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20/12/2023 | FRANCE | N°23PA00515

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 20 décembre 2023, 23PA00515


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2020 par lequel la maire de Paris lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire des fonctions d'une durée de six mois, de condamner la ville de Paris à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis, d'enjoindre à la maire de Paris de retirer cette sanction de son dossier administratif et de reconstituer sa carrière pour la période d'exclusion, soit du 1er d

écembre 2020 au 31 mai 2021, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 eu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2020 par lequel la maire de Paris lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire des fonctions d'une durée de six mois, de condamner la ville de Paris à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis, d'enjoindre à la maire de Paris de retirer cette sanction de son dossier administratif et de reconstituer sa carrière pour la période d'exclusion, soit du 1er décembre 2020 au 31 mai 2021, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Par un jugement n° 2100904 du 8 décembre 2022 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2023, M. A..., représenté par Me Paulin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100904 du 8 décembre 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision 17 novembre 2020 prononçant la suspension temporaire de ses fonctions pour une durée de six mois ;

3°) d'enjoindre à la ville de Paris de retirer cette sanction disciplinaire de son dossier administratif et de reconstituer administrativement sa carrière pour la période du 1er décembre 2020 au 30 mai 2021 inclus, dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner la ville de Paris au versement de la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi constitué par l'atteinte à sa réputation, son honneur et sa probité ;

5°) de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 4 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

M. A... soutient que :

- la décision de sanction du 17 novembre 2020 est entachée d'incompétence ;

- la décision est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- la décision est entachée d'un vice de procédure tiré de l'irrégulière composition de la commission paritaire, siégeant en formation disciplinaire, qui s'est prononcée sur son cas ;

- la décision est entachée d'un vice de procédure faute de notification de l'avis de la commission administrative paritaire ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit faute de mise en œuvre de son pouvoir d'appréciation par l'autorité compétente qui s'est sentie liée par l'avis de la commission administrative paritaire ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'aucune faute ne peut lui être reprochée ;

- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2023, la ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-Froger, conclut au rejet de la requête de M. A... et à ce qu'il soit mis à sa charge une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens invoqués par A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 2017-105 du 27 janvier 2017 ;

- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dubois ;

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique ;

- les observations de Me Froger pour la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., membre du corps des ingénieurs cadres supérieurs d'administration parisienne, titulaire du grade d'ingénieur cadre supérieur en chef, exerçait en dernier lieu les fonctions de chargé de mission auprès du chef du service des déplacements à la direction de la voirie et des déplacements (DVD). Par décision du 17 novembre 2020, il a fait l'objet d'une sanction de suspension temporaire des ses fonctions pour une durée de six mois. Il relève appel du jugement n° 2100904 du 8 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté son recours pour excès de pouvoir contre cette sanction ainsi que ses conclusions à fins d'indemnisation de son préjudice moral.

Sur les conclusions à fin d'annulation, d'injonction et à fin d'indemnisation :

2. En premier lieu, la décision du 17 novembre 2020 prononçant la suspension de M. A... de ses fonctions pour une durée de six mois est signée par Mme Marie Villette, secrétaire générale de la ville de Paris, chargée en vertu de l'article 2 de l'arrêté du 27 octobre 2020 portant nouvelle organisation du secrétariat général de la ville de Paris, de diriger l'ensemble des directions de la ville, et disposant, en vertu de l'article 1er d'un arrêté distinct du même jour, publié au bulletin officiel de la ville de Paris du 6 novembre 2020, d'une délégation de la maire de Paris à l'effet de signer tous arrêtés, actes ou décisions préparés par les services placés sous son autorité. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit dès lors être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, la décision attaquée comporte les textes applicables à la situation de M. A... et les griefs retenus à son encontre, permettant à celui-ci de comprendre, à sa seule lecture, les motifs de cette sanction. Le défaut de motivation invoqué manque ainsi en fait et doit être écarté.

4. En troisième lieu, le moyen tiré de l'irrégulière composition de la commission administrative paritaire statuant en formation disciplinaire n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé et ne peut qu'être écarté. A cet égard, la décision attaquée n'avait pas à comporter de mentions spécifiques justifiant de la régularité de la composition de cette commission ou du respect des règles de quorum s'imposant à elle. Le vice de procédure ainsi invoqué ne peut dès lors qu'être écarté.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 14 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " L'avis émis par le conseil de discipline est communiqué sans délai au fonctionnaire intéressé ainsi qu'à l'autorité territoriale qui statue par décision motivée ".

