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07/12/2023 | FRANCE | N°21LY02593

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 07 décembre 2023, 21LY02593


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



Mme G... F... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du conseil municipal de Talant (Côte-d'Or) du 27 juin 2019 portant désaffectation et déclassement du domaine public communal de la portion sud de la rue Sergent B... et cession de cette parcelle à M. E..., ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux du 2 août 2019.

Par jugement n° 1903301 du 3 juin 2021, le tribunal a rejeté sa demande.





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rocédure devant la cour



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 juillet 2021 et le 8 mai 2023, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme G... F... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du conseil municipal de Talant (Côte-d'Or) du 27 juin 2019 portant désaffectation et déclassement du domaine public communal de la portion sud de la rue Sergent B... et cession de cette parcelle à M. E..., ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux du 2 août 2019.

Par jugement n° 1903301 du 3 juin 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 juillet 2021 et le 8 mai 2023, Mme F..., représentée par Me Gourinat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cette délibération ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Talant la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions contestées méconnaissent les articles L. 141-1 et L. 141-3 du code de la voirie routière prescrivant la réalisation d'une enquête publique, dès lors qu'elles portent atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par la rue Sergent B... ;

- elles sont entachées d'un détournement de procédure, dès lors qu'elles ont pour objet de garantir la préservation de l'ordre public ;

- les dispositions de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues, dès lors que la rue Sergent B... et l'aire de retournement située à son terme demeurent affectées à l'usage direct du public en dépit des barrières et des enrochements déposés par la commune, respectivement, en 2014 et 2019 ;

- les décisions attaquées, qui ont pour objet la seule satisfaction d'intérêts privés, sont entachées de détournement de pouvoir.

Par des mémoires enregistrés le 24 août 2021 et le 3 juillet 2023, M. C... E..., représenté par Me Néraud, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de Mme F... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dispositions des articles L. 141-1 et L. 141-3 du code de la voirie routière prescrivant la réalisation d'une enquête publique ne sont pas méconnues, dès lors que la rue Sergent B..., qui constitue une impasse, n'assure aucune fonction de desserte ou de circulation ;

- les dispositions de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques n'ont pas été méconnues, dès lors que l'extrémité de l'impasse Sergent B..., dont l'accès a été interdit pas l'enrochement et le remblai déposés avant les décisions attaquées, ne présente aucune utilité publique ;

- la délibération en litige, qui s'inscrit dans un projet de réaménagement du belvédère, répond à un objectif d'intérêt général.

Par des mémoires enregistrés le 28 décembre 2022 et le 7 juillet 2023, la commune de Talant, représentée par Me Grillon, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de Mme F... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dispositions des articles L. 141-1 et L. 141-3 du code de la voirie routière prescrivant la réalisation d'une enquête publique ne sont pas méconnues, dès lors que la rue Sergent B..., n'est plus utilisée en tant que voie de desserte communale ;

- les dispositions de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques n'ont pas été méconnues, dès lors que l'extrémité de l'impasse Sergent B..., dont l'accès a été interdit pas l'enrochement et le remblai déposés avant les décisions attaquées, ne présente aucune utilité publique ;

- la délibération en litige, qui s'inscrit dans un projet de réaménagement du belvédère, répond à un objectif d'intérêt général.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de la voirie routière ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Evrard,

- les conclusions de M. D...,

- et les observations de Me Grillon pour la commune de Talant, et celles de Me Néraud pour M. E....

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 27 juin 2019, le conseil municipal de la commune de Talant (Côte-d'Or) a, d'une part, constaté la désaffectation du domaine public communal d'une portion de 250 mètres carrés de l'extrémité sud de la rue Sergent B... et décidé de procéder à son déclassement et, d'autre part, approuvé sa cession à M. E..., propriétaire riverain, au prix de 3 300 euros. Mme F..., également propriétaire riveraine, relève appel du jugement du tribunal administratif de Dijon du 3 juin 2021 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette délibération, ensemble la décision implicite de rejet née du silence conservé par la commune à la suite de son recours gracieux du 2 août 2019.

2. Aux termes de l'article L. 141-3 du code de la voirie routière : " Le classement et le déclassement des voies communales sont prononcés par le conseil municipal. Ce dernier est également compétent pour l'établissement des plans d'alignement et de nivellement, l'ouverture, le redressement et l'élargissement des voies. Les délibérations concernant le classement ou le déclassement sont dispensées d'enquête publique préalable sauf lorsque l'opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par la voie.".

3. Il ressort des pièces du dossier que la rue Sergent B... est, sur la portion qui se prolonge après l'intersection de cette voie avec l'avenue des Marronniers, une rue en impasse ne desservant aucune habitation. Toutefois, cette portion de voie, en dépit de son obstruction par des blocs de pierre au-delà de l'entrée de la propriété de Mme F... et de la pose de remblai, est utilisée par les piétons pour accéder à une zone de promenade aménagée, constituant un belvédère sur le lac du Chanoine A... et comportant des garde-corps et des bancs. La circonstance que les usagers de la voie puissent, pour certains d'entre eux, être à l'origine de nuisances sonores et de dépôt de déchets est, par elle-même, sans incidence sur les fonctions de desserte de ce belvédère assurées par la rue Sergent B.... Dans ces conditions, le déclassement du domaine public de la partie finale de cette rue en vue de sa cession à un propriétaire privé porte une atteinte aux fonctions de desserte assurées par la voie. Il est constant que le déclassement ainsi opéré n'a pas été précédé de l'enquête publique exigée, dans cette hypothèse, par l'article L. 141-3 du code de la voirie routière. A cet égard, la commune de Talant ne peut utilement faire état de la réunion qu'elle a organisée avec les riverains le 20 juin 2018, laquelle ne saurait tenir lieu d'une telle enquête publique. Dans ces conditions, la délibération du conseil municipal de Talant du 27 juin 2019 portant désaffectation et déclassement du domaine public d'une partie de la rue Sergent B... et cession à M. E... a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière. Par suite, Mme F... est fondée à en demander l'annulation, ainsi que celle du rejet implicite de son recours gracieux du 2 août 2019.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme F... est fondée à demander l'annulation du jugement n° 1903301 du tribunal administratif de Dijon du 3 juin 2021 et de la délibération du conseil municipal de Talant du 27 juin 2019 portant désaffectation et déclassement du domaine public d'une partie de la rue Sergent B... et cession à M. E... ainsi que le rejet implicite du recours gracieux du 2 août 2019.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme F..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Talant et M. E... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Talant une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme F....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1903301 du tribunal administratif de Dijon du 3 juin 2021 ainsi que la délibération du conseil municipal de Talant du 27 juin 2019 portant désaffectation et déclassement du domaine public d'une partie de la rue Sergent B... et cession à M. E... et la décision implicite de rejet du recours gracieux de Mme F... du 2 août 2019 sont annulés.

Article 2 : La commune de Talant versera à Mme F... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... F..., à M. C... E... et à la commune de Talant.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evrard, présidente de la formation de jugement,

Mme Psilakis, première conseillère,

Mme Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.

La présidente-rapporteure,

A. EvrardL'assesseure la plus ancienne,

Ch. Psilakis

Le greffier en chef,

C. Gomez

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

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N°21LY02593


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02593
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-01 Domaine. - Domaine public. - Consistance et délimitation.


Composition du Tribunal
Président : Mme EVRARD
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SCP CLEMANG

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;21ly02593 ?
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