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20/12/2023 | FRANCE | N°20MA03197

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 20 décembre 2023, 20MA03197


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée à associé unique Les Travaux du Midi a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune d'Aix-en-Provence à lui verser la somme de 414 438,98 euros toutes taxes comprises au titre des travaux supplémentaires qu'elle a réalisés dans le cadre de l'exécution de son marché, assortie des intérêts moratoires capitalisés au taux contractuellement convenu à compter du 20 juin 2015 et de condamner la commune à lui verser l

a somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement.



Par un jugement n° 17100...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée à associé unique Les Travaux du Midi a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune d'Aix-en-Provence à lui verser la somme de 414 438,98 euros toutes taxes comprises au titre des travaux supplémentaires qu'elle a réalisés dans le cadre de l'exécution de son marché, assortie des intérêts moratoires capitalisés au taux contractuellement convenu à compter du 20 juin 2015 et de condamner la commune à lui verser la somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement.

Par un jugement n° 1710038 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 août 2020 et 24 mai 2022, la société Les Travaux du Midi, représentée par Me Engelhard, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 juin 2020 ;

2°) de condamner la commune d'Aix-en-Provence à lui verser la somme de 414 438,98 euros toutes taxes comprises au titre des travaux supplémentaires qu'elle a réalisés dans le cadre de l'exécution de son marché, assortie des intérêts moratoires capitalisés au taux contractuellement convenu à compter du 20 juin 2015 et de condamner la commune à lui verser la somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un arrêt avant dire droit n° 20MA03197 du 19 juin 2023, la Cour, statuant sur l'appel de la société Les Travaux du Midi contre la commune d'Aix-en-Provence, a prescrit, avant de statuer sur la requête de la société Les Travaux du Midi, un avis technique.

Le consultant désigné par la Cour, M. B... A..., a remis son avis le 21 septembre 2023 en l'état. Le 26 septembre suivant, cet avis a été communiqué aux parties, qui ont été invitées à produire leurs observations.

La société Gulizzi Architecte a produit des observations le 9 octobre 2023 qui ont été communiquées le 10 octobre 2023.

La société PLB Energie Conseil a produit des observations le 17 octobre 2023 qui ont été communiquées le 18 octobre suivant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2023, la société Lamoureux Ricciotti Ingénierie, représentée par Me Capinero, conclut, par les mêmes moyens, aux mêmes fins que dans son précédent mémoire.

Elle fait en outre valoir que :

- il ne semble pas que la procédure lui ait été communiquée de sorte qu'elle doit être regardée comme tiers à l'instance ;

- le consultant a confondu les joints de dilation du bloc Sud et du bloc Nord.

Par des mémoires non communiqués, enregistrés les 31 octobre et 6 novembre 2023, la société Gulizzi Architecte, représentée par Me Melloul, conclut, par les mêmes moyens, aux mêmes fins que dans ses précédents mémoires.

Elle fait valoir que les demandes de l'appelante s'apparentent à un enrichissement sans cause.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2023, la commune d'Aix-en-Provence, représentée par Mes Olivier Ortega et Louis, conclut, par les mêmes moyens, aux mêmes fins que dans ses précédents mémoires.

Par ordonnance du 24 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 7 novembre 2023 à 12h00.

Vu :

- l'avis technique enregistré le 21 septembre 2023 ;

- l'ordonnance de taxation du 22 septembre 2023 ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux issu de l'arrêté du 8 septembre 2009 ;

- le décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Renaud Thielé, président assesseur de la 6ème chambre pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Isabelle Ruiz, rapporteure,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de Me Engelhard, pour la société Les Travaux du Midi, de Me Louis, pour la commune d'Aix-en-Provence, de Me Capinero, pour la SARL Lamoureux Ricciotti Ingénierie et la société Artec 64, et de Me Louarn, pour la SARL PLB Energie Conseil.

Considérant ce qui suit :

1. La société Les Travaux du Midi, titulaire du lot n° 1 d'un marché portant sur la construction d'une maison des arts martiaux et de l'escrime, a sollicité une rémunération supplémentaire à raison, en premier lieu, des différentes plus-values induites par la modification du principe constructif des voiles béton, en deuxième lieu, de la plus-value induite par l'élargissement de la section des poutres de reprise des planchers, et, en troisième lieu, de la plus-value induite par la modification du mode de fixation des brise-soleil. Par l'arrêt avant dire droit du 19 juin 2023, la Cour a prescrit, sur le fondement de l'article R. 625-2 du code de justice administrative, un avis technique. Elle a sollicité du consultant qu'il lui indique si la modification des principes de construction des voiles béton et de fixation des brise-soleil était techniquement nécessaire, en réservant la question des poutres de reprise. Le consultant a remis son avis le 21 septembre 2023.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne les voiles béton :

2. Comme le relève le consultant dans son avis technique, si l'article 3.4.1 du cahier des clauses techniques particulières se réfère bien à des " joints de dilatation " et si des structures en béton précontraint sont prévues pour les rives de plancher du bloc Nord en application de l'article 3.4.6 du même cahier, ce cahier ne mentionne à aucun moment l'obligation de recourir à la technique du béton précontraint par post-tension s'agissant des voiles eux-mêmes. Si, par ailleurs, le mémoire technique de la société Les Travaux du Midi, qui est au nombre des pièces contractuelles, indique, dans son point 3.1.d, que " les câbles de post-contrainte seront installés dans un premier temps dans les poutres et les linteaux. Puis, dans un second temps, dès que le béton aura atteint une certaine résistance, les câbles seront tendus ", cette mention, relative aux seules poutres et linteaux, n'est pas de nature à conférer au recours à la technique du béton précontraint par post-tension un caractère contractuel pour la construction des voiles béton de la structure.

