Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 8 février 2016 l'ajournant pour la 3ème fois à l'épreuve écrite n° 2 de l'examen organisé pour l'obtention du diplôme de chef de service de sécurité incendie et d'assistance à personne (SSIAP 3) ou de faire réévaluer sa copie par un jury en toute impartialité et de condamner le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de ses préjudices.
Par un jugement no 1601349 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, des pièces complémentaires et un mémoire, enregistrés respectivement le 24 mars 2021, le 12 août 2021 et le 13 janvier 2022, M. B..., représenté par Me Rochefort, avocate, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision d'ajournement et la décision prise sur recours administratif ;
3°) de condamner le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise à lui verser la somme de 15 000 euros à titre de dommages et des intérêts, cette somme étant assortie des intérêts au taux légal à compter de son recours administratif et de la capitalisation de ces intérêts ;
4°) à titre accessoire, d'enjoindre à l'Etat et au service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise de valider l'épreuve écrite 2 et de lui délivrer le diplôme SSIAP 3, à défaut, d'organiser à son profit une nouvelle épreuve écrite 2, et ce, dans le mois suivant la notification de la décision à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat et du service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise le versement de la somme de 2 500 euros à Me Rochefort sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, et, en cas de rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, de lui verser directement cette somme.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que l'Etat n'a pas été appelé à la cause en qualité de partie ;
- le tribunal administratif n'a pas répondu aux moyens tirés de l'absence de jury pour la totalité des épreuves, de la partialité du jury et du détournement de pouvoir ;
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé s'agissant du rejet des conclusions indemnitaires ;
- le procès-verbal d'examen et la fiche individuelle ont été confondus alors que cette dernière doit être annexée au procès-verbal ;
- les membres du jury ne sont pas identifiables en violation de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- la note de 8/20 obtenue lors de la 2ème présentation le 27 octobre 2015 est suffisante pour permettre la délivrance du diplôme ;
- seul le président du jury était présent lors de la notice technique et de l'épreuve orale ;
- il a vociféré en indiquant que l'exposant n'aurait jamais son examen et lui a posé des questions non prévues au programme ; la décision contestée est entachée de discrimination et d'une rupture d'égalité ; le jury a été partial ;
- son ajournement est entaché de détournement de pouvoir ; le président du jury a été mis en cause pénalement ;
- le coût de la formation dont il demande réparation s'élève à la somme de 7 000 euros et son préjudice moral peut être évalué à la somme de 8 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2021, le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise, représenté par Me Morant, avocat, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de M. B... ;
2°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- M. B... n'a contesté que la décision d'ajournement du 8 février 2016 ; les délais contre les décisions d'ajournement des 9 juillet 2015 et 27 octobre 2015 sont expirés ; les moyens invoqués à l'encontre de ces décisions ne peuvent qu'être écartés ;
- l'organisation des examens SSIAP ne relève pas de la compétence du préfet ;
- le requérant n'a pas invoqué en première instance le moyen tiré de l'absence du jury pour la totalité des épreuves ;
- le tribunal administratif a répondu au moyen tiré de la partialité du jury ;
- l'exposant n'identifie pas le lien entre la mise en cause du président du jury et le détournement de pouvoir ;
- le rejet de la demande de M. B... ne pouvait qu'entraîner le rejet de ses conclusions indemnitaires ;
- un procès-verbal comportant l'identité des membres du jury a été établi le 9 juillet 2015 ; lors de la 2ème et 3ème présentation, la fiche individuelle a été complétée conformément à l'arrêté du 2 mai 2005 ;
- la décision d'ajournement du 27 octobre 2015 n'a pas méconnu l'annexe IX de l'arrêté du 2 mai 2005 dès lors que le requérant n'a jamais obtenu une note supérieure ou égale à 10 et la moyenne de ses notes était inférieure à 12 ;
- M. B... n'a passé aucune épreuve orale les 27 octobre 2015 et 8 février 2016 ;
- il n'y a eu ni discrimination ni rupture d'égalité lors de l'examen ;
- le contentieux indemnitaire n'a pas été lié ;
- aucune faute n'est imputable au service exposant ;
- la demande indemnitaire n'est assortie d'aucune précision ou justification.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau de l'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles du 27 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 2 mai 2005 relatif aux missions, à l'emploi et à la qualification du personnel permanent des services de sécurité incendie des établissements recevant du public et des immeubles de grande hauteur ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Camenen,
- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,
- et les observations de Me Morant, pour le SDIS du Val-d'Oise.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... s'est présenté, le 8 février 2016, pour la troisième fois à la seconde épreuve écrite de l'examen pour l'obtention du diplôme de chef de service et d'assistance à personne (SSIAP 3). Il a obtenu la note de 6/20 et a été ajourné. Il relève appel du jugement du 19 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) du Val-d'Oise à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices qui résulteraient de l'illégalité de la décision d'ajournement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article 8 de l'arrêté du 2 mai 2005 susvisé relatif à l'organisation de l'examen : " L'organisation des examens prévus aux articles 4,5 et 6 du présent arrêté est à la charge des centres de formation pour leur propre candidat (...) ". Ainsi, contrairement à ce que soutient M. B..., l'organisation de l'examen de chef de service de sécurité incendie et d'assistance à personnes auquel il a participé ne relevait pas de la compétence du préfet du Val-d'Oise. Ainsi, il n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que le tribunal administratif devait appeler l'Etat à la cause et qu'à défaut de l'avoir fait, il aurait entaché son jugement d'irrégularité.
