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07/12/2023 | FRANCE | N°21MA03728

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 07 décembre 2023, 21MA03728


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société SAUR a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison de son établissement situé à Manosque.



Par un jugement n° 2001846 du 29 juin 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et un mémoire, enr

egistrés les 30 août 2021 et 31 janvier 2022, la société SAUR, représentée par Me David, demande à la Cour :



1°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SAUR a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison de son établissement situé à Manosque.

Par un jugement n° 2001846 du 29 juin 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 août 2021 et 31 janvier 2022, la société SAUR, représentée par Me David, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2001846 du 29 juin 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge demandée au tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation au sens du 11° de l'article 1382 du code général des impôts ne doivent pas être inclus dans la base de calcul de la cotisation foncière des entreprises ;

- l'administration devait appliquer la méthode d'évaluation prévue au 3° de l'article 1500 du code général des impôts.

Par des mémoires en défense enregistrés les 2 décembre 2021 et 13 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les immobilisations devaient être l'objet d'une évaluation par appréciation directe ;

- la société SAUR ne justifie pas des équipements relevant du 11° de l'article 1382 du code général des impôts.

Par une ordonnance du 27 septembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Platillero,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société SAUR a été imposée à la cotisation foncière des entreprises au titre de l'année 2018 à raison de son établissement situé à Manosque, dans lequel elle exploite une usine de traitement des eaux usées. Elle fait appel du jugement du 29 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'imposition laissée à sa charge à la suite de l'admission partielle de sa réclamation, à concurrence de 177 957 euros.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : " I. La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales (...) qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée (...) ". Aux termes de l'article 1467 du même code : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11°, 12° et 13° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période (...) ". Aux termes de l'article 1382 de ce code : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : (...) 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 ". Aux termes de l'article 1381 dudit code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; 2° Les ouvrages d'art et les voies de communication (...) ". Aux termes de l'article 1500 de ce code, dans sa rédaction applicable : " Les bâtiments et terrains industriels sont évalués : 1° selon les règles fixées à l'article 1499 lorsqu'ils figurent à l'actif du bilan de leur propriétaire ou de leur exploitant, et que celui-ci est soumis aux obligations définies à l'article 53 A ; 2° Selon les règles prévues à l'article 1499, lorsqu'ils figurent à l'actif du bilan d'une entreprise qui a pour principale activité la location de ces biens industriels ; 3° Selon les règles fixées à l'article 1498, lorsque les conditions prévues aux 1° et 2° du présent article ne sont pas satisfaites ".

3. La commune de Manosque a confié à la société SAUR, par un contrat du 15 décembre 2005, l'exploitation du service public de l'assainissement collectif, comprenant la collecte, le transport et l'épuration des eaux usées. Les compétences en matière d'eau potable et d'assainissement ayant été transférées au 1er janvier 2013 à la communauté Durance Lubéron Verdon Agglomération, la société SAUR a conclu avec cette collectivité un avenant n° 5 du 13 décembre 2017, visant notamment à tenir compte de la modification des ouvrages du service consistant en l'extension de la station de l'usine de traitement des eaux usées située au sein de la zone industrielle Saint-Maurice à Manosque, dont les travaux de construction ont eu lieu entre 2014 et 2017. A la suite du dépôt au centre des impôts fonciers de Digne-les-Bains par la commune propriétaire d'une déclaration du 6 novembre 2017 informant l'administration fiscale de cette construction, la cotisation foncière des entreprises en litige au titre de l'année 2018 a été établie au nom de la société SAUR.

En ce qui concerne la base de la cotisation foncière des entreprises :