6. M. A... soutient qu'il n'a pas reçu notification de l'avis favorable à une exclusion temporaire de ses fonctions pour une durée de six mois rendu, à l'unanimité de ses membres, par la commission administrative réunie en formation disciplinaire lors de la séance du 10 novembre 2020. Cependant, les dispositions précitées n'imposent pas que la communication à l'agent de l'avis du conseil de discipline intervienne, à peine d'illégalité de la décision de sanction, avant que cette décision ne soit prise. Le vice de procédure ainsi invoqué ne peut dès lors qu'être écarté.

7. En cinquième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité disciplinaire se serait estimée liée par l'avis rendu par la commission administrative paritaire le 10 novembre 2020. Le moyen tiré de l'incompétence négative dont serait entachée la décision de sanction attaquée ne peut dès lors qu'être écarté.

8. En sixième lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale (...) ". Aux termes de l'article 14 du décret du 24 mai 1994 portant dispositions statutaires relatives aux personnels des administrations parisiennes : " Pour l'application de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, les seize premiers alinéas sont rédigés comme suit : Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes (...) Troisième groupe : / la rétrogradation ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans (...) ". L'article 5 du décret du 27 janvier 2017 relatif à l'exercice d'activités privées par des agents publics et certains agents contractuels de droit privé ayant cessé leurs fonctions, aux cumuls d'activités et à la commission de déontologie de la fonction publique dans sa rédaction alors en vigueur dispose : " L'agent peut être autorisé à cumuler une activité accessoire avec son activité principale, sous réserve que cette activité ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l'indépendance ou à la neutralité du service ". Aux termes de l'article 7 de ce décret : " Le cumul d'une activité exercée à titre accessoire mentionnée à l'article 6 avec une activité exercée à titre principal est subordonné à la délivrance d'une autorisation par l'autorité dont relève l'agent intéressé ".

9. D'une part, la décision de suspension attaquée est motivée par le fait pour M. A... d'avoir continué son activité d'enseignement au sein de l'école des ingénieurs de la ville de Paris (EIVP) en dépit du refus de sa hiérarchie de lui délivrer une autorisation de cumul, d'avoir produit une autorisation de cumul falsifiée avec une fausse signature de la sous-directrice de la direction de la voirie et des déplacements à une date où celle-ci était en congés, et pour avoir utilisé le matériel professionnel et consacré une partie de son temps professionnel à cet enseignement. En se bornant à nier de manière générale tout comportement fautif commis dans le cadre de son service ou à l'extérieur, M. A... ne conteste pas sérieusement les motifs qui lui sont reprochés par la décision attaquée et qui sont établis par les pièces du dossier, en particulier la continuation d'une activité d'enseignement entre le 9 septembre 2019 et le 20 janvier 2020 pour une durée totale de plus de 77 heures pour lesquelles il a perçu une rémunération globale de 4 917,64 euros, alors qu'il ne disposait pour ce faire d'aucune autorisation de cumul. L'insubordination caractérisant ces faits justifiaient l'infliction d'une sanction disciplinaire. Le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'une erreur quant à la matérialité des faits doit ainsi être écarté.

10. D'autre part, compte tenu de leur gravité, en raison notamment de la durée pendant laquelle ces faits se sont poursuivis, alors pourtant que M. A... avait été informé par sa hiérarchie de son refus de lui accorder les autorisations de cumul nécessaires à cette activité d'enseignement compte tenu d'une moindre implication de sa part dans la réalisation des tâches qui lui avaient été assignées, la sanction de suspension de ses fonctions pour une durée de six mois n'est entachée d'aucune disproportion, alors même que M. A... n'a jamais été sanctionné disciplinairement au cours de sa carrière. En conséquence, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée de disproportion doit être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 17 novembre 2020 de suspension de ses fonctions pour une durée de six mois, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que, en l'absence d'illégalité fautive de la décision attaquée, ses conclusions à fin d'indemnisation de son préjudice moral.

Sur les frais d'instance :

12. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la ville de Paris, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

13. D'autre part, il y a lieu de mettre à la charge de M. A... le versement à la ville de Paris d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera une somme de 1 500 euros à la ville de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Ville de Paris et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre ;

- Mme Vrignon-Villalba, première conseillère ;

- M. Dubois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2023.

Le rapporteur,

J. DUBOISLa présidente,

H. VINOT

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA00515 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00515
Date de la décision : 20/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Jacques DUBOIS
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SCP FOUSSARD-FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-20;23pa00515 ?
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