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13/12/2023 | FRANCE | N°22PA04675

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 13 décembre 2023, 22PA04675


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011.



Par un jugement n° 2021878/2-2 du 27 juin 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête enregistrée le 31 octob

re 2022, M. A..., représenté par Me Philippe Morisset et Me Lucas Lopez, demande à la Cour :



1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 2021878/2-2 du 27 juin 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Philippe Morisset et Me Lucas Lopez, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 juin 2022 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la proposition de rectification du 12 septembre 2013 n'a pas été régulièrement notifiée ;

- l'administration n'a pas communiqué au cours de l'instance contentieuse les documents sur lesquels elle s'est fondée pour imposer 20 000 euros au titre des salaires versés en 2010 par la société Business Accelerator en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- les salaires ne sont pas imposables en France en application de l'article 22 de la convention fiscale franco-tunisienne ;

- les revenus de capitaux mobiliers ne sont pas imposables en France en application de l'article 28 de cette même convention.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 16 mars 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 17 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 2 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention entre la France et la Tunisie tendant à éliminer les doubles impositions et à établir des règles d'assistance mutuelle administrative en matière fiscale du 28 mai 1973 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Topin,

- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la société à responsabilité limitée Business Accelerator, dont il est le gérant et le seul salarié, M. A... s'est vu notifier, par un courrier du 12 septembre 2013, selon une procédure de taxation d'office, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu pour un montant total de 20 924 euros au titre des années 2010 et 2011, en conséquence du rehaussement de ses bases imposables de 20 000 euros dans la catégorie des traitements et salaires au titre de l'année 2010, et de 49 368 euros dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2011. Par un jugement du 27 juin 2022 dont M. A... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu et des prélèvement sociaux en droits et pénalités au titre des années 2010 et 2011.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la précédente procédure : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. Cette notification est interruptive de prescription. Lorsque le contribuable est taxé d'office en application de l'article L. 69, à l'issue d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut être saisie dans les conditions prévues à l'article L. 59. (...) Les dispositions du présent article ne sont pas applicables dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 67. ". Et aux termes de l'article L. 67 de ce même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. Toutefois, le délai de régularisation est fixé à quatre-vingt-dix jours pour la présentation à l'enregistrement de la déclaration mentionnée à l'article 641 du code général des impôts. / Il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable (...) a transféré son domicile fiscal à l'étranger sans déposer sa déclaration de revenus (...). ".

3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. A... a fait savoir à l'administration durant la vérification de la société Business Accelerator qu'il n'était plus domicilié en France. L'administration, qui l'a alors sollicité, ainsi que l'article 164 D du code général des impôts lui en donne la possibilité, afin qu'il désigne une adresse en France où les communications relatives à l'assiette, au recouvrement et au contentieux de l'impôt pourraient être adressées, a fait état dans la proposition de rectification de ce que M. A... avait indiqué le nom et l'adresse de son avocate à cette fin. La notification des rehaussements envisagés a ainsi été adressée à cette adresse. Si M. A... soutient qu'il n'a pas désigné cette personne à cette fin et que l'administration ne justifie pas de cette désignation, l'administration en tout état de cause n'était pas tenue de lui notifier les rehaussements envisagés en application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'il est constant que M. A... a transféré son domicilie à l'étranger sans déposer sa déclaration de revenus. Par ailleurs, l'irrégularité alléguée de la notification des rehaussements n'a privé M. A... d'aucune garantie susceptible d'exercer une influence sur la décision d'imposition, poursuivie suivant une procédure de taxation d'office. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales doit par suite être écarté.

4. En second lieu, contrairement à ce que soutient M. A..., l'absence de production des documents ayant servi au rehaussement de ses revenus salariaux au titre de l'année 2010 ne méconnaît pas le principe du contradictoire de la procédure juridictionnelle dès lors que ce principe implique que le juge statue au vu des pièces qui ont été communiquées aux parties. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait méconnu ce principe en ne produisant pas les documents obtenus de tiers au cours de l'instance contentieuse.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'imposition en France :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " (...) [les personnes] dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française ".

6. Il est constant que les revenus salariaux et de capitaux mobiliers sur lesquels M. A... a été imposé provenaient de la société Business Accelerator dont le siège social était en France et étaient donc de source française. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a retenu que ces sommes étaient imposables en France en application de l'article 4 A du code général des impôts.

7. En second lieu, si M. A... qui fait valoir que l'administration n'a pas justifié devant le tribunal des documents lui ayant permis de considérer qu'il avait perçu 20 000 euros de salaires en méconnaissance du principe du contradictoire, il résulte de la proposition de rectification du 9 septembre 2013 adressée à la société Business Accelerator et de celle du 12 septembre 2013 adressée au contribuable que l'administration a constaté l'existence d'une écriture comptable de versement de salaires à un bénéficiaire non identifié mais qu'elle a considéré comme devant être nécessairement M. A... puisque la société n'avait pas de salarié. Il appartenait par conséquent à M. A..., qui ne conteste pas la réalité de cette écriture comptable et qui supporte la charge de la preuve, d'apporter tout élément de nature à établir qu'il n'en n'avait pas été le bénéficiaire. Par suite le moyen tiré de ce que l'administration aurait méconnu le principe du contradictoire en ne produisant pas les documents établissant que la société lui aurait versé les salaires en litige doit être écarté.

En ce qui concerne l'application de la convention bilatérale :

8. Aux termes de l'article 14 de la convention franco-tunisienne : " 1. Les dividendes payés par une société qui est résidente d'un Etat contractant à une personne résidente de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. / 2. Par ailleurs, sous réserve des dispositions de l'article 15, ces dividendes peuvent être imposés dans l'Etat contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident, et selon la législation de cet Etat ". Aux termes du 1 de l'article 22 de cette convention : " Les salaires, traitements et autres rémunérations similaires qu'un résident d'un Etat contractant reçoit au titre d'un emploi salarié ne sont imposables que dans cet Etat à moins que l'emploi ne soit exercé dans l'autre Etat contractant. Si l'emploi y est exercé, les rémunérations reçues à ce titre sont imposables dans cet autre État. ". Aux termes de l'article 28 de la même convention : " Les éléments du revenu d'un résident d'un Etat contractant qui ne sont pas expressément mentionnés dans les articles précédents de la présente Convention ne sont imposables que dans cet Etat. "

9. M. A..., qui affirme avoir été domicilié fiscalement en Tunisie en 2010 et 2011, soutient que les salaires et revenus de capitaux mobiliers perçus au titre de ces années ne pouvaient être imposés en France en application des articles 22 et 28 de la convention fiscale franco-tunisienne. Toutefois, les stipulations des articles 14.2 et 22 de cette convention prévoient respectivement d'une part la possibilité d'imposer en France les dividendes versés par une société établie en France à un résident fiscal tunisien et d'autre part attribue de manière exclusive l'imposition en France des salaires versés en contrepartie d'une activité salariée en France. M. A... ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 28 de la convention dès lors que les revenus de capitaux mobiliers et salaires sont régis par les articles 14 et 22. Il en résulte que M. A... n'est pas fondé à soutenir que les stipulations des articles 22 et 28 de la convention franco-tunisienne faisaient obstacle à l'imposition de ces revenus en France.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Topin, présidente,

- Mme Jayer, première conseillère,

- Mme Fullana, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2023.

La présidente-rapporteure,

E. TOPINL'assesseure la plus ancienne,

M-D. JAYER

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04675


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04675
Date de la décision : 13/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TOPIN
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TOPIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : SELARL AVODIA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-13;22pa04675 ?
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