Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération n° DD/CNAC/2020-02-27-008 en date du 10 avril 2020 de la commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) lui infligeant un blâme et une pénalité financière de 15 000 euros.
Par un jugement n° 2001715 du 6 janvier 2022, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 février 2022, M. A... B..., représenté par la SELARL Ballorin-Baudry, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2001715 du 6 janvier 2022 du tribunal administratif de Dijon ;
2°) de mettre à la charge de la commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) une somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice.
M. B... soutient que :
- la décision attaquée a été signée par le président de la CNAC, dépourvu de délégation de pouvoir pour ce faire ;
- le jugement est entaché d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation car, la décision reposant sur un manquement à son devoir de vérification de la capacité d'exercice des salariés de la société, il n'a pas été informé, par l'un des agents, de l'interdiction temporaire d'exercice dont ce dernier faisait l'objet, ce que le téléservice ne lui permettait pas de vérifier, et ce manquement ne peut pas être doublement sanctionné.
- la sanction prononcée est disproportionnée.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 mai 2022, le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS), ayant pour avocat le cabinet Centaure Avocats, agissant par Me Cano, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge de la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le CNAPS fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 20 novembre 2023 :
- le rapport de M. Gros, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Apacheva, représentant le conseil national des activités privées de sécurité.
Considérant ce qui suit :
1. La société SIG, immatriculée le 7 mai 1997 au registre du commerce et des sociétés de Dijon, titulaire d'une autorisation de fonctionnement et son gérant d'un agrément, a, en novembre 2018, fait l'objet de contrôles par des agents de la délégation territoriale Est du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) à l'issue desquels la commission locale d'agrément et de contrôle (CLAC) Est a infligé un blâme tant à la société qu'à M. A... B..., son gérant, ainsi qu'une pénalité financière de 20 000 euros à la première et de 15 000 euros au second. La commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) a confirmé ces décisions par deux délibérations du 10 avril 2020. M. B... relève appel du jugement du 6 janvier 2022 du tribunal administratif de Dijon qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 10 avril 2020 n° DD/CNAC/2020-02-27-008 le concernant.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En invoquant une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation qu'auraient commises les premiers juges, M. B... ne critique pas la régularité du jugement mais son bien-fondé.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, il ressort des mentions de la délibération de la Commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) contestée du 10 avril 2020 qu'elle a été adoptée par une formation régulièrement composée, conformément aux dispositions de l'article L. 632-2 du code de la sécurité intérieure dans sa rédaction alors applicable. Si le président de la commission, régulièrement élu le 15 mars 2018 ainsi qu'en atteste le procès-verbal produit en défense, a apposé en cette qualité sa signature ainsi que ses nom et prénom sur l'original de la décision, conformément aux dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, cette seule circonstance ne caractérise aucune incompétence de l'auteur de l'acte.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 634-4, alors en vigueur, du code de la sécurité intérieure : " Tout manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles et déontologiques applicables aux activités privées de sécurité peut donner lieu à sanction disciplinaire. Le Conseil national des activités privées de sécurité ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction. / Les sanctions disciplinaires applicables aux personnes physiques et morales exerçant les activités définies aux titres Ier, II et II bis sont, compte tenu de la gravité des faits reprochés : l'avertissement, le blâme et l'interdiction d'exercice de l'activité privée de sécurité ou de l'activité mentionnée à l'article L. 625-1 à titre temporaire pour une durée qui ne peut excéder cinq ans. En outre, les personnes morales et les personnes physiques non salariées peuvent se voir infliger des pénalités financières. Le montant des pénalités financières est fonction de la gravité des manquements commis et, le cas échéant, en relation avec les avantages tirés du manquement, sans pouvoir excéder 150 000 €. Ces pénalités sont prononcées dans le respect des droits de la défense. ". Selon l'article L. 611-1 du même code : " Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu'elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : 1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles ou dans les véhicules de transport public de personnes / (...) / 2° A transporter et à surveiller, jusqu'à leur livraison effective, des bijoux représentant une valeur d'au moins 100 000 euros, des fonds, (...) ou des métaux précieux ainsi qu'à assurer le traitement des fonds transportés (...) ".