3. En deuxième lieu, le tribunal administratif a suffisamment répondu, au point 2 de sa décision, au moyen tiré de l'absence du jury pour la totalité des épreuves, en relevant que l'épreuve n° 2 pour laquelle, lors de sa 3ème présentation, M. B... a obtenu, le 8 février 2016, la note de 6/20 et a, en conséquence, été ajourné, a été corrigée par le seul président du jury conformément à l'annexe IX à l'arrêté du 2 mai 2005 susvisé.
4. En troisième lieu, le point 4 du jugement attaqué répond suffisamment aux moyens tirés de la partialité du jury et de l'existence d'un détournement de pouvoir en relevant qu'il n'est pas établi que le président du jury aurait fait preuve d'animosité à son encontre et que sa note serait motivée par des considérations extérieures aux mérites de la notice technique de sécurité rédigée par l'intéressé.
5. Enfin, en rejetant les conclusions indemnitaires de M. B..., qui étaient fondées sur l'illégalité fautive de la décision d'ajournement, par voie de conséquence du rejet de ses conclusions à fin d'annulation de la décision contestée, le tribunal administratif n'a pas insuffisamment motivé le jugement attaqué.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 8 février 2016 :
7. En premier lieu, aux termes de l'article 10 de l'arrêté du 2 mai 2005 susvisé : " Procès-verbal d'examen. / Le responsable du centre de formation agréé ou son représentant, chargé de l'organisation de l'examen, dresse le procès-verbal qu'il fait signer à tous les membres du jury. L'original du procès-verbal d'examen est conservé par le président du jury. (...) Une fiche individuelle d'examen par candidat non certifié est annexée au procès-verbal de l'examen. Elle reprend explicitement le bilan de l'épreuve QCM, des épreuves écrites pour le SSIAP 3 et les conditions de déclaration de l'inaptitude du candidat à l'épreuve pratique. / La fiche individuelle d'examen est délivrée au candidat non certifié par le centre de formation agréé qui en conserve une copie pour un éventuel duplicata (...) / Sans présentation de cette fiche, le candidat ne peut participer à un nouvel examen ".
8. M. B... soutient que le procès-verbal était absent de la procédure d'examen ou qu'il a été confondu avec la fiche individuelle. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'un procès-verbal d'examen a été établi par le jury le 9 juillet 2015 et qu'il est distinct de la fiche individuelle de M. B.... Par suite, le moyen tiré de l'absence de procès-verbal d'examen ou de ce que le procès-verbal a été confondu avec la fiche individuelle doit être écarté.
9. Par ailleurs, l'intéressé ayant obtenu 12,5/20 à la première épreuve écrite le 9 juillet 2015 et ayant été autorisé à conserver cette note et à repasser la deuxième épreuve écrite à deux reprises les 27 octobre 2015 et 8 février 2016 à l'occasion desquelles il a obtenu respectivement la note de 8/20 et de 6/20, aucun texte ni aucun principe n'imposait au jury d'établir pour la circonstance un nouveau procès-verbal et n'interdisait au président du jury de reporter la note alors obtenue par le candidat sur sa fiche individuelle, celle-ci impliquant en l'espèce son ajournement.
10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. / (...) ".
11. Il ressort du dossier de première instance, en particulier de la décision contestée produite par M. B... à l'appui de sa demande, que celle-ci comporte le nom, prénom, qualité et signature manuscrite de son auteur. Ainsi, le moyen tiré de ce que l'auteur de cette décision ne serait pas identifiable en violation de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article 9 de l'arrêté du 2 mai 2005 susvisé : " Jury d'examen Le jury d'examen est présidé soit par : - le directeur départemental des services d'incendie et de secours du département où se déroule l'examen (...) Le jury est composé, outre le président (...) de deux chefs de service de sécurité en fonction hiérarchique, dont l'un au moins est en poste dans un établissement recevant du public, pour les niveaux 2 et 3 (...) ". Aux termes de son article 10 : " Procès-verbal d'examen Le responsable du centre de formation agréé ou son représentant, chargé de l'organisation de l'examen, dresse le procès-verbal qu'il fait signer à tous les membres du jury. L'original du procès-verbal d'examen est conservé par le président du jury (...) ".
