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22/12/2023 | FRANCE | N°23VE00019

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 22 décembre 2023, 23VE00019


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. H... B... a demandé, par une requête transmise au tribunal administratif d'Orléans par une ordonnance n° 2207427 du tribunal administratif de Strasbourg en date du 14 novembre 2022, d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2022 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ainsi que l'arrêt

du 6 novembre 2022 par lequel le préfet de Loir-et-Cher a prononcé son assignation à rés...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé, par une requête transmise au tribunal administratif d'Orléans par une ordonnance n° 2207427 du tribunal administratif de Strasbourg en date du 14 novembre 2022, d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2022 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ainsi que l'arrêté du 6 novembre 2022 par lequel le préfet de Loir-et-Cher a prononcé son assignation à résidence pendant une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2204025 du 6 décembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a admis M. B... à l'aide juridictionnelle provisoire et rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 janvier et 3 juillet 2023, M. B..., représenté par Me Perez, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement rejetant sa requête ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les arrêtés précités du 6 novembre 2022 pris respectivement par le préfet de la Moselle et le préfet de Loir-et-Cher ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie en application des dispositions des articles L. 723-3 et R. 723-26-1 et R. 723-26-2 du code de la sécurité sociale.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement n'est pas signé ;

- le tribunal a omis de statuer sur plusieurs moyens ;

- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit, d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation ;

Sur le bien-fondé du jugement :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision refusant d'octroyer un délai de départ volontaire méconnaît les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision lui interdisant le retour sur le territoire français méconnaît l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision d'assignation à résidence méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Le préfet de Loir-et-Cher a produit un mémoire en défense, le 22 novembre 2023, postérieurement à la clôture de l'instruction intervenue trois jours francs avant l'audience.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 9 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Florent a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. H... B..., ressortissant algérien né le 21 novembre 1998, est entré irrégulièrement en France en septembre 2021 selon ses déclarations. Par un arrêté du 6 novembre 2022, le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par un arrêté du même jour, le préfet de Loir-et-Cher a prononcé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement du 6 décembre 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. A l'appui de sa requête sommaire, M. B... invoquait, à l'encontre de chacune des décisions contestées, les moyens tirés de l'insuffisante motivation des décisions en cause, de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation ainsi que le moyen tiré du non-respect des droits de la défense. Si, dans son mémoire complémentaire, M. B... n'a développé que certains de ces moyens, il n'a toutefois pas expressément abandonné les moyens initialement soulevés dans sa requête. Or le tribunal ne s'est pas prononcé sur les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant un délai d'un an et de la décision portant assignation à résidence, ni sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire et la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant un délai d'un an, ni davantage sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le moyen tiré de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision refusant d'octroyer un délai de départ volontaire et le moyen tiré de la méconnaissance du principe du respect des droits de la défense. Ces moyens, bien que pour beaucoup non assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, n'étaient pas inopérants. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens relatifs à sa régularité, le jugement attaqué doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif d'Orléans.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Moselle :

S'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français à destination de l'Algérie et refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

4. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) " Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". L'article L. 612-3 de ce code précise que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) ".

5. En premier lieu, par un arrêté du 21 octobre 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Moselle du même jour, librement accessible sur le site internet de la préfecture, le préfet de la Moselle a donné délégation à M. C... D..., directeur adjoint de l'immigration et de l'intégration, à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions dévolues à cette direction, à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent pas les décisions attaquées. Par ailleurs, l'article 5 de ce même arrêté prévoit que, lors des permanences qu'ils assurent les week-end, les agents du bureau de l'éloignement, parmi lesquels figure Mme F... A..., signataire de l'arrêté attaqué du dimanche 6 novembre 2022, sont habilités à signer, toutes mesures d'éloignement prises à l'encontre des ressortissants étrangers en situation irrégulière à l'exception des mesures d'expulsion régies par les articles L. 631-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, et dès lors qu'il n'est pas contesté que Mme A... était l'agent de permanence, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait entaché d'incompétence doit être écarté.

6. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde, permettant à M. B... d'en critiquer utilement les motifs. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions attaquées doit être écarté. Il ne ressort pas par ailleurs des termes de l'arrêté contesté que le préfet de la Moselle n'aurait pas procédé à un examen attentif et personnalisé de la situation du requérant.

7. En troisième lieu, si M. B... soutient que les décisions contestées ont été adoptées en méconnaissance des droits de la défense et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées par ailleurs d'une erreur de droit, ces moyens ne sont assortis d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que M. B... a été auditionné peu avant l'édiction de l'arrêté attaqué et informé qu'il était susceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. L'intéressé a ainsi été mis en mesure de faire valoir les éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle avant l'adoption de la mesure d'éloignement prise à son encontre.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, la durée du séjour de M. B..., de même que sa relation de concubinage avec une ressortissante française, débutée le 5 octobre 2021, présentait un caractère très récent. A supposer même, ainsi que le soutient M. B..., que son père, sa tante et ses oncles et cousins résident en France, il ressort des pièces du dossier et notamment des déclarations de l'intéressé faites aux services de police à l'occasion de la procédure de vérification de son droit au séjour que le requérant n'est pas dépourvu de toute famille dans son pays d'origine, où vivent encore sa mère et ses sœurs. En outre, il ressort du fichier automatisé des empreintes digitales que le requérant a fait l'objet d'un signalement pour des faits de violence, escroquerie et extorsion le 5 octobre 2021. Dans ces conditions, alors même que M. B... a, le 5 septembre 2022, procédé à la reconnaissance avant naissance de l'enfant dont sa compagne était enceinte, la mesure d'éloignement attaquée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le préfet de la Moselle, en faisant obligation à M. B... de quitter le territoire français, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. En cinquième lieu, aux termes des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Si M. B... fait valoir que la décision attaquée aurait pour effet de le séparer de son enfant, de nationalité française, il résulte de ce qui a été dit précédemment que cet enfant n'était pas encore né à la date de la décision attaquée. Par suite, M. B... ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de l'arrêté attaqué du moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

