La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2023 | FRANCE | N°21BX04203

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 07 décembre 2023, 21BX04203


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la délibération du 2 octobre 2019 par laquelle le conseil municipal de Saint-Sauvant a autorisé la cession de l'immeuble situé 2 rue de l'Enfer à la société d'économie mixte immobilière de la Saintonge (SEMIS) pour un prix de 188 700 euros.



Par un jugement n° 2000738 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.



Procédure de

vant la cour :



Par une requête enregistrée le 16 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Denis, dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la délibération du 2 octobre 2019 par laquelle le conseil municipal de Saint-Sauvant a autorisé la cession de l'immeuble situé 2 rue de l'Enfer à la société d'économie mixte immobilière de la Saintonge (SEMIS) pour un prix de 188 700 euros.

Par un jugement n° 2000738 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Denis, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Saint-Sauvant du 2 octobre 2019 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Sauvant une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conseillers municipaux ont été, préalablement à la délibération litigieuse, mal informés quant aux conséquences de la cession de l'immeuble sur les finances de la commune, ce qui méconnait l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu que le prix de vente, inférieur à la valeur de l'immeuble, n'entachait pas d'illégalité la délibération en cause.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 octobre 2022, la commune de Saint-Sauvant, représentée par Me Cadro, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Kolia Gallier,

- les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,

- et les observations de Me Cadro, représentant la commune de Saint-Sauvant.

Considérant ce qui suit :

1. Le conseil municipal de Saint-Sauvant a, par une délibération du 2 octobre 2019, autorisé le maire à céder, pour un prix de 188 700 euros, un immeuble situé 2 rue de l'Enfer à la société d'économie mixte immobilière de la Saintonge (SEMIS), qui en était jusqu'alors locataire en vertu d'un contrat de bail emphytéotique conclu avec la commune le 22 mai 1991. M. B... relève appel du jugement du 16 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.

2. Aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ". L'article L. 2241-1 du même code prévoit : " Le conseil municipal délibère sur la gestion des biens et les opérations immobilières effectuées par la commune (...) ".

3. M. B... soutient que les conseillers municipaux ont été induits en erreur par le maire de la commune qui leur a indiqué, à tort, que " la dette ne pouvait qu'augmenter alors que la simulation présentée par la SEMIS indique le contraire ". Aucune des pièces au dossier ne permet toutefois de corroborer que de telles informations auraient été données aux conseillers municipaux, la délibération en cause mentionnant seulement l'objectif " d'une meilleure gestion des immeubles actuellement sous baux emphytéotiques entre la commune de Saint-Sauvant et la SEMIS ". Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut, par suite, qu'être écarté.

4. La cession d'un bien immobilier appartenant au domaine privé d'une personne publique ne peut, en principe, être consentie qu'à un prix correspondant à la valeur réelle de ce bien et, dans l'hypothèse où le prix fixé serait significativement inférieur à cette valeur, elle doit être justifiée par des motifs d'intérêt général et assortie de contreparties suffisantes. Pour déterminer si la décision par laquelle une collectivité publique cède à une personne privée un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur est, pour ce motif, entachée d'illégalité, il incombe au juge de vérifier si elle est justifiée par des motifs d'intérêt général. Si tel est le cas, il lui appartient ensuite d'identifier, au vu des éléments qui lui sont fournis, les contreparties que comporte la cession, c'est-à-dire les avantages que, eu égard à l'ensemble des intérêts publics dont la collectivité cédante a la charge, elle est susceptible de lui procurer, et de s'assurer, en tenant compte de la nature des contreparties et, le cas échéant, des obligations mises à la charge des cessionnaires, de leur effectivité. Il doit, enfin, par une appréciation souveraine, estimer si ces contreparties sont suffisantes pour justifier la différence entre le prix de vente et la valeur du bien cédé.

5. Par la délibération litigieuse, le conseil municipal a autorisé le maire de la commune de Saint-Sauvant à vendre l'immeuble situé 2 rue de l'Enfer au prix de 188 700 euros. L'avis du service des domaines émis le 9 août 2019 a retenu que, compte tenu des caractéristiques du bien d'une surface de 354 m2 et de l'étude du marché local immobilier, la valeur de rachat de droits du bailleur du bien immobilier donné à bail emphytéotique peut être estimée à 222 000 euros. Pour soutenir que cette estimation serait sous-évaluée, M. B... se prévaut, d'une part, d'une unique estimation faite par une agence immobilière à la somme de 310 000 euros qui ne tient toutefois pas compte de la présence de sept logements locatifs sociaux dans l'immeuble concerné. Il se prévaut, d'autre part, d'un tableau recensant les données de prix et de surface de 22 ventes de biens immobiliers ayant eu lieu dans la commune. Toutefois, ces opérations immobilières, dont les dates ne sont pas précisées, concernent pour la quasi-totalité des maisons individuelles et des commerces dont les surfaces sont sensiblement inférieures à celle de l'immeuble cédé par la commune à la SEMIS. De tels éléments ne sont pas de nature à faire douter de l'estimation à laquelle a procédé le service des domaines dont aucun élément au dossier ne permet de retenir qu'il n'aurait pas tenu compte de la rentabilité locative de l'immeuble pour son évaluation. L'avis du 9 août 2019 précise également que la valeur de rachat estimée comprend une marge de négociation de 15% de sorte que le prix de vente fixé à 188 700 euros ne saurait être regardé comme significativement inférieur à la valeur réelle du bien. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la délibération du conseil municipal litigieuse serait entachée d'une erreur d'appréciation sur ce point.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée en toutes ses conclusions. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Saint-Sauvant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera à la commune de Saint-Sauvant la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Saint-Sauvant.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.

La rapporteure,

Kolia GallierLe président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Stéphanie Larrue

La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21BX04203 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04203
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : DENIS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;21bx04203 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award