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20/12/2023 | FRANCE | N°21PA03214

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 20 décembre 2023, 21PA03214


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 2013 et 2014.



Par un jugement n° 1908761 et 1908769 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande et prononcé, en application de l'article L. 280 du livre des procédures fiscales, une majoration de droits de 0,5

% par mois écoulé entre le 30 septembre 2019 et la date de lecture de son jugement.



Pro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1908761 et 1908769 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande et prononcé, en application de l'article L. 280 du livre des procédures fiscales, une majoration de droits de 0,5 % par mois écoulé entre le 30 septembre 2019 et la date de lecture de son jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 juin et

21 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Dumont, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1908761 et 1908769 du 8 avril 2021 ;

2°) de le décharger des suppléments d'imposition en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- la motivation du jugement est fondée sur une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les moyens relatifs à la non-conformité de la procédure d'imposition avec plusieurs normes du droit de l'Union européenne ont été écartés sans explication ;

- en se bornant à écarter le bénéfice de la doctrine fiscale, réclamé sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, alors qu'il s'était également prévalu des dispositions des articles L. 312-2 et L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, le jugement est entaché d'une omission à statuer ;

- les premiers juges n'ont pas exposé les motifs au vu desquels ils ont écarté le taux de charges dont il justifiait qu'il aurait dû lui être appliqué ;

- la majoration que le tribunal lui a infligée sur le fondement de l'article L. 280 du livre des procédures fiscales est infondée et elle n'est pas motivée.

En ce qui concerne le bien fondé du jugement :

S'agissant de la régularité de la procédure :

- la procédure d'imposition est irrégulière faute de notification régulière d'un avis de vérification et de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ;

- l'administration ne pouvait mettre en œuvre une taxation d'office et une évaluation d'office sans envoi préalable d'une mise en demeure ;

- il n'a pas bénéficié d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification de comptabilité ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

- l'avis de mise en recouvrement est insuffisamment motivé ;

- la décision rejetant sa réclamation est elle aussi insuffisamment motivée.

S'agissant du bien-fondé des suppléments d'imposition :

- il relevait toujours, à tout le moins s'agissant de l'année 2013, du régime du micro-BIC prévu à l'article 50-0 du code général des impôts ;

- en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée, seul le taux réduit aurait dû être retenu, il n'est par ailleurs pas justifié que tous les encaissements correspondent à des recettes, la répartition entre taux réduit et taux normal aurait en tout état de cause dû être de 1/4 - 3/4 alors, du reste, que le régime applicable était celui de l'autoliquidation de la taxe par l'entreprise ayant fait appel à lui en qualité de sous-traitant ;

- en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible, un assujetti qui n'est pas en possession d'une facture doit être autorisé à présenter des preuves objectives confirmant que le droit à déduction lui est acquis ;

- le profit sur le trésor n'est pas automatique dans l'hypothèse d'un rappel de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que cela ressort de la décision du Conseil d'Etat n° 340024 du 4 février 2015 ;

- le taux de marge de 48 et 57 % retenu par le service n'est pas réaliste alors que des comparables établissent qu'il se situe, pour ce type d'activité, entre 5 et 10 % ;

- les suppléments d'impôt sur le revenu sont infondés dès lors qu'ils ont la même origine que ceux auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2015 et qui ont été déchargés par le juge de l'impôt.

S'agissant des intérêts et majorations :

- l'application de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts n'est pas motivée et le montant de l'intérêt est, alors qu'il s'agit d'une sanction poursuivant un objectif dissuasif, disproportionné ;

- la majoration du a du 1 de l'article 1728 du code général des impôts est infondée en conséquence du caractère infondé des droits supplémentaires mis à sa charge, elle est insuffisamment motivée, s'agissant notamment du montant dû à ce titre, et elle est infondée dès lors qu'aucune mise en demeure préalable ne lui a régulièrement été notifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de relance conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Perroy,

- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. L'activité de plombier que M. B... exerce comme entrepreneur individuel a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des années 2013 et 2014, à l'issue de laquelle il a été rendu destinataire d'une proposition de rectification le 7 juin 2016, mettant à sa charge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des suppléments d'impôt sur le revenu en application des procédures prévues aux articles L. 66-3° et L. 73-1° du livre des procédures fiscales, ainsi que la majoration de 40 % prévue au a du 1 de l'article 1728 du code général des impôts. Par sa requête, M. B... demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1908761 et 1908769 du 8 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces suppléments d'imposition et lui a par ailleurs infligé la majoration prévue à l'article L. 280 du livre des procédures fiscales en décidant que le montant des droits en litige était majoré de 0,50 % par mois entier écoulé entre la date du 30 septembre 2019 et celle de lecture du jugement ou celle du paiement si l'impôt a été acquitté avant le jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Si, en premier lieu, M. B... fait grief au jugement d'avoir écarté comme inopérants plusieurs des moyens qu'il avait soulevés, relatifs à la non-conformité de la procédure d'imposition avec plusieurs normes du droit de l'Union européenne, l'erreur de droit commise, le cas échéant, par un tribunal administratif en regardant à tort un moyen comme inopérant justifie uniquement la censure de ce motif de son jugement et l'examen par la cour, statuant comme juge d'appel dans le cadre de l'effet dévolutif, des autres moyens soulevés en première instance, mais non l'annulation du jugement pour irrégularité puis l'examen des conclusions de première instance par voie d'évocation. Le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté.

4. M. B... soutient, en deuxième lieu, que le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'opposabilité des instructions ministérielles en application des articles L. 312-2 et

L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, la procédure d'imposition est intégralement régie par le livre des procédures fiscales de sorte que l'invocation du code des relations entre le public et l'administration était inopérante et que le tribunal pouvait, par suite et sans méconnaître les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative, ne pas expressément répondre à ce moyen.

5. Le requérant estime, en troisième lieu, que le tribunal n'a pas motivé les raisons qui lui ont fait considérer qu'il ne rapportait pas la preuve du taux de charge dont il sollicitait l'application. Il est toutefois précisé, au point 27 du jugement attaqué, qu'" en se bornant à invoquer ces éléments statistiques sans produire la moindre pièce justificative de ce que le taux de charges de son activité serait supérieur à celui retenu par l'administration, alors que la charge lui incombe, M. B... n'établit pas l'exagération des impositions contestées ". Il en résulte que le moyen doit être écarté comme manquant en fait.

6. En quatrième lieu, M. B... ne peut utilement soutenir, pour critiquer la régularité du jugement, que la majoration prévue à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales que le tribunal lui a infligée est infondée. S'il soutient par ailleurs que cette majoration n'est pas motivée, les premiers juges l'ont toutefois adoptée " compte tenu des moyens écartés aux points 3 à 31 du présent jugement ", c'est-à-dire une concaténation de moyens non étayés, inopérants ou manquant en fait, de sorte que la majoration était suffisamment motivée.

Sur le bien-fondé des impositions et pénalités en litige :

S'agissant de la régularité de la procédure :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification (...) " et aux termes de l'article L. 47 de ce même code : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification (...) ".

8. Compte tenu des modalités de présentation des plis recommandés prévues par la réglementation postale, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée la date de vaine présentation du courrier et qui porte, sur l'enveloppe ou l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis.

9. M. B... soutient que la procédure d'imposition est irrégulière faute de notification régulière de l'avis de vérification et de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié. Il résulte toutefois de l'instruction que l'avis de vérification daté du 29 janvier 2016, lequel fixait un premier rendez-vous le 14 février 2016 et mentionnait que " la charte des droits et obligations du contribuable vérifié (millésime mai 2015 + erratum) " pouvait être consultée sur le site internet de l'administration à l'adresse qui y était mentionnée ou remise sur simple demande, a été expédié le 1er février 2016 à l'adresse où M. B... a déclaré le siège de son activité, et que ce pli, " non réclamé " avant expiration du délai de garde, a été retourné au service avec une mention de vaine présentation du pli le 3 février 2016. Dès lors, s'étant abstenu de retirer ce pli dans les délais réglementaires, le requérant doit être regardé comme ayant régulièrement reçu notification de l'avis de vérification en cause le 3 février 2016. Le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : 1° le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales (...) lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (...) ". Et aux termes de l'article L. 66 du même code : " Sont taxés d'office : (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes (...) ".

11. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé au requérant le 3 février 2016 des mises en demeure de déposer les déclarations de BIC et de TVA pour les périodes du 1er janvier au 31 décembre 2013 et du 1er janvier au 31 décembre 2014. Ces mises en demeure ont été présentées à M. B... le 4 février 2016 et ont, selon les avis de réception produits en défense, été retournées au service avec la mention " pli avisé et non réclamé ". Le requérant, qui est ainsi réputé, en vertu des principes exposés au point 8, avoir eu notification régulière des mises en demeure le 4 février 2016, n'est par suite et en tout état de cause, pas fondé à soutenir que les procédures d'imposition d'office auraient été mises en œuvre sans mise en demeure préalable.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " I. - Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables (...) ". Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable dans lesquels sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.

13. Si M. B... soutient qu'en l'absence de débat oral et contradictoire, la procédure d'imposition est irrégulière, il résulte de l'instruction qu'une première réunion s'est tenue chez M. B... le 15 mars 2016, qu'à sa suite, plusieurs interventions ont eu lieu au domicile de l'intéressé au cours desquelles il a présenté des factures de ventes et d'achats et les relevés du compte bancaire professionnel qui ont notamment permis de déterminer le montant de la TVA déductible, avant que les rehaussements proposés ne soient exposés par le vérificateur lors de la réunion de synthèse du 23 mai 2016. A cet égard, si le requérant, qui n'avance par ailleurs aucun élément qui permettrait d'établir que le vérificateur se serait refusé à un débat avec lui, soutient que les vérifications ont eu lieu à son domicile personnel et non au lieu d'exploitation de son activité, il ressort de la proposition de rectification que " suite à la mise en garde, M. B... a contacté le service afin de fixer la date et le lieu de la première intervention, soit le 15 mars 2016 et à son domicile ". Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à un débat oral et contradictoire ne peut qu'être écarté.

14. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions ".

15. M. B... soutient que la proposition de rectification du 7 juin 2016 est insuffisamment motivée pour ne pas préciser les modalités de détermination, en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée, de la clé de répartition entre taux normal et taux réduit, en matière de taxe déductible, les crédits dont il dispose, et, en matière de BIC, du taux de charge retenu par le service. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, il ressort de l'examen de la proposition de rectification que l'administration s'est fondée sur le chiffre d'affaires déclaré qu'elle a ventilé entre taux réduit et taux normal en retenant une répartition 2/3 et 1/3 résultant des entretiens conduits pendant la vérification avec M. B..., pour déterminer le ratio de ses interventions sur des locaux à usage d'habitation et des locaux à usage commercial. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, la proposition de rectification vise, en annexe 1, l'ensemble des factures considérées comme déductibles au regard des prévisions du 1° du II de l'article 271 du code général des impôts. Cette motivation est de la sorte conforme aux prescriptions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, sans que le requérant établisse en quoi elle ne satisferait pas aux garanties prévues, à les supposer opposables, par les instruments juridiques issus notamment du droit de l'Union européenne dont il se prévaut. Enfin, s'agissant des BIC, l'administration a repris le chiffre d'affaires déclaré et a déterminé les charges à appliquer en retentant les factures d'achat de matériels et matières premières qui ont été présentées et en ajoutant au montant qui en résulte, par souci de réalisme économique, une quote-part supplémentaire de 25 % déterminée " lors des différents entretiens ". Le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la proposition de rectification ne peut, par suite, qu'être écarté.

16. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. (...) L'avis de mise en recouvrement est individuel. Il est signé et rendu exécutoire par l'autorité administrative désignée par décret. Les pouvoirs de l'autorité administrative susmentionnée sont également exercés par le comptable public compétent. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 256-1 du même livre : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. L'avis de mise en recouvrement mentionne également que d'autres intérêts de retard pourront être liquidés après le paiement intégral des droits. Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications (...) ".

17. Il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement rendu exécutoire le 31 août 2016 par le comptable du service des impôts des entreprises de Créteil fait référence à la proposition de rectification du 7 juin 2016 et mentionne les montants en droits, majorations et intérêts de retard des rappels de taxe sur la valeur ajoutée portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. Cet avis de mise en recouvrement comporte ce faisant l'ensemble des indications prévues par les dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales qui n'exigent pas que l'avis de mise en recouvrement mentionne le fondement légal des rectifications, alors que la proposition de rectification à laquelle l'avis de mise en recouvrement fait référence comporte déjà ces indications. Par ailleurs, M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, pas plus que de l'article 296 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ou de l'article 45 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

18. Si, en sixième lieu, M. B... se plaint de ce que la décision rejetant sa réclamation serait insuffisamment motivée, une telle décision n'a pour seul objet que de lier le plein-contentieux fiscal, de sorte que le moyen doit être écarté comme inopérant.

19. En septième lieu, le requérant invoque, au soutien de ses différents moyens de procédure, le respect des droits de la défense, les devoirs de loyauté, d'exemplarité et de neutralité de l'administration dans ses relations avec les contribuables, ainsi que les principes de légalité, de nécessité, de proportionnalité, de consentement à l'impôt et du respect du droit de propriété en se prévalant indifféremment de la Constitution et de son préambule, de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et de la Cour de justice de l'Union européenne, de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et du code des relations entre le public et l'administration et de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié. Cependant, il n'établit pas en quoi ces principes auraient été méconnus dans le cadre de la présente procédure.

20. En huitième lieu, le requérant ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, d'instructions administratives relatives à la procédure d'imposition, lesquelles ne sont pas davantage opposables à l'administration sur le fondement du code des relations entre le public et l'administration dans la mesure où la procédure d'imposition est exclusivement régie par les dispositions du livre des procédures fiscales.

S'agissant du bien-fondé des impositions supplémentaires :

21. En premier lieu, l'article 50-0 du code général des impôts, dans sa version en vigueur, prévoit que " (...) Sont exclus de ce régime : (...) b. Les contribuables qui ne bénéficient pas des dispositions du I de l'article 293 B. Cette exclusion prend effet à compter du 1er janvier de l'année de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée (...) ". S'agissant des limites du régime de franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée, l'article 293 B du code général des impôts dans sa version applicable au litige, dispose que " I. - Pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France (...) bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, lorsqu'ils n'ont pas réalisé : (...) 2° (...) un chiffre d'affaires afférent à des prestations de services (...) supérieur à : a) 32 600 euros l'année civile précédente ; b) ou 34 600 euros l'année civile précédente, lorsque la pénultième année, il n'a pas excédé le montant mentionné au a. II. - 1. Le I cesse de s'appliquer : (...) b) [aux assujettis] dont le chiffre d'affaires de l'année en cours afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, dépasse le montant mentionné au b du 2° du I ".

22. M. B... soutient que son activité continuait à relever du régime du micro-BIC qu'organise l'article 50-0 du code général des impôts, à tout le moins s'agissant de l'année 2013, dès lors que son application peut être maintenue au titre des deux premières années de franchissement des seuils. Il résulte toutefois de l'instruction que le chiffre d'affaires dégagé par l'activité de M. B... au titre de l'année 2013 s'est élevé à la somme de 100 685 euros. Le requérant n'était ainsi pas éligible au régime de la franchise en base de taxe de la valeur ajoutée au titre des années 2013 et 2014, ni ne pouvait bénéficier, par suite, du régime de micro-BIC de l'article 50-0 du code général des impôts au titre des exercices 2013 et 2014.