4. Pour apprécier la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.

5. Si la société SAUR soutient que les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation au sens du 11° de l'article 1382 du code général des impôts ne doivent pas être inclus dans le calcul de la base de la cotisation foncière des entreprises, elle se borne à produire le décompte général et définitif du marché relatif à la construction en cause qui fait état, sans aucune autre précision, de la distinction de travaux d'équipements et de travaux de génie civil, sans apporter aucun élément permettant d'apprécier la consistance des travaux qui ont été réalisés et regroupés sous le vocable d'équipements dans le cadre de ce décompte. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction qu'auraient été pris en compte, dans le calcul de la cotisation foncière des entreprises en litige, des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation spécifiquement adaptés à l'activité exercée dans l'établissement industriel et n'étant pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381. A cet égard, si la société SAUR fait valoir que la déclaration déposée par la commune de Manosque " souffrirait d'incohérences " et qu'il appartenait ainsi à l'administration " d'obtenir des éclaircissements sur les éléments déclarés par la collectivité ", elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations, alors qu'il résulte du contrat liant les parties qu'un inventaire des ouvrages mis à la disposition de la requérante lui a été remis, qu'il lui était loisible d'exposer la consistance des biens affectés à l'exploitation, et qu'elle n'a à aucun moment saisi la collectivité délégante d'une quelconque difficulté.

6. Par ailleurs, compte tenu de ce qui précède, la société SAUR n'est pas fondée à se prévaloir de l'instruction administrative référencée BOI-IF-CFE-20-20-10-10 du 12 septembre 2012 n° 10, qui ne comporte pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il lui a été fait application.

En ce qui concerne la méthode d'évaluation :

7. Il résulte des dispositions précitées de l'article 1500 du code général des impôts que, dès lors que le propriétaire ou l'exploitant de bâtiments et de terrains industriels passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est soumis aux obligations déclaratives définies à l'article 53 A de ce code et que ces immobilisations industrielles figurent à l'actif de son bilan, la valeur locative de ces immobilisations est établie selon les règles fixées à l'article 1499 du code. Par ailleurs, l'article 393-1, devenu 621-8, du plan comptable général, relatif aux immobilisations faisant l'objet d'une concession de service public ou de travaux publics, prévoit que " Les biens mis dans la concession par le concédant ou par le concessionnaire sont inscrits à l'actif du bilan de l'entité concessionnaire ". Ces dispositions s'appliquent aux contrats de délégation de service public mettant à la charge du délégataire les investissements correspondant à la création ou à l'acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, notamment les investissements de premier établissement.

8. La société SAUR soutient que l'administration ne pouvait appliquer la méthode comptable d'évaluation prévue à l'article 1499 du code général des impôts mais devait appliquer une méthode d'appréciation directe, prévue à l'article 1498 de ce code, dès lors que le contrat en litige est un contrat d'affermage et non un contrat de délégation de service public, ce qu'admet l'administration, compte tenu de la fourniture, pour la première fois en appel, du contrat de délégation, par affermage, du service d'assainissement collectif conclu entre la commune de Manosque et la SA Saur. En effet, il résulte de l'instruction que l'objet du contrat du 15 décembre 2005, prenant effet le 1er janvier 2006 et arrivant à échéance, en vertu de l'avenant du 13 décembre 2017, le 31 décembre 2018, consiste en la remise d'ouvrages construits par la collectivité publique, à charge pour la société SAUR de les exploiter et de les entretenir, en limitant en son article 7 les travaux imputables à l'exploitant à la surveillance, l'entretien, le renouvellement et le bon fonctionnement des équipements existants nécessaires au service, l'article 8 prévoyant par ailleurs qu'une part de la redevance d'assainissement revenant à la collectivité est destinée au financement des investissements engagés. Ce contrat était ainsi un contrat d'affermage. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, la société SAUR ne fournit aucun élément qu'elle seule est en mesure de produire permettant d'apprécier la consistance des biens passibles d'une taxe foncière, qu'ils soient exonérés ou non, les immobilisations à prendre en compte dans les bases taxables demeurant inconnues. En outre, le ministre fait valoir sans être contredit que le terrain d'assiette du bien en litige n'a pas fait l'objet d'une évaluation foncière, circonstance favorable à la société SAUR. Dans ces conditions, dans les circonstances de l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction que l'application de la méthode d'appréciation directe pour déterminer la valeur locative de l'extension de l'usine de traitement des eaux usées située au sein de la zone industrielle Saint-Maurice à Manosque serait de nature à entraîner une réduction de l'imposition primitive en litige.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société SAUR n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation de ce jugement et de décharge de l'imposition en litige doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société SAUR demande au titre des frais qu'elle a exposés.

D E C I D E :

Article 1 : La requête de la société SAUR est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée SAUR et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 décembre 2023.

2

N° 21MA03728


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03728
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : Atéléia Société d'Avocats

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;21ma03728 ?
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