3. Au demeurant, il ressort également de l'avis technique de l'expert qu'il n'était pas impossible techniquement de réaliser les voiles en béton précontraint, même si cette solution pouvait être source d'incommodités en termes notamment de gestion du chantier. Il en résulte que le recours à la technique du béton armé à la place de celle du béton précontraint ne revêtait pas un caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art. Si la société Les Travaux du Midi fait valoir que le recours à la technique du béton précontraint devenait techniquement impossible du fait du refus, opposé par le maître d'œuvre, des joints de dilatation, ce refus était lui-même, ainsi que l'admet la société et que le relève l'expert, commandé non par des raisons techniques mais par des raisons d'ordre esthétique.

S'agissant de la pose des brise-soleil :

4. Les pièces du marché, et notamment l'article 3.4.7 du cahier de clauses techniques particulières, ne précisent pas les modalités de pose et de fixation des brise-soleil. Le mémoire technique de la société, qui est au nombre des pièces contractuelles, prévoit quant à lui : " après coulage, les pièces seront placées sur la tranche. Nous pensons ensuite les fix[er] 4 par 4 en usine par un système de lierne béton ou métallique. Le bloc de 4 sera ainsi transporté et posé sur chantier. / Il reposera en pied sur la longrine et en tête, la lierne métallique ou béton sera claveté[e] au reste de la structure (...) ".

5. Il en résulte que le mode de fixation et de pose ainsi prévu par l'appelante n'est mentionné qu'à titre indicatif. Dès lors, les difficultés qu'elle a pu rencontrer pour mettre en œuvre la technique de pose qu'elle a annoncée n'ont pu donner, aux prestations qui en ont découlé, le caractère de travaux supplémentaires par rapport aux prescriptions contractuelles.

6. Au demeurant, si l'appelante invoque le caractère inadapté et impossible à mettre en œuvre du système de pose initialement prévu, elle se borne à évoquer le fait que le changement de système serait dû à un " choix architectural " et une " amélioration " en termes de " tenue de l'ouvrage dans le temps " et que la suppression du joint de reprise était " préférable " à ce qui était prévu. De telles motivations ne permettent pas de déduire que le changement de modalités de pose était indispensable à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

S'agissant des poutres de reprise des planchers :

7. Si la société soutient qu'afin d'assurer la tenue structurelle de l'ouvrage, elle a été dans l'obligation d'augmenter la section des poutres de reprise des planchers, nécessitant un surcroît de 85 m3 de béton représentant un surcoût de 16 006,35 euros hors taxes, elle n'établit ni le caractère supplémentaire de ces travaux par rapport aux prestations contractuelles, ni leur caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

8. Il résulte de ce qui précède que la société Les Travaux du Midi n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Aix-en-Provence. Compte tenu de ce rejet, les appels en garantie des parties sont sans objet.

Sur les dépens :

9. Les frais d'expertise taxés par ordonnance du 22 septembre 2023 et qui s'élèvent à 12 535 euros toutes charges comprises doivent être mis à la charge définitive de la société Les Travaux du Midi, qui est la partie perdante dans la présente instance.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société Les Travaux du Midi dirigées contre la commune d'Aix-en-Provence qui n'est pas, dans la présente instance, la partie tenue aux dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Les Travaux du Midi une somme de 2 000 euros à verser à la commune d'Aix-en-Provence en application de ces dispositions. Il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des autres parties à l'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Les Travaux du Midi est rejetée.

Article 2 : Les frais de l'avis technique taxés par ordonnance du 22 septembre 2023 sont mis à la charge définitive de la société Les Travaux du Midi.

Article 3 : La société Les Travaux du Midi versera une somme de 2 000 euros à la commune d'Aix-en-Provence au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Les Travaux du Midi, à la commune d'Aix-en-Provence, aux sociétés Gulizzi Architecte, Lamoureux Ricciotti Ingénierie, PLB Énergie Conseil et Artec 64, et à la SCP BR Associés, liquidatrice judiciaire de la société SEBA Méditerranée.

Copie en sera adressée à M. B... A..., expert.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2023, où siégeaient :

- M. Renaud Thielé, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère.

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 décembre 2023.

2

N° 20MA03197


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03197
Date de la décision : 20/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-02-01 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat. - Rémunération du co-contractant. - Indemnités. - Travaux supplémentaires.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Isabelle RUIZ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : ENGELHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-20;20ma03197 ?
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