23. En deuxième lieu, aux termes de l'article 256 du code général des impôts, " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Selon l'article 269 du même code, " 1 Le fait générateur de la taxe se produit : a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; (...) 2. La taxe est exigible : a) Pour les livraisons et les achats visés au a du 1 et pour les opérations mentionnées aux b et d du même 1, lors de la réalisation du fait générateur ; (...) c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits (...) ".

24. Il résulte de l'instruction qu'alors que M. B... s'était placé à tort sous le régime de la franchise en base de TVA, le vérificateur a constaté que les chiffres d'affaires déclarés correspondaient à ceux facturés et encaissés et a appliqué à ces montants, en l'absence d'attestations des clients du contribuable permettant de bénéficier du taux réduit pour les travaux réalisés dans les locaux d'habitation achevés depuis plus de deux ans, le taux réduit pour les deux tiers des prestations de service et le taux normal pour le tiers restant. Si le requérant conteste, d'une part, la ventilation effectuée par le service et fait alternativement valoir que seul le taux réduit aurait dû lui être appliqué et que la taxe aurait dû être auto-liquidée par les sociétés ayant fait appel à lui en qualité de sous-traitant, il ne verse aux débats aucun justificatif alors que la charge de la preuve lui incombe pour être imposé sur le fondement du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. D'autre part, s'il soutient qu'il n'est pas justifié que tous les encaissements correspondent à des recettes, l'administration s'est bornée à retenir le chiffre d'affaires que le contribuable avait lui-même déclaré.

25. En troisième lieu, aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ".

26. Si M. B... conteste, en se prévalant notamment du principe de la neutralité fiscale de la taxe sur la valeur ajoutée, le montant de taxe déductible retenu par le service, il résulte de l'instruction que l'administration a admis en déduction les factures qui lui ont été présentées, sans que l'intéressé ne précise, pas plus en appel qu'en première instance, quelles factures n'auraient pas été prises en compte par le vérificateur. Dans ces conditions, le moyen ne peut qu'être écarté.

27. En quatrième lieu, lorsqu'un contribuable fait l'objet de redressement en matière d'impôt sur les bénéfices et de taxe sur la valeur ajoutée, ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés peuvent être rehaussées d'un profit sur le Trésor chaque fois que le droit qui lui est ouvert, de déduire de ces bases la taxe sur la valeur ajoutée rappelée aboutirait, à défaut de la constatation à due concurrence d'un tel profit, à ce que le contribuable soit imposé à l'impôt sur les sociétés sur une assiette plus réduite que celle sur laquelle il aurait été imposé s'il avait acquitté régulièrement la taxe sur la valeur ajoutée.

28. Si M. B... soutient que certains rappels de taxe sur la valeur ajoutée ne doivent pas conduire au constat d'un profit sur le Trésor, en se prévalant notamment d'une décision du Conseil d'Etat n° 340024 du 4 février 2015, cette décision concerne l'hypothèse dans laquelle l'administration substitue un taux de taxe sur la valeur ajoutée plus élevé que celui initialement appliqué par le contribuable, alors que les rappels visant le requérant résultent d'une application erronée du régime de franchise en base lui ayant permis d'éluder le paiement de la taxe au détriment du Trésor. Le moyen tiré de ce que la réintégration d'un profit sur le Trésor serait infondée ne peut, par suite, qu'être écarté.

29. En cinquième lieu, M. B... soutient que le taux de charges déductibles retenu par l'administration, à savoir, respectivement pour 2013 et 2014, 48 % et 57 %, n'est pas réaliste et que les données statistiques disponibles dans son secteur d'activité conduisent à une fourchette comprise entre 90 et 95 % de charges. Toutefois, ces seuls éléments statistiques généraux, qui ne se rapportent pas à une activité individuelle de plomberie, ne suffisent pas à établir que le taux de charges de son activité serait supérieur à celui retenu par l'administration, alors qu'il incombe au contribuable rectifié selon la procédure prévue au 1° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales d'établir l'exagération des impositions contestées.

