Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 7 novembre 2022 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2208020 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 28 avril 2023, M. A..., représenté par Me Dabbaoui, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler les décisions du 7 novembre 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A... soutient que :
- le jugement est irrégulier faute d'être suffisamment motivé et dans la mesure où le tribunal administratif n'a pas examiné de manière circonstanciée sa situation et commis une erreur manifeste d'appréciation, s'agissant de l'atteinte portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- les décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- ces décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
La requête a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
La président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Laval, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant kosovar, né le 25 juin 1994, est entré irrégulièrement sur le territoire français, le 21 septembre 2010, à l'âge de seize ans, accompagné de ses parents, ses frères et sa sœur. Ses demandes d'asile ont été rejetées. Par un arrêté du 10 avril 2014, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a prononcé une obligation de quitter le territoire français à destination du Kosovo, où M. A... a été reconduit. M. A... est revenu irrégulièrement sur le territoire national le 27 juin 2015 et a déposé, le 9 juillet 2015, une demande d'asile rejetée définitivement par la Cour nationale du droit d'asile le 6 juillet 2016. A la suite du rejet d'une nouvelle demande d'asile, il a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, le 9 mai 2016, dont la légalité a été confirmée par une ordonnance du 10 avril 2017 du président de la cour administrative d'appel de Lyon. Il a fait l'objet, le 17 mars 2019, d'un arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sans délai, assorti d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'une année et d'une assignation à résidence. Le 21 mars 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande tendant à l'annulation de cet arrêté. M. A... a formé une demande d'admission exceptionnelle au séjour le 5 mars 2021. Par un arrêté du 7 novembre 2022, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 30 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, le jugement du tribunal administratif de Grenoble répond de façon complète et circonstanciée aux moyens invoqués par M. A.... Par suite, il est suffisamment motivé.
3. En second lieu, hormis dans le cas où le juge de première instance a entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs du jugement par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Si M. A... soutient que les premiers juges n'ont pas procédé à un examen circonstancié de sa situation, ont restreint la portée de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entaché leur analyse d'une erreur manifeste d'appréciation, de tels moyens ne relèvent pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. A... fait valoir sa durée de présence sur le territoire français où il est entré en 2010, à l'âge de seize ans, et revenu en 2015, l'état de santé de sa mère qui est titulaire d'une carte de séjour temporaire, la présence régulière en France de ses frères et sœur et son intégration sur le territoire national. Toutefois, M A... qui est majeur, est célibataire sans charge de famille et ne démontre pas le caractère indispensable de sa présence auprès de sa mère, qui n'est pas isolée en France. Il n'établit pas être dépourvu de liens personnels ou familiaux au Kosovo, où il est retourné vivre après la mise à exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre en 2014, et où peut s'inscrire sa vie d'adulte. Il ne justifie pas, par ailleurs, d'une intégration particulièrement notable sur le territoire national du seul fait de sa participation à des activités bénévoles, de sa connaissance du français et par la production d'une promesse d'embauche, alors qu'il a fait l'objet de plusieurs refus de séjour et de trois mesures d'éloignement entre 2014 et 2019. Dans ces conditions, eu égard, notamment aux conditions de son séjour en France, les décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ne peuvent être regardées comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elles ont été prises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. Pour les mêmes motifs, l'arrêté du 7 novembre 2022 n'est pas entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 30 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Courbon, présidente de la formation de jugement,
M. Laval, premier conseiller,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.
Le rapporteur,
J.-S. Laval
La présidente,
A. Courbon
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY01490