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07/12/2023 | FRANCE | N°22LY03240

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 07 décembre 2023, 22LY03240


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 25 mars 2022 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a abrogé son attestation de demande d'asile et lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans, et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte et de supprimer son signalement

aux fins de non-admission du système d'information A... ou, à défaut, de suspendre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 25 mars 2022 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a abrogé son attestation de demande d'asile et lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans, et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte et de supprimer son signalement aux fins de non-admission du système d'information A... ou, à défaut, de suspendre l'exécution de la décision d'obligation de quitter le territoire français jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ou jusqu'à la date de notification de l'ordonnance.

Par un jugement n° 2201129 du 15 septembre 2022, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Fauveau Ivanovic, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de supprimer son signalement aux fins de non-admission du système d'information dit " A... " ;

3°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, une somme de 1 800 euros au titre des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions portant abrogation de son attestation de demandeur d'asile et refus de séjour sont insuffisamment motivées ; elles sont entachées d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ; elles méconnaissent les articles L. 542-2 1° d) et L. 531-27 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de menace grave à l'ordre public justifiée et compte tenu des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refusant un délai de départ volontaire, et portant interdiction de retourner sur le territoire français, sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité des décisions portant abrogation de son attestation de demandeur d'asile et refus de séjour.

Par un mémoire enregistré le 20 octobre 2023, le préfet de la Côte-d'Or, représenté par Me Rannou, conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge de M. B... au titre des frais du litige.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 décembre 2022.

Une ordonnance du 23 octobre 2023 a fixé la clôture de l'instruction au 13 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatif au statut des réfugiés ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averti du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Chassagne, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant de l'ancienne République islamique d'Afghanistan, déclare être né le 17 août 1991 à Nangarhar et être entré sur le territoire français pour la dernière fois le 1er octobre 2020, après avoir séjourné essentiellement en Autriche depuis 2015. M. B... a présenté une demande d'asile, qui a été enregistrée le 30 octobre 2020. Malgré la conduite d'une procédure de transfert de l'intéressé auprès des autorités de la République d'Autriche, la République française étant devenue responsable de cette demande, une nouvelle attestation de demande d'asile lui a été délivrée le 9 juin 2021. Cette demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 13 décembre 2021, dans le cadre de la procédure accélérée. Le préfet de la Côte-d'Or, par un arrêté du 25 mars 2022, a constaté qu'il n'était pas autorisé à résider en France au titre de l'asile et a abrogé son attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Dijon qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que les décisions constatant que l'intéressé n'était pas autorisé à résider en France au titre de l'asile et portant abrogation de son attestation de demande d'asile, seraient insuffisamment motivées et entachées d'un défaut d'examen sérieux de sa situation, doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 542-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile : " En l'absence de recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin à la notification de cette décision. / Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci. ". Aux termes de l'article L. 542-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : / 1° Dès que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris les décisions suivantes : / d) une décision de rejet dans les cas prévus à l'article L. 531-24 et au 5° de l'article L. 531-27 ; / (...) / Les dispositions du présent article s'appliquent sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. ". Aux termes de l'article L. 531-27 de ce code : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue en procédure accélérée à la demande de l'autorité administrative chargée de l'enregistrement de la demande d'asile dans les cas suivants : / (...) / 5° La présence en France du demandeur constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'État ; / (...). ". Aux termes de l'article L. 531-31 de ce code : " La décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides mentionnée à l'article L. 531-26, celle de l'autorité administrative mentionnée à l'article L. 531-27, ou le refus de l'office de faire application de l'article L. 531-28 ne peut pas faire l'objet, devant les juridictions administratives de droit commun, d'un recours distinct du recours qui peut être formé, en application de l'article L. 532-1, devant la Cour nationale du droit d'asile à l'encontre de la décision de l'office. ".

4. D'abord, si M. B... soutient que les décisions constatant qu'il n'était pas autorisé à résider en France au titre de l'asile et portant abrogation de son attestation de demande d'asile méconnaîtraient les articles L. 542-2 1° d) et L. 531-27 5° précités, au motif que sa présence en France ne constituerait pas une menace grave à l'ordre public qui aurait permis à l'OFPRA de se prononcer sur sa demande d'asile en procédure accélérée, ce qui ferait obstacle à ce que son droit au maintien sur le territoire prenne fin à la date de la décision de ce dernier, en toute hypothèse, il résulte des dispositions de l'article L. 531-1 ci-dessus citées que la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 531-27 ne peut être critiquée qu'à l'occasion d'un recours devant la CNDA à l'encontre de la décision de l'OFPRA, et pas d'un recours devant les juridictions de droit commun. Ensuite, à supposer même que M. B... aurait entendu se prévaloir directement, à l'encontre de ces décisions en litige, des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, celles-ci n'ont toutefois, ni pour objet, ni pour effet, de l'éloigner ou d'entraîner, par elles-mêmes, son retour en Afghanistan, si bien qu'il ne saurait se prévaloir utilement de ces stipulations. Les moyens ne peuvent donc qu'être écartés comme inopérants.

5. En dernier lieu, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refusant un délai de départ volontaire, et portant interdiction de retour sur le territoire français, ne sont pas illégales par voie de conséquence de l'illégalité des décisions constatant que l'intéressé n'était pas autorisé à résider en France au titre de l'asile et portant abrogation de son attestation de demande d'asile. Les moyens ne sauraient donc être admis.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Sa requête doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme au titre des frais exposés par le préfet de la Côte-d'Or et non compris dans les dépens, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le préfet de la Côte-d'Or au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.

Le rapporteur,

J. ChassagneLe président,

V.-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03240

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03240
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : IVANOVIC FAUVEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;22ly03240 ?
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