Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 13 juin 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un premier jugement n° 2203405 du 16 janvier 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions relatives à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination et a renvoyé devant une formation collégiale l'examen des conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour.
Par un second jugement n° 2203405 du 20 janvier 2023, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 mai 2023, M. A... B..., représenté par Me Cécile Madeline, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 janvier 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 juin 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou " étudiant ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir, à défaut de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire de ne pas exécuter l'arrêté attaqué ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros hors taxe à verser à Me Madeline au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ladite condamnation valant renonciation au versement de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations des articles 6-5 de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors que sa situation répond à des considérations humanitaires et des motifs exceptionnels de nature à permettre son admission exceptionnelle au séjour ;
- la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour étant illégale, l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2023, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour de rejeter la requête.
Il fait valoir que le moyen soulevé par l'appelant ne sont pas fondés.
M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 13 avril 2023.
Par une ordonnance du 7 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 novembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A... B..., ressortissant algérien né le 24 décembre 2002, est entré en France le 1er septembre 2017 à l'âge de 14 ans, sous couvert d'un visa de court séjour et a été confié à une tante. Le 19 mai 2022, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par l'arrêté du 13 juin 2022, le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Il a été placé en rétention par un arrêté du 11 janvier 2023. Il relève appel du jugement du 20 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, l'arrêté attaqué mentionne avec suffisamment de précisions les circonstances de droit et les considérations de fait, propres à ce dernier, qui constituent le fondement de la décision portant refus de séjour. Le préfet a en outre examiné si l'admission exceptionnelle au séjour de l'intéressé répondait à des considérations humanitaires ou se justifiait au regard de motifs exceptionnels. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien précité : Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. B... était célibataire sans enfant. S'il fait état de son concubinage avec une ressortissante française, le début de la vie commune et le projet d'enfant sont postérieurs à l'arrêté du 13 juin 2022. M. B... fait état de l'arrivée de ses parents et de ses sœurs à compter de l'année 2018 mais il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils seraient en situation régulière, le récépissé de titre de séjour de son père et de sa sœur ayant expiré à la fin de l'année 2022. Dès lors, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et l'arrêté attaqué n'a pas méconnu les stipulations citées au point 3.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable au litige : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire (...) ". Les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et à y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. S'il en résulte que les dispositions précitées, relatives aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens, le préfet peut toujours délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit en appréciant, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été scolarisé en collège puis au lycée jusqu'à la fin de l'année scolaire 2020/2021 ainsi qu'en atteste le proviseur du lycée des métiers Le Corbusier de Saint-Etienne-du-Rouvray en date du 17 janvier 2022. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé, qui a entendu solliciter un titre de séjour portant la mention " étudiant ", aurait obtenu le baccalauréat ou serait inscrit dans une formation. Dès lors, et en toute hypothèse, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour. Par suite, le moyen doit être écarté.
7. En dernier lieu, les moyens dirigés contre la décision de refus de séjour n'étant pas fondés, le moyen excipant de son illégalité à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit, en toute hypothèse, être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juin 2022.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution. L'appelant, qui indique être père d'un enfant de nationalité française né le 25 avril 2023, demande à la cour d'enjoindre à l'administration de ne pas exécuter la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. Toutefois, le jugement attaqué du 20 janvier 2023 n'a pas statué sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et M. B... n'a pas relevé appel du jugement du 16 janvier 2023 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions relatives à l'annulation de cette mesure d'éloignement. Par suite, la demande d'injonction relative à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français est inopérante et ne peut qu'être rejetée.
Sur les frais d'instance :
10. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par Me Madeline, avocate de M. B..., et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Cécile Madeline.
Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 1er décembre 2023 à laquelle siégeaient :
- M. Thierry Sorin, président de chambre,
- M. Marc Baronnet, président-assesseur,
- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2023.
Le rapporteur,
Signé : G. VandenbergheLe président de chambre
Signé : T. Sorin
La greffière,
Signé : A.S. Villette
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière
Anne-Sophie VILLETTE
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N°23DA00871