30. En sixième lieu, si le requérant soutient que les impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2015 ont été déchargées alors qu'elles avaient la même origine, la décharge dont il se prévaut, prononcée par jugement n° 1707122 du tribunal administratif de Melun, confirmé par un arrêt 21PA03057 de la Cour administrative d'appel de Paris, résulte seulement de ce que la procédure d'imposition suivie pour 2015, laquelle est distincte de celle en litige, était viciée pour n'avoir pas satisfait aux exigences de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales. Dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté.

S'agissant des intérêts et majorations :

31. En premier lieu, aux termes de l'article 1727 du code général des impôts :

" I. - Toute créance de nature fiscale, dont l'établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. A cet intérêt s'ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code. (...) ". Le taux de l'intérêt de retard, fixé à 0,40 % par mois par le III de cet article jusqu'au 31 décembre 2017, a été ramené à 0,20 % par mois par l'article 55 de la loi du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, dont le III précise que ce nouveau taux s'applique aux intérêts courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020.

32. Par sa décision n° 438849 du 22 juillet 2020, le Conseil d'Etat a rappelé, en premier lieu, que l'intérêt de retard institué par ces dispositions vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales. Il a jugé, en second lieu, que si, ainsi qu'il ressort d'ailleurs des travaux préparatoires ayant précédé l'adoption des dispositions de la loi du 28 décembre 2017 contestées devant lui, l'évolution des taux du marché a conduit, dans les années précédant sa réduction, à une hausse relative de cet intérêt par rapport à ces derniers et en particulier aux taux pratiqués lors de la souscription des emprunts de l'Etat, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié. Il suit de là que l'application des intérêts n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique et que, ne constituant pas une sanction, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir, pour faire obstacle à l'application de l'article 1727 du code général des impôts, des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En outre, le requérant ne saurait davantage soutenir qu'il incomberait au juge de moduler le taux de l'intérêt de retard et, à tout le moins, de le ramener au niveau de l'intérêt légal.

33. En second lieu, aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa version applicable : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai (...) ".

34. Il résulte de l'instruction que M. B... n'a pas répondu dans les délais impartis aux mises en demeure de déposer ses déclarations de BIC et de TVA, lesquelles lui ont été notifiées le 4 févier 2016 dans les conditions exposées au point 11, de sorte que l'administration a assorti les droits mis à sa charge de la majoration prévue par les dispositions légales précitées. D'une part, le requérant n'est pas fondé, en vertu de ce qui a déjà été dit, à soutenir que cette majoration serait infondée en conséquence du mal-fondé des droits rappelés ou du fait du défaut de notification des mises en demeure de déclarer. D'autre part, s'il soutient que cette majoration n'aurait pas été suffisamment motivée du fait de l'absence de mention de son montant dans le corps de la proposition de rectification, il résulte de l'examen de celle-ci qu'elle comporte le quantum de la somme due au titre de la majoration, la circonstance que celui-ci figure dans les " conséquences financières " du document étant à cet égard sans incidence. Enfin, M. B... ne saurait utilement se prévaloir de ce que le critère d'intentionnalité n'est en l'espèce pas établi, un tel critère n'entrant pas dans les prévisions de l'article 1728 du code général des impôts.

35. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge, en droits, majorations et intérêts de retard, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 2013 et 2014.

Sur les frais d'instance :

36. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. B... la somme qu'il lui réclame au titre des frais qu'il a exposés dans l'instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD)

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Perroy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2023.

Le rapporteur,

G.PERROY

La présidente,

H. VINOT

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA0321402


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03214
Date de la décision : 20/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Gilles PERROY
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : DUBAULT BIRI & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-20;21pa03214 ?
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