5. L'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure impose aux personnes participant à une activité mentionnée à son article L. 611-1, la détention d'une carte professionnelle qui atteste de la satisfaction aux conditions qu'il énumère. Aux termes de l'article R. 631-15 du même code, composante du code de déontologie des personnes physiques ou morales exerçant des activités privées de sécurité : " Vérification de la capacité d'exercer / Les entreprises et leurs dirigeants s'interdisent d'employer ou de commander, même pour une courte durée, des personnels de sécurité et de recherches ne satisfaisant pas aux conditions de qualification professionnelle ou ne possédant pas les autorisations valides requises pour exercer leurs missions / Ils s'assurent de l'adéquation des compétences aux missions confiées ". L'article R. 634-6 de ce code interdit aux personnes faisant l'objet d'une interdiction temporaire d'exercer ou dont la carte professionnelle a été retirée, l'accomplissement d'actes professionnels relevant d'activités privées de sécurité que ce code régit.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est le gérant de la société SIG qui a, du 25 novembre au 15 décembre 2017, employé en tant qu'agent de sécurité privée une personne pourtant interdite d'exercer de telles missions pour une période de deux années courant à compter du 8 avril 2016, sans que M. B... vérifie à l'embauche la satisfaction de la condition tenant à la détention d'une carte professionnelle valide. Le requérant ne saurait s'exonérer de ce manquement, que lui reproche la délibération critiquée, en se prévalant du non-respect par le salarié concerné de son obligation d'information de l'employeur prescrite par l'article R. 631-26 du code de la sécurité intérieure et de l'absence alléguée de mention par le téléservice du CNAPS des refus ou retrait de carte professionnelle.
7. La CNAC a également reproché à M. B..., en qualité de gérant de la société, de ne pas avoir davantage contrôlé la capacité d'exercice de salariés de la société SIG. La décision relève ainsi l'emploi de cinq salariés détenteurs de cartes professionnelles dont la validité avait expiré en cours de contrat et qui ont été tardivement licenciés, l'emploi de deux salariées dont les cartes professionnelles étaient invalides depuis juin 2015 et septembre 2017, prétendument démissionnaires, l'emploi de deux autres salariés ayant exercé leurs fonctions durant les intervalles, respectivement de deux mois et de huit mois, séparant les dates d'expiration de validité et de renouvellement de leurs cartes, l'embauche, le 31 août 2018, pour exercer des missions de surveillance/gardiennage, d'une personne non détentrice d'une carte professionnelle qui ne lui a été délivrée que le 13 septembre suivant. Ces manquements ne sont pas discutés par le requérant qui se borne dans ses écritures à renvoyer indistinctement à la requête d'appel et pièces annexes de la société SIG dont il est le gérant.
8. Ces manquements, qui sont établis, reprochés à M. B... par la délibération en litige, laquelle ne s'appuie pas sur un avertissement et une pénalité financière de 500 euros infligés par une précédente décision du 16 septembre 2016 pour un manquement de M. B... aux prescriptions de l'article R. 631-16 du code de sécurité intérieure, exposait le requérant au prononcé d'une sanction et à l'infliction d'une pénalité financière en application des dispositions visées ci-dessus de l'article L. 634-4 du code de la sécurité intérieure. Eu égard à l'importance de tels manquements, le blâme et la pénalité financière de 15 000 euros qui l'assortit infligés le 10 avril 2020 à M. B... ne présentent pas de caractère disproportionné.
9. Par ailleurs, il résulte des mêmes dispositions visées ci-dessus de l'article L. 634-4 du code de la sécurité intérieure qu'en cas de manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles et déontologiques relatifs aux activités privées de sécurité, la CNAC peut infliger une sanction disciplinaire et une pénalité financière non seulement à une personne physique mais également à une personne morale. Ainsi, le législateur a admis que des sanctions puissent le cas échéant être infligées tant à une société qu'à son dirigeant, dès lors que des manquements leur sont personnellement imputables. Par suite, en sanctionnant la société SIG d'un blâme et d'une pénalité financière de 20 000 euros, et en infligeant par ailleurs à son gérant, M. B..., un blâme assorti d'une pénalité de 15 000 euros, chacune de ces sanctions étant fondée sur des manquements personnellement imputés à la personne concernée, la commission nationale d'agrément et de contrôle n'a pas méconnu le principe " non bis in idem "dès lors que la sanction infligée au gérant, seule en litige dans la présente instance, se fonde sur son rôle de direction et donc sur l'imputabilité personnelle des manquements qui peut lui être opposée, sans que M. B... ait personnellement fait l'objet de plusieurs sanctions cumulées.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de la délibération n° DD/CNAC/2020-02-27-008 du 10 avril 2020 de la commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS).
Sur les frais liés au litige :
11. Le Conseil national des activités privées de sécurité n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions du Conseil national des activités privées de sécurité tendant à l'application de ces mêmes dispositions en mettant à la charge de M. B... une somme de 500 euros.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera au Conseil national des activités privées de sécurité une somme de 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au Conseil national des activités privées de sécurité.
Délibéré après l'audience du 20 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Stillmunkes, président de la formation de jugement,
M. Gros, premier conseiller,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2023.
Le rapporteur,
B. Gros
Le président,
H. Stillmunkes
La greffière,
F. Abdillah
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 22LY00518