13. Si M. B... soutient que les mentions figurant sur le procès-verbal d'examen établi le 9 juillet 2015 ne permettent pas de s'assurer de sa conformité aux articles 8, 9 et 10 de l'arrêté du 2 mai 2015, ce moyen est sans incidence sur la légalité de la décision contestée du 8 février 2016, qui n'a pas donné lieu à un nouveau procès-verbal du jury ainsi qu'il a été dit, cette décision ayant été prise par le seul président du jury conformément aux dispositions de l'annexe IX à l'arrêté du 2 mai 2005 susvisé.
14. En quatrième lieu, s'agissant de l'épreuve écrite 2, l'annexe IX à l'arrêté du 2 mai 2005 susvisé précise que " une note inférieure à 8 ne permet pas la délivrance du diplôme ". Aux termes de cette même annexe : " (...) Pour les épreuves écrites, la moyenne inférieure à 12 entraîne l'ajournement du candidat. / Le candidat conserve pendant un an après la date de l'examen initial le bénéfice d'une note supérieure ou égale à 8. / Le candidat conserve pendant un an après la date de l'examen initial le bénéfice de l'aptitude à l'épreuve orale. / Le candidat peut pendant cette période repasser la ou les épreuves sans suivre de nouveau la formation. / Dans ce cas, le candidat doit obtenir une note supérieure ou égale à 10, et la moyenne des notes obtenues doit être supérieure ou égale à 12. / Après cette période le candidat doit suivre une formation complète avant de se représenter à un examen ".
15. Il résulte de ces dispositions que lorsque le candidat repasse une ou plusieurs épreuves dans le délai d'un an suivant l'examen initial, il doit obtenir une note supérieure ou égale à 10 et la moyenne des notes obtenues doit être supérieure ou égale à 12. Ainsi, contrairement à ce que soutient M. B..., la note de 8/20 qu'il a obtenue lorsqu'il a repassé pour la deuxième fois la seconde épreuve écrite de l'examen SSIAP3 le 27 octobre 2015 ne lui permettait pas d'obtenir son diplôme, tout comme d'ailleurs la note de 6/20 qu'il a obtenue lors de la troisième tentative. Par suite et en tout état de cause, ce moyen doit être écarté.
16. En cinquième lieu, s'agissant de l'épreuve écrite 2, l'annexe IX à l'arrêté du 2 mai 2005 susvisé précise également que : " Les copies devront faire l'objet d'une correction par le président du jury ou par un préventionniste recyclé ".
17. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des mentions de sa fiche individuelle, que M. B... a repassé une troisième fois la seconde épreuve écrite le 8 février 2016. Il n'est pas établi, contrairement à ce que fait valoir M. B..., qu'il a participé à l'épreuve orale à cette occasion, alors même qu'il a pu avoir un échange avec le président du jury. Contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte des dispositions citées au point précédent que le président du jury a pu régulièrement corriger seul l'épreuve écrite à laquelle il a participé le 8 février 2016 et prononcer son ajournement, cette correction n'ayant pas à être faite par le jury dans son ensemble. Ainsi, M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision d'ajournement du 8 février 2016 au motif que seul le président du jury était présent le 8 février 2016.
18. En sixième lieu, il n'est pas établi, par les seuls éléments figurant dans le recours administratif de M. B..., que le président du jury aurait vociféré lorsqu'il s'est présenté à la seconde épreuve écrite le 8 février 2016, qu'il lui aurait précisé qu'il n'aurait jamais cet examen et qu'il lui aurait attribué une note fictive et arbitraire. Il n'est pas davantage établi que des questions ne figurant pas au programme lui auraient été posées. Ainsi, les seuls éléments avancés par le requérant ne suffisent pas à établir l'existence d'une présomption de discrimination dont il aurait fait l'objet. Ils ne permettent pas davantage d'établir l'existence d'une rupture d'égalité entre candidats et l'absence d'impartialité du jury. Par suite, ces moyens doivent être écartés.
19. Enfin, si le président du jury a été poursuivi pénalement pour des faits de complicité d'aide au séjour irrégulier en bande organisée et corruption passive, cette circonstance ne suffit pas à établir que la décision attaquée serait entachée de détournement de pouvoir.
20. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de prescrire les mesures d'instruction sollicitées par le requérant, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.
Sur les conclusions indemnitaires :
21. Ces conclusions n'ont pas fait l'objet d'une demande préalable. Ainsi, ces conclusions sont, en tout état de cause, irrecevables et doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse une somme au conseil de M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par le SDIS du Val-d'Oise sur le même fondement.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président assesseur,
Mme Houllier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.
Le rapporteur,
G. CamenenLa présidente,
C. Signerin-IcreLa greffière,
C. Fourteau
La République mande et ordonne au préfet du Val-d'Oise en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 21VE00831