Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, ainsi que des pénalités et intérêts de retard correspondant, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014.
Par un jugement n° 2007922/2-2 du 12 septembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 14 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Eric Planchat, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 septembre 2022 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée devant ce tribunal ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dès lors qu'il n'a pas été fait état des chiffres d'affaires, activités, types de cuisine, pourcentages des achats solide et liquide des dix-huit établissements ayant servi de référence pour la fixation du coefficient d'achat revente appliqué à l'activité de " bar, brasserie " ;
- la reconstitution des recettes de l'activité " bar, restauration " est radicalement viciée ;
- la reconstitution des recettes de l'activité de jeux est radicalement viciée.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 31 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 21 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Topin,
- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,
- et les observations de Me Planchat, représentant M. A....
Une note en délibéré présentée pour M. A... a été enregistrée le 29 novembre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. L'entreprise individuelle de bar brasserie tabac, exploitée sous l'enseigne " La Gitane " par M. A... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service a procédé à des rehaussements du résultat des exercices 2012, 2013 et 2014 après avoir constaté le défaut de caractère probant de la comptabilité et procédé à une reconstitution de recettes. M. A... s'est vu en conséquence notifier des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2012, 2013 et 2014. Par un jugement du 12 septembre 2022 dont M. A... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la précédente procédure : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Lorsque l'administration fiscale entend fonder un redressement sur des éléments de comparaison issus de données chiffrées provenant d'autres entreprises, elle doit, pour assurer le caractère contradictoire de la procédure, sans méconnaître le secret professionnel protégé par l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, désigner nommément ces entreprises mais ne fournir au contribuable que des moyennes ne lui permettant pas de connaître, fût-ce indirectement, les données propres à chacune d'elles.
3. Il résulte de la proposition de rectification du 18 décembre 2015 que pour reconstituer le chiffre d'affaires de l'activité " bar, brasserie " de l'établissement et déterminer le coefficient d'achat/revente, l'administration s'est référée à l'activité de dix-huit établissements dont elle a fourni la dénomination et l'adresse exacte. La proposition adressée à la société requérante était ainsi suffisamment motivée et lui a d'ailleurs permis, à l'occasion des observations qu'elle a présentées de discuter utilement de la pertinence des établissements ayant servi de comparaison. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit ainsi être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions ou le comité mentionnés à l'article L. 59 (...) est saisi d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission (...). / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...) ".
5. En premier lieu, pour reconstituer le chiffre d'affaires de l'entreprise alors que la comptabilité a été écartée à raison de son défaut de caractère probant, l'administration a utilisé la méthode de " comparaison " en appliquant un coefficient moyen d'achat/revente de 3,54 dégagé à partir de douze établissements similaires. Si M. A... soutient que l'administration ne pouvait pas fonder la reconstitution en se référant à l'activité d'autres établissements similaires au sien dès lors qu'elle disposait des factures d'achat des solides et liquides ainsi que de la carte du menu au cours de la vérification de comptabilité, il résulte de l'instruction que la carte des menus, produite postérieurement aux opérations de vérification, ne présente aucun caractère probant des prix pratiqués sur la période vérifiée. M. A... n'établit pas ainsi le caractère radicalement vicié de la méthode de reconstitution appliquée. Par ailleurs, il ne démontre pas non plus le caractère exagéré des impositions mises à sa charge en se bornant à soutenir qu'il n'a pas été tenu compte des pertes et des offerts à hauteur de 10 %, proportion dont il ne justifie pas, alors que le coefficient de comparaison retenu inclut déjà les pertes et les offerts et que l'administration a, par ailleurs, défalqué des achats 9 % en 2012, 13,66 % en 2013 et 8,01 % en 2014 au titre des consommations non facturées.
6. En second lieu, l'administration a reconstitué la comptabilité de l'activité de vente des jeux de grattage en se fondant sur les données transmises par la Française des Jeux dans l'exercice du droit de communication faisant état de 28 830 euros versés en 2012 à l'entreprise au titre des commissions perçues sur la vente de jeux instantanés alors que seuls 14 421 euros avaient été déclarés par l'entreprise sur cet exercice. Elle fait valoir, sans être contestée, que, au regard du fonctionnement de la Française des jeux, les produits afférents aux ventes sont acquis et encaissés au fur et à mesure des ventes effectuées. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration s'est fondée sur des encaissements alors que les règles propres à une comptabilité d'engagement devaient s'appliquer.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant 1'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40% en cas de manquement délibéré (...) ".
8. Il résulte de l'instruction que, pour assortir les droits litigieux de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration s'est fondée sur le fait que, dans le cadre d'une activité exercée à titre individuel, M. A... ne pouvait pas ignorer qu'il s'abstenait de déclarer des montants importants de façon régulière et récurrente, les minorations en base s'élevant à 101 556 euros en 2012, 57 561 euros en 2013 et 98 084 euros en 2014, et représentant respectivement une dissimulation de 31,86 %, 21,20 % et 29,32 % du chiffre d'affaires global reconstitué. L'administration a ainsi établi le caractère délibéré du manquement. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts doit donc être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Topin, présidente,
- Mme Jayer, première conseillère,
- Mme Fullana, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2023.
La présidente-rapporteure,
E. TOPINL'assesseure la plus ancienne,
M-D. JAYER
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA04830