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21/12/2023 | FRANCE | N°22NC00689

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 21 décembre 2023, 22NC00689


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée Inas a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler d'une part la décision du 17 septembre 2019, par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge la somme totale de 9 364 euros au titre des contributions prévues par les articles L. 8253-1 du code du travail et L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble le rejet de son r

ecours gracieux intervenu le 27 novembre 2019 et d'autre part le titre de perception émis ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Inas a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler d'une part la décision du 17 septembre 2019, par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge la somme totale de 9 364 euros au titre des contributions prévues par les articles L. 8253-1 du code du travail et L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble le rejet de son recours gracieux intervenu le 27 novembre 2019 et d'autre part le titre de perception émis le 6 novembre 2019 pour recouvrer la somme de 7 240 euros au titre de la contribution prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail.

Par un jugement n° 2000426 du 18 janvier 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2022 et des mémoires complémentaires enregistrés les 30 mai 2022 et 20 novembre 2023, la société à responsabilité limitée Inas, représentée par Me Herrmann, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 18 janvier 2022 ;

2°) d'annuler la décision du 17 septembre 2019 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge la somme totale de 9 364 euros au titre des contributions prévues par les articles L. 8253-1 du code du travail et L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble le rejet de son recours administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision du 17 septembre 2019 est entachée d'incompétence ;

- la décision du 17 septembre 2019 est entachée d'un vice de procédure tenant à ce qu'en méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire ;

- la décision du 17 septembre 2019 est insuffisamment motivée ;

- la décision du 17 septembre 2019 repose sur des faits matériellement inexistants.

Par un mémoire distinct, enregistré le 17 mars 2022, présenté à l'appui de sa requête d'appel formée contre ce jugement du 18 janvier 2022, la SARL Inas demande à la cour de transmettre au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du 1er alinéa de l'article L. 8251-1 du code du travail et d'annuler l'ordonnance de refus de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance du 16 juin 2022, la présidente de la première chambre a refusé de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité que lui avait soumise la SARL Inas.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2023, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par Me De Froment conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la SARL Inas sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la SARL Inas ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sibileau, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle effectué le 25 janvier 2019 d'un restaurant exploité par la société à responsabilité limitée Inas (ci-après " SARL Inas), les services de police ont constaté la présence en situation de travail de Mme A.... Par des décisions du 17 septembre 2019, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à la charge de la SARL Inas les contributions spéciale et forfaitaire du fait de l'emploi de Mme A... pour un montant total de 9 364 euros. Un titre de perception a été émis le 6 novembre 2019 afin d'assurer le recouvrement de la somme de 7 240 euros correspondant au montant de la contribution spéciale. Par un jugement n° 2000426 du 18 janvier 2022 dont il est interjeté appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le recours formé par la SARL Inas contre la décision du 17 septembre 2019 ensemble la décision rejetant son recours administration et contre le titre de perception du 6 novembre 2019.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France ". Aux termes de l'article L. 8253-1 du même code : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 8271-17 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Outre les agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés à l'article L. 8112-1, les agents et officiers de police judiciaire, les agents de la direction générale des douanes sont compétents pour rechercher et constater, au moyen de procès-verbaux transmis directement au procureur de la République, les infractions aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler et de l'article L. 8251-2 interdisant le recours aux services d'un employeur d'un étranger non autorisé à travailler. ". Aux termes de l'article R. 8253-3 du même code : " Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis en application de l'article L. 8271-17, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indique à l'employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa date de réception par le destinataire, que les dispositions de l'article L. 8253-1 sont susceptibles de lui être appliquées et qu'il peut présenter ses observations dans un délai de quinze jours. ".

3. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. / Le montant total des sanctions pécuniaires prévues, pour l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler, au premier alinéa du présent article et à l'article L. 8253-1 du code du travail ne peut excéder le montant des sanctions pénales prévues par les articles L. 8256-2, L. 8256-7 et L. 8256-8 du code du travail ou, si l'employeur entre dans le champ d'application de ces articles, le montant des sanctions pénales prévues par le chapitre II du présent titre. / L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et de fixer le montant de cette contribution. (...) ".

4. Si ni les articles L. 8253-1 et suivants du code du travail, ni l'article L. 8271-17 du même code ne prévoient expressément que le procès-verbal constatant l'infraction aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler en France, et fondant le versement de la contribution spéciale, soit communiqué au contrevenant, le respect du principe général des droits de la défense suppose, s'agissant des mesures à caractère de sanction, ainsi d'ailleurs que le précise désormais l'article L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration, que la personne en cause soit informée, avec une précision suffisante et dans un délai raisonnable avant le prononcé de la sanction, des griefs formulés à son encontre et mise à même de demander la communication des pièces au vu desquelles les manquements ont été retenus. Par suite, l'Office français de l'immigration et de l'intégration est tenu d'informer l'intéressé de son droit de demander la communication du procès-verbal d'infraction sur la base duquel ont été établis les manquements qui lui sont reprochés.

5. Il est constant que le courrier de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 26 juin 2019 n'informait pas la SARL Inas de son droit de demander la communication du procès-verbal d'infraction sur la base duquel les manquements avaient été établis et que ce document ne lui a pas été transmis avant l'édiction de la sanction. Dans cette mesure, la décision du 17 septembre 2019 a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière et doit par voie de conséquence être annulée ainsi que la décision rejetant le recours administratif et le titre exécutoire émis à la suite.

6. Il résulte de ce qui précède que la SARL Inas est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une part de la décision du 17 septembre 2019, par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge la somme totale de 9 364 euros au titre des contributions prévues par les articles L. 8253-1 du code du travail et L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du rejet de son recours gracieux intervenu le 27 novembre 2019 et d'autre part du titre de perception émis le 6 novembre 2019 pour recouvrer la somme de 7 240 euros au titre de la contribution prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail.

Sur les frais d'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Inas, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'Office français de l'immigration et de l'intégration demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SARL Inas et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2000426 du tribunal administratif de Strasbourg du 18 janvier 2022, la décision du 17 septembre 2019 et le titre exécutoire du 6 novembre 2019 sont annulés.

Article 2 : L'Office français de l'immigration et de l'intégration versera à la SARL Inas la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de l'Office français de l'immigration et de l'intégration présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Inas et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle et à la Direction départementale des finances publiques du Val de Marne.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente assesseure,

- M. Sibileau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 décembre 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-B. SibileauLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 22NC00689


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00689
Date de la décision : 21/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste SIBILEAU
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : HERMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-21;22nc00689 ?
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