l'administration centrale du ministère de la justice et ceux qui exercent dans les juridictions, les services déconcentrés et les écoles de formation. A son paragraphe 6, cette circulaire dispose que : " Le changement de grade se traduit par une revalorisation automatique du montant de l'IFSE perçu par l'agent avant sa promotion, dans la limite du plafond réglementaire applicable au groupe de fonctions correspondant au poste occupé par l'agent. / Les montants de revalorisation, fixés par la présente circulaire, sont forfaitaires et identiques pour tous les périmètres d'affectation " et renvoie à l'annexe 2 la fixation à 3 000 euros du montant de cette revalorisation pour les directeurs de services de greffe judiciaires qui deviennent directeurs de greffe judiciaire principaux à compter de la mise en œuvre du RIFSEEP au 1er janvier 2019 pour ce corps de fonctionnaires.

4. En premier lieu, si le requérant soutient que la note de service contestée méconnaît le décret du 20 mai 2014 et l'arrêté du 18 décembre 2018 pris pour son application en ne tenant pas compte du grade détenu par les directeurs des services de greffe judiciaires pour les répartir au sein des groupes de fonctions, il résulte de l'article 2 du décret du 20 mai 2014 que les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps sont réparties dans chaque groupe au regard des critères professionnels que cet article énumère, dans lesquels ne figure pas le grade détenu par les fonctionnaires de ce corps.

5. En deuxième lieu, ainsi que le mentionne au demeurant ladite circulaire, la fixation par le ministre de la justice d'un " socle indemnitaire ", qu'il définit comme le montant minimum d'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise garanti à un agent en raison des fonctions exercées, pour chacun des quatre groupes de fonctions des directeurs des services de greffe judiciaires, ne fait pas obstacle à ce que le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise attribué aux membres d'un même groupe de fonctions soit différent entre ces agents pour tenir compte de l'expérience et de la technicité acquise par chacun dans l'exercice de ces fonctions, sous réserve de ne pas dépasser le plafond annuel de cette indemnité fixé par arrêté interministériel. En prévoyant que les directeurs des services de greffe judiciaires exerçant dans les juridictions et classés dans le groupe de fonctions n° 3 bénéficient d'un socle indemnitaire d'un montant de 8 400 euros au 1er janvier 2019, l'annexe 1 de cette circulaire n'a pas entendu interdire que l'expérience et la technicité acquise par un directeur de service de greffe judiciaire et reconnue notamment par sa réussite à l'examen professionnel de directeur principal des services de greffe judicaires avant la mise en œuvre du nouveau régime indemnitaire au 1er janvier 2019 soit prise en compte par l'attribution par son gestionnaire d'un montant d'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise au moins égal au montant attribué aux greffiers qui accèdent à ce grade à compter de cette date, majoré de la revalorisation de 3 000 euros prévue par l'annexe 2 de cette circulaire.

6. Par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision en litige, les premiers juges se sont fondés sur le motif tiré de l'illégalité de ladite circulaire, invoquée par voie d'exception, en ce qu'en ne prévoyant pas que les directeurs principaux des services de greffe judiciaires ayant accédé à ce grade avant le 1er janvier 2019 devaient bénéficier d'un montant d'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise au moins égal au montant majoré de la revalorisation prévue pour les directeurs des services de greffe judiciaires ayant accédé à ce même grade à compter du 1er janvier 2019, ladite circulaire méconnaît le principe d'égalité.

7. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... tant devant le tribunal administratif de Toulouse qu'en appel.

8. M. B... soutient que l'application du socle indemnitaire correspondant au montant minimum de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise garanti est infondée, dès lors que rien ne s'oppose à ce que son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise soit majorée pour atteindre le montant de 11 400 euros alloué aux directeurs des services de greffe judiciaires promus au grade de directeur de service de greffe principal à compter du 1er janvier 2019. Toutefois, si l'administration a alloué à l'intéressé un montant d'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de 8 400 euros correspondant à la garantie indemnitaire individuelle prévue par l'article 6 du décret du 20 mai 2014, le requérant ne fait valoir aucun élément personnel et circonstancié de nature à établir qu'au vu de l'expérience et de la technicité acquises, l'administration aurait entaché la décision attaquée d'erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision fixant le groupe de fonction ainsi que l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de M. B... à un montant annuel inférieur à 11 400 euros et a enjoint au responsable des ressources humaines du service administratif régional de la cour d'appel de Montpellier de prendre, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, une décision fixant le montant annuel de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de M. B... pour la période courant à compter du 1er janvier 2019 à au moins 11 400 euros pour un travail à temps plein.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, au titre des frais liés au litige exposés par M. B....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2002952 du 16 novembre 2021 du tribunal administratif de Toulouse est annulé en tant qu'il a annulé la décision fixant le groupe de fonction ainsi que l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de M. B... à un montant annuel inférieur à 11 400 euros et a enjoint au responsable des ressources humaines du service administratif régional de la cour d'appel de Montpellier de prendre, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, une décision fixant le montant annuel de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de M. B... pour la période courant à compter du 1er janvier 2019 à au moins 11 400 euros pour un travail à temps plein.

Article 2 : La demande de M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 décembre 2023.

La présidente rapporteure,

A. Geslan-Demaret La présidente assesseure,

A. Blin

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22TL20158


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL20158
Date de la décision : 28/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Armelle GESLAN-DEMARET
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : MYRIAM BOUSSOUM AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-28;22tl20158 ?
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