11. En sixième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, le préfet n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en faisant obligation à M. B... de quitter le territoire français.

12. En septième lieu, si contrairement à ce qu'indique l'arrêté attaqué, M. B... dispose d'un passeport en cours de validité, il est constant que l'intéressé est entré irrégulièrement en France et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Il résulte par ailleurs de l'instruction que le préfet aurait légalement pris la même décision s'il s'était uniquement fondé sur ce dernier motif. Enfin, au regard de ce qui a été dit au point 9, M. B... n'est pas fondé à soutenir que ce refus de délai de départ volontaire porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens dirigés contre cette décision ;

13. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

14. Ainsi qu'il a été dit au point 9, M. B... a procédé, deux mois avant l'arrêté attaqué, à la reconnaissance de l'enfant à naître dont sa concubine, ressortissante française, est enceinte et la naissance est prévue en décembre 2022. Dans ces circonstances particulières et alors que le signalement dont il a fait l'objet n'a été suivi d'aucune condamnation, M. B... est fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît dès lors l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher :

15. En premier lieu, par un arrêté du 5 octobre 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 6 octobre suivant, librement accessible sur le site internet de la préfecture, le préfet de Loir-et-Cher a donné délégation à Mme G... E..., sous-préfète de Romorantin-Lanthenay, à l'effet de signer, pour l'ensemble du département, à l'occasion des permanences effectuées notamment les week-ends, les arrêtés assignant à résidence un étranger en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté.

16. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde, permettant à M. B... d'en critiquer utilement les motifs. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté doit être écarté. Il ne ressort pas par ailleurs des termes de l'arrêté contesté que le préfet de Loir-et-Cher n'aurait pas procédé à un examen attentif et personnalisé de sa situation.

17. En troisième lieu, si M. B... soutient que les décisions contestées ont été adoptées en méconnaissance des droits de la défense et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées par ailleurs d'une erreur de droit, ces moyens ne sont assortis d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. M. B... a en tout état de cause été mis en mesure de faire valoir les éléments pertinents de sa situation personnelle lors de son audition du 6 novembre 2022, ainsi qu'il a été dit au point 7.

18. En quatrième lieu, si M. B... soutient que le préfet de Loir-et-Cher " ne démontre pas en quoi il était justifié et proportionné de l'assigner à résidence en lieu et place de lui octroyer un délai de départ volontaire ", il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'intéressé serait prêt à quitter seul le territoire français. D'autre part, il n'apporte aucun élément de nature à établir que l'obligation qui lui est faite de se présenter les lundis, mercredis et vendredis à 8 h 30 au commissariat de police de Blois serait disproportionnée et de nature à porter atteinte à sa liberté d'aller et venir. Ainsi le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de la décision d'assignation à résidence doit être écarté.

19. En cinquième lieu, le requérant ne fournit aucun élément de nature à établir que le périmètre de l'assignation, à savoir le département du Loir-et-Cher, et les obligations de pointage auxquelles il est astreint seraient disproportionnés au regard de son droit au respect de la vie privée et familiale. Par suite, le préfet de Loir-et-Cher, en prononçant son assignation à résidence, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

20. En sixième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être également écarté comme inopérant.

21. En dernier lieu, il résulte des éléments exposés précédemment que l'obligation de quitter le territoire sans délai prise à l'égard de M. B... n'est pas illégale. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant assignation à résidence est dépourvue de base légale. Ce moyen doit donc être écarté.

22. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est uniquement fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2022 du préfet de la Moselle en tant qu'il prononce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an et que le surplus de ses conclusions à fin d'annulation des arrêtés litigieux doit être rejeté, de même que ses conclusions à fin d'injonction, l'annulation prononcée par la présente décision n'impliquant aucune mesure d'exécution.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

23. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. B... présentée sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi que sur le fondement des articles L. 723-3 et R. 723-26-1 et R. 723-26-2 du code de la sécurité sociale.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2204025 du tribunal administratif d'Orléans du 6 décembre 2022 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 6 novembre 2022 du préfet de la Moselle est annulé en tant qu'il prononce une interdiction de retour sur le territoire français d'un an à l'encontre de M. B....

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle et au préfet de Loir-et-Cher.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Pilven, président assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2023.

La rapporteure,

J. FLORENTLe président,

P-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 23VE00019


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE00019
Date de la décision : 22/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: Mme Julie FLORENT
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE
Avocat(s) : PEREZ

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-22;23ve00019 ?
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